Évaluation des obligations contractuelles et des droits des parties dans le cadre d’un crédit à la consommation

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Évaluation des obligations contractuelles et des droits des parties dans le cadre d’un crédit à la consommation

La société Sogefinancement a accordé un crédit personnel de 25 000 euros à M. [F] et Mme [C] en janvier 2017, remboursable en 84 mensualités. Un avenant en août 2019 a réaménagé le remboursement à 237,25 euros sur 99 mois. Suite à des impayés, Sogefinancement a demandé la déchéance du terme et a assigné les emprunteurs en juin 2022. Le tribunal a prononcé la déchéance des intérêts contractuels et a condamné M. [F] et Mme [C] à payer 9 265,55 euros. Sogefinancement a interjeté appel, demandant l’infirmation du jugement et le paiement de sommes plus élevées. La cour a examiné la validité de la remise de la fiche d’information précontractuelle (FIPEN) et a noté qu’elle n’était pas signée. En septembre 2024, la société Franfinance a pris la suite de Sogefinancement et a soutenu que la FIPEN n’avait pas besoin d’être signée. La cour a confirmé le jugement initial, mais a modifié le montant dû à 9 135,46 euros, laissant les dépens à la charge de Sogefinancement.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

10 octobre 2024
Cour d’appel de Paris
RG
23/04036
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 4 – Chambre 9 – A

ARRÊT DU 10 OCTOBRE 2024

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 23/04036 – N° Portalis 35L7-V-B7H-CHGQA

Décision déférée à la Cour : Jugement du 23 décembre 2022 – Juge des contentieux de la protection d’EVRY-COURCOURONNES – RG n° 22/00902

APPELANTE

La société FRANFINANCE, société anonyme, agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège, venant aux droits de la société SOGEFINANCEMENT suite à une fusion-absorption en date du 1er juillet 2024

N° SIRET : 719 807 406 00884

[Adresse 4]

[Adresse 5]

[Adresse 5]

représentée par Me Sébastien MENDES GIL de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

substitué à l’audience par Me Hinde FAJRI de la SELAS CLOIX & MENDES-GIL, avocat au barreau de PARIS, toque : P0173

INTIMÉS

Monsieur [I] [F]

né le [Date naissance 2] 1977 au CONGO

[Adresse 3]

[Adresse 3]

DÉFAILLANT

Madame [V] [C]

née le [Date naissance 1] 1981 en ANGOLA

[Adresse 3]

[Adresse 3]

DÉFAILLANTE

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 25 juin 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre, chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Muriel DURAND, Présidente de chambre

Mme Laurence ARBELLOT, Conseillère

Mme Sophie COULIBEUF, Conseillère

Greffière, lors des débats : Mme Camille LEPAGE

ARRÊT :

– DÉFAUT

– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Mme Muriel DURAND, Présidente et par Mme Camille LEPAGE, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS, PROCÉDURE ET PRÉTENTIONS DES PARTIES

Selon offre préalable acceptée le 6 janvier 2017, la société Sogefinancement a consenti à M. [I] [F] et à Mme [V] [C] un crédit personnel d’un montant en capital de 25 000 euros remboursable en 84 mensualités de 347,50 euros hors assurance incluant les intérêts au taux nominal de 4,50 %, le TAEG s’élevant à 4,74 %, soit une mensualité avec assurance de 380 euros.

Par avenant du 30 août 2019, les parties ont convenu d’un réaménagement du montant dû à cette date de 17 691,33 euros par réduction du montant des mensualités à la somme de 237,25 euros assurance comprise, sur 99 mois du 10 novembre 2019 au 10 janvier 2028.

Plusieurs échéances n’ayant pas été honorées, la société Sogefinancement a entendu se prévaloir de la déchéance du terme.

Par acte du 7 juin 2022, la société Sogefinancement a fait assigner M. [F] et Mme [C] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire d’Evry en paiement du solde du prêt lequel, par jugement réputé contradictoire du 23 décembre 2022, a prononcé la déchéance du droit aux intérêts contractuels et a condamné M. [F] et Mme [C] solidairement au paiement de la somme de 9 265,55 euros, dit que cette somme ne produira pas intérêts au taux légal, condamné M. [F] et Mme [C] in solidum aux dépens et au paiement d’une somme de 300 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et débouté la banque de ses autres demandes.

