Exception d’inexécution : 28 septembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/10284

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Exception d’inexécution : 28 septembre 2023 Cour d’appel d’Aix-en-Provence RG n° 22/10284

COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

Chambre 1-2

ARRÊT

DU 28 SEPTEMBRE 2023

N° 2023/598

Rôle N° RG 22/10284 – N° Portalis DBVB-V-B7G-BJYOA

[X] [C]

C/

[W] [J]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

Me Maxence WALAS

Décision déférée à la Cour :

Ordonnance de référé rendue par Monsieur le Président du Tribunal de proximité de BRIGNOLES en date du 03 Juin 2022 enregistrée au répertoire général sous le n° 12-21-000446.

APPELANTE

Madame [X] [C]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Totale numéro 2022/5885 du 15/07/2022 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE),

née le [Date naissance 2] 1966 à [Localité 4]

demeurant [Adresse 3]

représentée et assistée par Me Maxence WALAS, avocat au barreau de Marseille substitué par Me Sandra JUSTON, avocat au barreau d’aix-en-Provence

INTIME

Monsieur [W] [J],

demeurant [Adresse 1]

défaillant

*-*-*-*-*

COMPOSITION DE LA COUR

En application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 Juin 2023, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Myriam GINOUX, Présidente, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Madame Myriam GINOUX, Présidente

Mme Catherine OUVREL, Conseillère

Mme Angélique NETO, Conseillère

Greffier lors des débats : Mme Isabelle MAZAN.

Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 28 Septembre 2023.

ARRÊT

Rendu par défaut,

Prononcé par mise à disposition au greffe le 28 Septembre 2023,

Signé par Madame Myriam GINOUX, Présidente et Mme Caroline VAN-HULST, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

***

EXPOS » DU LITIGE

Par acte sous seing privé en date du 29 aout 2013, M. [W] [J] a consenti à Mme [X] [C], un bail à usage d’habitation portant sur un logement sis [Adresse 3], (Var), moyennant un loyer mensuel initialement fixé à la somme de 1 100 € par mois.

Un commandement de payer visant la clause résolutoire a été délivré le 5 mai 2021, aux fins d’obtenir le paiement de la somme de 11 171 € au principal.

Par acte en date du 28 septembre 2021, régulièrement dénoncé au Préfet du Var, M. [W] [J] a fait assigner Mme [X] [C] en référé devant le juge des contentieux de la protection aux fins de voir constater l’acquisition de la clause résolutoire, prononcer l’expulsion de Mme [X] [C] et tous occupants de son chef sous astreinte, la condamner à lui payer une somme provisionnelle de 15 571 euros au titre de la dette locative, décompte arrêté au 1er août 2021, la condamnation de la locataire au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer indexé et des charges jusqu’au départ des lieux, et sa condamnation à une somme de 1 500 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.

Par ordonnance, en date du 3 juin 2022, le juge des contentieux de la protection du tribunal de proximité de Brignoles a :

– constaté la résiliation du bail liant les parties au 5 juillet 2021,

– à défaut de départ volontaire de la locataire, ordonné l’expulsion de Mme [X] [C] et tous occupants de son chef, par toutes voies et moyens de droit et au besoin avec le concours de la force publique,

– condamné Mme [X] [C] à payer à M. [W] [J] :

‘ la somme provisionnelle de 23 100 €, au titre des loyers, charges et indemnités d’occupation impayés au 1er mars 2022, avec intérêts au taux légal à compter de l’assignation,

‘ une indemnité d’occupation mensuelle égale au montant du loyer en cours , jusqu’à libération effective des lieux par remise des clés,

‘ pour frais irrépétibles la somme de 800 €,

– condamné M. [W] [J] à payer à Mme [X] [C] une somme provisionnelle de 5 000 € au titre de la réparation de son préjudice de jouissance,

– rejeté les demandes plus amples des parties,

– condamné Mme [X] [C] aux dépens comme visé dans la motivation,

– rappelé que la décision était exécutoire par provision.

Par déclaration reçue le 18 juillet 2022, Mme [X] [C] a interjeté appel de cette décision, l’appel portant sur toutes ses dispositions dûment reprises sauf celle relative à la condamnation du bailleur à lui payer la somme provisionnelle de 5 000 euros au titre de la réparation de son préjudice de jouissance.

