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8 janvier 2020
Cour d’appel de Paris
RG n°
17/19362
Copies exécutoiresRÉPUBLIQUE FRANÇAISE
délivrées aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 4
ARRÊT DU 08 JANVIER 2020
(n° , 12 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 17/19362 – N° Portalis 35L7-V-B7B-B4JGM
Décision déférée à la Cour : Jugement du 04 Octobre 2017 – Tribunal de Commerce de PARIS – RG n° 2017025630
APPELANTES
– SARL SUSHI COLOMBES
Ayant son siège social : [Adresse 6]
[Adresse 6]
N° SIRET : 814 945 960 (NANTERRE)
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
– SARL SUSHI MEUDON
Ayant son siège social : [Adresse 1]
[Adresse 1]
N° SIRET : 527 880 884 (NANTERRE)
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
– SARL SUSHI CHATOU
Ayant son siège social : [Adresse 7]
[Adresse 7]
N° SIRET : 522 548 940
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
– SARL SUSHI SAINT CLOUD
Ayant son siège social : [Adresse 4]
[Adresse 4]
N° SIRET : 524 396 181 (NANTERRE)
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
– SARL SUSHI NANTERRE
Ayant son siège social : [Adresse 2]
[Adresse 2]
N° SIRET : 820 496 206 (NANTERRE)
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentées par Me Julia ALBERTANI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0891
Ayant pour avocat plaidant : Me Nicolas DISSAUX, avocat au barreau de LILLE, toque : R252
– SARL SL BOIS COLOMBES
Ayant son siège social : [Adresse 3]
[Adresse 3]
N° SIRET : 530 830 520 (NANTERRE)
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentée par Me Julia ALBERTANI, avocat au barreau de PARIS, toque : A0891
Désistement partiel en date du 12 mars 2019
INTIMÉES
– SASU GROUPE PLANET SUSHI
Ayant son siège social : [Adresse 5]
[Adresse 5]
N° SIRET : 477 542 823 (NANTERRE)
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
– SASU P.S.D
Ayant son siège social : [Adresse 5]
[Adresse 5]
N° SIRET : 823 269 055 (NANTERRE)
prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
Représentées par Me Arnaud GUYONNET de la SCP AFG, avocat au barreau de PARIS, toque : L0044
Ayant pour avocat plaidant : Me Justine GRANDMAIRE, substituant Me François-Luc SIMON, de la SELARL SIMON ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, toque : P0411
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 05 Novembre 2019, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère, chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre
Madame Agnès BODARD-HERMANT, Conseillère
Monsieur Dominique GILLES, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : Madame Cécile PENG
ARRÊT :
– contradictoire
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
– signé par Madame Marie-Laure DALLERY, Présidente de chambre, et par Madame Cécile PENG, greffier auquel la minute de la présente décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE
Vu le jugement rendu le 4 octobre 2017 par le tribunal de commerce de Paris qui a :
– débouté les parties de toutes leurs demandes,
– condamné solidairement les sociétés SL Bois Colombes, Sushi Colombes, Sushi Meudon, Sushi Chatou, Sushi Saint-Cloud et Sushi Nanterre aux dépens et à payer à chacune des sociétés Groupe planet sushi et PSD la somme de 5.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
Vu l’appel relevé par les sociétés SL Bois Colombes, Sushi Colombes, Sushi Meudon, Sushi Chatou, Sushi Saint-Cloud et Sushi Nanterre ;
Vu les conclusions notifiées le 05 mars 2019 par les sociétés Sushi Colombes, Sushi Chatou, Sushi Chatou, Sushi Saint-Cloud et Sushi Nanterre qui demandent à la cour, au visa des articles 1134, 1156,1157,1158, 1162 du code civil dans leur version applicable aux faits de l’espèce, de l’article 9 al.1er de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016 portant réforme du droit des contrats et de l’article 1143 du code civil, d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et de :
– dire que l’article 3.1 du contrat de franchise conclu entre chaque appelante et la société GPS (Groupe Planet Sushi) met à la charge financière exclusive de cette dernière l’ensemble des coûts de fonctionnement du site internet du réseau ‘ Planet sushi’, en ce compris les fonctionnalités permettant aux internautes de passer commande en ligne et aux demanderesses de traiter ces commandes, s’agissant notamment du paiement en ligne,
