Examen des obligations de vérification de solvabilité et des conséquences en matière de droit aux intérêts dans le cadre d’un contrat de crédit.

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Examen des obligations de vérification de solvabilité et des conséquences en matière de droit aux intérêts dans le cadre d’un contrat de crédit.

La société BNP Paribas Personal Finance a accordé un crédit personnel de 19 900 euros à M. [Z] en mars 2017, remboursable en 72 mensualités. Suite à des impayés, la société a demandé la déchéance du terme et a assigné M. [Z] en justice. Le tribunal a condamné M. [Z] à payer 3 448,13 euros, mais a également prononcé une déchéance du droit aux intérêts contractuels, en raison d’un manque de vérification de la solvabilité de l’emprunteur. BNP Paribas a interjeté appel, demandant l’infirmation du jugement et la reconnaissance de la validité de l’offre de prêt. M. [Z] n’a pas constitué d’avocat pour sa défense. La cour d’appel a infirmé le jugement initial, a déclaré qu’il n’y avait pas lieu à déchéance des intérêts contractuels, et a condamné M. [Z] à payer 8 677,94 euros plus intérêts, tout en laissant les dépens à la charge de BNP Paribas.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 octobre 2024
Cour d’appel de Paris
RG
23/03960
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2024

(n° , 6 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/03960 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHGHD

Décision déférée à la Cour : Jugement du 13 décembre 2022 – Juge des contentieux de la protection de BOBIGNY – RG n° 22/01424

APPELANTE

La société BNP PARIBAS PERSONAL FINANCE, société anonyme agissant poursuites et diligences de son représentant légal, domicilié ès-qualités audit siège

N° SIRET : 542 097 902 04319

[Adresse 1]

[Localité 4]

représentée et assistée de Me Coralie-Alexandra GOUTAIL de l’EURL Goutail Avocat, avocat au barreau de PARIS, toque : A0201

INTIMÉ

Monsieur [P] [S] [Z]

né le [Date naissance 2] 1974 à [Localité 6] (COMORES)

[Adresse 3]

[Localité 5]

DÉFAILLANT

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– DÉFAUT

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 28 mars 2017, la société BNP Paribas Personal Finance a consenti à M. [P] [S] [Z] un crédit personnel d’un montant en capital de 19 900 euros remboursable en 72 mensualités de 328,30 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 5,84 %, le TAEG s’élevant à 6 %, soit une mensualité avec assurance de 348,88 euros.

Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société BNP Paribas Personal Finance a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte du 13 décembre 2022, la société BNP Paribas Personal Finance a fait assigner M. [Z] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Bobigny en paiement du solde du prêt lequel, par jugement réputé contradictoire du 13 décembre 2022, a déclaré la société BNP Paribas Personal Finance recevable en son action et l’a condamnée au paiement de la somme de 3 448,13 euros avec intérêts au taux légal non majorés à compter du 13 juillet 2022 et aux dépens.

Après avoir contrôlé la recevabilité de la demande au regard de la forclusion, il a retenu une déchéance du droit aux intérêts contractuels au motif que la solvabilité de l’emprunteur n’avait pas été suffisamment vérifiée, la banque ne produisant pas de pièces justificatives des charges de l’emprunteur.

Il a déduit les sommes versées soit 16 451,87 euros du capital emprunté et a relevé que pour assurer l’effectivité de la sanction il fallait écarter l’application des dispositions relatives à la majoration de plein droit du taux légal de 5 points.

Par déclaration réalisée par voie électronique le 22 février 2023, la société BNP Personal Finance a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 17 avril 2023, la société BNP Paribas Personal Finance demande à la cour :

– d’infirmer le jugement sauf en ce qu’il l’a déclaré recevable,

– de la déclarer recevable en son action,

– de dire et juger que l’offre de prêt est valide et régulière,

– de constater que la déchéance du terme a été prononcée,

– subsidiairement de dire et juger qu’en l’absence de régularisation des échéances impayées, il y a lieu de prononcer la déchéance du terme du contrat objet de la présente,

– encore plus subsidiairement, de dire et juger qu’il a été commis une faute dans la cessation du règlement des échéances du et de prononcer la résiliation judiciaire de l’offre de prêt,

– de dire et juger qu’elle justifie de la recevabilité, du bien fondé et de l’étendue de ses demandes,

– en conséquence de condamner M. [Z] à lui payer la somme de 9 081,27 euros avec intérêts au taux contractuel de 6 % l’an à compter du 13 juillet 2022,

– de condamner M. [Z] à lui payer la somme de 1 500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens avec distraction au profit de Me Coralie Goutail en application de l’article 699 du code de procédure civile.

Elle fait valoir qu’elle est recevable, le premier impayé non régularisé datant du 25 avril 2021.

Elle indique produire toutes les pièces propres à justifier de la régularité du contrat et du bien-fondé de la demande et relève qu’elle produit notamment la fiche de dialogue qui mentionne les revenus et charges et les bulletins de salaire qu’il avait remis ainsi que les pièces qu’elle doit conserver. Elle considère que le tribunal est allé au-delà des exigences du texte et qu’aucune déchéance du droit aux intérêts contractuels n’est encourue.

Aucun avocat ne s’est constitué pour M. [Z] à qui la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiées par acte du 18 avril 2023 délivré à étude.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience le 25 juin 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte de l’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 28 mars 2017 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur la forclusion

La recevabilité de l’action de la société BNP Paribas Personal Finance au regard de la forclusion, vérifiée par le premier juge, n’est pas remise en cause à hauteur d’appel. Le jugement doit être confirmé sur ce point.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

La vérification de la solvabilité

L’article L. 312-16 du code de la consommation impose au prêteur avant de conclure le contrat de crédit, de vérifier la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations y compris des informations fournies par ce dernier à la demande prêteur et de consulter le fichier prévu à l’article L. 751-1, dans les conditions prévues par l’arrêté mentionné à l’article L. 751-6.

