Exception d’inexécution : 28 septembre 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/01600

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Exception d’inexécution : 28 septembre 2023 Cour d’appel de Grenoble RG n° 22/01600

N° RG 22/01600 – N° Portalis DBVM-V-B7G-LKUR

C4

Minute N°

Copie exécutoire

délivrée le :

la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY

Me Pascale HAYS

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE GRENOBLE

CHAMBRE COMMERCIALE

ARRÊT DU JEUDI 28 SEPTEMBRE 2023

Appel d’un jugement (N° RG 2020J00149)

rendu par le Tribunal de Commerce de VIENNE

en date du 14 avril 2022

suivant déclaration d’appel du 19 avril 2022

APPELANTE :

S.A.S. L.E.C. (SOCIETE LYONNAISE D’EQUIPEMENT ET DE CONTROLE) immatriculée au Registre du Commerce et des Sociétés de Lyon sous le n°393 304 134, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 2]

[Localité 3]

représentée par Me Alexis GRIMAUD de la SELARL LEXAVOUE GRENOBLE – CHAMBERY, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me BOLZONI, avocat au barreau de LYON

INTIMÉE :

S.A.S. V.P.C. au capital de 2.000 euros, immatriculée au RCS de Lyon sous le numéro 832 873 871, prise en la personne de son représentant légal, domicilié en cette qualité audit siège

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée par Me Pascale HAYS, avocat au barreau de GRENOBLE, postulant et plaidant par Me Anthony SCARFOGLIERO, avocat au barreau de ST ETIENNE,

COMPOSITION DE LA COUR :

LORS DES DÉBATS ET DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Marie-Pierre FIGUET, Présidente,

Mme Marie-Pascale BLANCHARD, Conseillère,

M. Lionel BRUNO, Conseiller,

Assistés lors des débats de Alice RICHET, Greffière,

DÉBATS :

A l’audience publique du 31 mai 2023, M. BRUNO conseiller, a été entendu en son rapport,

Les avocats ont été entendus en leurs conclusions et plaidoiries,

Puis l’affaire a été mise en délibéré pour que l’arrêt soit rendu ce jour,

Faits et procédure :

1. La société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle (ci-après LEC) est une société familiale créée en 1977, présidée par [S] [Y] jusqu’en mars 2018, ce dernier étant l’actuel dirigeant de la societé VPC. La société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle est détenue à 100% par une holding, SF.LEC, elle-même détenue pour 47,7 % par les deux filles de [S] [Y], [X] [U] et [D] [Y].

2. Suite à des difficultés économiques et financières, la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle a sollicité en 2017 la désignation d’un mandataire ad’hoc au tribunal de commerce de Lyon. Une conciliation a conduit à la réorganisation de la direction opérationnelle, [S] [Y] démissionnant de son poste de président pour être remplacé par son gendre [F] [U]. Une convention a été établie entre la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle et la société VPC, ayant pour objet une mission de conseil et d’accompagnement par [S] [Y], au profit de la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle, pendant 36 mois à compter du 1er avril 2018.

3. Le 26 août 2020, la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle a formé opposition à l’ordonnance d’injonction de payer n°2020IP00232, signifiée le 3 août 2020 à la requête de la société VPC, portant sur la somme de 14.400 euros en principal, avec intérêts légaux à compter de la signification et les entiers dépens.

4. Par jugement du 14 avril 2022, le tribunal de commerce de Vienne a’:

– déclaré recevable mais non fondée l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer n°2020lP000232 rendue le 3 juin 2020′;

– condamné la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle à payer à la société VPC la somme de 81.600 euros’;

– débouté la société VPC de l’ensemble de ses autres demandes indemnitaires’;

– débouté la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles’;

– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile’;

– rappelé que l’exécution provisoire est de droit’;

– rejeté comme non fondés tous autres moyens, fins et conclusions contraires des parties’;

– condamné la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle aux dépens prévus à l’article 695 du code de procédure civile, liquidés conformément à l’article 701 du code de procédure civile.