– dire en conséquence que la société GPS prendra en charge l’ensemble des coûts liés au traitement et à la transmission des commandes en ligne,
– prononcer la nullité des contrats de prestation de service conclus entre chacune d’elles et la société PDS pour violence,
– en conséquence, condamner la société PDS ainsi que la société GPS in solidum à restituer l’ensemble des sommes versées au titre des contrats de prestation de services conclus le 22 octobre 2016, s’élevant au 31 décembre 2018 aux sommes suivantes :
* pour la société Chatou : 16.157,02 euros,
* pour la société Colombes : 13.394,36 euros,
* pour la société Meudon : 14.517,35 euros,
* pour la société Nanterre : 14.966,20 euros,
* pour la société Saint Cloud : 13.559,64 euros,
* pour la société SL Bois Colombes : 8.228,56 euros,
– en conséquence, condamner la société GPS à payer aux appelantes la somme de 24.480 euros , correspondant à la perte d’exploitation de celles-ci durant la période pendant laquelle la société GPS a coupé les commandes en ligne,
– débouter la société GPS de toutes ses demandes,
– condamner la société GPS aux entiers dépens et à leur payer, à chacune, la somme de 5.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile,
– prononcer l’exécution provisoire ;
Vu les dernières conclusions notifiées le 25 février 2019 par la société Groupe Planet Sushi et par la société PSD qui demandent à la cour, au visa des articles 1134 et 2044 du code civil (ancienne version) ainsi que des articles 1140 et suivants et 1169 du code civil, de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté les six appelantes de l’ensemble de leurs demandes,
– l’infirmer en ce qu’il a débouté la société GPS de sa demande de condamnation concernant la constitution des garanties à première demande et, en conséquence, enjoindre aux sociétés SL Bois Colombes, Sushi Chatou, Sushi Meudon et Sushi Saint Cloud de constituer sans délai la garantie à première demande à laquelle elles sont tenues, conformément aux termes du protocole transactionnel signé avec elles, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la décision à intervenir,
– condamner solidairement les appelantes aux dépens et à payer à chacune d’elles la somme de 10.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.
Vu l’ordonnance de désistement partiel du 12 mars 2019 constant l’extinction de l’instance et le dessaisissement de la cour à l’égard de la société SL Bois Colombes ;
Vu la clôture de l’instruction prononcée par ordonnance du 8 octobre 2019 ;
Vu les conclusions notifiées le 18 octobre 2019 par les appelantes et la signification d’une nouvelle pièce numérotée 25 ;
Vu les conclusions de procédure du 21 octobre 2019 par lesquelles la société Groupe Planet Sushi et la société PSD demandent à voir déclarer irrecevables les conclusions du 18 octobre 2019 et la pièce adverse n°25 signifiée à cette date.
SUR CE LA COUR
Sur la procédure
Par application de l’article 783 du code de procédure civile, les conclusions notifiées par les appelantes le 18 octobre 2019 et la pièce n°25 communiquée par elles à cette date, soit postérieurement à l’ordonnance de clôture du 8 octobre 2019, doivent être déclarées irrecevables.
La cour, qui est dessaisie à l’égard de la société SL Bois Colombes, ne statuera que sur les demandes formées par et contre les autres appelantes.
Au fond
La société Groupe Planet Sushi, ci-après GPS, exploite et développe un réseau de restaurants de gastronomie japonaise occidentalisée, sous l’enseigne ‘Planet sushi’, dont 40 restaurants en franchise.
Elle a signé des contrats de franchise d’une durée de 7 ans :
– le 17 décembre 2015 avec la société Sushi Colombes,
– le 25 octobre 2010 avec la société Sushi Meudon,
– le 8 mars 2010 avec la société Sushi Chatou qui a manifesté sa volonté de renouveler le contrat par lettre du 18 mai 2017,
– le 31 août 2010 avec la société Sushi Saint-Cloud,
– le 10 juin 2016 avec la société Sushi Nanterre.
