Évaluation préalable des preuves en vue d’un litige potentiel

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Évaluation préalable des preuves en vue d’un litige potentiel

Monsieur [G] [O] et Madame [M] [I] ont signé un contrat le 29 juillet 2013 avec la société LES MAISONS RENOBAT pour la construction de leur maison, incluant une piscine au sous-sol. La réception de la maison a eu lieu le 23 juillet 2016, avec des réserves levées le 15 décembre 2020. Le 3 septembre 2021, ils ont vendu la maison à Monsieur [D] [X] et Madame [U] [X], en précisant que la piscine n’était pas terminée. Les époux [X] ont ensuite mandaté la société AMENAGEMENT ENTRETIEN PISCINES ET SPAS pour l’aménagement de la piscine, mais des désordres ont été constatés après des travaux en 2022, empêchant la mise en eau et la réception des travaux. Une expertise amiable a été réalisée par l’assureur de la société LES MAISONS RENOBAT, avec un rapport déposé le 15 janvier 2024. Le 28 mars 2024, les époux [X] ont assigné en référé plusieurs parties, y compris les anciens propriétaires et les sociétés impliquées, pour obtenir une expertise sur les désordres de la piscine et demander des dommages-intérêts. Lors de l’audience du 27 juin 2024, les époux [X] ont maintenu leur demande, tandis que les défendeurs ont formulé des réserves sur leur responsabilité. Les sociétés LES MAISONS RENOBAT et AEPS ne se sont pas présentées à l’audience.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 septembre 2024
Tribunal judiciaire de Nanterre
RG
24/00916
TRIBUNAL JUDICIAIRE DE NANTERRE

RÉFÉRÉS

ORDONNANCE DE RÉFÉRÉ RENDUE LE 10 SEPTEMBRE 2024

N° RG 24/00916 – N° Portalis DB3R-W-B7I-ZJEE

N° :

[U] [X],
[D] [X]

c/

S.A. ABEILLE IARD & SANTE,
S.A.R.L. LES MAISONS RENOBAT,
S.A.S. AMÉNAGEMENT ENTRETIEN PISCINES ET SPAS AEPS,
[M] [I],
[G] [O]

DEMANDEURS

Madame [U] [Z] épouse [X]
[Adresse 9]
[Localité 17]

Monsieur [D] [X]
[Adresse 9]
[Localité 17]

représentés par Maître Fanny SACHEL de la SELARL Samman Cabinet d’avocats, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : G0160

DEFENDEURS

Madame [M] [I]
[Adresse 3]
[Localité 15]

et

Monsieur [G] [O]
[Adresse 10]
[Localité 16]

représentés par Maître Philippe BRAMI de l’AARPI DESCLEVES & ASSOCIES, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : T14

S.A. ABEILLE IARD & SANTE
[Adresse 4]
[Localité 14]

représentée par Maître Jean-denis GALDOS DEL CARPIO de la SELARL GALDOS & BELLON, avocats au barreau de PARIS, vestiaire : R56

S.A.R.L. LES MAISONS RENOBAT
[Adresse 5]
[Localité 13]

non comparante

S.A.S. AMÉNAGEMENT ENTRETIEN PISCINES ET SPAS AEPS
[Adresse 8]
[Localité 12]

non comparante

COMPOSITION DE LA JURIDICTION

Président : François PRADIER, 1er Vice-président, tenant l’audience des référés par délégation du Président du Tribunal,

Greffier : Pierre CHAUSSONNAUD, Greffier

Statuant publiquement en premier ressort par ordonnance réputée contradictoire mise à disposition au greffe du tribunal, conformément à l’avis donné à l’issue des débats.

