Exclusion d’un membre de groupe : affaire Tale Of Voices
Exclusion d’un membre de groupe : affaire Tale Of Voices
Ce point juridique est utile ?

Une levée d’option sur l’album d’un groupe par le producteur musical n’est pas nécessairement collective à l’ensemble des membres du groupe. Un contrat d’enregistrement d’artiste, s’il peut désigner le groupe collectivement, par le terme ‘l’artiste” reste individuel pour chaque membre.

Affaire Sony 

Dans cette affaire, Sony avait bien la possibilité de rompre le contrat d’enregistrement à l’égard d’un seul des membres du groupe Tale Of Voices (TOV).

La société Sony et les membres du groupe musical Tale Of Voices (TOV) dont le « beat boxer » (artiste interprète musical / accompagnement rythmique vocal)  faisait partie, ont conclu un contrat dénommé «contrat gagnant» en vue de la participation à un programme audiovisuel dont le prix était un contrat d’artiste. Le groupe TOV a remporté le concours puis un premier album du groupe a été mis en vente. Par lettre, la maison de disque a levé son option pour la réalisation d’un second album.

Exclusion d’un membre de groupe 

Par lettre recommandée, la société Sony a informé l’un des artistes du groupe que sa participation n’était pas pertinente pour la production du troisième album. Cet artiste a saisi sans succès les juridictions pour contester la rupture contractuelle et obtenir le paiement de diverses sommes de natures salariales et indemnitaires.

Pas de caractère abusif de la rupture du CDD

L’article 1242-2 du code du travail dispose, dans sa version applicable lors de la conclusion du contrat, que sous réserve des dispositions de l’article L. 1242-3, un contrat de travail à durée déterminée ne peut être conclu que pour l’exécution d’une tâche précise et temporaire, et seulement dans les cas suivants : (..) 3° Emplois à caractère saisonnier ou pour lesquels, dans certains secteurs d’activité définis par décret ou par convention ou accord collectif de travail étendu, il est d’usage constant de ne pas recourir au contrat de travail à durée indéterminée en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois.

Par ailleurs, l’article D1242-1 du code du travail dispose qu’il est d’usage constant de ne pas recourir au CDI en raison de la nature de l’activité exercée et du caractère par nature temporaire des emplois de l’édition phonographique, ce que confirme l’article 19 de la convention collective nationale de l’édition phonographique du 30 juin 2008 qui stipule que le recours au CDD pour les artistes est d’usage constant.

En l’espèce, l’artiste a été engagé par la société Sony dans le cadre d’un contrat à durée déterminée dit « d’usage » en application de l’article L.1242-2 3°du code du travail.

Clause de levée d’option 

Ce contrat intitulé « The sing-off contrat gagnant » conclu entre la société Sony Music Entertainment France d’une part, et les six chanteurs de Tale of Voices (TOV) dont l’artiste  d’autre part, stipule sous le titre « Durée et nombre d’enregistrements » qu’ : « En outre, comme il est d’usage dans le secteur de l’édition phonographique, l’Artiste consent expressément à la société 4 options de contrats distincts et successifs, d’une durée minimale de 20 mois chacun, dans les mêmes termes et conditions que ceux du contrat initial visé à l’article 3.1.2 ».

L’article 3.2.3 dispose quant à lui : « La société s’engage à notifier à l’Artiste, par courrier recommandé avec accusé de réception, sa décision définitive de lever ou non l’option sur le contrat considéré en vue de procéder à la fixation de l’album concerné (…)au plus tard un mois avant le terme du contrat en cours. En cas d’exercice par la société de son droit d’option, le contrat suivant prendra effet au terme du précédent ».

Contrat de groupe, contrat individuel 

Si le contrat initial précisait que les six chanteurs cocontractants sont dénommés « l’Artiste » ou « le Groupe », et forme un ensemble auquel il est fait référence dans tout le contrat sous ces termes, le contrat de travail étant commun à plusieurs artistes appartenant au même groupe en application de l’article L.7121-7 du code du travail, ce contrat, conformément à l’article L.7121-6 du même code, est également un contrat de travail individuel liant chaque salarié avec la société employeur.

Or, la société Sony n’a jamais levé l’option pour le troisième album à l’égard du beat-boxer (percussionniste vocal). Aussi, aucune rupture abusive du contrat de travail à durée déterminée ne peut être reprochée à la société Sony, aucun nouveau contrat de travail n’ayant été conclu avec l’artiste à l’expiration du second contrat à durée déterminée.


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