Des différents sont survenus entre le franchiseur et les sociétés Sushi Chatou, Sushi Meudon et Sushi Saint-Cloud qui ont abouti à des protocoles transactionnels signés le 18 septembre 2015.
L’article 3.1 de chacun des contrats de franchise, intitulé Site internet du franchiseur, stipule :
‘Le franchiseur dispose des droits exclusifs d’exploitation du site internet www.planetsushi.fr.
Le franchiseur exploite et gère seul le site www.planetsushi.fr .
Il s’engage à présenter le restaurant du franchisé et à permettre au franchisé de traiter les commandes faites par les consommateurs désireux d’être livrés à l’intérieur de la zone géographique définie à l’Annexe 2 .
Le franchisé reconnaît que le franchiseur lui apporte ainsi une clientèle. Par ailleurs, il reconnaît que ledit site contribue à la notoriété de la marque. Il accepte en conséquence que le franchiseur finance en partie le fonctionnement du site www.planetsushi.fr au moyen du fonds publicitaire constitué par la participation à la publicité nationale versée par les franchisés du réseau Planet sushi, telle que définie à l’article 5.6.c.i du contrat .’
La société GPS, qui avait fait appel à un prestataire extérieur, la société Chronoresto, pour gérer à titre payant le service de la commande en ligne, a décidé en juin 2016 de proposer un autre prestataire, la société PSD, pour assurer ce service.
Par courriel du 27 septembre 2016, elle a annoncé aux franchisés la mise en place du nouveau site de commandes en ligne à compter du 3 octobre suivant, rappelant qu’il s’était imposé au regard des dysfonctionnements répétés auxquels Chronoresto avait exposé le réseau et précisant que les modalités financières et autres conditions restaient identiques.
Tous les franchisés, à l’exception des appelantes, ont signé les conditions générales d’utilisation du nouveau prestataire.
Par courriel du 1er octobre 2016, M. [G], dirigeant des sociétés appelantes, a demandé au franchiseur à bénéficier du nouveau site internet sans payer en soulignant qu’il avait déjà versé des sommes au prestataire Chonoresto qu’il n’aurait pas dû payer, que le franchiseur s’était engagé à permettre le traitement des commandes en ligne et que le contrat prévoyait le paiement de ce service par les redevances publicitaires et les royalties.
La société GPS lui a répondu le 2 octobre 2016 que le service avait toujours été payant, que le rôle du franchiseur se limitait à permettre de traiter les commandes en ligne, leur gestion et transmission ayant toujours été assurées par un prestataire et facturées aux franchisés.
Le 4 octobre 2016, se plaignant de ne plus pouvoir proposer des commandes en ligne depuis le 3 octobre, les sociétés appelantes ont mis en demeure la société GPS de réactiver cette fonctionnalité informatique.
N’obtenant pas satisfaction, les appelantes ont saisi le juge des référés qui, par ordonnance du 21 octobre 2016, les a déboutées de leur demande tendant à voir réactiver le lien informatique permettant les commandes en ligne.
A la même date, les sociétés appelantes ont signé les conditions générales d’utilisation de la société PSD, à l’exception de la société Sushi Nanterre qui les a signées le 17 février 2017.
Puis les 30 mai et 27 juin 2017, les six sociétés franchisées ont assigné la société GPS et la société PSD devant le tribunal de commerce de Paris aux fins de voir prononcer la nullité des contrats de prestation de service conclus avec la société PSD pour violence, condamner la société PSD à leur restituer à chacune les sommes versées au titre de ces contrats et condamner la société GPS au paiement d’une somme correspondant à la perte d’exploitation subie durant la période pendant laquelle elles ont été dans l’impossibilité de commander en ligne ; le tribunal, par le jugement déféré, les a déboutées de toutes leurs demandes et a rejeté la demande reconventionnelle de la société GPS.
