Exception d’inexécution : 22 novembre 2023 Cour d’appel d’Agen RG n° 22/00955

·

·

Exception d’inexécution : 22 novembre 2023 Cour d’appel d’Agen RG n° 22/00955

ARRÊT DU

22 Novembre 2023

DB/CTE

———————

N° RG 22/00955 –

N° Portalis DBVO-V-B7G-DBY6

———————

S.C.I. DJ

S.A.S. DJINO

C/

S.A. ELVA MENUISERIES

——————

GROSSES le

aux avocats

ARRÊT n° 412-2023

COUR D’APPEL D’AGEN

Chambre Civile

LA COUR D’APPEL D’AGEN, 1ère chambre dans l’affaire,

ENTRE :

S.C.I. DJ

RCS d’AUCH N° 823 208 269

[Adresse 1]

[Localité 2]

S.A.S. DJINO

RCS d’AUCH N° B 822 933 099

‘[Adresse 7]’

[Localité 3]

Représentées par Me Alain PEYROUZET, substitué à l’audience par Me LAGAILLARDE, avocat au barreau du GERS

APPELANTES d’un jugement du Tribunal Judiciaire d’AUCH en date du 05 Octobre 2022, RG 21/01129

D’une part,

ET :

S.A. ELVA MENUISERIES

RCS LA ROCHE SUR YON N° 341 052 686

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Juan Carlos HEDER, avocat postulant au barreau du GERS

Représentée par Me Yves HONHON, SARL HONNON-LÉPINAY, avocat plaidant au barreau de NANTES

INTIMÉE

D’autre part,

COMPOSITION DE LA COUR :

l’affaire a été débattue et plaidée en audience publique le 06 septembre 2023 devant la cour composée de :

Président : Dominique BENON, Conseiller

Assesseur : Jean-Yves SEGONNES, Conseiller

Qui en ont rendu compte dans le délibéré de la cour composée outre eux-même de :

Marianne DOUCHEZ-BOUCARD, Présidente de chambre

en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, et après qu’il en a été délibéré par les magistrats ci-dessus nommés,

Greffière : Nathalie CAILHETON

ARRÊT : prononcé par mise à disposition au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

‘ ‘

FAITS :

Le 10 mai 2017, la SCI DJ, gérée par [D] [H], a passé commande à la SA Menuiseries Elva de tout un ensemble de portes-fenêtres pour un prix de 27 854,03 Euros TTC destinées à être posées dans un immeuble à usage d’hôtel situé [Adresse 5] à [Localité 2] (32) exploité par la SAS DJINO dont [D] [H] est également le gérant.

La SCI DJ a payé un acompte de 13 927,01 Euros.

Les menuiseries ont été livrées le 20 juillet 2017 par les transports Benoit.

Des réserves ont été mentionnées sur la lettre de voiture lors de la réception des marchandises.

Le 25 juillet 2017, la SCI DJ a fait constater par Me [F], huissier de justice, que plusieurs menuiseries étaient endommagées.

M. [H] a fait savoir qu’il refusait de payer le solde du prix.

Par lettre recommandée du 4 janvier 2019, la SA Menuiseries Elva a réclamé par écrit à la SCI DJ le paiement du solde des marchandises, soit 13 327,02 Euros.

Elle a vainement réitéré cette demande les 6 et 20 mars 2019 puis, par acte délivré le 22 septembre 2021, a fait assigner la SCI DJ et la SAS DJINO devant le tribunal judiciaire d’Auch avec de les voir condamner in solidum à lui payer le solde de sa facture avec intérêts contractuels.

Par jugement rendu le 5 octobre 2022, le tribunal judiciaire d’Auch a :

– mis hors de cause la SAS DJINO,

– débouté la SAS DJINO de sa demande présentée au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SCI DJ à verser à la SA Menuiseries Elva la somme de 13 327,02 Euros majorée des intérêts de retard contractuellement fixés à 1,5 fois le taux des intérêts au taux légal et ce à compter du 22 septembre 2021,

– condamné la SCI DJ à verser à la SA Menuiseries Elva la somme de 1 999,05 Euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2021 au titre de la clause pénale,

– condamné la SCI DJ à verser à la SA Menuiseries Elva la somme de 2 000 Euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SCI DJ au paiement des dépens,

– rappelé que la décision est de droit exécutoire à titre provisoire.

Le tribunal a estimé que la SAS DJINO n’était pas le co-contractant de la

SA Menuiseries Elva et que celle-ci n’ayant pas été chargée de la pose, les défauts de pose relevés ne pouvaient pas lui être imputés.

