Exception d’inexécution : 21 décembre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 22/02994

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Exception d’inexécution : 21 décembre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 22/02994

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 22/02994 – N° Portalis DBVH-V-B7G-IRZZ

CS

JUGE DES CONTENTIEUX DE LA PROTECTION D’UZES

14 juin 2022 RG :22/000083

[U]

C/

Société GRAND DELTA HABITAT

Grosse délivrée

le

à Me Méré

Selarl Sergent Delran

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

2ème chambre section C

ARRÊT DU 21 DECEMBRE 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge des contentieux de la protection d’UZES en date du 14 Juin 2022, N°22/000083

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Mme Corinne STRUNK, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Madame Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre

Mme Laure MALLET, Conseillère

Mme Corinne STRUNK, Conseillère

GREFFIER :

Mme Véronique LAURENT-VICAL, Greffière, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 13 Novembre 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 21 Décembre 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

Madame [Z] [U]

née le 08 Juin 1978 à [Localité 6]

[Adresse 3]

[Localité 4]

Représentée par Me Christine MERE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

INTIMÉE :

Société GRAND DELTA HABITAT immatriculée au RCS d’Avignon sous le n° 662 620 079, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux en exercice domiciliés ès qualités audit siège social

[Adresse 2]

[Localité 5]

Représentée par Me Sylvie SERGENT de la SELARL DELRAN-BARGETON DYENS-SERGENT- ALCALDE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de NIMES

ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 19 Octobre 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé par mise à disposition au greffe de la Cour et signé par Madame Sylvie DODIVERS, Présidente de chambre, le 21 Décembre 2023,

EXPOSE DU LITIGE

Par acte sous seing privé du 26 avril 2017, la société Grand Delta Habitat a donné en location à Mme [Z] [U] un appartement et une place de stationnement sis [Adresse 1], moyennant le paiement d’un loyer de 550,34 euros et 20,43 euros par mois.

Dénonçant l’insalubrité de l’appartement la contraignant à quitter le logement en juillet 2021, Mme [U] a saisi le juge des contentieux de la protection près le tribunal de proximité d’Uzès en vue d’obtenir la résiliation du contrat de bail aux torts exclusifs du bailleur, la restitution du dépôt de garantie, une dispense de l’obligation de paiement du loyer et l’allocation de dommages et intérêts pour un montant de 5.000 euros.

Par jugement contradictoire en date du 14 juin 2022, le juge de proximité a :

– prononcé la résiliation du bail signé entre la société Grand Delta Habitat et Mme [Z] [U] le 26 avril 2017, et ce à compter de ce jour à torts partagés;

– jugé que la société Grand Delta Habitat n’a pas satisfait à son obligation de délivrance et l’a condamnée à verser à Mme [Z] [U] la somme de 1.950 euros au titre de son préjudice de jouissance pendant 39 mois;

– décidé de ne dispenser Mme [Z] [U] du paiement du loyer lequel reste dû jusqu’à la résiliation du bail;

– rajouté qu’elle sera tenue au paiement d’une indemnité d’occupation équivalente au montant du loyer et ce jusqu’à la restitution des clés de l’appartement initialement loué;

– jugé que le dépôt de garantie sera restitué à Mme [U] dans les formes et délais prévus à l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 et à l’appui d’un décompte locatif liquidatif;

– condamné la société Grand Delta Habitat aux dépens;

– rejeté la demande de la société Grand Delta Habitat au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

– débouté les parties de leurs demandes plus amples ou contraires;

– rappelé le caractère exécutoire de la décision au visa de l’article 514 du code de procédure civile.

Par déclaration du 1er septembre 2022, Mme [Z] [U] a relevé un appel limité de ce jugement.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 3 février 2023, auxquelles il est expressément référé, Mme [Z] [U] , appelante, demande à la cour de :

– la juger recevable et bien fondée en son appel;

– juger Grand Delta Habitat infondé en son appel incident;

Y faisant droit et procédant par voie de réformation du jugement:

– prononcer la résiliation du bail aux torts exclusifs de la société Grand Delta;

– la dispenser du paiement du loyer en tout et partie à compter du mois de juillet 2021 jusqu’à la résiliation du bail;

– débouter Grand Delta Habitat de son appel incident;

– condamner Grand Delta Habitat à lui payer la somme de 5.000 euros à titre de dommages et intérêts;

– condamner Grand Delta Habitat à lui verser la somme de 1.800 € au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile outre les entiers dépens.