5. La société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle a interjeté appel de cette décision le 19 avril 2022, en ce qu’elle a’:

– déclaré recevable mais non fondée l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer n°2020IP000232 rendue le 3 juin 2020′;

– condamné l’appelante à payer à la société VPC la somme de 81.600 euros’;

– débouté l’appelante de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles’;

– rejeté comme non fondés tous autres moyens, fins et conclusions contraires des parties’;

– condamné l’appelante aux dépens prévus à l’article 695 du code de procédure civile, liquidés conformément à l’article 701 du code de procédure civile’;

– ordonné l’exécution provisoire.

L’instruction de cette procédure a été clôturée le 27 avril 2023.

Prétentions et moyens de la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle :

6. Selon ses conclusions remises le 26 avril 2023, elle demande à la cour, au visa des articles 1219, 1220, 1226, 1302 et 1353 du code civil, des articles 32-1 et 1417 du code de procédure civile’:

– de réformer la décision dont appel en ce qu’elle a déclaré recevable mais non fondée l’opposition à l’ordonnance d’injonction de payer n°2020IP000232 rendue le 3 juin 2020′; en ce qu’elle a condamné la concluante à payer à la société VPC la somme de 81.600 euros’; en ce qu’elle a débouté la concluante de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles’; en ce qu’elle a rejeté comme non fondés tous autres moyens, fins et conclusions contraires des parties’; en ce qu’elle a condamné la concluante aux dépens prévus à l’article 695 du code de procédure civile’; en ce qu’elle a ordonné l’exécution provisoire’;

– statuant à nouveau, sur l’inexécution contractuelle fautive de la société VPC et ses conséquences, de juger que l’intimée n’a pas exécuté les obligations mises à sa charge dans la convention de prestation de services du 30 mars 2018′;

– de juger que la concluante est fondée à opposer l’exception d’inexécution à l’encontre de l’intimée’;

– de condamner la société VPC à restituer à la concluante les sommes versées entre l’envoi de la mise en demeure du 9 juillet 2019 et la résiliation du contrat du 29 octobre 2019, en l’absence de prestations réalisées soit une somme de 20.000 euros TTC correspondant au mois de juillet 2019, août 2019, septembre 2019 et octobre 2019′;

– sur la résiliation de la convention, de juger que la concluante était bien fondée à prononcer la résolution de la convention du 30 mars 2018 par courrier du 29 octobre 2019 en raison de son inexécution par la société VPC’;

– sur l’action fautive et abusive de la société VPC, de juger qu’elle a agi de manière purement dilatoire’;

– de juger que la société VPC a contrevenu aux dispositions légales de l’article L.611-15 du code de commerce en communiquant des pièces couvertes dont elle ne devait pas avoir la possession’;

– en conséquence, de condamner l’intimée à payer à la concluante une somme de 3.000 euros en indemnisation du préjudice subi au titre d’une procédure abusive et fautive’;

– sur l’appel incident formé par la société VPC, de le rejeter et de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société VPC de l’ensemble de ses autres demandes indemnitaires’;

– en tout état de cause, de rejeter l’ensemble des demandes présentées par l’intimée’;

– y ajoutant, de condamner la société VPC à payer à la concluante une somme de 7.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile’;

– de condamner l’intimée aux entiers dépens dont distraction au profit de la Selarl Lexavoué Grenoble.

Elle expose’:

7. – que lors de la réorganisation de la concluante, il a été convenu que monsieur [Y] s’en tienne à une mission d’accompagnement et de conseil, en qualité de prestataire extérieur, moyennant une rémunération de 4.000 euros HT par mois, pour 10 journées de travail, la convention étant régularisée le 30 mars 2018 pour une durée de 36 mois, commençant à courir le 1er avril 2018′;

8. – que les prestations de l’intimée consistaient dans l’assistance technique et informatique portant sur la formation à l’utilisation d’un logiciel, à la formation et à la gestion des domaines Web, et à la transmission des codes permettant le fonctionnement de l’entreprise’;

9. – que le 9 juillet 2019, la concluante a informé l’intimée que la convention n’était plus exécutée et qu’ainsi aucune contrepartie n’était fournie contre la rémunération mensuelle de 4.000 euros’; que la concluante a ainsi proposé de résilier amiablement cette convention, avant de lui notifier le 29 octobre 2019 sa résiliation’; que la société VPC a alors présenté une requête aux fins d’injonction de payer’;

