Exception d’inexécution : 15 décembre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 23/01479

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Exception d’inexécution : 15 décembre 2023 Cour d’appel de Nîmes RG n° 23/01479

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

ARRÊT N°

N° RG 23/01479 – N° Portalis DBVH-V-B7H-IZSF

CO

JUGE DE L’EXECUTION D’AVIGNON

13 avril 2023 RG :23/00048

S.C.I. LA BARIOTE

C/

S.C.M. SCM CENTRE DE RADIOLOGIE [5]

Grosse délivrée

le 15 DECEMBRE 2023

à Me Philippe PERICCHI

Me Peggy RAYNE

COUR D’APPEL DE NÎMES

CHAMBRE CIVILE

4ème chambre commerciale

ARRÊT DU 15 DECEMBRE 2023

Décision déférée à la Cour : Jugement du Juge de l’exécution d’AVIGNON en date du 13 Avril 2023, N°23/00048

COMPOSITION DE LA COUR LORS DES DÉBATS :

Madame Claire OUGIER, Conseillère, a entendu les plaidoiries en application de l’article 805 du code de procédure civile, sans opposition des avocats, et en a rendu compte à la cour lors de son délibéré.

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre

Madame Claire OUGIER, Conseillère

Madame Agnès VAREILLES, Conseillère

GREFFIER :

Madame Isabelle DELOR, Greffière à la Chambre commerciale, lors des débats et du prononcé de la décision

DÉBATS :

A l’audience publique du 20 Novembre 2023, où l’affaire a été mise en délibéré au 15 Décembre 2023.

Les parties ont été avisées que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe de la cour d’appel.

APPELANTE :

S.C.I. LA BARIOTE société civile immobilière au capital de 1.524,49 euros, inscrite au RCS d’AVIGNON sous le n° D 333 785 707, représentée par son gérant domicilié en cette qualité au siège social sis

[Adresse 1]

[Localité 3]

Représentée par Me Philippe PERICCHI de la SELARL AVOUEPERICCHI, Postulant, avocat au barreau de NIMES

Représentée par Me Nicolas HEQUET, Plaidant, avocat au barreau D’AVIGNON

INTIMÉE :

S.C.M. SCM CENTRE DE RADIOLOGIE [5], Société civile de moyens, au capital social de 13.125,86 euros, immatriculée au RCS d’AVIGNON sous le n° 337 671 275, représentée par ses gérants en exercice domiciliés audit siège ès-qualités

[Adresse 2]

[Localité 4]

Représentée par Me Peggy RAYNE, Plaidant/Postulant, avocat au barreau D’AVIGNON

Affaire fixée en application des dispositions de l’article 905 du code de procédure civile avec ORDONNANCE DE CLÔTURE rendue le 16 Novembre 2023

ARRÊT :

Arrêt contradictoire, prononcé publiquement et signé par Mme Christine CODOL, Présidente de Chambre, le 15 Décembre 2023, par mise à disposition au greffe de la Cour

EXPOSÉ

Vu l’appel interjeté le 28 avril 2023 par la SCI La Bariote à l’encontre du jugement prononcé le 13 avril 2023 par le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Avignon, dans l’instance n°23/00048 ;

Vu l’avis de fixation de l’affaire à bref délai du 9 mai 2023 ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 15 novembre 2023 par l’appelante et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu les dernières conclusions remises par la voie électronique le 13 juin 2023 par la SCM Centre de radiologie [5], intimée, et le bordereau de pièces qui y est annexé ;

Vu l’ordonnance de clôture de la procédure du 9 mai 2023 à effet différé au 16 novembre 2023 ;

***

Par acte du 13 janvier 1986, la SCI La Bariote a donné à bail à Messieurs [Y] [I] et [D] [M], agissant pour la SCM [5], société en constitution, un local à usage commercial sur la commune d'[Localité 4].

