Le 2 février 2017, la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine a ouvert un compte de dépôt pour Mme [O]. Ce compte est devenu débiteur après que plusieurs chèques émis par Mme [F] [D] et Mme [O] ont été rejetés. Le 25 juillet 2018, la banque a mis Mme [O] en demeure de régulariser un solde débiteur de 5 018,30 euros. Le 8 août 2018, la banque a déposé une plainte pour remises frauduleuses de chèques et a assigné Mme [O] en paiement le 24 février 2019. Le tribunal d’instance d’Angers a rouvert les débats le 3 mai 2019 pour examiner la validité du contrat d’autorisation de découvert et d’autres documents. Par un jugement du 26 juillet 2019, le tribunal a rejeté les demandes de la banque et a condamné celle-ci aux dépens. La banque a interjeté appel le 23 août 2019. Mme [O] n’ayant pas constitué avocat, la banque a procédé à une assignation. Le 6 mai 2024, l’ordonnance de clôture a été rendue. La Caisse de crédit agricole a demandé à la cour d’infirmer le jugement et de condamner Mme [O] à verser 5 190,26 euros, ainsi que 2 000 euros au titre des frais. L’arrêt a été rendu par défaut, condamnant Mme [O] à verser 5 186,44 euros avec intérêts et 2 000 euros pour les frais, ainsi qu’aux dépens.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
D’ANGERS
CHAMBRE A – COMMERCIALE
JC/CG
ARRET N°:
AFFAIRE N° RG 19/01719 – N° Portalis DBVP-V-B7D-ER2V
jugement du 26 Juillet 2019
Tribunal d’Instance d’ANGERS
n° d’inscription au RG de première instance
ARRET DU 10 SEPTEMBRE 2024
APPELANTE :
CRCAM DE L’ANJOU ET DU MAINE
[Adresse 5]
[Localité 4]
Représentée par Me Etienne DE MASCUREAU de la SCP ACR AVOCATS, avocat au barreau d’ANGERS, substitué à l’audience par Me Audrey PAPIN
INTIMEE :
Madame [R] [O]
née le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 7] (76)
[Adresse 3]
[Localité 2]
N’ayant pas constitué avocat
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue publiquement à l’audience du 21 Mai 2024 à 14H00, Me Audrey PAPIN, avocat, ne s’y étant pas opposée, devant Mme CORBEL, Présidente de chambre et devant M. CHAPPERT, conseiller qui a été préalablement entendu en son rapport.
Ces magistrat ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme CORBEL, présidente de chambre
M. CHAPPERT, conseiller
Mme GANDAIS, conseillère
Greffière lors des débats : Mme TAILLEBOIS
ARRET : arrêt par défaut
Prononcé publiquement le 10 septembre 2024 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions de l’article 450 du code de procédure civile ;
Signé par Catherine CORBEL, présidente de chambre et par Sophie TAILLEBOIS, greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS ET PROCÉDURE :
Le 2 février 2017, la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine a consenti à Mme [R] [O] l’ouverture dans ses livres d’un compte de dépôt n° [XXXXXXXXXX06].
Le solde du compte de dépôt est passé en position débitrice après que plusieurs chèques émis par Mme [F] [D] et par Mme [O] elle-même ont été portés à l’encaissement mais sont revenus impayés.
Par une lettre recommandée avec demande d’avis de réception du 25 juillet 2018, la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine a mis Mme [O] en demeure de régulariser ce solde débiteur d’un montant de 5 018,30 euros.
Le 8 août 2018, la banque a déposé une plainte à l’encontre de Mme [O] pour des faits de remises frauduleuses de chèques.
Elle a finalement fait assigner Mme [O] en paiement devant le tribunal d’instance d’Angers par un acte d’huissier du 24 février 2019.
Le 3 mai 2019, le tribunal d’instance a rouvert les débats pour demander à la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine de s’expliquer sur la validité l’existence du contrat d’autorisation de découvert et d’apporter toutes pièces justifiant de l’existence du contrat, de s’expliquer sur la délivrance de la Fiche d’information pré-contractuelle européenne normalisée (Fipen) et sur la consultation du Fichier des incidents de remboursement des crédits aux particuliers (Ficp), ainsi que de produire un décompte détaillé des sommes dues expurgées des intérêts et des frais.
Par un jugement du 26 juillet 2019, le tribunal d’instance a :
– rejeté l’ensemble des demandes en paiement de la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine,
– rejeté la demande formée par la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamné la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine aux dépens,
– dit ne pas y avoir lieu à exécution provisoire,
Par une déclaration du 23 août 2019, la Caisse Régionale de Crédit Agricole mutuel de l’Anjou et du Maine a interjeté appel de ce jugement, l’attaquant en toutes ses dispositions et intimant Mme [O].
Mme [O] n’ayant pas constitué avocat, la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine l’a fait assigner et lui a fait signifer ses conclusions par un acte d’huissier du 9 décembre 2019, délivré dans les conditions de l’article 659 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 6 mai 2024.