10. – que le jugement déféré n’a pas apprécié la gravité des manquements reprochés à l’intimée, justifiant l’exception d’inexécution’; que le comportement de monsieur [Y] a rendu impossible l’exécution du contrat, attaquant professionnellement et personnellement ses anciens salariés dans des mails injurieux’; qu’ainsi, la concluante lui a demandé de ne plus se présenter dans les locaux de l’entreprise’; que l’intimée n’a plus exécuté ses obligations, ne cherchant plus à poursuivre sa mission même en distanciel’;

11. – que l’intimée ne justifie d’aucun élément permettant de justifier de la réalité de ses interventions, ou du fait qu’elle ait cherché à accomplir sa mission’; que le seul but poursuivi par monsieur [Y] a été d’obtenir un complément de rémunération pour un travail non réalisé’;

12. – que si le tribunal a retenu que la concluante n’a pas mis en demeure l’intimée de satisfaire à son obligation dans un délai raisonnable, il n’a pas pris en compte la gravité des manquements imputés à la société VPC’; que préalablement au courrier de résiliation du 29 octobre 2019, la concluante a préalablement mis en garde le 9 juillet l’intimée que la résiliation à ses torts était envisagée’; que ce n’est que trois mois plus tard que la concluante a résilié le contrat’; que pendant ce délai, l’intimée n’a pas repris l’exécution ni recherché de dialogue’;

13. – en tout état de cause, que l’action de l’intimée était abusive, puisqu’elle a tenté, non contradictoirement, en occultant des pièces au président du tribunal, d’obtenir une ordonnance notifiée en période de congés, afin d’empêcher la concluante de faire valoir des voies de recours’;

14. – que l’intimée a commis des fautes en communiquant des pièces couvertes par la confidentialité, puisqu’elle a produit le protocole de conciliation dont le contenu est couvert par l’article L611-15 du code de commerce’; que ce protocole a été signé par monsieur [Y] en sa qualité de représentant légal de la concluante, seule bénéficiaire du secret et seule à même de produire ce document’; que ce comportement a été réitéré dans le cadre de l’instance conduite lors de la demande de suspension de l’exécution provisoire devant le premier président de la cour’; que seule la concluante était en mesure de lever la confidentialité’;

15. – que si l’intimée sollicite incidemment des dommages et intérêts à hauteur de 43.200 euros TTC, représentant 36 échéances de 1.200 euros TTC, au titre d’un engagement complémentaire du 30 mars 2018, cet engagement était conditionné à la reprise par l’intimée des remboursements aux banques en vertu du protocole du 30 novembre 2017′; que l’intimée ne justifie pas que ces remboursements ont repris’; que le tribunal a exactement rejeté cette demande’;

16. – que si l’intimée demande également le paiement de 72.000 euros, au titre d’une rupture abusive des relations contractuelles, correspondant à 12 échéances mensuelles de 6.000 euros (4.800 euros, outre 1.200 euros), cette prétention est en contradiction avec la demande principale de l’intimée, car elle intègre une des redevances mensuelles prévues au contrat de prestation de services’; que cette somme fait partie intégrante de la condamnation principale ainsi que jugé par le tribunal, alors que l’intimée ne peut prétendre à une double indemnisation’;

17. – s’agissant de la demande portant sur 36.000 euros, à titre de dommages et intérêts au titre d’une inexécution fautive de la convention du 30 mars 2018 et de l’engagement complémentaire du même jour, que l’intimée ne fonde pas la raison de cette prétention, ni ne justifie d’un préjudice distinct des autres demandes indemnitaires’;

18. – que la demande concernant une résistance abusive de la concluante est mal fondée, étant légitime à opposer l’exception d’inexécution et à résilier la convention trois mois après mise en demeure restée infructueuse’; que la concluante n’a pas résisté abusivement en contestant la saisie-attribution pratiquée par l’intimée le 23 mars 2023 d’autant qu’un échéancier avait été convenu avec le commissaire de justice mandaté par l’intimée.