Ce bail a été renouvelé le 24 juin 1993 et le 23 septembre 2003 au bénéfice de la SCM Centre de radiologie [5].

Sur l’assignation délivrée au bailleur par cette société pour des désordres affectant l’immeuble, le tribunal de grande instance d’Avignon a, par jugement du 17 mars 2015, signifié le 4 mai 2015 à la SCI La Bariote, notamment,

condamné la SCI La Bariote à effectuer les travaux de réfection préconisés par l’expert pour mettre fin aux désordres d’infiltration qui s’élèvent pour réaliser l’étanchéité des plafonds, murs et sols à la somme de 7.250 euros HT, pour remettre en état les locaux à la somme de 3.810 euros HT et pour reprendre les chutes d’eau à la somme de 1.250 euros HT dans le délai de deux mois de la signification du présent jugement et passé ce délai, sous astreinte de 100 euros par jour de retard,

condamné la SCI La Bariote à payer à la SCM Centre de radiologie [5] la somme de 5.000 euros en remboursement des travaux de réfection qui se sont avérés inutiles du fait des infiltrations.

Sur l’assignation délivrée à la SCI La Bariote par le preneur en liquidation de l’astreinte, motif pris de l’inexécution des travaux, le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Avignon a, par jugement du 8 octobre 2020, signifié à la SCI le 24 novembre 2020,

constaté que la SCI La Bariote justifie d’une cause étrangère dans l’exécution du jugement du 17 mars 2020 au sens de l’article L131-4 du code des procédures civiles d’exécution,

supprimé l’astreinte fixée par le tribunal de grande instance d’Avignon le 17 mars 2015,

débouté la SCM Centre de radiologie [6] de sa demande d’astreinte définitive,

constaté que la SCI La Bariote a signé un devis établi par la société Fernandez le 7 février 2020 pour un montant de 41.285,82 euros,

dit que les travaux correspondant à ce devis établi par la société Fernandez le 7 février 2020 pour un montant de 41.285,82 euros devront être exécutés et que faute d’exécution une astreinte de 50 euros par jour de retard commencera à courir dans le délai de deux mois à compter de la signification de la présente décision,

condamné la SCI La Bariote à payer à la SCM Centre de radiologie [5] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné la SCI La Bariote aux dépens.

Sur l’appel interjeté à l’encontre de cette décision par la SCM Centre de radiologie [5], et par arrêt du 14 avril 2021, signifié le 29 avril 2021 à la SCI La Bariote, la cour d’appel de Nîmes a :

infirmé le jugement déféré en toutes ses dispositions à l’exception de la condamnation de la SCI La Bariote à payer à la SCM Centre de radiologie [5] la somme de 1.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens de première instance,

statuant à nouveau,

dit que la SCI La Bariote n’a pas exécuté l’obligation de faire qui était mise à sa charge par jugement du tribunal de grande instance d’Avignon du 17 mars 2015 qui lui a été signifié le 4 mai 2015,

dit qu’elle ne justifie d’aucune cause étrangère au sens de l’article L131-4 du code des procédures civiles d’exécution,

dit qu’elle ne justifie pas davantage d’un comportement ou de difficultés d’exécution qui permettent de diminuer le montant de l’astreinte provisoire fixée,

en conséquence, liquidé l’astreinte provisoire fixée par le jugement du 17 mars 2015 à la somme de 161.500 euros,

condamné la SCI La Bariote à payer à la SCM Centre de radiologie [5] la somme de 161.500 euros arrêtée au 4 décembre 2019,

assorti désormais d’une nouvelle astreinte provisoire fixée à 100 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, l’obligation de faire prononcée par le jugement du 17 mars 2015,

dit que la SCI La Bariote supportera les dépens d’appel et payera à la SCM Centre de radiologie [5] une somme de 1.500 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure d’appel,

rejeté toutes autres demandes.

