Exclusivité : 9 mai 2007 Cour de cassation Pourvoi n° 06-13.092

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Exclusivité : 9 mai 2007 Cour de cassation Pourvoi n° 06-13.092
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9 mai 2007
Cour de cassation
Pourvoi n°
06-13.092

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que la société D’ocon films productions (la société D’ocon) et la société Carrère group (la société Carrère) ont conclu, le 2 octobre 1998, un contrat de coproduction, portant sur une série de dessins animés, aux termes duquel les sociétés avaient notamment prévu une répartition entre elles du financement global, des tâches à accomplir, des droits exclusifs d’exploitation suivant des territoires déterminés ainsi que des recettes ; que de nombreuses difficultés ont été rencontrées dans la coproduction de la série, tenant notamment à sa réalisation et à des retards de paiement ; qu’après avoir refusé de lui délivrer les épisodes de la série et l’avoir mise en demeure de lui régler une certaine somme, la société Carrère a confirmé à la société D’ocon, par lettre recommandée du 5 décembre 2001, la résiliation du contrat à ses torts ; que la société D’ocon ayant demandé l’exécution forcée du contrat et le paiement de dommages-intérêts, la société Carrère a sollicité reconventionnellement que soit constatée la résolution du contrat et que la société D’ocon soit condamnée à lui payer diverses sommes ;

Sur le premier moyen :

Attendu que la société Carrère fait grief à l’arrêt d’avoir dit que les dommages-intérêts qui lui sont dus par la société D’ocon sont compensés avec la somme de 307 262,55 euros correspondant à la somme versée par la société D’ocon pour la réalisation de la série “Arguaï 2075”, alors selon le moyen :

1 / qu’en déboutant la société Carrère de sa demande de paiement des sommes versées aux lieu et place de la société D’ocon, sous prétexte que le contrat de coproduction ne visait aucun usage professionnel qui aurait imposé, en cas de résolution, le règlement de telles sommes par le coproducteur défaillant à titre de dommages-intérêts, et qu’il était au contraire prévu que sa participation lui serait restituée après compensation avec les dommages intérêts alloués à l’autre partie, après avoir pourtant constaté que, selon les dispositions de l’article 17 de la convention, il était prévu qu’en cas de résolution pour inexécution, “la partie défaillante pourra éventuellement avoir droit au remboursement des dépenses et apports qu’elle a effectivement faits en espèces, sans intérêts et seulement après que l’autre partie ait récupéré son investissement total augmenté d’un intérêt à définir, ainsi que toutes dépenses supplémentaires qui auraient été rendues nécessaires par ladite défaillance majorées également d’un intérêt à définir”, ce dont il résultait nécessairement qu’en cas de résolution due à la défaillance d’un coproducteur, l’autre était en droit d’obtenir, prioritairement, le remboursement des sommes qu’il avait engagées aux lieu et place de son partenaire au titre des dépenses rendues nécessaires par cette défaillance, la cour d’appel n’a pas tiré de ses propres constatations les conséquences légales qui s’en évinçaient et violé l’article 1134 du code civi ;

2 / qu’en déduisant d’une clause énonçant qu’en cas de résolution, “la partie défaillante pourra éventuellement avoir droit au remboursement des dépenses et apports qu’elle a effectivement faits en espèces, sans intérêts et seulement après que l’autre partie ait récupéré son investissement total augmenté d’un intérêt à définir, ainsi que toutes dépenses supplémentaires qui auraient été rendues nécessaires par ladite défaillance majorées également d’un intérêt à définir’, que la compensation ainsi prévue entre la créance de restitution du coproducteur défaillant et les dommages-intérêts qu’il pourrait devoir faisait obstacle au droit du coproducteur substitué d’obtenir le paiement, à titre de dommages-intérêts, des sommes versées aux lieux et place de la partie défaillante, la cour d’appel en a dénaturé les termes clairs et précis et violé l’article 1134 du code civil ;