Pour prononcer la déchéance du droit aux intérêts contractuels, le juge a retenu que la notice d’assurance n’était pas produite.

Il a retenu qu’après déduction des sommes versées, il restait dû une somme de 9 265,55 euros et a relevé que pour assurer l’effectivité de la sanction il fallait écarter l’application de l’article 1231-6 du code civil.

Par déclaration réalisée par voie électronique le 22 février 2023, la société Sogefinancement a interjeté appel de cette décision.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 22 mai 2023, la société Sogefinancement demande à la cour :

– de la déclarer recevable et bien fondée en ses demandes, fins et conclusions,

– d’infirmer le jugement sauf en ses dispositions relatives aux dépens et aux frais irrépétibles,

– de déclarer irrecevables les moyens visant à faire prononcer la déchéance du droit aux intérêts au regard du délai de prescription quinquennale, et subsidiairement de rejeter le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels,

– de constater que la déchéance du terme a été prononcée, subsidiairement de prononcer la résiliation judiciaire du contrat de crédit au vu des manquements de l’emprunteur dans son obligation de rembourser les échéances du crédit et fixer la date des effets de la résiliation au 18 novembre 2021 et,

– en tout état de cause, de condamner M. [F] et Mme [C] solidairement à lui payer la somme de 17 964,07 euros majorée des intérêts au taux contractuel de 4,50 % l’an à compter du 19 novembre 2021 sur la somme de 15 672 euros et au taux légal pour le surplus,

– subsidiairement, en cas de déchéance du droit aux intérêts de condamner M. [F] et Mme [C] solidairement à lui payer la somme de 10 870,46 euros avec intérêts au taux légal à compter du 14 avril 2022, date de la mise en demeure et de dire et juger qu’il n’y a pas lieu d’écarter la majoration du taux légal,

– en tout état de cause de condamner M. [F] et Mme [C] in solidum à lui payer la somme de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens avec distraction au profit de Selas Cloix & Mendes Gil.

S’agissant de la prescription, elle fait valoir que celle-ci s’applique à toutes les demandes qu’elles soient formées par voie d’action ou par voie d’exception, que la demande de déchéance du droit aux intérêts est bien une demande puisqu’elle vise à compenser les intérêts avec la créance et que cette prescription s’applique aussi bien aux parties qu’au juge qui ne peut avoir plus de droits que les parties elles-mêmes. Elle se prévaut de l’article L. 110-4 du code de commerce dans sa version applicable après l’entrée en vigueur de la loi du 17 juin 2008, laquelle a réduit ce délai à 5 ans et soutient que les arguments soulevés au titre d’une déchéance du droit aux intérêts contractuels pour irrégularité du formalisme précontractuel ou du formalisme contractuel ne pouvaient donc être invoqués que jusqu’au 6 janvier 2022 alors que le juge l’a soulevée à l’audience du 27 octobre 2022.

Elle soutient produire la notice d’assurance et qu’aucune disposition du code de la consommation n’impose de la parapher ou de la signer, que l’offre de prêt comporte une mention selon laquelle les emprunteurs reconnaissent avoir reçu, pris connaissance et conservé un exemplaire de ladite notice.

Elle soutient avoir valablement mis en ‘uvre la déchéance du terme par l’envoi d’une mise en demeure préalable et à titre subsidiaire, si la cour devait considérer que la déchéance du terme n’était pas acquise, elle rappelle que la clause résolutoire est toujours sous entendue dans les contrats synallagmatiques et que M. [F] et Mme [C] ont commis des manquements graves à leur obligation de remboursement devant conduire au prononcé de la résolution judiciaire du contrat.

Elle s’estime fondée à obtenir le paiement des sommes qu’elle réclame et insiste sur le fait qu’elle a le droit de prétendre à une indemnité de résiliation équivalant à 8 % du capital restant dû.