Sur les demandes des sociétés appelantes
Elles soutiennent en premier lieu que l’article 3.1 des contrats de franchise oblige le franchiseur à prendre en charge les frais liés au fonctionnement du service de traitement des commandes en ligne ; elles invoquent en ce sens :
– la lettre de cette clause, qui met à la charge du franchiseur une obligation de résultat, l’obligeant à faire bénéficier les franchisés d’une fonctionnalité permettant le traitement de commandes en ligne, qui prévoit le financement lié au fonctionnement du site dans sa globalité, toutes fonctionnalités confondues, qui mentionne que les franchisés acceptent que le franchiseur réalise ce financement pour partie par les redevances publicitaires, le financement de l’autre partie n’ayant jamais fait l’objet d’un consentement exprès des franchisés devant être à la charge exclusive du franchiseur dans le cadre du paiement des royalties ;
– l’esprit de la clause, du fait que le traitement des commandes en ligne revêt une telle importance dans la restauration japonaise que les parties n’ont pas pu ne pas l’intégrer dans le champ contractuel, qu’aucun article du contrat de franchise n’évoque ni ne précise les conditions notamment financières auxquelles le service de traitement des commandes en ligne serait suspendu, que les évolutions du site et de ses fonctionnalités se sont toujours inscrites dans le cadre du contrat de franchise et qu’il serait inconcevable que chaque franchisé traite avec le prestataire de son choix, le prestataire retenu devant intervenir directement sur le site du franchiseur,
– l’article 1162 du code civil qui dispose que, dans le doute, la convention s’interprète contre celui qui a stipulé, en l’espèce la société GPS qui a rédigé les contrats, et en faveur ce celui qui a contracté l’obligation.
Les appelantes ajoutent que les relations jadis entretenues avec la société Chronoresto sont indifférentes, faisant valoir que :
– la renonciation à un droit ne se présume pas et une simple tolérance ne vaut pas renonciation,
– l’article 16.5 du contrat de franchise stipule que le fait pour l’une ou l’autre des parties de ne pas revendiquer l’application d’une clause quelconque du contrat ne pourra être interprété comme valant renonciation par cette partie aux droits qui en découlent,
– l’article 16.3 du contrat précise qu’aucun document postérieur, aucune modification du contrat, quelle qu’en soit la forme, ne produira d’effet entre les parties sans prendre la forme d’un avenant dûment daté et signé par elles.
La société GPS invoque, à titre préliminaire, l’irrecevabilité des demandes formées par les sociétés Sushi Meudon, Sushi Chatou et Sushi Saint-Cloud en raison des protocoles transactionnels du 18 septembre 2015 qui stipulent en leur article 7.1 : ‘Le franchisé renonce aux procédures judiciaires en cours et renonce à toute demande et action que ce soit qui trouverait leur cause dans les conditions de conclusion, d’interprétation ou d’exécution du contrat de franchise pour la période antérieure à la signature des présentes…..Le franchisé renonce plus largement et de manière générale et définitive à toute action trouvant son fondement dans des faits ou des fautes antérieures à la signature des présentes.’ L’intimée allègue :
-que le service de la commande en ligne a été mis en place dès la conclusion des contrats de franchise et que les franchisées en bénéficiaient lorsqu’elles ont signé les protocoles transactionnels,
– que le grief invoqué par les appelantes est constitutif d’une contestation qui existait déjà potentiellement lors de la signature des protocoles comme trouvant son fondement dans des faits antérieurs à la signature des protocoles.
Mais le tribunal a justement retenu que la contestation portait sur les prestations résultant de la signature des conditions générales d’utilisation de la société PSD les 21 octobre 2016 et 17 février 2017, soit pour des faits survenus postérieurement à la signature des protocoles ; le moyen tiré de l’irrecevabilité des demandes doit donc être rejeté.
Cependant, la société GPS fait justement valoir que les termes clairs de l’article 1.3 des contrats de franchise ne nécessitent aucune interprétation; il en résulte en effet :
– que le franchiseur doit présenter le restaurant du franchisé sur son site et doit seulement permettre au franchisé de traiter la commande en ligne, lui fournissant ainsi le moyen nécessaire pour y parvenir
– que le franchiseur ne s’est jamais engagé à y procéder lui-même, étant observé que la charte internet produite par les appelantes précise que les franchisés bénéficient du module de commande en ligne,
– que le franchiseur finance en partie le fonctionnement du site internet au moyen du fond publicitaire constitué par la participation à la publicité nationale versée par les franchisés.