Nous, Président , après avoir entendu les parties présentes ou leurs conseils, à l’audience du 27 juin 2024, avons mis l’affaire en délibéré à ce jour :

EXPOSE DU LITIGE
Par contrat en date du 29 juillet 2013, Monsieur [G] [O] et Madame [M] [I] ont confié à la société LES MAISONS RENOBAT la construction de leur maison sise [Adresse 9] à [Localité 17] qui comprend une piscine au sous-sol.
La réception de la maison a eu lieu le 23 juillet 2016 et les réserves ont été levées le 15 décembre 2020.
Par acte authentique en date du 3 septembre 2021, Monsieur [G] [O] et Madame [M] [I] ont vendu la maison à Monsieur [D] [X] et Madame [U] [X], ci-après « les époux [X] » en précisant que la piscine au sous-sol n’était pas finie et restait à installer.
Selon devis en date du 27 octobre 2021, les époux [X] ont mandaté la société AMENAGEMENT ENTRETIEN PISCINES ET SPAS, ci-après « la société AEPS », pour procéder à l’aménagement de ladite piscine.
Des travaux ont été effectués en 2022 mais la mise en eau de la piscine et la réception des travaux n’ont pu se faire.
Par la suite, les époux [X] ont constaté des désordres affectant leur piscine.
Une expertise amiable a été diligentée par la société ABEILLE IARD & SANTE, en qualité d’assureur de la société LES MAISONS RENOBAT, et un rapport a été déposé le 15 janvier 2024.
Par actes en date des 28 mars 2024, les époux [X] ont assigné en référé devant le président du tribunal judiciaire de Nanterre Monsieur [G] [O], Madame [M] [I], la société LES MAISONS RENOBAT ayant construit la maison, son assureur la société ABEILLE IARD & SANTE ainsi que la société AEPS ayant participé à la construction de la piscine pour obtenir la désignation d’un expert sur le fondement de l’article 145 du code de procédure civile aux fins d’analyser les causes des désordres affectant leur piscine. Ils sollicitent également la condamnation in solidum de tous les défendeurs à leur verser à chacun la somme de 1 500 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et aux dépens.
A l’audience du 27 juin 2024, les époux [X] ont sollicité l’entier bénéfice de leur acte introductif d’instance.
Le président du tribunal judiciaire a décidé de retenir le dossier.
La société ABEILLE IARD & SANTE, représentée, ne s’oppose pas à l’expertise mais formule les protestations et réserves d’usage quant à sa responsabilité et sa prise en charge en tant qu’assureur du constructeur de la maison. Elle sollicite de débouter les époux [X] de leur demande au titre de l’article 700 du code de procédure civile et de statuer ce que de droit sur les dépens.
Monsieur [G] [O] et Madame [M] [I], représentés, formulent également les protestations et réserves d’usage quant à la mesure d’expertise sollicitée par les demandeurs.
Régulièrement assignées par remise à personne habilitée, les sociétés LES MAISONS RENOBAT et AEPS n’ont pas comparues à l’audience et ne se sont pas fait représenter. 
Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, si le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond. Le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample informé de l’exposé et des prétentions des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux conclusions déposées et développées oralement à l’audience.
MOTIFS
Sur la demande d’expertise
Selon l’article 145 du code de procédure civile, s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé.
Justifie d’un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel.
En l’espèce, les époux [X] versent notamment aux débats une déclaration d’ouverture de chantier effectuée le 8 juillet 2014 par Monsieur [G] [O], un descriptif des travaux effectués par la société LES MAISONS RENOBAT, un rapport d’étude géotechnique établi par la société SOLPROJET portant sur la qualité du sol et sur le contexte géotechnique d’emplacement de la maison, un protocole d’accord signé entre Monsieur [G] [O] et Madame [M] [I] et la société LES MAISONS RENOBAT le 23 octobre 2020 pour procéder à la levée des réserves à la suite de la réception des travaux, une attestation d’assurance dommages-ouvrage de la société LES MAISONS RENOBAT par la société ABEILLE IARD & SANTE, l’acte de vente de la maison entre Monsieur [G] [O] et Madame [M] [I] et les époux [X] en date du 3 septembre 2021, le devis établi par la société AEPS en date du 16 novembre 2021 pour procéder à l’installation de la piscine pour un prix de 75 885,60 euros ainsi que le rapport d’expertise amiable en date du 15 janvier 2024 établi par Monsieur [S] [C] faisant état d’une piscine qui « depuis la réception du 23/07/2016 [était] sans aucun aménagement ni mise en eau de la part de l’ancien propriétaire. Ce jour, la piscine est vide, et plusieurs carreaux de carrelage ont été déposés, permettant de voir le support béton à plusieurs endroits », observant « de fortes présence de calcites visibles sur la surface du radier à ces endroits et au point le plus bas, on observe la présence de venues d’eau sur le béton » et signalant ne pas retrouver de puits de décompression donnant sur un drainage éventuel sous la partie basse de la piscine et que lorsque la piscine est vidée, « la poussée des terres et eaux souterraines est supérieure à ce que la piscine peut reprendre en contrainte normale, lorsqu’elle est remplie ». L’expertise amiable conclut que « la piscine n’a jamais été mise en eau et donc jamais en condition normale d’utilisation. De fait, les poussées de terres et des éventuelles remontées de nappe n’ont jamais été compensées par le poids de l’eau de la piscine de 2016 à 2023 soumettant la structure de la piscine à des poussées anormales des contraintes du sol, la piscine étant censée être calculée pour être remplie ».
Au vu de ces éléments, les époux [X] justifient d’un motif légitime pour obtenir la désignation d’un expert en vue d’établir, avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige, selon mission qui sera ordonnée et effectuée dans les conditions précisées au dispositif de la présente décision.
Cette mesure étant ordonnée à la demande des époux [X] et dans leur intérêt probatoire, les frais de consignation seront à leur charge.