Si le contrat n’a pas été conclu en agence, l’article L. 312-17du même code prévoit une vérification de la solvabilité de l’emprunteur renforcée, le prêteur ou son intermédiaire devant fournir à l’emprunteur une fiche d’informations distincte de la fiche mentionnée à l’article L. 312-12, laquelle doit être conservée par le prêteur pendant toute la durée du prêt et comporter notamment les éléments relatifs aux ressources et charges de l’emprunteur ainsi que, le cas échéant, aux prêts en cours contractés par ce dernier, être signée ou son contenu confirmé par voie électronique par l’emprunteur et faire l’objet d’une déclaration certifiant sur l’honneur son exactitude. De plus lorsque le crédit porte sur un montant supérieur à 3 000 euros, cette fiche doit être corroborée par des pièces justificatives à jour au moment de l’établissement de la fiche d’information, dont la liste, définie par décret est la suivante :

1° Tout justificatif du domicile de l’emprunteur ; et

2° Tout justificatif du revenu de l’emprunteur ; et

3° Tout justificatif de l’identité de l’emprunteur.

Il résulte des articles L. 341-2 et L. 341-3 que lorsque le prêteur n’a pas respecté les obligations fixées aux articles L. 312-16 et L. 312-17, il est déchu du droit aux intérêts, en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

Le contrat a été conclu à distance et la société BNP Paribas Personal Finance produit la fiche de renseignements signée par M. [Z] qui mentionne ses revenus et le montant de son loyer ainsi que la copie de ses bulletins de salaire des mois de janvier et février 2017 qui corroborent ce montant, un justificatif de domicile (plan de paiement Engie) et la copie de son titre de séjour.

Elle démontre également avoir consulté le FICP avant la date de déblocage des fonds et produit le résultat de cette consultation.

Elle justifie donc du respect de ces textes et aucune déchéance du droit aux intérêts n’est donc encourue pour ce motif.

Les autres pièces

La société BNP Paribas Personal Finance produit en sus :

– le contrat de prêt qui comprend un bordereau de rétractation,

– la fiche d’informations précontractuelles européennes normalisées signée,

– la fiche explicative signée,

– la fiche conseil en assurance signée,

– la notice d’assurance.

Aucune déchéance du droit aux intérêts contractuels n’est donc encourue et le jugement doit donc être infirmé.

Sur le montant des sommes dues

En application de l’article L. 312-39 du code de la consommation en cas de défaillance de l’emprunteur, le prêteur peut exiger le remboursement immédiat du capital restant dû, majoré des intérêts échus mais non payés. Jusqu’à la date du règlement effectif, les sommes restant dues produisent les intérêts de retard à un taux égal à celui du prêt. En outre, le prêteur peut demander à l’emprunteur défaillant une indemnité qui, dépendant de la durée restant à courir du contrat et sans préjudice de l’application de l’article 1231-5 du code civil, est fixée suivant un barème déterminé par décret.

L’article D. 312-16 du même code dispose que le prêteur peut demander une indemnité égale à 8 % du capital restant dû à la date de défaillance. Aucune autre pénalité notamment de retard ne peut être exigée par le prêteur.

La société BNP Paribas Personal Finance produit en sus de l’offre de contrat de crédit qui comporte une clause de déchéance du terme, l’historique de prêt, le tableau d’amortissement, la mise en demeure avant déchéance du terme du 27 juin 2022 enjoignant à M. [Z] de régler l’arriéré de 3 636,20 euros sous 8 jours à peine de déchéance du terme. M. [Z] ne s’est pas acquitté des sommes dues.

Il en résulte que la société BNP Paribas Personal Finance se prévaut de manière légitime de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues et qu’elle est fondée à obtenir paiement des sommes dues soit :

– 3 636,20 euros au titre des échéances impayées assurance comprise

– 5 041,74 euros au titre du capital restant dû

soit un total de 8 677,94 euros majorée des intérêts au taux de 5,84 % à compter du 13 juillet 2022 date de l’assignation comme demandé.

Elle est en outre fondée à obtenir une indemnité de résiliation de 8 % laquelle, sollicitée à hauteur de 403,33 euros, apparaît excessive au regard du taux d’intérêts et du préjudice subi et doit être réduite à la somme de 50 euros et produire intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2022.

La cour condamne donc M. [Z] à payer ces sommes à la société BNP Personal Finance.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement doit être confirmé en ce qu’il a condamné M. [Z] aux dépens de première instance et a rejeté la demande de la société BNP Personal Finance sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

En revanche rien ne justifie de le condamner aux dépens d’appel, alors que n’ayant jamais comparu ni été représenté, il n’a jamais fait valoir aucun moyen ayant pu conduire le premier juge à statuer comme il l’a fait. La société BNP Personal Finance conservera donc la charge de ses dépens d’appel et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Infirme le jugement sauf en ce qu’il a déclaré la demande de la société BNP Personal Finance recevable, a condamné M. [P] [S] [Z] aux dépens et a rejeté la demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Dit n’y avoir lieu à déchéance du droit aux intérêts contractuels ;

Condamne M. M. [P] [S] [Z] à payer à la société BNP Personal Finance les sommes de 8 677,94 euros majorée des intérêts au taux de 5,84 % à compter du 13 juillet 2022 au titre du solde du prêt et de 50 euros majorée des intérêts au taux légal à compter du 13 juillet 2022 au titre de l’indemnité légale de résiliation ;

Laisse les dépens d’appel à la charge de la société BNP Personal Finance ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


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