Il n’y est aucunement prévu que le franchiseur, qui supporte le coût de l’hébergement du site, finance aussi les frais de gestion des commandes en ligne, relatifs notamment au transfert des commandes du site aux restaurants, à la réception des réclamations et leur traitement.
En fait, la gestion du service de commande en ligne a toujours été effectuée par un prestataire extérieur qui était la société Chronoresto jusqu’en septembre 2016, aux frais des franchisés; la société Chronoresto s’était engagée, notamment, à mettre à disposition un numéro marchand permettant l’encaissement des commandes payées en ligne, transmettre la commande au restaurant, vérifier sa bonne transmission, assurer le service client téléphonique 7 jours sur 7, procéder aux annulations de commandes et aux remboursements carte bleue à la suite d’une annulation.
En conséquence, les appelantes, qui ont refusé en octobre 2016 de continuer à payer ces frais de gestion lors du changement de prestataire, alors qu’il n’existait aucune aggravation de leur coût, sont mal fondées en toutes leurs demandes à l’encontre de la société
GPS.
En second lieu, les appelantes invoquent la nullité des contrats de prestation de service conclus avec la société PSD pour contrepartie dérisoire ou illusoire d’une part, violence d’autre part.
Sur le premier point, elles font valoir :
– que les contrats sont soumis à l’article 1169 du code civil, issu de l’ordonnance 2016-131 entrée en vigueur le 1er octobre 2016 et qu’une contrepartie est illusoire lorsque : ‘ dès que la formation du contrat, son exécution est impossible ou lorsqu’elle fait double emploi avec l’exécution d’un autre contrat’,
– qu’en l’espèce, le contrat de prestation de services a pour objet quatre prestations déjà mises à la charge de la société GPS par le contrat de franchise, à savoir :
* la mise en avant du restaurant,
* la transmission de la commande en ligne vers le logiciel de caisse du restaurant, présentée comme une part prépondérante du savoir faire du franchiseur dans la charte internet,
* le service client et le bénéfice d’une hot-line existant déjà en vertu du contrat de franchise,
* les dysfonctionnements susceptibles d’affecter le service de la commande en ligne déjà pris en charge par le franchiseur qui avait conclu un contrat spécifique avec la société Dico.
Pour étayer leurs allégations les appelantes se référent aux stipulations du contrat de franchise et au contenu de la charte internet ; elle soulignent que la société PSD, qui a son siège à la même adresse que la société GPS, est une coquille vide et que Mme [Y], ancienne salariée de la société GPS employée pour la gestion des dysfonctionnements du site et les relations avec les franchisés, est désormais la salariée de la société PSD.
Les appelantes ajoutent :
– que les DADS communiquées par GPS (pièce 19) établissent qu’avant la mise en place de son nouveau site en 2016, des membres de son personnel étaient affectés au service marketing digital et web, lequel comprenait le fonctionnement et l’entretien du site internet, le tout étant financé grâce aux redevances publicitaires facturés aux franchisés et que GPS ne peut maintenant par sa filiale PSD interposée, facturer deux fois la même chose,
– que le contrat conclu par la société GPS avec Oxalide, prestataire d’hébergement de sa plate-forme web, met à la charge de celle-ci des prestations que la société GPS prétend prise en charge par sa filiale GPD, précisant que Oxalide assure un service technique ouvert 24 h sur 24.
Mais l’examen du contrat conclu par la société GPS avec la société Oxalide montre qu’il définit les conditions d’intervention technique de cette société dans le cadre de l’hébergement et de l’infogérance de la plate forme web, ce qui n’apporte aucun élément utile au présent litige.
Les éléments relatifs à un autre litige portant sur des factures antérieures à 2016 pour des prestations de marketing n’apportent pas plus d’éléments probants à la solution du présent litige.
Par ailleurs, la société GPS oppose à juste raison qu’elle a eu recours à la société Dico pour ses établissements succursales.