A titre subsidiaire, elle précise que M. [F] et Mme [C] ont réglé la somme de 15 744,54 euros hors frais de dossier de 120 euros mais que les échéances d’assurance échues restent dues car la déchéance du droit aux intérêts ne porte pas sur les cotisations d’assurance et qu’ils restent devoir à ce titre 1 615 euros si bien qu’en cas de déchéance du droit aux intérêts la somme due est de 10 870,46 euros.

Elle indique que les intérêts légaux sont dus, que le juge n’a pas le pouvoir d’en écarter le jeu, que seul le juge de l’exécution a le pouvoir de supprimer la majoration de 5 points car cette question relève de l’exécution puisque pour être appliquée, il faut une inexécution pendant 2 mois et que la perte des intérêts est suffisamment significative.

Aucun avocat ne s’est constitué pour M. [F] et Mme [C] à qui la déclaration d’appel a été signifiée par actes du 5 mai 2023 délivrés à étude et les conclusions par actes du 7 juin 2023 délivrés à étude.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 21 mai 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience le 25 juin 2024.

A l’audience la cour ayant examiné les pièces a relevé que la FIPEN produite n’était pas signée. Elle a fait parvenir le 25 juin 2024 au conseil de la banque par RPVA un avis rappelant que dans un arrêt du 7 juin 2023 (pourvoi 22-15.552) la première chambre de la cour de cassation avait considéré que la preuve de la remise de la FIPEN ne pouvait se déduire de la clause de reconnaissance et de la seule production de la FIPEN non signée, ce document émanant de la seule banque, souligné que l’intimé ne comparaissait pas et a invité la banque à produire tout justificatif de la remise de cette FIPEN et le cas échéant à faire valoir ses observations sur la déchéance du droit aux intérêts encourue à défaut de preuve de remise, et ce au plus tard le 2 septembre 2024.

Le 2 septembre 2024, la société Franfinance indiquant venir aux droits de la société Sogefinancement a fait parvenir une note en délibéré aux termes de laquelle elle fait valoir :

– qu’aucun texte ne prévoit que la FIPEN soit signée et que sa seule obligation consiste à remettre cette fiche d’information,

– que jusqu’à l’arrêt du 7 juin 2023 visé dans l’avis, la Cour de cassation admettait que la remise d’un document constituant un fait juridique, elle pouvait être prouvée par tous moyens et notamment par une clause de reconnaissance, et qu’il en était déduit, de manière constante, que la clause combinée à la production de la copie du document permettait à l’établissement de crédit de rapporter la preuve de la remise du document sans qu’il soit nécessaire que ledit document soit signé par l’emprunteur,

– que l’exigence d’un document émanant du débiteur n’est requise qu’en matière de preuve des actes juridiques par l’article 1362 du code civil,

– que l’apposition de la signature de l’emprunteur sur le document ne confère, en outre, pas à la production un caractère plus probant que celui résultant de la signature sous la clause de reconnaissance corroborée par la production d’une copie du document,

– que la FIPEN soit ou non signée laisse à l’emprunteur la faculté de rapporter la preuve contraire que le document qui lui a été remis n’est pas celui que le prêteur a produit, en produisant le cas échéant l’exemplaire qui lui a été remis,

– que l’arrêt du 7 juin 2023 apparaît en contradiction avec une position jusqu’alors clairement établie, qu’il ne peut qu’être analysé en un arrêt d’espèce voire d’égarement isolé et ne saurait être suivi, étant rappelé que la loi a une valeur normative supérieure et que jusqu’alors la présente cour statuait différemment,

– que changer de jurisprudence conduirait à heurter gravement le principe de sécurité juridique et que cette règle ne peut au mieux valoir que pour l’avenir et ne saurait être appliquée rétroactivement car la banque n’était pas en mesure de prévoir cette exigence nouvelle,

– qu’il y a donc lieu de ne pas prononcer de déchéance du droit aux intérêts de ce chef.