Par exploit du 22 décembre 2022, la SCM Centre de radiologie [5] a de nouveau fait assigner la SCI La Bariote devant le juge de l’exécution du tribunal judiciaire d’Avignon en liquidation de l’astreinte et fixation d’une nouvelle astreinte.

Par jugement du 13 avril 2023, le juge de l’exécution a

débouté la SCI La Bariote de sa demande de sursis à statuer,

débouté la SCI La Bariote de sa demande de renvoi de l’examen du dossier à une audience postérieure au 23 août 2023,

liquidé l’astreinte de l’obligation de faire issue du jugement du 17 mars 2015 à 61.200 euros,

condamné en conséquence la SCI La Bariote à payer à la SCM Centre de radiologie [5] la somme de 61.200 euros avec intérêt au taux légal à compter de la décision,

débouté la SCM Centre de radiologie [5] de sa demande de majoration de l’astreinte,

condamné la SCI La Bariote à payer à la SCM Centre de radiologie [5] la somme de 1.800 euros,

condamné la SCI La Bariote aux dépens,

débouté les parties du surplus de leurs demandes.

La SCI La Bariote a interjeté appel de cette décision aux fins de la voir réformer en toutes ses dispositions, à l’exception de celle rejetant la demande de majoration de l’astreinte.

***

Dans ses dernières conclusions, l’appelante demande à la cour, au visa de l’article L131-4 du code des procédures civiles d’exécution, de, la déclarant recevable et bien fondée en son appel, y faisant droit,

infirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions, et en ce qu’il a rejeté dans le même temps les demandes de la SCI La Bariote,

Statuant à nouveau,

surseoir à statuer sur l’ensemble des demandes de la SCM Centre de radiologie [5] jusqu’au 23 aout 2023 afin de vérifier la bonne exécution par la SCI La Bariote des travaux qui seront entrepris par la société […] qu’elle a missionnée,

débouter la SCM Centre de radiologie [5] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

à tout le moins, minorer excessivement la liquidation de l’astreinte provisoire au regard du comportement de celui à qui l’injonction est adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter,

reporter le paiement des sommes qui seraient ainsi dues aux termes de de la demande de liquidation d’astreinte formulée par la SCM Centre de radiologie [5] à au moins douze mois, afin de permettre à la SCI La Bariote de régler en premier lieu le solde des travaux auprès de la société […],

ordonner que chacune des parties à l’instance conserve la charge de ses frais irrépétibles ainsi que de ses dépens, tant au titre de la première instance que de l’appel.

Au soutien de ses prétentions, l’appelante fait valoir que c’est à tort que ses demandes de sursis à statuer et de renvoi ont été rejetées par le premier juge alors qu’après règlement d’un acompte de 25.000 euros sur le devis établi par la société Mutli real, les travaux ordonnés devaient être réalisés prochainement.

Le preneur a multiplié les résistances, refusé que les travaux soient réalisés en dehors de sa période de fermeture annuelle puis empêché l’intervention de la société engagée à cet effet, pour un coût bien plus élevé que celui prévu initialement par l’expert, en ne déplaçant ni ne protégeant pas son matériel médical d’une grande valeur, comme elle avait été requise de le faire, de sorte que les travaux plusieurs fois programmés ne pouvaient encore être exécutés.

En outre, le non paiement des loyers dus depuis des années « assèche » la SCI et entrave la bonne réalisation des travaux, alors même qu’elle fait preuve d’un grande bonne volonté face aux exigences du preneur.

Le jugement déféré doit donc être infirmé, le demande d’astreinte rejetée ou son montant à tout le moins minoré et, en tout état de cause, son paiement différé.

***

Dans ses dernières conclusions, l’intimée demande à la cour, au visa des articles L131-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, de

confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions,

Y ajoutant,

condamner la SCI La Bariote à lui payer la somme de 2.500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile au titre des frais irrépétibles d’appel,

la condamner aux entiers dépens de l’appel,

rejeter toutes demandes, fins et conclusions contraires.