MOYENS ET PRETENTIONS DES PARTIES :
Par des dernières conclusions remises au greffe par la voie électronique le 22 novembre 2019, auxquelles il est renvoyé pour un exposé des moyens, la Caisse Régionale de Crédit Agricole mutuel de l’Anjou et du Maine demande à la cour :
– de la recevoir en son appel, ainsi qu’en ses demandes, fins et conclusions,
y faisant droit,
– d’infirmer le jugement,
– de condamner Mme [O] à lui verser la somme de 5 190,26 euros au titre du solde débiteur de son compte n° [XXXXXXXXXX06], avec les intérêts au taux légal sur la somme de 5 186,44 euros à compter du 14 septembre 2018,
– de rejeter toutes prétentions contraires comme non recevables, en tout cas non fondées,
– de la condamner également lui verser la somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les dépens de première instance et d’appel, lesquels seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
L’assignation n’ayant pas été délivrée à la personne de Mme [O], le présent arrêt sera rendu par défaut conformément à ce que prévoit l’article 473, alinéa 1, du code de procédure civile.
Mme [O] n’ayant pas constitué avocat et étant, comme telle, défaillante devant la cour, l’article 472, alinéa 2, du code de procédure civile prévoit qu’il ne peut être fait droit à la demande que dans la mesure où la cour l’estime régulière, recevable et bien fondée, tandis qu’il ressort de l’article 954, alinéa 5, du même code, que l’intimée est réputée s’approprier les motifs du jugement.
– sur la demande de condamnation au paiement :
Le tribunal d’instance a considéré que, malgré la réouverture des débats à cette fin, la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine ne rapportait pas la preuve de la réalité du contrat d’autorisation de découvert qu’elle prétendait avoir consenti à Mme [O]. Il a notamment relevé que l’offre préalable d’autorisation de découvert en compte de dépôt remboursable dans un délai égal ou supérieur à un mois et inférieure à trois mois produite par la banque n’était pas suffisante, puisque non signée par aucune des parties.
La Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine reproche au premier juge d’avoir ainsi statué alors qu’elle estime lui avoir fourni les éléments suffisants pour établir la réalité de l’autorisation de découvert consentie à Mme [O], que celle-ci ne contestait d’ailleurs ni dans son principe ni dans son montant. Elle ajoute produire, en cause d’appel, les exemplaires signés des conditions générales du compte, l’offre de contrat de crédit à la consommation portant autorisation de découvert acceptée le 23 août 2017 ainsi que la fiche de conseil en assurance. Elle explique que l’autorisation de découvert de 100 euros a été dépassée dès juin 2018, Mme [O] s’étant livrée à des actes de cavalerie bancaire avec la complicité de Mme [D], et qu’elle en a alerté sa cliente dès le 15 juin 2018. Elle précise que Mme [D] a, de son côté, été condamnée au paiement du découvert de son propre compte de dépôt par le tribunal d’instance de Saumur, le 24 avril 2019.
Sur ce,
L’article 1353 du code civil impose à la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine de rapporter la preuve de l’existence de l’obligation qui motive sa demande de condamnation au paiement et, réciproquement, à Mme [O] de rapporter la preuve de l’extinction de cette obligation.
La Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine produit bien en l’espèce la copie de l’ouverture en ses livres du compte n° [XXXXXXXXXX06], au nom de Mme [O], qui a signé manuscritement les conditions particulières le 2 février 2017. Ces conditions particulières ne contiennent pas elles-memes d’autorisation de découvert mais renvoient à la possibilité d’une telle autorisation de découvert de moins de trois mois par un contrat distinct et signé par le client (article 2).
L’appelante prétend rapporter la preuve de la signature d’une telle autorisation de découvert consentie à Mme [O] et c’est sur ce point très précisément qu’elle a été déboutée de ses demandes en première instance. A cette fin, la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine produit une ‘offre de contrat de crédit à la consommation – autorisation de découvert au compte de dépôt remboursable dans un délai égal ou supérieur à un mois et inférieur à trois mois’, ainsi que des documents intitulés ‘conditions générales du compte à composer’, ‘fiche de dialogue’ et ‘fiche conseil fournie en application des articles L. 520-1, R. 520-1 et R. 520-2 du code des assurance’. Alors que le premier juge avait retenu que l’offre de crédit par autorisation de découvert en compte était dépourvue de toute signature dans l’encart prévu à cet effet, l’exemplaire produit à la cour comporte bien une signature. Cette signature se compose plus exactement, d’une part, d’une reproduction numérisée de la signature manuscrite de Mme [O] et, d’autre part, de la mention :
‘signé électroniquement par : [O] [R]
Référence : H0CSDEC1-00000879-00000100239424-20170823174448-8DP5BAFXC22HPW41
Date : 23/08/2017
17:45:05 (UTC+02)
Motif : acceptation des conditions’
les documents ‘Le Compte à Composer – Convention de services du Crédit Agricole’, ‘Fiche de dialogue’ et ‘Fiche conseils fournie en application des articles L. 520-1, R. 520-1 et R. 520-2 du code des assurances’ étant tous signés selon le même procédé, seuls changeant les références de l’opération de signature électronique et l’heure des signatures (toutes recueillies dans un laps de temps compris en 17:44:37 et 17:46:20).