Elle justifie en outre que le 1er juillet 2024 a été publiée la déclaration de régularité et de conformité du même jour approuvant les termes du projet de fusion par absorption de la société Sogefinancement par la société Franfinance signé le 7 mai 2024 et déposé au greffe du tribunal de commerce de Nanterre le même jour et constatant la réalisation de ladite fusion suite à la décision des associés de la société Sogefinancement et de l’Assemblée générale extraordinaire de Franfinance du 1er juillet 2024 et la dissolution sans liquidation de la société Sogefinancement à compter du même jour.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Selon l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, il est néanmoins statué sur le fond, le juge ne fait droit à la demande que s’il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Il résulte de l’article 954 dernier alinéa du code de procédure civile que la partie qui ne conclut pas ou qui, sans énoncer de nouveaux moyens, demande la confirmation du jugement est réputée s’en approprier les motifs.

Il y a lieu de prendre en compte que la société Franfinance vient aux droits de la société Sogefinancement.

Sur la demande en paiement

Le présent litige est relatif à un crédit souscrit le 6 janvier 2017 soumis aux dispositions de la loi n° 2010-737 du 1er juillet 2010 de sorte qu’il doit être fait application des articles du code de la consommation dans leur rédaction en vigueur après le 1er mai 2011 et leur numérotation postérieure à l’ordonnance n° 2016-301 du 14 mars 2016 et au décret n° 2016-884 du 29 juin 2016.

Sur la forclusion

L’article R. 312-35 du code de la consommation dispose que les actions en paiement à l’occasion de la défaillance de l’emprunteur dans le cadre d’un crédit à la consommation, doivent être engagées devant le tribunal dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance à peine de forclusion et que cet événement est notamment caractérisé par le premier incident de paiement non régularisé et précise que lorsque les modalités de règlement des échéances impayées ont fait l’objet d’un réaménagement ou d’un rééchelonnement, le point de départ du délai de forclusion est le premier incident non régularisé intervenu après le premier aménagement ou rééchelonnement conclu entre les intéressés.

Constitue un réaménagement et/ou un rééchelonnement au sens de ce texte, le contrat qui a pour seul objet de réaménager les modalités de remboursement d’une somme antérieurement prêtée, pour permettre, par l’allongement de la période de remboursement et l’abaissement du montant de l’échéance mensuelle, d’apurer le passif échu, pour autant qu’il ne se substitue pas au contrat de crédit initial dont la déchéance du terme n’a pas été prononcée, qu’il n’en modifie pas les caractéristiques principales telles le montant initial du prêt et le taux d’intérêts et qu’il porte sur l’intégralité des sommes restant dues à la date de sa conclusion.

La recevabilité de l’action de la banque au regard de la forclusion n’a pas été vérifiée par le premier juge. Or en application de l’article 125 du code de procédure civile, il appartient au juge saisi d’une demande en paiement de vérifier d’office même en dehors de toute contestation sur ce point que l’action du prêteur s’inscrit bien dans ce délai.

En l’espèce, le réaménagement produit répond aux exigences de ce texte et il résulte de l’historique de compte que le premier impayé non régularisé postérieur à ce réaménagement est celui du 10 juillet 2021. Dès lors la banque qui a assigné le 07 juin 2022 n’est pas forclose en son action et doit être déclarée recevable.

Sur la déchéance du droit aux intérêts

La prescription du moyen

La banque soutient que le juge du fond ne pouvait soulever d’office le 27 octobre 2022 le moyen tiré de la déchéance du droit aux intérêts contractuels au regard du délai de prescription quinquennale ayant commencé à courir à la date d’acceptation de l’offre et devant se terminer au 6 janvier 2022.

La prescription est sans effet sur l’invocation d’un moyen qui tend non pas à l’octroi d’un avantage, mais seulement à mettre en échec une prétention adverse.

C’est ainsi que, défendant à une action en paiement du solde d’un crédit à la consommation, l’emprunteur peut opposer tout moyen tendant à faire rejeter tout ou partie des prétentions du créancier par application d’une disposition du code de la consommation prévoyant la déchéance du droit aux intérêts, sans se voir opposer la prescription, pour autant qu’il n’entende pas en obtenir un autre avantage tel le remboursement d’intérêts indûment acquittés.

Dans le rôle qui lui est conféré tant par l’article R. 632-1 du code de la consommation que par le droit européen, le juge peut relever d’office, sans être enfermé dans un quelconque délai, toute irrégularité qui heurte une disposition d’ordre public de ce code.