3 / qu’en tout état de cause, le contrat de coproduction stipulait, en son article 17, que sa résiliation entraînerait “la rétrocession immédiate et automatique au bénéfice de l’autre partie de tous les droits de la partie défaillante sur la série ( )” et ajoutait que, dans ce cas, “la partie défaillante pourra éventuellement avoir droit au remboursement des dépenses et apports qu’elle a effectivement faits en espèces, sans intérêts et seulement après que l’autre partie ait récupéré son investissement total augmenté d’un intérêt à définir, ainsi que toutes dépenses supplémentaires qui auraient été rendues nécessaires par ladite défaillance majorées d’un intérêt à définir” ; qu’en décidant que l’ensemble du préjudice causé à la société Carrère serait réparé exactement par la compensation de sa créance d’indemnisation avec sa dette de restitution à l’égard de la société D’ocon, sans s’assurer que, conformément aux dispositions de l’article 17 du contrat, la société Carrère avait récupéré son investissement total et le remboursement de toutes les dépenses supplémentaires rendues nécessaires par la défaillance de la société D’ocon, la cour d’appel a violé l’article 1134 du code civil ;

4 / qu’en raison de leur nature supplétive, les usages professionnels ont par définition vocation à être appliqués dans le silence des parties ; qu’en énonçant, pour débouter la société Carrère de sa demande de paiement des sommes versées aux lieu et place de la société D’ocon, que les parties ne s’étaient pas référées aux usages professionnels imposant, en matière de coproduction, la restitution, par la partie défaillante, à titre de dommages-intérêts, des sommes versées par le coproducteur substitué, la cour d’appel s’est fondée sur des motifs inopérants et privé son arrêt de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du code civil ;

5 / qu’en retenant que la société Carrère ne démontrait pas l’existence d’un usage imposant au coproducteur défaillant la restitution, à l’autre partie, des sommes payées par cette dernière en ses lieux et place, à titre de dommages-intérêts, sans rechercher, ainsi qu’elle y était expressément invitée, si un tel usage ne résultait pas de l’article 3 des conditions générales du mandat de distribution type, versé aux débats, dans sa rédaction établie par les chambres syndicales de producteurs et distributeurs, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1135 du code civil ;

Mais attendu, en premier lieu, que l’arrêt retient que la société D’ocon est fondée à réclamer la restitution de la somme de 307 262,55 euros qu’elle avait versée et estime souverainement que le préjudice de la société Carrère doit être fixée à cette même somme ; qu’il relève encore que l’article 17 du contrat de coproduction prévoit la restitution de la participation de la partie défaillante, après toutefois compensation avec les dommages-intérêts qui pourraient être alloués à l’autre partie ; qu’en l’état de ces constatations et appréciations, la cour d’appel, qui n’avait pas à effectuer la recherche évoquée par la troisième branche et qui ne lui avait pas été demandée, a pu, sans dénaturation, prononcer la compensation des sommes ainsi réclamées ;

Attendu, en second lieu, que c’est dans l’exercice de son pouvoir souverain d’interprétation que la cour d’appel a retenu qu’il résultait des dispositions de l’article 17 du contrat de coproduction que les parties n’avaient pas entendu se référer aux usages professionnels et relevé au demeurant que ces usages n’avaient pas été démontrés ;

D’où il suit que le moyen n’est fondé en aucune de ses branches ;

Et sur le second moyen, en tant qu’il fait grief à l’arrêt d’avoir dit que les dommages-intérêts dus par la société D’ocon à la société Carrère sont compensés avec la somme de 307 262,55 euros correspondant à la somme versée par la société D’ocon pour la réalisation de la série “Argaï 2075”, alors, selon le moyen :

1 / que le juge d’appel étant par principe saisi des prétentions et moyens des parties formulés expressément dans les conclusions, les prétentions formulées sans équivoque dans les motifs des conclusions doivent être prises en considération quand bien même elles ne seraient pas reprises au dispositif de ces écritures ; qu’en énonçant néanmoins, pour déclarer qu’elle n’était pas saisie de la demande formulée dans les motifs des conclusions de la société Carrère tendant à la restitution d’une somme de 608 850 francs versée à la société D’ocon et que cette dernière ne justifiait pas avoir utilisée pour le film, que la société Carrère ne demandait pas le remboursement de cette somme dans le dispositif de ses écritures, la cour d’appel a violé l’article 954, alinéa 1er, du nouveau code de procédure civile ;

2 / qu’en tout état de cause, en se déterminant par les mêmes motifs, la cour d’appel n’a pas répondu au moyen expressément invoqué dans les motifs des conclusions de la société Carrère et tendant à la restitution, par la société D’ocon, d’une somme de 608 850 francs qui lui avait été versée et qu’elle ne justifiait pas avoir utilisée pour le film, violant de ce chef l’article 455 du nouveau code de procédure civile ;

Mais attendu que les motifs critiqués ne justifient pas le chef du dispositif attaqué ; que le moyen est irrecevable ;

 


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