Prétentions et moyens de la société VPC’:

19. Selon ses conclusions remises le 11 mai 2023, elle demande à la cour, au visa des articles 1101, 1103 et 1104, 1163, 1188,1189,1194,1217, 1212 à 1215, 1226 et 1641 du code civil’:

– de confirmer le jugement déféré en ce qu’il a condamné l’appelante à payer la somme de 81.600 euros, en ce qu’il l’a déboutée de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles et l’a condamnée aux dépens’;

– de l’infirmer pour le surplus et, statuant à nouveau’;

– d’assortir la condamnation au paiement de 81.600 euros prononcée par le tribunal de commerce de Vienne des intérêts au taux légal avec anatocisme à compter du 27 février 2020, date de la mise en demeure’;

– de condamner la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle à payer à la concluante les sommes de:

* 43.200 euros à titre de dommages et intérêts, correspondant à l’engagement complémentaire résultant de l’accord en date du 30 mars 2018 et pour l’ensemble de la durée de la convention, soit 36 échéances de 1.200 euros TTC, outre intérêts au taux légal avec anatocisme à compter du 27 février 2020, date de la mise en demeure’;

* 72.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive des relations contractuelles, correspondant à 12 échéances d’un montant de 4.800 euros plus 1.200 euros soit 6.000 euros par échéance;

* 10.000 euros au titre de la résistance abusive’:

– de débouter la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions’;

– de condamner la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle à payer à la concluante la somme de 25.000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile’;

– de condamner la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle aux entiers dépens de l’instance dont distraction faite au bénéfice de maître Pascale Hays, avocate au barreau de Grenoble.

Elle soutient’:

20. – que parallèlement à la signature du contrat de prestations de service entre les deux sociétés le 30 mars 2018, il a été prévu, par un autre contrat signé le même jour, que la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle s’engage à modifier le montant de la rémunération prévue à la convention de prestations de service, pour la porter à 5.000 euros HT à compter de la reprise des remboursements des banques conformément au protocole de conciliation signé le 30 novembre 2017 et de ses avenants éventuels’; qu’il a été également stipulé que l’appelante s’engage à verser à la concluante à titre de rémunération exceptionnelle due au titre de la convention de prestations de service, un complément de 1.000 euros HT par mois écoulé entre la date de la signature de la convention de prestations de service et la date de modification de la rémunération prévue ci-dessus’;

21. – que la concluante a exécuté sa prestation de conseil, jusqu’à ce que lors de l’assemblée générale du 25 juin 2018, monsieur [U] demande à monsieur [Y] de ne plus se présenter’; que la concluante s’est ainsi trouvée dans l’impossibilité d’accomplir sa mission’; qu’un an plus tard, l’appelante lui a adressé un accord de rupture amiable pour cause d’inexécution;

22. – concernant l’exception d’inexécution invoquée par l’appelante, que le contrat signé le 30 mars 2018 a prévu une durée d’exécution de trois ans à partir du 1er avril 2018, avec possibilité de renouvellement tacite chaque année, sauf dénonciation trois mois avant l’arrivée du terme’; que l’appelante a résilié la convention unilatéralement et sans mise en demeure’; que le tribunal a relevé que les éléments avancés par l’appelante pour justifier cette rupture ne pouvaient constituer le manquement grave invoqué’; que l’appelante a cependant payé des factures adressées postérieurement sans difficulté au cours de l’année 2019; que la démarche de l’appelante a eu pour seul but de rendre impossible l’exercice de la mission de la concluante pour l’inciter à accepter une rupture du contrat’;

23. – concernant l’attitude de monsieur [Y], que les courriels produits par l’appelante sont tous datés de la période pendant laquelle cette personne était le président de la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle, et ainsi antérieurs à la signature de la convention du 30 mars 2018′; que les reproches ne pouvaient ainsi entraîner la résiliation de cette convention’; que les courriels de [X] et [F] [U] du 21 juin 2018 contiennent des affirmations infondées et ne visent qu’à se procurer des preuves’;

24. – que l’action mise en ‘uvre par la concluante n’est pas abusive, puisque si l’ordonnance portant injonction de payer rendue le 3 juin 2020 n’a été signifiée que le 3 août 2020, la concluante n’est pas responsable de l’emploi du temps du commissaire de justice’; que la concluante a retiré des débats le protocole de conciliation’; que l’appelante ne justifie d’aucun préjudice’;