Au soutien de son appel, Mme [U] dénonce l’état d’insalubrité manifeste du logement tenant à la présence d’une importante humidité à compter de 2018 entraînant l’apparition de champignons et la saturation en eau des murs, désordre rendant l’appartement inhabitable.

Elle expose qu’en dépit de nombreuses sollicitations de sa part, le bailleur n’a engagé aucune démarche pour faire cesser les troubles dénoncés ce qui l’a contrainte à quitter le logement avec les membres de sa famille comprenant un fils handicapé.

Elle ajoute avoir reçu de manière tardive des propositions de relogement inadaptées à la situation familiale.

Elle dénonce en conséquence le comportement fautif du bailleur qui a manqué à son obligation de délivrance et d’entretien, ce qui justifie la résiliation du bail aux torts exclusifs du bailleur, sa responsabilité ne pouvant être atténuée par le fait qu’il ait engagé tous les moyens nécessaires en vue d’identifier l’origine du désordre.

En réponse aux moyens exposés par l’intimée, elle conteste le fait que la non-habitation du logement depuis juillet 2021 soit à l’origine des désordres alors que le rapport d’expertise indique clairement que les sinistres successifs en lien avec des infiltrations d’eau sont à l’origine du désordre.

A cet égard, le non-paiement du loyer est à mettre en lien avec cette exception d’inexécution et il est justifié qu’elle soit dispensée du respect de son obligation de paiement eu égard à l’importance de l’indécence du logement.

Elle réclame enfin la réparation des préjudices subis en lien avec la destruction de l’ensemble du mobilier par l’humidité, le défaut de jouissance, et le préjudice moral en lien avec cette situation.

Dans ses dernières conclusions remises et notifiées le 23 décembre 2022, auxquelles il est expressément référé, la société Grand Delta Habitat, intimée, demande à la cour de :

* A titre principal:

– infirmer le jugement en toutes ses dispositions sauf en ce qu’il a condamné Mme [U] au paiement du loyer et d’une indemnité d’occupation;

– constater que la cour n’est pas saisie d’une demande de Mme [U] relative à la dispense de régler le loyer;

– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il débouté l’intéressée de sa demande de régler son loyer;

Statuant à nouveau,

– constater que Grand Delta Habitat a respecté ses obligations de bailleur;

– débouter Mme [U] de sa demande en résiliation du bail aux torts du bailleur;

– débouter l’intéressée de ses demandes d’indemnisation et de restitution du dépôt de garantie;

– ordonner la restitution par Mme [U] des sommes versées par Grand Delta Habitat en exécution du jugement de première instance

*A titre subsidiaire;

– confirmer purement et simplement le jugement entrepris;

– débouter Mme [U] de l’intégralité de ses demandes

* En toute hypothèse:

– la condamner à la somme de 2.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens.

Au soutien de ses conclusions, Grand Delta Habitat soutient que le logement a été délivré en bon état d’usage comme en atteste l’état d’entrée dans les lieux.

S’agissant de son obligation d’entretien, elle soutient avoir tout mis en oeuvre pour mettre fin aux désordres dénoncés par la locataire et ce dès le mois de juillet puis octobre 2018. Elle a fait intervenir à plusieurs reprises la société JMS qui va opérer sur le toit terrasse, réaliser une recherche de fuite, assurer la réfection entière de la salle de bains, effectuer des travaux de plomberie et ce de 2018 au mois d’avril 2021 puis enfin en juillet 2022. En juin 2021, c’est la société Servimo qui interviendra pour une recherche de fuite avec réalisation dès le mois d’août 2021 d’un changement de canalisation et des raccords aux appareils sanitaires, puis ensuite au mois de novembre 2021. Elle considère avoir satisfait à son obligation d’entretien en engageant tous les moyens nécessaires pour faire cesser le sinistre.

Elle dénonce de son côté l’insuffisance de ventilation du logement qui n’a pas permis le séchage après plusieurs sinistres et explique aujourd’hui la persistance de l’humidité, la locataire ayant quitté le logement en juillet 2021 sans pour autant résilier le bail, comportement qui a contribué et participé activement à la prolifération des moisissures dans le logement.

