Exclusivité : 7 mars 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 14-23.193

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Exclusivité : 7 mars 2017 Cour de cassation Pourvoi n° 14-23.193
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7 mars 2017
Cour de cassation
Pourvoi n°
14-23.193

SOC.

JL

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 7 mars 2017

Cassation

M. X…, président

Arrêt n° 349 FS-P+B+R+I

Pourvoi n° Z 14-23.193

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu l’arrêt suivant :

Statuant sur le pourvoi formé par M. Pascal Y…, domicilié […],                              

contre l’arrêt rendu le 18 juin 2014 par la cour d’appel de Besançon (2e chambre civile), dans le litige l’opposant à l’institution AG2R Réunica prévoyance, anciennement AG2R prévoyance, dont le siège est […],                                   

défenderesse à la cassation ;

Le demandeur invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, composée conformément à l’article R. 431-5 du code de l’organisation judiciaire, en l’audience publique du 17 janvier 2017, où étaient présents : M. X…, président, Mme Z…, conseiller référendaire rapporteur, M. Huglo, Mmes Geerssen, Lambremon, MM. Chauvet, Maron, Déglise, Mme Farthouat-Danon, M. Betoulle, Mmes Slove, Basset, conseillers, Mmes Salomon, Depelley, Duvallet, Barbé, M. Le Corre, Mmes Prache, Chamley-Coulet, conseillers référendaires, Mme A…, avocat général, Mme Hotte, greffier de chambre ;

Sur le rapport de Mme Z…, conseiller référendaire, les observations de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat de M. Y…, de Me B… , avocat de l’institution AG2R prévoyance, devenue AG2R Réunica prévoyance, l’avis de Mme A…, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Sur le moyen unique, soulevé d’office après avis donné aux parties conformément aux dispositions de l’article 1015 du code de procédure civile :

Vu l’article 56 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ;

Attendu, selon l’arrêt attaqué, que les représentants des employeurs et des organisations syndicales représentatives des salariés du secteur de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie, soumis à la convention collective nationale étendue des entreprises artisanales relevant de ce secteur, ont conclu, le 24 avril 2006, un avenant n° 83 à cette convention collective par lequel ils ont décidé de mettre en oeuvre un régime de remboursement complémentaire obligatoire des frais de santé pour les salariés entrant dans le champ d’application de ce secteur ; qu’AG2R prévoyance a été désignée aux termes de l’article 13 de cet avenant pour gérer ce régime et l’article 14 a imposé à toutes les entreprises entrant dans le champ d’application de l’avenant n° 83 de souscrire les garanties qu’il prévoit à compter du 1er janvier 2007 ; que l’accord a été étendu au plan national, par arrêté ministériel du 16 octobre 2006, à toute la branche de la boulangerie et de la boulangerie-pâtisserie ; qu’AG2R prévoyance a été désignée par les partenaires sociaux, pour une nouvelle durée de cinq ans, comme unique gestionnaire du régime, aux termes d’un avenant n° 100 du 27 mai 2011 étendu par arrêté du 23 décembre 2011 ; que M. Y…, non adhérent d’une organisation d’employeurs signataire de l’avenant, ayant refusé de s’affilier au régime géré par AG2R prévoyance, cette dernière a, par acte du 20 janvier 2012, saisi un tribunal de grande instance pour obtenir la régularisation de l’adhésion de cet artisan et le paiement des cotisations dues pour l’ensemble de ses salariés depuis le 1er janvier 2007 ; que par décision du 8 juillet 2016, le Conseil d’Etat a annulé l’article 6 de l’arrêté du 23 décembre 2011 ; que l’institution AG2R prévoyance est devenue AG2R Réunica prévoyance ;

Attendu que pour condamner M. Y… à régulariser son adhésion et ordonner le règlement des cotisations dues à l’institution AG2R prévoyance depuis le 1er janvier 2007, l’arrêt retient que les conditions de la désignation de l’organisme chargé du régime mis en place dans le cadre d’un accord professionnel de mutualisation des risques, par les partenaires sociaux, en l’absence de disposition légale les obligeant à réaliser un appel d’offres, doivent être analysées à la lumière des contraintes particulières imposées aux entreprises susceptibles d’être mises en concurrence et de la situation du secteur d’activité concerné, qu’à cet égard, il n’est pas contestable que l’appartenance de AG2R Prévoyance, institution de prévoyance faisant partie du groupe qui gérait le régime de retraite complémentaire obligatoire des boulangers (ISICA) et le régime de prévoyance des risques décès-incapacité-invalidité dans la même branche (ISICA Prévoyance) constitue un critère objectif de choix pour la gestion du régime complémentaire du risque santé, que de plus l’Etat a exercé un contrôle suffisant, d’une part, en prenant un arrêté d’extension précédé d’une demande d’avis à la commission nationale de la négociation collective, d’autre part, à travers l’arrêt du Conseil d’Etat en date du 19 mai 2008 qui avait rejeté le recours en excès de pouvoir formé à l’encontre de l’arrêté d’extension, qu’il n’y a pas lieu en conséquence de faire droit à la demande de renvoi préjudiciel formulée par M. Y… ;

Attendu cependant, que la Cour de justice de l’Union européenne, dans son arrêt du 17 décembre 2015 (C-25/14 et C-26/14), a dit pour droit que c’est l’arrêté d’extension de l’accord collectif confiant à un unique opérateur, choisi par les partenaires sociaux, la gestion d’un régime de prévoyance complémentaire obligatoire au profit des salariés, qui a un effet d’exclusion à l’égard des opérateurs établis dans d’autres Etats membres et qui seraient potentiellement intéressés par l’exercice de cette activité de gestion ; qu’il apparaît que dans un mécanisme tel que celui en cause, c’est l’intervention de l’autorité publique qui est à l’origine de la création d’un droit exclusif et qui doit ainsi avoir lieu dans le respect de l’obligation de transparence découlant de l’article 56 du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne ; que s’agissant du droit de l’Union européenne, dont le respect constitue une obligation, tant en vertu du Traité sur l’Union européenne et du Traité sur le fonctionnement de l’Union européenne qu’en application de l’article 88-1 de la Constitution, il résulte du principe d’effectivité issu des dispositions de ces Traités, telles qu’elles ont été interprétées par la Cour de justice de l’Union européenne, que le juge national chargé d’appliquer les dispositions du droit de l’Union a l’obligation d’en assurer le plein effet en laissant au besoin inappliquée, de sa propre autorité, toute disposition contraire ; qu’à cet effet, il doit pouvoir, en cas de difficulté d’interprétation de ces normes, en saisir lui-même la Cour de justice à titre préjudiciel ou, lorsqu’il s’estime en état de le faire, appliquer le droit de l’Union, sans être tenu de saisir au préalable la juridiction administrative d’une question préjudicielle, dans le cas où serait en cause devant lui, à titre incident, la conformité d’un acte administratif au droit de l’Union européenne ; qu’il en résulte que l’arrêté du 16 octobre 2006 simplement précédé de la publicité prévue à l’article L. 133-14 du code du travail, alors applicable, qui ne peut être regardée comme ayant permis aux opérateurs intéressés de manifester leur intérêt pour la gestion des régimes de prévoyance concernés avant l’adoption de la décision d’extension, incompatible avec les règles issues du droit de l’Union tel qu’interprété par la Cour de justice de l’Union européenne, doit voir son application écartée en l’espèce ;

Qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé le texte susvisé ;

 


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