25. – s’agissant des demandes indemnitaires de la concluante, que la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle a repris le remboursement des banques selon le protocole de conciliation, de sorte que la rémunération exceptionnelle prévue par la convention de prestations de service est due’; que l’appelante n’a pas exécuté spontanément le jugement déféré, malgré l’ordonnance du premier président de la cour d’appel ayant rejeté la demande d’arrêt de l’exécution provisoire, et s’est opposée à une saisie-attribution alors qu’aucun accord de paiement n’avait été accepté par le commissaire de justice;

26. – que la concluante ne sollicite pas ainsi une double indemnisation de ses préjudices, puisqu’elle demande l’exécution des engagements, outre des dommages et intérêts visant à réparer le caractère abusif de la rupture du contrat, et une résistance abusive.

*****

27. Il convient en application de l’article 455 du code de procédure civile de se référer aux conclusions susvisées pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties.

MOTIFS DE LA DECISION’:

28. Selon le tribunal de commerce, la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle ne démontre pas avoir adressé à la société VPC une mise en demeure de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable et mentionnant expressément qu’à défaut pour la société VPC de satisfaire à son obligation, elle serait en droit de résoudre le contrat. Il a en outre constaté que la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle, pour attester des manquements de la société VPC, produit deux courriels datés de 2017 et donc antérieurs à la convention et un courriel d’avril 2018 faisant état d’une remarque déplacée à un collaborateur, qui ne peuvent constituer le manquement grave invoqué. Le tribunal a ainsi considéré que la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle n’a pas respecté les obligations de l’article 1226 du code civil et qu’elle porte à ce titre l’entière responsabilité de son obligation de paiement et n’a aucun moyen sérieux à faire valoir en soutien de son opposition.

29. Le tribunal a indiqué que la société VPC produit un engagement complémentaire souscrit avec la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle le 30 mars 2018 prévoyant le versement de rémunérations antérieures et une majoration de la rémunération de monsieur [Y] dans le cadre de la convention signée à la même date. Il a constaté que les dispositions de cet engagement sont soumises à des conditions de trésorerie, de chiffre d’affaire et de remboursements bancaires, et que la société VPC ne démontre pas, au sens des dispositions de l’article 9 du code de procédure civile, que lesdites conditions ont été remplies. Il a ainsi rejeté sa demande indemnitaire formées à hauteur de 43.200 euros.

30. Le tribunal a également dit que la société VPC ne démontre pas l’existence d’un préjudice distinct des échéances prévues par la convention compensé par la somme qui lui sera allouée, et il l’a déboutée de ses demandes de dommages et intérêts, de 72.000 euros, 36.000 euros et de 5.000 euros pour résistance abusive.

31. Le tribunal a constaté que lors de l’audience du 6 janvier 2022, la société VPC a retiré de ses moyens et conclusions le protocole de conciliation et il a ainsi débouté la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle de sa demande formée au titre de l’article 32-1 du code de procédure civile.

32. La cour relève, concernant en premier lieu les conditions de la rupture du contrat de prestations de service du 30 mars 2018, que ce contrat a été conclu pour une durée de trois ans à compter du 1er avril 2018, avec renouvellement par tacite reconduction ensuite pour un an, sauf dénonciation trois mois avant l’arrivée du terme. Selon son préambule, il fait suite à la réorganisation fonctionnelle de la société LEC convenue en 2017 dans le cadre d’une procédure de mandat ad hoc puis d’une conciliation aboutissant à la signature d’un protocole signé entre cette société et ses créanciers le 30 novembre 2017. A ce titre, il a été alors convenu que [F] [U], antérieurement directeur général, prenne en charge la direction opérationnelle de la société LEC, [S] [Y] se voyant confié une mission d’accompagnement et de conseil en qualité de prestataire extérieur.

33. Le contrat conclu entre les deux sociétés par monsieur [U] pour la société LEC et monsieur [Y] pour la société VPC, a mis à la charge de cette dernière une mission d’assistance technique et informatique liée à l’activité de développement et de fabrication de sources lumineuses, avec la transmission des codes permettant le fonctionnement de la société LEC.