Elle souligne enfin le refus opposé par l’appelante à toutes les propositions de relogement faites.

Elle dénonce de son côté le comportement fautif de Mme [U] qui s’est abstenue de tout paiement du loyer et charges sans y être autorisée, ce qui justifie le rejet des demandes présentées par l’appelante.

Sur la dispense de loyer, l’intimé considère que la cour n’est pas saisie d’une telle prétention en application de l’article 954 du code de procédure civile.

Enfin, sur la demande indemnitaire, l’intimé s’y oppose considérant l’imprécision des préjudices allégués.

La clôture de la procédure est intervenue le 19 octobre 2023 et l’affaire a été appelée à l’audience du 13 novembre 2023 pour être mise en délibéré, par mise à disposition au greffe, le 14 décembre 2023.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de la demande de dispense de paiement du loyer:

Le bailleur soulève l’irrecevabilité d’une telle demande au regard des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile considérant cette prétention comme nouvelle en appel.

Il résulte cependant du jugement entrepris que Mme [U] a saisi le juge de proximité d’Uzès d’une demande aux fins de voir juger qu’aucun loyer ne peut être du par la locataire.

Il s’ensuit que cette demande ne peut donc être qualifiée de nouvelle et sera donc déclarée recevable.

Sur la demande de résiliation judiciaire du bail,

Selon l’article 1224 du code civil, « la résolution résulte soit de l’application d’une clause résolutoire soit, en cas d’inexécution suffisamment grave, d’une notification du créancier au débiteur ou d’une décision de justice. »

Ainsi le juge peut prononcer la résiliation du contrat en cas notamment d’une inexécution suffisamment grave de l’une de parties quant à ses obligations contractuelles.

Selon l’article 1719 du code civil, l’article 6 de la loi du 6 juillet 1989, le bailleur est tenu de remettre au locataire un logement décent ne laissant pas apparaître de risques manifestes pouvant porter atteinte à la sécurité physique ou à la santé et doté de tous les éléments le rendant conforme à l’usage d’habitation, les normes de décence étant précisées par le décret 2002-120 du 30 janvier 2002.

Le preneur est quant à lui tenu de payer son loyer et ses charges.

En l’espèce, l’état des lieux d’entrée en date du 26 avril 2017 ne mentionne aucun désordre, le logement étant décrit en bon d’usage et de réparation d’entretien.

Le preneur ne peut dès lors soutenir que le logement était indécent depuis l’entrée dans les lieux en l’absence de preuve contraire.

Il ressort en revanche des éléments du dossier qu’au cours de la location, Mme [U] a subi divers désordres caractérisant une indécence du logement consistant en une humidité importante occasionnant la présence de moisissures, et d’odeurs.

Un premier rapport d’expertise établi par Elex le 26 novembre 2021 révèle qu’après quelques mois d’occupation, la locataire a constaté la présence anormale d’humidité en partie basse des murs du rez de chaussée entraînant le développement de champignons et la présence de cloques. En dépit de recherches, l’origine du sinistre a été attribuée à un phénomène naturel de remontées par capillarités. Parallèlement à cette problématique, au cours des premiers mois de l’année 2020, une humidification importante a été retrouvée au niveau du plafond du salon de rez de chaussée ainsi qu’au niveau des murs des toilettes à l’étage. En dépit de travaux de réfection de la salle de bains, Mme [U] a dénoncé une aggravation du phénomène d’humidification des murs au rez de chaussée. Lors de la réalisation de l’expertise, il a été noté les éléments suivants:

– saturation en eau de la plâtrerie en pied des murs (cloisons/doublages) avec un TH supérieur à 80%;

– humidification anormale de la chape support de pose du revêtement carrelé (fuite ou infiltration);

– exclusion du phénomène naturel de remontées d’humidité par capillarité comme origine du désordre;

– dégradation notable de la cloison séparant la salle de bains des toilettes, les causes de ce sinistre n’est plus active.

En conclusion, l’expert d’assurance indique que l’appartement loué n’est ‘actuellement plus habitable’ puisque tous les murs du rez de chaussée sont saturés en humidité.