Par acte du 2 décembre 2022, la SCI DJ et la SAS DJINO ont déclaré former appel du jugement en indiquant que l’appel porte sur les dispositions du jugement qui ont :

– condamné la SCI DJ à verser à la SA Menuiseries Elva la somme de 13 327,02 Euros majorée des intérêts de retard contractuellement fixés à 1,5 fois le taux des intérêts au taux légal et ce à compter du 22 septembre 2021,

– condamné la SCI DJ à verser à la SA Menuiseries Elva la somme de 1 999,05 Euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 22 septembre 2021 au titre de la clause pénale,

– condamné la SCI DJ à verser à la SA Menuiseries Elva la somme de 2 000 Euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné la SCI DJ au paiement des dépens,

– rejeté les demandes de la SCI DJINO.

La clôture a été prononcée le 28 juin 2023 et l’affaire fixée à l’audience de la Cour du 6 septembre 2023.

PRÉTENTIONS ET MOYENS :

Par dernières conclusions notifiées le 13 juin 2023, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, la SCI DJ et la SAS DJINO présentent l’argumentation suivante :

– La SAS DJINO n’est pas co-contractante de l’intimée :

* elle ne peut se voir réclamer le solde de la facture.

* toutefois, elle doit bénéficier de l’article 700 du code de procédure civile, contrairement à ce qu’a décidé le tribunal.

– La SA Menuiseries Elva a manqué à ses obligations :

* la lettre de voiture a mentionné qu’il n’existait pas de protection pour le transport et que toutes les menuiseries étaient abîmées, ce qui relève de la responsabilité de l’expéditeur, c’est à dire de la SA Menuiseries Elva.

* cette dernière n’a pas livré des menuiseries conformes à la commande, ce qui implique de procéder à un démontage de l’ensemble des menuiseries posées, comme le technicien de la SA Menuiseries Elva lui a indiqué, de sorte qu’elle est bien fondée à opposer une exception d’inexécution.

* sa co-contractante a reconnu sa faute en proposant une réduction du prix, mais en s’abstenant de proposer le changement des éléments non-conformes.

* elle produit des attestations, postérieures au jugement, attestant que les éléments livrés ne sont pas adaptés aux ouvertures.

Au terme de leurs conclusions, elles demandent à la Cour de :

– confirmer le jugement en ce qu’il a mis hors de cause la SAS DJINO, mais condamner la SA Menuiseries Elva à lui payer la somme de 3 500 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– infirmer le jugement en ce qu’il a prononcé condamnation à l’encontre de la SCI DJ,

– fixer le prix des menuiseries à 13 927,01 Euros,

– rejeter les demandes présentées par la SA Menuiseries Elva à l’encontre de la SCI DJ,

– condamner la SA Menuiseries Elva à payer à la SCI DJ la somme de 3 500 Euros au titre des frais irrépétibles exposés en 1ère instance et la même somme au titre des frais irrépétibles exposés en appel,

– mettre les dépens à sa charge incluant la somme de 384,09 Euros au titre du constat établi par Me [F] le 25 juillet 2017.

*

* *

Par conclusions d’intimée notifiées le 11 mai 2023, auxquelles il est renvoyé pour le détail de l’argumentation, la SA Menuiseries Elva présente l’argumentation suivante :

– L’appelante procède par affirmations sans fondement.

– Le constat d’huissier produit a été établi postérieurement à la pose par un tiers et constate des traces de plâtre et de peinture qui n’ont pu intervenir que lors de la pose, tout comme les traces de choc.

– La SCI DJ a toujours refusé l’intervention de son service après-vente.

– Le voiturier n’a pas émis de réserve lors de la prise des marchandises et les dégradations sont de son fait.

Au terme de ses conclusions, elle demande à la Cour de :

– débouter les appelantes de leurs demandes,

– constater la radiation de la SAS DJINO le 2 décembre 2022,

– confirmer le jugement,

– condamner la SCI DJ à lui payer la somme de 5 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, et à supporter les dépens,

– rappeler que la décision sera assortie de l’exécution provisoire de droit (cette demande qui ne vise qu’à rappeler un mécanisme qui s’applique de plein droit est sans objet).

——————-

MOTIFS :

1) Considérations préliminaires :

Dans le dispositif de ses conclusions, l’intimée demande à la Cour de ‘constater la radiation de la SAS DJINO le 2 décembre 2022″.

Cette demande de simple constat ne constitue pas une prétention.

Il n’y a pas lieu d’y répondre.

2) Sur la demande d’application de l’article 700 du code de procédure civile présentée par la SAS DJINO :

Il n’est pas exclu qu’il ait pu exister, dans l’esprit de la SA Menuiseries Elva, une confusion sur l’identité exacte de sa co-contractante, tant la SCI DJ que la SAS DJINO étant gérées par M. [H].

Ainsi, la SA Menuiseries Elva a adressé deux mises en demeure de payer à la SAS DJINO sans que cette dernière ne fasse valoir qu’elle n’était pas l’auteur de la commande des menuiseries.