Les appelantes ne démontrent en aucune façon que la société PSD serait une coquille vide ; il apparaît que les prestations de service, réalisées d’abord par la société Chronoresto puis par la société PSD, ne sont pas mises à la charge de la société GPS par le contrat de franchise, les obligations du franchiseur étant définies à l’article 3.1 analysé plus haut, étant observé que présentation du restaurant et mise en avant sur un site internet ne sont pas identiques ; la charte internet, qui définit ‘les conditions générales de mise à disposition des services associés au site www.planetsushi.fr, et notamment de mise en avant du réseau de restaurant sous l’enseigne Planet Sushi et de prise de commandes en ligne en rappelant et précisant le cadre légal et contractuel’, n’a pas pour objet de différencier les prestations incombant au franchiseur ou à un prestataire extérieur, ni de régler les conditions financières entre franchiseur et franchisé.
Le moyen tiré d’une contrepartie dérisoire ou illusoire doit donc être rejeté.
Sur le second point relatif à la violence, les appelantes font valoir :
– que le service de commande en ligne est essentiel dans l’activité de restauration japonaise, comme représentant 40 % du chiffre d’affaires d’un restaurant,
– que par courriel du 25 août 2016, la société GPS a écrit à l’ensemble de ses franchisés :
‘Nous vous laissons le soin d’apprécier vos nouvelles CGPS et de nous faire retour en notant que vous avez pris connaissance de celles-ci et que vous acceptez sans réserve les conditions générales reçues par mail. Cela nous permettra de vous communiquez vos accès à vos backoffice respectifs.
Sans réponse de votre part, nous ne pourrons vous communiquer vos accès et nous devrons suspendre la prise de commande en ligne pour vos restaurants – en indiquant que la prise de commande par téléphone est disponible – jusqu’à validation des CGPS jointes.’
– qu’il ressort de la pièce ‘n°4.39″ que la société GPS pilote les nouvelles prestations, a entendu prendre la place de l’ancien prestataire et a mis en place un système afin de faire payer aux franchisés le fonctionnement d’un site qui lui incombe,
– qu’elles n’ont signé le contrat PSD que sous la contrainte, sous la pression d’une menace économique qui compromettait leur existence,
– que sous couvert d’assurer le traitement des commandes en ligne, le contrat PSD octroie à la société GPS un accès total au fichier clients des franchisés, y compris les données personnelles et identifiants des clients, ce procédé manifestant une réelle duplicité,
– que contrairement à ce que le tribunal a retenu, les franchisés ne disposaient pas de solution de rechange, la gestion des commandes en ligne nécessitant un seul interlocuteur,
– que la société GPS retire de la conclusion des contrats PSD un double avantage, d’abord financier en se ménageant une rente sur ses franchisés, puis sur le plan juridique en lui octroyant un accès total au fichier client de ses franchisés, ce qui a pour effet de contourner un arrêt rendu à son encontre par la cour d’appel de Paris le 29 avril 2014.
Il apparaît que dans son courriel du 27 septembre 2016 (pièce n° 4.1 des appelantes), la société GPS, qui annonce à ses franchisés la création du nouveau site de commandes en ligne, mentionne des améliorations comme le suivi des livraisons, rappelle que les modalités de fonctionnement du site avec le nouveau prestataire ont donné lieu à des discussions entre son conseil et l’association des franchisés et indique que les conditions financières sont identiques à celles du prestataire Chronoresto ; il n’en ressort nullement que la société GPS aurait pris la place de l’ancien prestataire; la pièce 39 visée par les appelantes ne figure pas dans leur bordereau de communication de pièces.
Il est possible aux parties à un contrat de franchise d’organiser contractuellement la propriété du fichier-clients, son utilisation et son sort ; en l’espèce, le contrat de franchise prévoit que le franchisé demeure propriétaire de son fichier-clients, mais que le franchiseur peut pendant la durée du contrat et après son terme utiliser ce fichier lors de toutes opérations à des fins exclusivement de promotion du concept et des produits Planet sushi, à l’exclusion de toute utilisation à des fins personnelles ou commerciales autres ; les conditions générales d’utilisation de la société PSD prévoient que ‘ les données personnelles collectées sur le site sont nécessaires au traitement des commandes. Ces données pourront être communiquées à la société Groupe Planet Sushi, en qualité de franchiseur, et utilisée par cette dernière uniquement pour les besoins d’exécution du contrat de franchise, à savoir lors des opérations de fidélité à des fins de promotion du concept et des produits Planet sushi.’