Un autre rapport a été rédigé le 13 décembre 2021 par Origine, expert recherche de fuites, qui donne la conclusion suivante:

‘L’infiltration d’eau dans l’appartement résulte de sinistres successifs ayant engendré un apport d’eau important dans la chape de l’appartement. Suite à l’inspection thermographique et hygrométrique, il apparaît que la zone de désordres est en cours de séchage mais pas encore asséchée. L’absence de ventilation et l’ensemble des fenêtres fermées ralenti le séchage de la chape donc des pieds de cloison. Un défaut d’étanchéité dans la douche combinée avec un orifice important non traité en étanchéité dans le sol entretient une humidité en pied de gaine électrique en contact direct avec la chape’.

Enfin, un dernier rapport a été établi le 20 juin 2022 par le service habitat et construction du département du Gard lequel révèle que la dalle en rez-de-chaussée et les bas des murs sont imprégnés d’humidité; il est également noté la présence de moisissures sur le bas des murs en rez-de-chaussée ainsi que la présence d’un trou dans le mur à côté de la douche engendrant une infiltration dans la gaine électrique. Il est enfin indiqué que les mesures d’humidité dans les matériaux sont très importantes (avoisinant les 99%) et qu’il existe un réel problème d’humidité dans le logement.

Si la locataire justifie d’une première mise en demeure adressée le 19 octobre 2021 dénonçant l’indécence du logement consistant notamment en la présence de moisissures sur les murs et une humidité par capillarité, l’historique du dossier démontre que les désordres sont plus anciens et que le bailleur en a été informé dès l’année 2018 puisqu’il a engagé diverses recherches de fuite au cours de l’année 2018:

– dans le sanitaire le 10 juillet 2018 ,

– en toiture le 25 juillet 2018;

– sous dalle le 22 octobre 2018.

Courant de l’année 2019, des opérations similaires ont été engagées comme en témoignent les factures datées du 26 juin 2019, le 20 décembre 2019, le 13 mai 2020 (recherche fuite sous bac à douche), le 20 mai 2020 (réfection douche), le 30 juillet 2020 et encore pour des recherches de fuite les 19 avril 2021, 29 juin 2021, 5 octobre 2021 et 23 novembre 2021.

Ces éléments démontrent que les désordres dénoncés ont été portés à la connaissance du bailleur à compter du mois de juillet 2018 et ont persisté au cours des années postérieures sans que Grand Delta Habitat ne parvienne à mettre fin aux dysfonctionnements dénoncés en dépit des nombreuses diligences engagées puisqu’en 2022.

Il en résulte que Mme [U] a subi un préjudice de jouissance depuis le mois de juillet 2018 en sorte que la responsabilité du bailleur doit être nécessairement retenue peu importe qu’il ait fait preuve de diligences dans la mesure où l’origine du désordre n’a jamais été clairement identifiée et que le désordre a persisté.

Le premier juge a considéré néanmoins que la résiliation du bail sera prononcée aux torts partagés considérant que le non règlement des loyers à compter du mois d’avril 2021 et la non-occupation du logement à compter de juillet 2021 par la locataire n’a pas rendue possible une ventilation et une aération suffisantes expliquant la persistance de l’humidité. Il relève enfin que la locataire n’a pas donné suite à la solution de relogement présentée par le bailleur le 26 novembre 2021.

En l’état, si Mme [U] a fait le choix de quitter le logement en raison de son indécence, il ne peut lui être fait grief d’avoir contribué ainsi à la persistance du désordre alors même que l’appartement a subi des infiltrations dans le cadre de sinistre successifs depuis 2018 occasionnant ainsi un apport important d’eau dans la chape.

Alors que l’origine du désordre n’a pas été clairement identifiée, rien ne démontre que les réparations effectuées par le bailleur ont été efficaces et rien n’exclut que l’aggravation des infiltrations ne soient pas en lien avec l’absence de traitement efficace des causes du sinistre.

Par ailleurs, s’agissant de la proposition de relogement, il sera souligné que les désordres sont subis par la locataire depuis le mois de juillet 2018 et ce n’est que par courrier du 26 novembre 2021 que le bailleur lui propose d’opérer son relogement dans un appartement de type 5. Le refus opposé par Mme [U], motivé notamment par l’absence de cour nécessitée par la présence d’un enfant handicapé, ne peut être considéré comme fautif alors qu’elle a reçu une seule proposition.