Par conséquent, c’est à juste titre que le tribunal a rejeté la demande d’application de l’article 700 du code de procédure civile présentée par la SAS DJINO.

Le jugement doit être confirmé sur ce point.

3) Sur les sommes réclamées par la SA Menuiseries Elva à la SCI DJ :

Vu les articles 1217 et 1219 du code civil,

Le tribunal a justement rappelé qu’il appartient à celui qui invoque l’exception d’inexécution en alléguant que son co-contractant n’a rempli que partiellement son obligation, d’établir cette inexécution de sorte qu’il s’ensuit en l’espèce que la SCI DJ, assignée en paiement par la SA Menuiseries Alva, supporte la charge de la preuve du bien-fondé de l’exception d’inexécution dont elle se prévaut pour se soustraire au paiement des sommes qui lui sont réclamées.

C’est ensuite par des motifs pertinents que la Cour adopte que le tribunal a considéré que la SCI DJINO n’apportait pas cette preuve et qu’en conséquence, elle doit être condamnée à payer à sa co-contractante les sommes restées impayées sur la commande du 10 mai 2017.

Il suffit d’ajouter ou de préciser les éléments suivants :

– le procès verbal de constat établi le 25 juillet 2017 dont se prévaut la SCI DJ mentionne l’existence de traces blanches (c’est à dire de peinture blanche ou de plâtre) sur les menuiseries en place et que la peinture rouge d’origine de certaines d’entre elles est abîmée, ce qui signe des désordres imputables à leur pose, prestation qui ne faisait pas partie de la commande passée auprès de la SA Menuiseries Elva.

– les défauts d’ouverture et de fermeture constatés par l’huissier peuvent également trouver leur origine dans une mauvaise pose.

– lors de la réception des marchandises, il a été constaté au déchargement, selon les réserves indiquées sur la lettre de voiture, ‘protection inexistante ou très peu et pas attachée, toutes les menuiseries sont abîmées’, ce qui est de nature à relever de la responsabilité du transporteur ou de l’expéditeur, étant précisé, d’une part, que l’article A-5 des conditions générales de vente de la SA Menuiseries Elva stipule ‘les marchandises voyagent en toute hypothèse aux risques et périls de l’acheteur, même lorsque le prix est établi franco, il appartient donc à celui-ci de garantir ses droits vis-à-vis des transporteurs par lettre recommandée’ et, d’autre part, que cette constatation est renforcée par le fait qu’il n’est justifié d’aucune réserve sur l’état des marchandises lors de leur embarquement.

– la mention dans la suite de cette réserve, ‘responsabilité de l’expéditeur lors de la préparation de la commande’ ne peut être prise en compte dès lors qu’elle est d’une écriture différente et manifestement ajoutée d’une autre main, voire même établie postérieurement à la réception des menuiseries.

– les déclarations de [T] [B], [J] [G], [I] [C] et [P] [E] sur le fait que les marchandises n’ont pas été correctement fixées et protégées mettent en cause la responsabilité, non pas de la SA Menuiserie Elva, mais du transporteur qui a pour rôle de fixer correctement dans ses véhicules les éléments qu’il transporte.

– les attestations produites par la SCI DJ, établies postérieurement au jugement, constatant que les dimensions des menuiseries ‘n’étaient pas bonnes’ ([X] [O]), ce qui est également attesté par [W] [M], ne peuvent à elles seules signer la défaillance de la SA Menuiseries Alva faute d’explications et de justification sur les modalités de choix des menuiseries par la SCI DJ et de leur métré, la SCI DJ n’ayant jamais sollicité une mesure d’expertise.

Le jugement sera confirmé.

Enfin, l’équité permet d’allouer à l’intimée, en cause d’appel, la somme de

3 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

– la Cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant par arrêt contradictoire prononcé par mise à disposition au greffe et en dernier ressort,

– CONFIRME le jugement en toutes ses dispositions ;

– Y ajoutant,

– CONDAMNE la SCI DJ à payer à la SAS Menuiseries Elva, en cause d’appel, la somme de 3 000 Euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

– CONDAMNE la SCI DJ aux dépens de l’appel et dit qu’ils pourront être recouvrés directement par Me [A] pour ceux dont il a fait l’avance sans avoir reçu provision, conformément à l’article 699 du code de procédure civile.

– Le présent arrêt a été signé par Marianne Douchez-Boucard, présidente, et par Nathalie Cailheton, greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

La Greffière, La Présidente,

 


0 0 votes
Je supporte LegalPlanet avec 5 étoiles
S’abonner
Notification pour
guest
0 Commentaires
Le plus ancien
Le plus récent Le plus populaire
Commentaires en ligne
Afficher tous les commentaires
Chat Icon
0
Nous aimerions avoir votre avis, veuillez laisser un commentaire.x