Examen des conséquences excessives d’une exécution dans un contexte de difficultés financières et de santé.

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Examen des conséquences excessives d’une exécution dans un contexte de difficultés financières et de santé.

La Banque Populaire Méditerranée a été déboutée de sa demande de radiation du rôle de l’affaire. Le conseiller de la mise en état a décidé qu’il n’y avait pas lieu à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, mais a condamné la banque au paiement des dépens de l’incident, qui seront recouvrés selon les dispositions relatives à l’aide juridictionnelle. Une somme de 1.500 euros a été accordée sur le fondement de l’article 700.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

17 octobre 2024
Cour d’appel d’Aix-en-Provence
RG
23/14262
COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE

[Adresse 2]

[Localité 1]

Chambre 3-3

N° RG 23/14262 – N° Portalis DBVB-V-B7H-BMFOU

Ordonnance n° 2024/M219

Madame [H] [R]

(bénéficie d’une aide juridictionnelle Partielle numéro 2024-003139 du 04/04/2024 accordée par le bureau d’aide juridictionnelle de AIX-EN-PROVENCE)

représentée et assistée de Me Laura QUILLIEN, avocat au barreau D’AIX-EN-PROVENCE

Appelante et défenderesse à l’incident

BANQUE POPULAIRE MEDITERRANEE, prise en la personne de son directeur général

représentée et assistée de Me Hubert ROUSSEL de l’ASSOCIATION ROUSSEL-CABAYE & ASSOCIES, avocat au barreau de MARSEILLE substitué par Me Lucie AURAND, avocat au barreau de MARSEILLE

Intimée et demanderesse à l’incident

ORDONNANCE D’INCIDENT

du 17 octobre 2024

Nous, Françoise PETEL, magistrat de la mise en état de la Chambre 3-3 de la cour d’appel d’Aix-en-Provence, assistée de Laure METGE, greffier ;

Après débats à l’audience du 18 Septembre 2024, ayant indiqué à cette occasion aux parties que l’incident était mis en délibéré, avons rendu le 17 octobre 2024, l’ordonnance suivante :

Par jugement réputé contradictoire du 16 octobre 2023, le tribunal de commerce d’Aix-en-Provence a :

– condamné Mme [H] [R] à payer à la Banque Populaire Méditerranée les sommes de :

– 5.798,17 euros, au titre du solde débiteur du prêt de 20.000 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 5,26 % l’an depuis l’arrêté de compte du 12 avril 2023,

– 11.475,55 euros, au titre du solde débiteur du prêt de 22.500 euros, outre intérêts au taux conventionnel de 4,45 % l’an depuis l’arrêté de compte du 12 avril 2023,

– ordonné la capitalisation des intérêts dans les termes et selon les modalités de l’article 1343-2 du code civil,

– condamné Mme [H] [R] à payer à la Banque Populaire Méditerranée la somme de 1.000 euros à titre d’indemnité sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné Mme [H] [R] aux dépens,

– rappelé que l’exécution provisoire du jugement est de droit.

Suivant déclaration du 20 novembre 2023, Mme [H] [R] a relevé appel de cette décision.

Par conclusions notifiées et déposées le 19 décembre 2023, la Banque Populaire Méditerranée a saisi le conseiller de la mise en état d’un incident aux fins de, au visa de l’article 524 du code de procédure civile, radiation de l’affaire du rôle de la cour.

Aux termes de ses dernières conclusions d’incident notifiées et déposées le 17 septembre 2024, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, l’intimée demande au conseiller de la mise en état de :

– dire et juger qu’il n’est pas impossible pour Mme [H] [R] de faire face à ses obligations et qu’il n’y a pas de conséquence manifestement excessive à commencer à rembourser une dette d’argent,

– ordonner la radiation du rôle de l’affaire du fait de l’inexécution des condamnations prononcées par la décision dont appel revêtue de l’exécution provisoire,

– condamner Mme [H] [R] d’avoir à lui payer la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, et les entiers dépens de l’incident.