34. En parallèle, une convention a été signée également le 30 mars 2018, sous la forme d’une lettre:

– concernant les versements supplémentaires dues à [S] [Y], au titre de ses fonctions de président de la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle, si la trésorerie de la société le permet et si le chiffre d’affaire mensuel HT est au moins de 700.000 euros. Cela porte sur 37.760,06 euros, gelés au titre du protocole de conciliation et ne concerne que cette personne’;

– concernant en outre, à compter de la reprise par la société LEC des remboursements des banques conformément au protocole de conciliation, la rémunération due à la société VPC au titre du contrat de prestations de service’: cette rémunération sera majorée pour la porter à 5.000 euros HT’;

– enfin, la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle s’engage à payer à la société VPC une rémunération exceptionnelle de 1.000 euros par mois écoulé entre la date de la signature du contrat de prestations de service et la date de la modification de la rémunération.

35. Par lettre 9 juillet 2019, la société LEC a invoqué l’inexécution du contrat de prestations de service et a proposé une résiliation amiable, indiquant qu’à défaut d’acceptation par la société VPC, elle se prévaudra d’une résiliation pour faute. Le 29 octobre 2019, la société LEC a informé la société VPC de la résiliation du contrat de prestations de service en raison de son inexécution.

36. Aux termes des articles 9 du code de procédure civile et 1353 du code civil, il appartient à la société LEC de justifier des faits qu’elle invoque au soutien de son exception d’inexécution, puisqu’elle se prétend libéré de son obligation de régler les sommes prévues dans les deux contrats conclus le 30 mars 2018.

37. Or, si la société LEC invoque le comportement de monsieur [Y] qui aurait rendu impossible l’exécution du contrat de prestations de services, de sorte qu’elle lui a demandé de ne plus se présenter au sein de l’entreprise, et se fonde à ce titre sur des mails adressés en juin et septembre 2017 par [S] [Y] à des employés de la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle, ayant motivé celle-ci à lui interdire de venir dans les locaux, en raison de propos injurieux, ces mails sont cependant antérieurs au contrat de prestations de service, et monsieur [Y] était alors le président de la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle. Ils sont ainsi sans rapport avec le contrat ayant donné lieu à la demande en paiement de la société VPC.

38. Il ressort en outre du procès-verbal de l’assemblée générale du 25 juin 2018 de la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle’que son président, [F] [U], s’est engagé à communiquer mensuellement aux associés des données chiffrées et des éléments sur les discussions avec des investisseurs potentiels, en échange de l’absence de la présence physique de [S] [Y] au sein de la société et de son absence d’intervention auprès des partenaires, salariés et conseils des sociétés du groupe. Ce dernier a accepté de ne plus être présent dans les locaux.

39. Enfin, par mail du 21 juin 2018, [X] [Y] a indiqué à son père [S] [Y], au sujet d’une visite de ce dernier dans l’entreprise, et d’une altercation avec un employé, que son mari [F] [U] lui demande de dire à son père de ne plus venir au bureau et de cesser ses interventions, afin de retrouver des relations familiales cordiales et sereines, sans que cela remette en cause l’accord financier entre les deux sociétés.

40. Il résulte de ces éléments que la société VPC s’est ainsi vue interdire la possibilité d’exécuter ses prestations définies dans la première convention du 30 mars 2018, alors que jusqu’à l’assemblée générale du 25 juin 2018, aucun grief n’a été porté à sa connaissance concernant une inexécution de ses obligations. La société LEC ne justifie pas ainsi d’une inexécution fautive de la société VPC justifiant la résiliation du contrat, dont la durée initiale était de trois ans, ensuite renouvelable annuellement sauf dénonciation moyennant préavis. En outre, il est constant que la société LEC a attendu une année pour proposer une résiliation amiable, réglant les factures adressées par la société VPC, sans formuler, pendant cette année aucune observation sur une inexécution des obligations contractuelles. Il s’ensuit que le tribunal de commerce a exactement retenu que l’appelante n’a pas respecté les obligations énoncées à l’article 1226 du code civil, disposant que le créancier peut, à ses risques et périls, résoudre le contrat par voie de notification.

