Évoquer un concurrent est légal : affaire Maisons du Monde c/ FLY

Évoquer un concurrent est légal : affaire Maisons du Monde c/ FLY

Action en parasitisme pour similitudes volontaires

Les sociétés MAISONS DU MONDE FRANCE et FLY, devenue BAZALP, distribuent toutes deux des articles d’ameublement et de décoration de maison. La société MAISONS DU MONDE a découvert que la société FLY diffusait un prospectus publicitaire mettant en avant un slogan combinant deux polices de caractères dont elle estimait qu’elles étaient associées à sa propre identité visuelle. Elle estimait que ce comportement était constitutif d’actes de parasitisme et mettait en demeure sa concurrente de cesser la diffusion dudit prospectus.

La société MAISONS DU MONDE reprochait principalement à la société FLY de s’être livré à des actes de concurrence parasitaire, en diffusant un prospectus commercial qui reprend partiellement des éléments rattachés à sa propre identité visuelle. Elle visait principalement le slogan mis en avant par le prospectus : ‘déRANGER SON PETIT MONDE’.

Elle exposait que la société FLY a fait usage de polices de caractères similaires à celles qu’elle emploie. Ainsi, le terme ‘MONDE’, qui est selon l’appelante étroitement associé à sa propre enseigne ‘MAISONS DU MONDE’, est écrit dans une typographie très spécifique qu’elle emploie depuis une quinzaine d’année pour son enseigne. Elle détaillait les spécificités de cette typographie et soulignait que, au sein de la variété quasiment illimitée de polices disponibles, les ressemblances étroites entre celle attachée à son identité et celle employée par sa concurrente sur le prospectus litigieux ne pouvait résulter du hasard.

Preuve du parasitisme

Aucun acte de parasitisme n’a été retenu. Si la qualification d’acte de parasitisme n’est pas soumise à la démonstration d’un risque de confusion, il n’en reste pas moins que, pour établir le parasitisme, la seule imitation ou évocation de l’identité visuelle du concurrent ne suffit pas.

En effet, encore faut-il en effet démontrer la volonté, pour la partie à laquelle l’imitation est reprochée, de s’inscrire dans le sillage de son adversaire, en cherchant à évoquer dans l’esprit du public les éléments qui servent à l’identifier afin de profiter indûment des investissements qu’elle a consentis pour établir sa notoriété. La concurrence parasitaire peut ainsi se déduire d’un faisceau de présomptions, d’un ensemble d’éléments appréhendés dans leur globalité.

Évocation des concurrents

S’agissant de la théorie avancée par la société MAISONS DU MONDE, selon laquelle le message porté par le prospectus litigieux, associé à la proximité visuelle, visait à interpeller la concurrence, en lui ‘lançant un défi’, cela ne constituait pas un comportement répréhensible, ni une preuve de parasitisme.

En effet, le libre jeu de la concurrence, principe cardinal, n’interdit pas d’évoquer un concurrent. Le parasitisme n’est pas pour autant constitué, puisqu’aucune intention de profiter de la notoriété de se concurrent ne pourrait être retenue dans un tel cas, puisque précisément l’idée serait de mettre celle-ci en opposition. La société MAISONS DU MONDE ne pouvait donc soutenir que le message du prospectus était ‘un message de défi visant à bousculer un concurrent’ et que dans le même temps ce slogan visait à usurper sa notoriété au profit de son adversaire.

Si un agissement parasitaire ne suppose pas l’existence d’un risque de confusion, il nécessite toutefois la volonté de bénéficier de la reconnaissance du concurrent, de se rattacher à l’image positive attachée à son identité dans l’esprit des consommateurs, or la société MAISONS DU MONDE ne convainc pas en expliquant qu’en cherchant à la défier, la société FLY aurait simultanément bénéficié des investissements réalisés pour promouvoir son identité.

En conclusion, à supposer donc qu’une possibilité marginale d’évocation de la société MAISONS DU MONDE existe à la lecture du prospectus litigieux, il ne peut être analysé comme un acte délibéré opéré en vue de parasiter sa renommée.


Chat Icon