C’est en vain que les appelantes se référent à un arrêt rendu en la forme des référés par la cour d’appel de Paris le 29 avril 2014, la difficulté alors soumise à la juridiction concernant l’installation par la société GPS, en 2012, d’un module informatique FTP MANAGER qui aurait, selon la société SL Bois Colombes, donné accès aux données personnelles sur sa clientèle et ainsi permis un détournement de clientèle.
Les intimées soulignent à juste raison que la violence économique suppose qu’une partie profite de la situation de dépendance de l’autre pour lui imposer des conditions anormales, ce qui n’est pas le cas en l’espèce ; en effet :
– la situation des appelantes ne caractérise pas un état de dépendance,
– les conditions générales proposées par la société PSD ne présentent aucun caractère anormal et les appelantes n’ont consenti, en les signant, aucun avantage excessif ou anormal.
Eu égard aux relations existant entre les parties et à la liberté de négocier les avantages réciproques en résultant pour elles, la menace de suspendre le service des commandes en ligne ne peut être considérée comme illégitime et constituer une violence.
En tout état de cause, les appelantes ne démontrent pas que la violence alléguée aurait été déterminante de leur consentement.
En conséquence, les appelantes doivent être déboutées de leur demande en nullité des contrats de prestation de services conclus avec la société PSD et de toutes leurs demandes formées contre les société PSD et GPS.
Sur les demandes de la société GPS
Les protocoles transactionnels signés le 18 septembre 2015 entre la société GPS et chacune des sociétés Sushi Chatou, Sushi Meudon et Sushi Saint Cloud stipulent en leur article 1 : ‘Par ailleurs, le franchisé s’engage, conformément au contrat de franchise à fournir à la société Groupe Planet Sushi une garantie à première demande dès l’adoption de son plan de redressement. A défaut et dans l’attente de la constitution de garantie, il est convenu que le franchisé s’acquittera du paiement exact de ses commandes par décade sans créer de nouvelles dettes à l’égard de son franchiseur.’
Les trois appelantes signataires de ces protocoles ont chacune fait l’objet de plans de redressement les 14 octobre 2015 et 21 janvier 2016; mais elles n’ont pas fourni la garantie à première demande prévue.
Il convient donc de faire droit à la demande de la société GPS dans les termes du dispositif de l’arrêt.
Sur les dépens et l’application de l’article 700 du code de procédure civile
Les appelantes, qui succombent doivent supporter les dépens.
Vu les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, il y a lieu d’allouer la somme de 8.000 euros à chacune des sociétés GPS et PSD, les demandes des appelantes de ce chef étant rejetées.
PAR CES MOTIFS
La Cour,
DÉCLARE irrecevables les conclusions notifiées par les appelantes le 18 octobre 2019 et la pièce n°25 par elles communiquée à cette date ;
INFIRME le jugement seulement en ce qu’il a rejeté la demande de la société Groupe Planet Sushi relative à la constitution de garanties à première demande ;
Statuant à nouveau sur ce point,
ENJOINT aux sociétés Sushi Chatou, Sushi Meudon et Sushi Saint Cloud de constituer la garantie à première demande à laquelle elles sont tenues conformément aux protocoles transactionnels signés par elles dans les 30 jours de la signification du présent arrêt, sous astreinte, passé ce délai, de 500 euros par jour de retard pendant 3 mois ;
CONFIRME le jugement en toutes ses autres dispositions ;
Y ajoutant,
CONDAMNE solidairement les sociétés Sushi Colombes, Sushi Chatou, Sushi Meudon, Sushi Saint Cloud et Sushi Nanterre à payer la somme de 8.000 euros à chacune des sociétés Groupe Planet Sushi et PSD, par application de l’article 700 du code de procédure civile ;
DÉBOUTE les parties de toutes leurs autres demandes ;
CONDAMNE solidairement les sociétés Sushi Colombes, Sushi Chatou, Sushi Meudon, Sushi Saint Cloud et Sushi Nanterre aux dépens d’appel.
Le Greffier Le Président
Cécile PENG Marie-Laure DALLERY