La cour, qui n’est saisie d’aucune dénégation de signature, constate ainsi que la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine produit désormais la copie de l’offre de crédit par découvert en compte de dépôt signée par Mme [O].
Il est observé que, bien que l’offre soit intitulée ‘offre de contrat de crédit à la consommation – autorisation de découvert au compte de dépôt remboursable dans un délai égal ou supérieur à un mois et inférieur à trois mois’, ce qui a motivé la banque à respecter les obligations informatives de l’article L. 312-84 du code de la consommation, l’objet du contrat porte sur un découvert de 100 euros et d’une durée maximum de 30 jours consécutifs qui le ferait donc normalement échapper au régime protecteur défini au chapitre II du Titre I du Livre III du code de la consommation par l’effet de l’article L. 312-4 (3°) et (4°) de ce même code.
La Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine produit l’intégralité des extraits du compte n° [XXXXXXXXXX06] depuis son ouverture (2 février 2017). Ces derniers révèlent que le compte a fonctionné normalement jusqu’au 23 mai 2018. Les positions débitrices, qui ont épisodiquement pu dépasser le découvert autorisé, ont toutes été régularisées par un retour du solde en position créditrice avant même l’expiration du délai de 30 jours consécutifs.
A compter du 23 mai 2018, des encaissements de chèques revenus impayés et contrepassés ont eu pour effet de porter le solde en position débitrice, au-delà du montant du découvert convenu (100 euros), sans plus aucune régularisation après le 20 juin 2018.
La Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine jutifie qu’elle a informé Mme [O] par une lettre du 20 juillet 2018, soit exactement un mois après le début du dépassement, du montant de ce dépassement, du taux débiteur ainsi que des frais susceptibles d’être prélevés sur son compte pour toute opération de débit par chèque, par carte, par virement ou par prélèvement, se conformant ainsi aux dispositions de l’article L. 312-92 du code de la consommation.
Mais il lui appartenait également, à l’issue d’un délai de trois mois, soit de soumettre à Mme [O] une offre de crédit sous la forme d’une autorisation de découvert supérieure à trois mois pour se conformer à l’article L. 312-84, alinéa 2, du code de la consommation, soit de procéder à la résiliation de la convention de compte de dépôt dans les conditions de l’article L. 312-1-1 V du code monétaire et financier.
C’est ce à quoi la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine a procédé par la lettre recommandée avec demande d’avis de réception datée du 25 juillet 2018 et distribuée le 30 juillet 2018, dans laquelle elle a mis Mme [O] en demeure de lui régler la somme de 5 018,30 euros au titre du solde débiteur de son compte de dépôt n° [XXXXXXXXXX06] dans un délai de quinze jours suivant la réception et en lui indiquant qu »à défaut de règlement des sommes indiquées ci-dessus dans le délai imparti, nous entreprendrons alors le recouvrement de nos créances par voie judiciaire’. Nonobstant les termes de cette lettre, la résiliation de la convention de compte de dépôt est donc intervenue le 30 septembre 2018, à l’expiration du délai de préavis de deux mois légalement prévu par l’article L. 312-1-1 V précité et le solde est donc devenu exigible à cette date.
L’appelante produit enfin un premier décompte arrêté au 13 septembre 2018 ainsi qu’un second décompte arrêté au 6 mai 2019, expurgé des frais et pour satisfaire à la demande qui lui avait faite par le premier juge. Le recoupement de ces deux décomptes amène à condamner Mme [O] à verser à la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine la somme de 5 186,44 euros, correspondant au montant du solde débiteur à la date de la clôture du compte, avec les intérêts au taux légal (tels que sollicités par la banque) à compter du 30 septembre 2018, date de l’exigibilité de la créance. Le jugement sera en conséquence infirmé en ce qu’il a rejeté cette demande de condamnation au paiement.
– sur les demandes accessoires :
Le jugement est également infirmé dans ses dispositions ayant statué sur les frais et les dépens de première instance.
Mme [O], partie perdante, sera condamnée aux dépens de première instance comme d’appel, qui pourront être recouvrés directement conformément dispositions de l’article 699 du code de procédure civile, ainsi qu’à verser à la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine une somme totale de 2 000 euros recouvrant les frais irrépétibles exposés en première instance et en appel.
La cour statuant publiquement, par arrêt rendu par défaut, et par mise à disposition au greffe,
Infirme le jugement entrepris en toutes ses dispositions ;
statuant à nouveau et y ajoutant,
Condamne Mme [O] à verser à la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou
et du Maine la somme de 5 186,44 euros au titre du solde débiteur de son
compte de dépôt n° [XXXXXXXXXX06], avec les intérêts au taux légal à compter du 30 septembre 2018 ;
Condamne Mme [O] à verser à la Caisse de crédit agricole mutuel de l’Anjou et du Maine une somme totale de 2 000 euros au titre des frais irrépétibles exposés en première instance et en appel ;
Condamne Mme [O] aux dépens de première instance et d’appel, qui pourront être recouvrés directement dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.
LA GREFFIERE, LA PRESIDENTE,
S. TAILLEBOIS C. CORBEL