La SCM Centre de radiologie [5] soutient que c’est à raison que les demandes de sursis à statuer et de renvoi ont été rejetées par le premier juge, dès lors que la bonne exécution des travaux est sans influence sur la liquidation de l’astreinte couvrant une période antérieure. Il est demandé paiement de la somme de 61.200 euros, laquelle correspond à l’astreinte ayant couru du 30 juin 2021 au 5 mars 2023.

En outre, l’intimée observe que les travaux doivent être exécutés depuis plus de huit ans selon le jugement du 17 mars 2015 et que dès lors, le coût des travaux nécessaires a logiquement augmenté, le prix des matériaux et de la main d’oeuvre ayant flambé et l’état des locaux s’étant encore dégradé précisément du fait de la carence du bailleur à les effectuer.

Elle produit un constat du 2 mars 2022 démontrant qu’à cette date, aucun des travaux ordonnés n’avait été exécuté, et soutient que cette inertie ne peut s’expliquer par le non paiement des loyers, précisant sur ce point qu’il existe seulement un désaccord, récent, entre les parties sur la révision de loyer opérée, qu’elle s’est acquittée jusqu’en 2020 du paiement dû et s’est ensuite prévalue d’une exception d’inexécution tenant l’impossibilité de jouissance des lieux résultant précisément des désordres auxquels les travaux ordonnés devaient remédier, et qu’en tout état de cause, elle n’a fait l’objet d’aucune mise en demeure et d’aucun commandement de payer de ce chef.

Aucune cause étrangère ne peut justifier que les travaux ordonnés n’aient pas encore été réalisés, d’autant qu’ils sont indispensables à la salubrité des locaux dans lesquels est exploité un centre médical de radiologie.

Ce n’est que deux mois après l’assignation, et de façon tardive, par courrier du 14 février 2023, que l’intimée a été informée de ce qu’un devis avait enfin été accepté par son bailleur et que les travaux allaient débuter, le délai de deux semaines annoncé étant proprement incompatible avec la gestion du centre médical et les rendez-vous déjà programmés, le personnel devant être mis en chômage technique et les machines débranchées et protégées selon un protocole particulier. En tout état de cause c’est une liquidation d’astreinte arrêtée au 5 mars 2023 qui est sollicitée.

***

Pour un plus ample exposé, il convient de se référer à la décision déférée et aux conclusions visées supra.

DISCUSSION

Sur la procédure :

La demande de sursis à statuer « jusqu’au 23 aout 2023 » telle que formulée au dispositif des dernières écritures de l’appelante, comme la demande d’infirmation du jugement déféré en ce qu’il a refusé le renvoi de l’affaire à une audience ultérieure au 23 aout 2023, sont devenues sans objet en l’état d’une audience en instance d’appel qui s’est tenue le 20 novembre 2023, l’affaire ayant alors été mise en délibéré au 15 décembre 2023.

Sur le fond’:

Par arrêt du 14 avril 2021, la cour d’appel de Nîmes a, notamment, assorti d’une nouvelle astreinte provisoire fixée à 100 euros par jour de retard passé le délai de deux mois à compter de la signification du présent arrêt, l’obligation de faire prononcée par le jugement du 17 mars 2015.

Cet arrêt a été signifié le 29 avril 2021 à la SCI La Bariote.

Celle-ci disposait donc d’un nouveau délai courant jusqu’au 29 juin 2021 pour satisfaire à l’obligation mise à sa charge par le jugement du 17 mars 2015.

La SCM Centre de radiologie demande liquidation de l’astreinte fixée par cet arrêt du 14 avril 2021, sur la période courant après cette échéance du 29 juin 2021 et jusqu’au 5 mars 2023 uniquement.