Dans ses dernières conclusions transmises le 25 novembre 2022, auxquelles il convient de se référer pour plus ample exposé des faits et de la procédure et des moyens des parties, Mme [X] [C] demande à la cour qu’elle :

– réforme l’ordonnance entreprise dans toutes ses dispositions,

‘ statuant de nouveau,

– constate l’existence de contestations sérieuses,

– déboute M. [W] [J] de toutes ses demandes,

– le condamne à réaliser les travaux prescrits par SOLIHA dans le rapport du 26 août 2021, sous astreinte de 100 € par jour de retard, à compter de la signification de la décision à intervenir,

– suspende le paiement des loyers et le bail jusqu’à achèvement des travaux prescrits par SOLIHA dans le rapport du 26 août 2021,

– statuer ce que de droit sur les dépens étant rappelé que Mme [X] [C] est éligible à l’aide juridictionnelle totale.

Régulièrement intimé, M. [W] [J] n’a pas constitué avocat devant la cour d’appel.

La procédure a été clôturée le 14 juin 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Attendu qu’aux termes de l’article 834 du code de procédure civile, dans tous les cas d’urgence, le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection dans les limites de sa compétence, peuvent ordonner en référé toutes les mesures qui ne se heurtent à aucune contestation sérieuse ou que justifie l’existence d’un différend ; que l’article 835 du même code dispose que le président du tribunal judiciaire ou le juge du contentieux de la protection, dans les limites de sa compétence, peuvent toujours, même en présence d’une contestation sérieuse, prescrire en référé les mesures conservatoires ou de remise en état qui s’imposent, soit pour prévenir un dommage imminent, soit pour faire cesser un trouble manifestement illicite ; qu’en application des dispositions de ces textes, il est possible, en référé, de constater la résiliation de plein droit d’un contrat de bail, en application d’une clause résolutoire, lorsque celle-ci est mise en oeuvre régulièrement ;

Sur l’exception d’inexécution et l’indécence alléguée du logement :

En application des articles 1728, 1741 du code civil et 7 a de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le locataire a pour obligation principale le paiement du loyer et des charges récupérables aux termes convenus ; un manquement grave et répété à cette obligation justifie la résiliation du bail ou la délivrance d’un congé à l’initiative du bailleur.

Aux termes de l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur est tenu de mettre à disposition un logement décent ne laissant apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité ou à la santé, répondant à un critère de perfomance énergétique minimal et doté des éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation ;

L’article 2 du décret n° 2002-120 du 30 janvier 2002 dispose : Le logement doit satisfaire aux conditions suivantes, au regard de la sécurité physique et de la santé des locataires :

1. Il assure le clos et le couvert. Le gros ‘uvre du logement et de ses accès est en bon état d’entretien et de solidité et protège les locaux contre les eaux de ruissellement et les remontées d’eau. Les menuiseries extérieures et la couverture avec ses raccords et accessoires assurent la protection contre les infiltrations d’eau dans l’habitation. Pour les logements situés dans les départements d’outre-mer, il peut être tenu compte, pour l’appréciation des conditions relatives à la protection contre les infiltrations d’eau, des conditions climatiques spécifiques à ces départements ;

2. Il est protégé contre les infiltrations d’air parasites. Les portes et fenêtres du logement ainsi que les murs et parois de ce logement donnant sur l’extérieur ou des locaux non chauffés présentent une étanchéité à l’air suffisante. Les ouvertures des pièces donnant sur des locaux annexes non chauffés sont munies de portes ou de fenêtres. Les cheminées doivent être munies de trappes. Ces dispositions ne sont pas applicables dans les départements situés outre-mer .

Aux termes de l’article 1219 du code civil, la partie peut refuser d’exécuter son obligation, alors même que celle-ci est exigible, si l’autre n’exécute pas la sienne et si cette inexécution est suffisamment grave.

Si le droit de toute personne à disposer d’un logement décent constitue un objectif à valeur constitutionnelle, le locataire qui estime son droit méconnu ne peut toutefois se prévaloir de l’exception d’inexécution pour suspendre unilatéralement le paiement des loyers, qu’à la condition de rapporter la preuve du caractère non seulement indécent mais encore inhabitable des lieux loués.

En l’espèce, Mme [X] [C] verse aux débats un rapport de l’établissement SOLIHA en date du 26 août 2021, et un rapport de poilice municipale du 4 octobre 2021 faisant notamment état :

– de multiples infiltrations,

– de nombreuses zones de moisissures,

– des champignons qui poussent à l’intérieur de l’appartement,

– le tableau électrique n’est pas aux normes,

– une applique de la salle de bains est dangereuse,

– absence de protection mécanique au niveau de l’alimentation de la plaque de cuisson,

– l’alimentation électrique des radiateurs n’est pas aux normes,

– la vitre de l’insert est cassée,

– le réseau d’évacuation des eaux usées refoule,

– le groupe de sécurité du chauffe eau est mal installé,

– absence de système de ventilation mécanique adapté au logement.