Sur les demandes accessoires
L’article 491 du code de procédure civile imposant au juge de statuer sur les dépens, et aucune partie ne pouvant être regardée comme perdante au sein de la présente instance, il y a lieu, en application de l’article 696 du code de procédure civile, de laisser à chacune d’entre elle la charge de ses propres dépens.
L’article 700 du code de procédure civile dispose que le juge condamne la partie tenue aux dépens ou qui perd son procès à payer à l’autre partie la somme qu’il détermine, au titre des frais exposés et non compris dans les dépens. Il doit à ce titre tenir compte de l’équité ou de la situation économique de la partie condamnée et peut écarter pour les mêmes considérations cette condamnation.
Aucune partie ne pouvait être regardée comme perdante au sein de la présente instance, il n’y a pas lieu à condamnation au titre de l’article 700 du code de procédure civile de sorte que la demande des époux [X] sera rejetée.

PAR CES MOTIFS
RENVOYONS les parties à se pourvoir sur le fond du litige,
Par provision, tous moyens des parties étant réservés.
ORDONNONS une expertise et DÉSIGNONS en qualité d’expert :
[H] [V]
[Adresse 7]
Port. : [XXXXXXXX02]
Mèl. : [Courriel 18]
(expert inscrit auprès de la cour d’appel de Versailles, sous la rubrique C-02.08 – Piscines : gros-oeuvre, étanchéité, bassins préfabriqués, traitement de l’eau, de l’air, équipements)
avec mission de :
– se rendre sur les lieux dans l’immeuble sis [Adresse 9] à [Localité 17],
 – se faire communiquer tous documents et pièces nécessaires à l’accomplissement de sa mission,
– s’entourer, si besoin est, de tout sachant et technicien de son choix,
– examiner les travaux exécutés par les sociétés défenderesses, dire s’ils sont conformes aux devis et factures, déterminer s’il existe des défauts, malfaçons, non finitions et en rechercher les causes,
-examiner les désordres allégués dans l’assignation et donner son avis sur leur origine, causes et importance,
– décrire les travaux de reprise et procéder à un chiffrage desdits travaux,
– fournir tous éléments techniques et de fait de nature à déterminer les responsabilités encourues et évaluer les préjudices subis,
– fournir toutes les indications sur la durée prévisible des réfections ainsi que sur les préjudices accessoires qu’ils pourraient entraîner tels que privation ou limitation de jouissance,
– évaluer les troubles de jouissance subis,
– donner son avis sur les comptes entre les parties,
DISONS qu’en cas d’urgence reconnue par l’expert, la partie la plus diligente pourra nous en référer pour être autorisée à faire exécuter à ses frais avancés, pour le compte de qui il appartiendra, les travaux estimés indispensables par l’expert, lequel dans ce cas déposera un pré-rapport précisant la nature et l’importance des travaux,