41. Concernant une mise en demeure émanant de la société LEC, le même article prévoit que sauf urgence, le créancier de l’obligation inexécutée doit préalablement mettre en demeure le débiteur défaillant de satisfaire à son engagement dans un délai raisonnable. A ce titre, la cour observe qu’aucune mise en demeure n’a été adressée à la société VPC de satisfaire à ses obligations définies dans le contrat du 30 mars 2018. Par contre, l’appelante ne peut faire grief à la société VPC de ne pas l’avoir mise en demeure d’exécuter son

obligation de paiement, puisqu’il est justifié qu’une telle mise en demeure a été adressée par la société VPC le 27 février 2020, concernant les factures de novembre 2019 à janvier 2020.

42. Concernant les sommes dues à la société VPC en exécution des deux contrats du 30 mars 2018, la société LEC n’ayant pas permis l’exécution du contrat de prestations de service et n’ayant pas ainsi valablement prononcé la résiliation de cette convention, il en résulte qu’elle reste débitrice des sommes prévues dans le premier contrat signé le 30 mars 2018, pour la période de trois ans prévue par ladite convention. Il en résulte que le jugement déféré sera confirmé en ce qu’il a condamné l’appelante à payer la somme de 81.600 euros. Y ajoutant, la cour assortira cette condamnation de l’intérêt au taux légal à compter du 27 février 2020, date de la mise en demeure, avec capitalisation à compter du présent arrêt.

43. Concernant la somme complémentaire prévue par la lettre valant contrat du 30 mars 2018, la cour constate que si la société VPC a produit initialement ce protocole, elle l’a ensuite retiré, en raison de la confidentialité qui y est attachée et elle n’en fait plus état dans ses conclusions. En raison de cette confidentialité, elle se trouve privée de la possibilité d’établir qu’il a été respecté. Il doit cependant être relevé que l’exécution de ce protocole n’est pas contredite par l’appelante’et il en résulte que la reprise du remboursement des banques est acquise. En conséquence, cette rémunération complémentaire est due. Le jugement déféré sera infirmé sur ce point. Statuant à nouveau, la cour fera droit à la demande de l’intimée visant le paiement de 43.200 euros TTC, correspondant aux 36 mensualités de 1.200 euros TTC. Cette somme portera intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure.

44. S’agissant de l’appel incident de la société VPC, au titre des dommages et intérêts pour rupture abusive des relations contractuelles à hauteur de 72.000 euros, le tribunal de commerce a justement retenu que la preuve d’un préjudice distinct du paiement des échéances prévues dans les deux contrats n’est pas établie. Le jugement déféré sera confirmé sur ce point.

45. S’agissant de la demande de paiement de 10.000 euros à titre de dommages et intérêts pour résistance abusive de la société LEC, il n’est pas plus justifié de l’existence d’un préjudice. Cette demande ne pouvait qu’être rejetée par les premiers juges.

46. Succombant en son appel, la société LEC sera condamnée à payer à la société VPC la somme de 4.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de l’instance.

PAR CES MOTIFS

La Cour statuant publiquement, contradictoirement, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile, après en avoir délibéré conformément à la loi,

Vu les articles 1101 et suivants, 1226, 1353 du code civil, l’article 9 du code de procédure civile ;

Infirme le jugement déféré en ce qu’il a débouté la société VPC de l’ensemble de ses autres demandes indemnitaires’;

Confirme le jugement déféré en ses autres dispositions soumises à la cour ;

statuant à nouveau’;

Condamne la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle à payer à la société VPC la somme de 43.200 euros à titre de dommages et intérêts, correspondant à l’engagement complémentaire résultant de l’accord en date du 30 mars 2018′;

Dit que les sommes de 81.600 euros et de 43.200 euros mises à la charge de la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle porteront intérêts au taux légal à compter du 27 février 2020, et que les intérêts seront capitalisés à compter du présent arrêt’;

Déboute la société VPC de sa demande tenant au paiement de la somme de 72.000 euros à titre de dommages et intérêts pour rupture abusive des relations contractuelles, et de sa demande tendant au paiement de la somme de 10.000 euros au titre de la résistance abusive de la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle’;

y ajoutant’;

Condamne la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle à payer à la société VPC la somme de 4.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile’;

Condamne la société Lyonnaise d’Equipement et de Contrôle aux dépens exposés en cause d’appel avec distraction au profit de maître Hays, avocate ;

SIGNÉ par Mme FIGUET, Présidente et par Mme RICHET, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière La Présidente

 


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