Par ses dernières conclusions d’incident notifiées et déposées le 17 septembre 2024, auxquelles il est expressément référé en application des dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, Mme [H] [R] demande au conseiller de la mise en état de :

– débouter la Banque Populaire Méditerranée de sa demande de radiation dès lors que l’exécution provisoire du jugement dont appel est tout simplement impossible pour elle faute de liquidités, – à titre subsidiaire, s’il devait être considéré par le conseiller de la mise en état qu’une telle exécution était possible, débouter la Banque Populaire Méditerranée de sa demande de radiation dès lors qu’une exécution qui ne pourrait être que partielle entraînerait des conséquences manifestement excessives par rapport à sa situation d’autant que le jugement dont appel, réputé contradictoire, a des chances d’être réformé,

– condamner la Banque Populaire Méditerranée au paiement de la somme de 1.500 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens de l’incident.
MOTIFS

Pour s’opposer à la demande de radiation formée par l’intimée, Mme [H] [R], qui ne conteste pas n’avoir aucunement exécuté le jugement assorti de l’exécution provisoire dont elle a interjeté appel, fait valoir que, à la suite de la liquidation judiciaire en 2023 de la société qu’elle avait créée en 2016, elle a connu de graves problèmes de santé liés à une sévère dépression, qu’elle est, depuis avril 2023, en arrêt maladie, qu’elle perçoit une indemnité journalière d’un montant brut de 42,05 euros, qu’elle n’a pas su faire face à ses charges et se trouve désormais lourdement endettée et dans l’incapacité de faire face au passif qui lui incombe.

Elle expose par ailleurs que, si elle est propriétaire, en indivision avec son concubin à concurrence de la moitié chacun, de leur résidence principale, ils n’ont jusqu’alors remboursé que la somme de 12.185 euros au titre du prêt immobilier ayant servi à le financer, que la somme à lui revenir en cas de vente ne serait pas suffisante pour exécuter provisoirement le jugement, que faute de liquidités disponibles, elle se trouve dans l’impossibilité absolue de procéder à cette exécution.

Elle invoque, à titre subsidiaire, l’existence de conséquences manifestement excessives, soutenant que l’exécution ne pourrait être que partielle, et que la radiation constituerait une mesure disproportionnée, dès lors qu’elle serait privée de toit, et sans les moyens de se reloger dans la mesure où c’est actuellement l’assurance CNP qui honore son crédit immobilier en raison de son arrêt maladie longue durée, et ce, d’autant que le jugement attaqué a des chances d’être réformé compte tenu de la disproportion de ses engagements de caution.

Cependant, ainsi que le fait à juste titre valoir la Banque Populaire Méditerranée, cette dernière argumentation, qui relève du débat au fond, ne peut être retenue dans le cadre du présent incident.

En revanche, au vu des pièces produites aux débats, dont il résulte essentiellement que l’appelante, suivie dans le cadre d’une dépression résistante, se trouve actuellement dans l’incapacité de reprendre une activité professionnelle, qu’elle a pour revenus les indemnités journalières que lui verse l’Assurance Maladie pour un montant net mensuel moyen de 1.213 euros, qu’elle a diverses dettes, dont des charges courantes, impayées, et que, si elle est certes propriétaire indivise de son logement, les remboursements jusqu’alors effectués du crédit contracté pour l’acquisition de ce bien sur une durée de trois cents mois ne représentent qu’une partie minime du capital emprunté, il apparaît que, si Mme [H] [R] n’est pas dans l’impossibilité totale d’exécuter la décision, l’exécution serait en l’état de nature à entraîner des conséquences manifestement excessives.

Dans ces conditions, il n’y a pas lieu de faire droit à la demande de l’intimée tendant à voir prononcer la radiation du rôle de l’affaire sur le fondement des dispositions de l’article 524 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le conseiller de la mise en état,

Statuant publiquement et contradictoirement,

Déboute la Banque Populaire Méditerranée de sa demande de radiation du rôle de l’affaire,

Dit n’y avoir lieu dans le cadre du présent incident à condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

Condamne la Banque Populaire Méditerranée aux dépens de l’incident, qui seront recouvrés conformément aux dispositions relatives à l’aide juridictionnelle.

Fait à Aix-en-Provence, le 17 octobre 2024

Le greffier Le magistrat de la mise en état

Copie délivrée aux avocats des parties ce jour.

Le greffier


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