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27 avril 1989
Cour de cassation
Pourvoi n°
86-42.566
AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE COMMERCIALE, FINANCIERE et ECONOMIQUE a rendu l’arrêt suivant :
Sur le pourvoi formé par la société en nom collectif FRANCAISE ECHANGES COMMERCIAUX “FRECOM RAVI et Cie”, dont le siège est à Paris (16e), … Armée,
en cassation d’un arrêt rendu le 25 juin 1987 par la cour d’appel de Paris (4e chambre, section B), au profit de la société à responsabilité limitée IDEAL LOISIRS, dont le siège est à Paris (8e), …,
défenderesse à la cassation ;
La demanderesse invoque à l’appui de son pourvoi, les cinq moyens de cassation annexés au présent arrêt ;
LA COUR, en l’audience publique du 14 mars 1989, où étaient présents : M. Baudoin, président, M. Le Tallec, rapporteur, MM. Defontaine, Hatoux, Patin, Bodevin, Mme Pasturel, M. Plantard, Mme Loreau, MM. Vigneron, Edin, conseillers, Mmes Desgranges, Dupieux, M. Le Dauphin, conseillers référendaires, M. Raynaud, avocat général, Mme Arnoux, greffier de chambre ;
Sur le rapport de M. le conseiller Le Tallec, les observations de la SCP Desaché et Gatineau, avocat de la société Française Echanges Commerciaux, de Me Barbey, avocat de la société Ideal Loisirs, les conclusions de M. Raynaud, avocat général, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Attendu que, selon l’arrêt attaqué (Paris, 25 juin 1987), suivant un acte daté du 14 septembre 1979, la société Konsumex, organisme hongrois d’exportation, a confié à la société de droit américain Ideal toy corporation (la société Ideal toy) la distribution exclusive dans divers pays dont la France d’un cube comprenant plusieurs cubes articulés ; que la société Ideal toy a concédé à sa filiale française, la société Idéal loisirs, la distribution exclusive en France de ces cubes ; que cette dernière les y a commercialisés au cours de l’année 1980 sous le nom de “Rubik’s Cubes” ; qu’alléguant que la société Française échanges commerciaux FRECOM RAVI et Cie (société FRECOM) commercialisait en France un cube identique sous le même conditionnement, les sociétés Ideal toy et Idéal loisirs ont demandé la condamnation de la société FRECOM pour concurrence déloyale et pour contrefaçon d’un modèle déposé et d’une oeuvre artistique ; que la cour d’appel a déclaré la société
Ideal toy irrecevable en son action mais a accueilli la demande de la société Idéal loisirs ;
Sur le premier moyen :
Attendu que la société FRECOM fait grief à la cour d’appel d’avoir ainsi statué alors que, selon le pourvoi, d’une part, les règles du droit communautaire sur la libre circulation des produits n’autorisent pas un importateur dont le droit exclusif de commercialiser le produit importé se trouve épuisé à s’opposer à l’importation et à la vente par un autre importateur du produit sur lequel il n’a plus aucun droit excusif et qu’en décidant le contraire, l’arrêt attaqué a violé l’article 30 du Traité instituant la Communauté économique européenne (le Traité), et alors que, d’autre part, il y a bien eu épuisement du droit, qu’il résulte notamment des conclusions de la société Idéal loisirs signifiées le 12 janvier 1987, d’un arrêt de la cour de Paris du
22 janvier 1982 et des propres constatations de l’arrêt attaqué qu’une société Edimay avait exercé les droits de l’auteur du jeu cubique avant la société Idéal loisirs et que cette société avait importé avec l’accord du créateur ou de ses ayants droit les cubes fabriqués à Taïwan, réalisant par là même l’épuisement du droit ; que les demandes de la société Idéal loisirs étaient donc contraires aux règles du droit communautaire et que l’arrêt attaqué a, de ce nouveau chef, violé l’article 30 du Traité ;
Mais attendu que la cour d’appel a constaté que les cubes importés par la société FRECOM n’avaient été mis dans le commerce ni par le titulaire des droits de propriété industrielle ou intellectuelle ni avec son consentement ; d’où il suit que le moyen n’est pas fondé ;
Sur les deuxième et troisième moyens réunis :
Attendu que la société FRECOM fait également grief à la cour d’appel d’avoir retenu des actes de concurrence déloyale alors que, selon le pourvoi d’une part, il est expressément constaté par les juges du fond et non contesté que les premières factures d’achat de la société FRECOM sont de janvier 1981 et que cette société n’a importé les cubes prétendument semblables à ceux pour lesquels Idéal loisirs avait fait une publicité qu’à partir de juin 1981 ; qu’en déclarant la société FRECOM coupable envers la société Idéal loisirs d’actes de concurrence déloyale pour la période antérieure à la cession de droits consentie à cette société par l’inventeur le 16 janvier 1981, c’est-à-dire pour une période où les cubes prétendument concurrentiels n’avaient pas encore été importés, la cour d’appel n’a pas déduit de ses constatations de fait les conséquences légales qui s’en inféraient, en violation de l’article 1382 du Code civil, alors que, d’autre part, la société
FRECOM n’entendait nullement se prévaloir des droits de la société Edimay, mais qu’elle entendait plus exactement se prévaloir d’un fait établi et incontestable, à savoir que la société Edimay avait la première exploité les jeux cubiques en France et qu’en conséquence, la société Idéal loisirs n’était pas la première à avoir importé et commercialisé ces produits ; que l’arrêt attaqué a donc violé l’article 4 du nouveau Code de procédure
civile et qu’en conséquence de cette dénaturation, il n’a pas légalement justifié sa décision, de ce premier chef, au regard de l’article 1382 du Code civil, et alors qu’enfin, il ne pourrait y avoir de concurrence déloyale que dans la mesure où la société Idéal loisirs aurait la première exploité, et qu’il résulte au contraire des constatations de l’arrêt que c’est la société Edimay qui, la première, a importé 2 500 cubes et exploité ce marché en France, et qu’en retenant la concurrence déloyale à la charge de la société FRECOM en considération de la prétendue priorité d’Idéal loisirs, la cour d’appel n’a pas déduit de ses constatations de fait les conséquences légales qui s’en inféraient, en violation de l’article 1382 du Code civil ;