Enfin, s’agissant du non-paiement de loyer à compter du mois de juillet 2021, si Mme [U] ne justifie pas d’une autorisation la dispensant de tout paiement, elle invoque néanmoins une exception d’inexécution considérant que le logement n’est plus habitable.

Sur ce point, comme il a été dit précédemment, la locataire justifie d’un préjudice de jouissance subi depuis le mois de juillet 2018 qui a persisté et s’est aggravé au cours des années postérieures sans que Grand Delta Habitat ne parvienne à mettre fin aux dysfonctionnements dénoncés.

Le rapport Elex du 26 novembre 2021 conclut en faveur de l’inhabitabilité de l’appartement puisque tous les murs du rez de chaussée sont saturés en humidité. Au regard de l’antériorité du désordre et de son ampleur, il n’est pas excessif de dire que cette inhabitabilité était présente 4 mois plus tôt, soit en juillet 2021, lorsque la locataire a cessé de régler la part de loyer restant à sa charge et a décidé de quitter le logement.

Il s’ensuit que Mme [U] peut valablement opposer à son obligation de paiement l’exception d’inexécution.

Il s’ensuit que la résiliation du contrat de bail sera prononcée exclusivement aux torts du bailleur et que l’appelante peut valablement revendiquer une dispense de loyer à compter du mois de juillet 2021.

Grand Delta Habitat sera débouté en conséquence des demandes tendant au rejet de la dispense de paiement de loyer, en condamnation de l’appelante au loyer courant et à une indemnité d’occupation due à compter de la résiliation du bail.

Le jugement entrepris sera infirmé de ces chefs.

Pour le surplus, la décision déférée sera confirmée en ce qu’elle a ordonné la restitution du dépôt de garantie.

Enfin, Mme [U] réclame une somme de 5000 euros à titre de dommages et intérêts couvrant divers préjudices :moral, jouissance, matériel. Elle se prévaut notamment de la destruction de son mobilier, ainsi que des tracas générés par cette situation.

Le premier juge a accordé à la locataire une somme de 1950 euros qui est suffisante pour indemniser le préjudice subi.

Si la situation a nécessairement causé à Mme [U] de nombreux désagréments depuis le mois de juillet 2018, il s’avère que les atteintes au mobilier ne sont pas démontrées par la seule production de factures, les attestations produites étant quant à elles trop imprécises pour considérer qu’elles établissent le préjudice matériel revendiqué par la locataire.

La décision déférée sera donc confirmée en ce qu’elle a arrêté le préjudice de jouissance à une somme de 1950 euros.

– Sur les demandes accessoires:

Il y lieu de confirmer le jugement déféré concernant les condamnations au titre des dépens et des frais irrépétibles de première instance.

En application de l’article 696 du code de procédure civile, l’intimé, qui succombe, supportera les dépens d’appel et sera condamné à payer la somme de 1.000 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS,

La cour, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant après débats en audience publique par mise à disposition au greffe, par arrêt contradictoire, en matière civile et en dernier ressort,

Prononce la recevabilité de la demande de dispense de paiement du loyer,

Infirme le jugement rendu le 14 juin 2022 par le juge de proximité sauf en ce qu’il a :

– jugé que la société Grand Delta Habitat n’a pas satisfait à son obligation de délivrance et l’a condamné à verser à Mme [Z] [U] la somme de 1.950 euros au titre de son préjudice de jouissance pendant 39 mois;

– jugé que le dépôt de garantie sera restitué à Mme [U] dans les formes et délais prévus à l’article 22 de la loi du 6 juillet 1989 et à l’appui d’un décompte locatif liquidatif;

– condamné la société Grand Delta Habitat aux dépens;

– rejeté la demande de la société Grand Delta Habitat au titre de l’article 700 du code de procédure civile;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Prononce la résiliation du bail signé entre la société Grand Delta Habitat et Mme [Z] [U] le 26 avril 2017, et ce à compter du jugement de première instance, aux torts exclusifs de la société Grand Delta Habitat,

Dispense Mme [Z] [U] du paiement du loyer à compter du mois de juillet 2021,

Déboute les parties du surplus de leurs demandes,

Condamne la société Grand Delta Habitat à payer à la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la société Grand Delta Habitat aux dépens d’appel.

Arrêt signé par la présidente de chambre et par la greffière.

LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,

 


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