Il n’est pas contesté par l’appelante qu’elle n’avait pas, au 5 mars 2023 encore, exécuté les travaux ordonnés et assortis de l’astreinte. Les échanges produits au débats et afférents aux vicissitudes qui ont encore affecté l’exécution des travaux ultérieurement, le démontrent également, étant même précisé qu’il n’est pas établi qu’à ce jour, lesdits travaux aient finalement été exécutés.

La SCI La Bariote se prévaut en revanche des dispositions de l’article L131-4 du code des procédures civiles d’exécution selon lesquelles « le montant de l’astreinte provisoire est liquidé en tenant compte du comportement de celui à qui l’injonction a été adressée et des difficultés qu’il a rencontrées pour l’exécuter. (…) L’astreinte provisoire ou définitive est supprimée en tout ou partie s’il est établi que l’inexécution ou le retard dans l’exécution de l’injonction du juge provient, en tout ou partie, d’une cause étrangère ».

Doivent donc être examinés le comportement de la SCI La Bariote, les difficultés qu’elle aurait rencontrées pour s’exécuter, et l’existence d’une cause étrangère ayant pu faire obstacle ou retarder cette exécution sur cette période du 30 avril 2021 au 6 mars 2023.

L’arrêt fixant la nouvelle astreinte, rendu par la cour d’appel de Nîmes le 14 avril 2021, est signifié à la SCI La Bariote le 29 avril 2021.

Alors que lui a été astreint un délai de deux mois pour s’exécuter à compter de cette date, la SCI se manifeste pour la première fois auprès de son preneur, postérieurement à cette décision, le 1er décembre 2022.

Dans ce courrier produit en pièce 26 par l’intimée, le bailleur l’informe que « en vue de faire réaliser les travaux conformément aux décisions de justice, (il) se rendra pour visite, avec des entrepreneurs, dans le local le 7 décembre 2022 ».

Il n’est alors pas justifié du silence et de la carence qui ont précédé ce courrier pendant près de 18 mois, et il n’est encore livré aucune explication à ce sujet dans les dernières écritures de l’appelante, sinon par une référence à l’âge de son dirigeant qui n’est pas utile.

Cette visite organisée le 7 décembre 2022 est confirmée dans l’échange entre les conseils des parties (pièce 10 de l’appelante).

La SCI La Bariote justifie de ce qu’un devis n°122640 est établi le 13 janvier 2023 par la société […] suite à cette visite, et de ce qu’elle le signe et verse un acompte de 25.000 euros le 19 janvier 2023 (pièces 11, 12, 13 et 13bis de l’appelante).

Le 19 janvier 2023, l’entreprise mandatée lui propose un calendrier fixant le début des travaux au 6 mars 2023, calendrier qu’elle accepte le jour même -sans pour autant qu’elle justifie s’être rapprochée de son preneur à ce sujet (pièce 14 de l’appelante).

Et c’est seulement par courrier daté du 14 février 2023 mais transmis par voie électronique le 17 février 2023, la SCI La Bariote informe son preneur de la signature de ce devis et de ce que les travaux doivent commencer au 6 mars 2023.

Toutes les difficultés dont fait état le bailleur dans ses écritures quant à la définition d’une date qui convienne à tous, quant au report des travaux et quant aux objections soulevées par le preneur, sont ultérieures à la date du 6 mars 2023 et ne peuvent donc être prises en compte pour la liquidation de l’astreinte demandée.

Ainsi, entre le 29 avril 2021, date de signification de l’arrêt du 14 avril 2021, et le 6 mars 2023 où les travaux devaient être effectivement réalisés, la SCI La Bariote n’a réellement accompli des démarches qu’en décembre 2022 et janvier 2023, sans que soit seulement invoquée une raison à ce retard. Et le temps pris par l’entrepreneur […] pour établir son devis le 13 janvier 2023 suite aux visites de décembre 2022, puis pour programmer le début des travaux au 6 mars 2023 sur un acompte versé le 19 janvier 2023, ne peut être retenu comme constituant une cause étrangère dès lors qu’il ne résulte que du retard mis par l’appelante à se soucier de l’exécution effective des travaux mis à sa charge par le jugement du 17 mars 2015.