Si ces constats ont permis au premier juge, à juste titre, de caractériser un préjudice de jouissance, et de fixer une provision à valoir sur la réparation de celui-ci à hauteur de 5 000 €, ils ne sauraient démontrer l’insalubrité ni l’inhabitabilité du logement.

En effet le rapport de SOLIHA précise que l’état des lieux d’entrée ne révélait pas la moindre trace d’humidité, d’infiltrations ni de moisissures, et que la vitre de l’insert était seulement abimée.

Il précise également qu’un certain nombre de réparations d’entretien à la charge du locataire, sont non effectuées comme notamment le flexible de la bouteille de gaz périmé et qui n’a pas été remplacé ; le retrait des appliques et de la prise du couloir qui doivent être remis en place par le locataire, les grilles d’aération sur le manteau de la cheminée qui sont noircies doivent être nettoyées par le locataire, le logement n’est pas équipé d’un détecteur de fumée pourtant fourni par le propriétaire ( cf rapport de police).

Le rapport de constatation de la police municipale mentionne que les murs sont jaunis par la fumée de cigarette ; que les meubles de la cuisine et appareils ménagers ont été rachetés neufs il y a trois ans mais que certaines portes sont manquantes ; que le chauffe eau a été changé par le propriétaire il y a 3/4 ans .

De surcroît, Mme [X] [C] ne s’est jamais plaint de l’indécence du logement avant la délivrance du commandement de payer, et elle ne démontre ni ne soutient s’être elle-même acquittée de son obligation de procéder ou de faire procéder aux travaux d’entretien locatifs qui lui incombent et dont relèvent une partie des constat précités ; c’est donc par des motifs pertinents que la cour adopte, que le premier juge a considéré qu’aucune contestation sérieuse, fondée sur une exception d’inexécution tirée d’un manquement à son obligation de délivrance, ne pouvait être opposée à M. [W] [J].

Sur l’acquisition de la clause résolutoire et la résiliation du bail :

Aux termes de l’article 7 a de la loi n° 89-462 du 6 juillet 1989, le locataire est obligé de payer le loyer et les charges récupérables aux termes convenus ; que l’article 24 alinéa 1 du même texte dispose que toute clause prévoyant la résiliation de plein droit du contrat de location pour défaut de paiement du loyer ou des charges aux termes convenus ou pour le non versement du dépôt de garantie ne produit effet que deux mois après un commandement de payer demeuré infructueux ;

Le bail signé par les parties le 29 août 2013 comprend une clause résolutoire reprenant les dispositions de l’article précité.

Mme [X] [C] qui oppose aux bailleurs une exception d’inexécution pour justifier le non paiement total ou partiel des loyers depuis le mois de mars 2020, ne conteste pas qu’elle ne s’est pas acquittée des causes du commandement payé dans les deux mois de sa délivrance ( le 5 mai 2021).

C’est donc par des motifs pertinents, que la cour adopte, que le premier juge a constaté l’acquisition de la clause résolutoire à la date du 5 juillet 2021, ordonné l’expulsion du locataire à défaut départ volontaire, l’a condamnée au regard du décompte versé, à payer au bailleur une somme provisionnelle de 23 100 € au titre des loyers, charges et indemnité d’occupation dues au 1er mars 2022 avec intérêts légaux, l’a également condamnée à verser, à partir du 6 juillet 2021, à l’intimé, à titre provisionnel, une indemnité d’occupation correspondant au montant du loyer augmenté de la provision pour charges.

Enfin, c’est également à juste titre que le premier juge a relevé que Mme [X] [C], qui n’a plus la qualité de locataire depuis le 5 juillet 2021, ne peut réclamer la réalisation de travaux dans la maison qu’elle occupe aujourd’hui sans droit ni titre

L’ordonnance entreprise sera donc confirmée de l’ensemble des dispositions entreprises.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

L’ordonnance entreprise doit être confirmée en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles.

Mme [X] [C] qui succombe doit être condamnée aux dépens d’appel selon modalités applicables en matière d’aide juridictionnelle totale.

Elle doit être déboutée de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La Cour,

Confirme l’ordonnance entreprise en toutes ses dispositions querellées,

Y ajoutant,

Condamne Mme [X] [C] aux dépens d’appel selon modalités applicables en matière d’aide juridictionnelle,

La déboute de sa demande sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

la greffière la présidente

 


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