FAISONS INJONCTION aux parties de communiquer aux autres parties les documents de toute nature qu’elles adresseront à l’expert pour établir le bien fondé de leurs prétentions,
DISONS que l’expert sera saisi et effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 263 et suivants du code de procédure civile et qu’il déposera son rapport en un exemplaire original sous format papier et en copie sous la forme d’un fichier PDF enregistré sur un CD-ROM) au greffe du tribunal de grande instance de Nanterre, service du contrôle des expertises, extension du palais de justice, [Adresse 11] ([XXXXXXXX01], dans le délai de 6 mois à compter de l’avis de consignation, sauf prorogation de ce délai dûment sollicité en temps utile auprès du juge du contrôle (en fonction d’un nouveau calendrier prévisionnel préalablement présenté aux parties),
DISONS que l’expert devra, dès réception de l’avis de versement de la provision à valoir sur sa rémunération, convoquer les parties à une première réunion qui devra se tenir avant l’expiration d’un délai de deux mois, au cours de laquelle il procédera a une lecture contradictoire de sa mission, présentera la méthodologie envisagée, interrogera les parties sur d’éventuelles mises en cause, établira contradictoirement un calendrier de ses opérations et évaluera le coût prévisible de la mission, et qu’à l’issue de cette première réunion il adressera un compte-rendu aux parties et au juge chargé du contrôle,
Dans le but de limiter les frais d’expertise, invitons les parties, pour leurs échanges contradictoires avec l’expert et la communication des documents nécessaires à la réalisation de la mesure, à utiliser la voie dématérialisée via l’outil OPALEXE,
DISONS que, sauf accord contraire des parties, l’expert devra adresser à celles-ci une note de synthèse dans laquelle il rappellera l’ensemble de ses constatations matérielles, présentera ses analyses et proposera une réponse à chacune des questions posées par la juridiction,
DISONS que l’expert devra fixer aux parties un délai pour formuler leurs dernières observations ou réclamations en application de l’article 276 du code de procédure civile et rappelons qu’il ne sera pas tenu de prendre en compte les transmissions tardives ;
DÉSIGNONS le magistrat chargé du contrôle des expertises pour suivre la mesure d’instruction et statuer sur tous incidents ;
DISONS que l’expert devra rendre compte à ce magistrat de l’avancement de ses travaux d’expertise et des diligences accomplies et qu’il devra l’informer de la carence éventuelle des parties dans la communication des pièces nécessaires à l’exécution de sa mission conformément aux dispositions des articles 273 et 275 du code de procédure civile ;
FIXONS à la somme de 3 000 euros la provision à valoir sur la rémunération de l’expert qui devra être consignée par Monsieur [D] [X] et Madame [U] [X] entre les mains du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal, [Adresse 6], dans le délai de 6 semaines à compter de la présente ordonnance, sans autre avis ;
Il convient de privilégier le paiement par virement, la partie demanderesse devant solliciter les coordonnées de la régie par mail (avec une copie scannée de la décision):
[Courriel 19] ;

DISONS que, faute de consignation dans ce délai impératif, la désignation de l’expert sera caduque et privée de tout effet ;
DISONS qu’en déposant son rapport, l’expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération,
REJETONS les demandes plus amples ou contraires,
LAISSONS à chacune des parties la charge de ses propres dépens.

FAIT À NANTERRE, le 10 septembre 2024.

LE GREFFIER

Pierre CHAUSSONNAUD, Greffier

LE PRÉSIDENT

François PRADIER, 1er Vice-président


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