Enfin, le non-paiement des loyers par la SCM intimée n’est pas de nature à justifier la non-exécution desdits travaux, étant observé que ce preneur se prévaut bien au contraire d’une exception d’inexécution à cet égard tenant l’insalubrité des locaux loués (pièce 28 de l’intimée).

C’est donc à bon droit que le premier juge a procédé à la liquidation de l’astreinte sur toute la période du 30 juin 2021 au 5 mars 2023.

Selon l’article 1er du Protocole n° 1 à la Convention de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, toute personne physique a droit au respect de ses biens.

Il a été retenu par la Cour de cassation que «’l’astreinte, en ce qu’elle impose, au stade de sa liquidation, une condamnation pécuniaire au débiteur de l’obligation, est de nature à porter atteinte à un intérêt substantiel de celui-ci, de sorte qu’elle entre dans le champ d’application de la protection des biens garantie par ce protocole’».

Il appartient donc au juge saisi, non seulement de prendre en compte le comportement du débiteur de l’obligation et les difficultés auxquelles il s’est heurté pour l’exécuter, mais aussi «’d’apprécier le caractère proportionné de l’atteinte que (l’astreinte) porte au droit de propriété du débiteur au regard du but légitime qu’elle poursuit’» et de s’assurer que le montant de l’astreinte liquidée est raisonnablement proportionné à l’enjeu du litige -la situation financière du débiteur y étant en revanche indifférente. (Civ 2è 20 janvier 2022 n°20-15.261 et 19-22.435).

En l’espèce, les obligations imparties sous astreinte à la SCI La Bariote par jugement du 17 mars 2015 avaient pour objet de permettre la jouissance du local commercial loué et l’exploitation de ce local pour l’activité de centre de radiologie du preneur, ce qu’empêchait l’état des lieux tels qu’apprécié par un expert judiciaire et tel que retenu par le tribunal.

Depuis lors, sur la période considérée, et malgré une première liquidation d’astreinte par arrêt du 14 avril 2021, le bailleur n’a toujours pas fait les diligences qui lui incombaient pour remettre en état ses locaux et satisfaire à l’obligation mise à sa charge par décision judiciaire.

La liquidation de l’astreinte au montant fixé par le premier juge, qui ne tient qu’à la seule mauvaise volonté -persistante- de l’appelante de respecter les obligations imparties dans les délais fixés, comporte ainsi un rapport très raisonnable de proportionnalité avec l’enjeu du litige qui était précisément d’astreindre l’appelante au respect de ses obligations de bailleur et de permettre au preneur d’exercer son activité dans des locaux qui ne sont pas insalubres.

S’agissant encore de la demande en report du paiement de l’astreinte liquidée, elle ne peut qu’être rejetée tenant, d’une part, le fait que la SCI LA Bariote a eu le temps depuis 2015 de provisionner les sommes utiles pour les travaux mis à sa charge, quand bien même elles auraient augmenté entretemps compte tenu de sa longue carence, et, d’autre part, l’absence de tout justificatif comptable permettant d’éclairer la cour sur sa situation financière.

Le jugement est confirmé en toutes ses dispositions.

Sur les frais de l’instance’:

L’appelante, qui succombe, devra supporter les dépens de l’instance et payer à l’intimée une somme équitablement arbitrée à 2.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS’:

La Cour, statuant par arrêt contradictoire et en dernier ressort,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Dit que la SCI La Bariote supportera les dépens d’appel et payera à la SCM Centre de radiologie [5] une somme de 2.000 euros par application de l’article 700 du code de procédure civile.

Arrêt signé par la présidente et par la greffiere.

LA GREFFIÈRE, LA PRÉSIDENTE,

 


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