En l’espèce, le moyen soulevé d’office par le premier juge et susceptible de priver le prêteur de son droit aux intérêts contractuels n’a pas pour effet de conférer à l’emprunteur un avantage autre qu’une minoration de la créance dont la société Sogefinancement poursuit le paiement.

Loin de constituer un remboursement des intérêts acquittés par le jeu d’une compensation qui supposerait une condamnation -qui n’est pas demandée- de l’organisme de crédit à payer une dette réciproque, ces moyens ne peuvent avoir pour seul effet que de modifier l’imputation des paiements faits par l’emprunteur.

En conséquence, il convient d’écarter la fin de non-recevoir soulevée par la banque.

La notice d’assurance

L’article L. 312-29 du code de la consommation impose au prêteur, lorsque l’offre de contrat de crédit est assortie d’une proposition d’assurance, de remettre à l’emprunteur une notice qui comporte les extraits des conditions générales de l’assurance le concernant, notamment les nom et adresse de l’assureur, la durée, les risques couverts et ceux qui sont exclus. Si l’assurance est obligatoire pour obtenir le financement, l’offre préalable rappelle que l’emprunteur peut souscrire une assurance équivalente auprès de l’assureur de son choix. Si l’assurance est facultative, l’offre préalable rappelle les modalités suivant lesquelles l’emprunteur peut ne pas y adhérer.

Il résulte de l’article L. 341-4 du code de la consommation que l’absence de remise de cette notice entraîne la déchéance du droit aux intérêts pour le prêteur.

Contrairement à ce que soutient la banque, la preuve de la remise de la notice et de sa conformité ne sauraient résulter d’une simple clause pré-imprimée selon laquelle l’emprunteur reconnaît la remise, une telle clause ne constituant qu’un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments de preuve pertinents et notamment la production de la notice.

En l’espèce, le contrat contient une clause pré-imprimée selon laquelle l’emprunteur reconnaît la remise, et si une telle clause ne constitue qu’un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer, il reste qu’elle figure dans la partie acceptation de l’assurance et qu’il produit également la notice elle-même et dès lors la déchéance du droit aux intérêts contractuels n’est pas encourue de ce chef.

La fiche d’informations précontractuelles

Il résulte de l’article L. 312-12 du code de la consommation que préalablement à la conclusion du contrat de crédit, le prêteur ou l’intermédiaire de crédit donne à l’emprunteur, par écrit ou sur un autre support durable, les informations nécessaires à la comparaison de différentes offres et permettant à l’emprunteur, compte tenu de ses préférences, d’appréhender clairement l’étendue de son engagement.

Cette fiche d’informations précontractuelles -FIPEN- est exigée à peine de déchéance totale du droit aux intérêts (article L. 341-1), étant précisé qu’il incombe au prêteur de rapporter la preuve de ce qu’il a satisfait à son obligation d’information et de remise de cette FIPEN.

A cet égard, la clause type, figurant au contrat de prêt, selon laquelle l’emprunteur reconnaît avoir reçu la fiche d’informations précontractuelles normalisées européennes, n’est qu’un indice qu’il incombe au prêteur de corroborer par un ou plusieurs éléments complémentaires.

Il a toutefois été jugé qu’un document qui émane du seul prêteur ne peut utilement corroborer les mentions de cette clause type de l’offre de prêt pour apporter la preuve de l’effectivité de la remise. (Cass. civ. 1, 7 juin 2023, n° 22-15.552).

Dès lors, la production de la FIPEN remplie par le prêteur ne saurait suffire à corroborer cette clause car ce qui doit être prouvé d’emblée par le prêteur est la remise effective à M. [F] et Mme [C] non représentés en appel, de la FIPEN personnalisée.

Il doit dès lors être considéré que la banque qui ne produit que le contrat comportant une clause de reconnaissance et une FIPEN remplie mais non signée par M. [F] et Mme [C] ne rapporte pas suffisamment la preuve d’avoir respecté l’obligation qui lui incombe, sans qu’elle puisse valablement opposer que la signature de cette pièce n’est pas exigée par les textes ou que le fait que l’appréciation des éléments de preuves apportés ait pu être différente est de nature à heurter un principe de sécurité juridique.

Sur la déchéance du terme et les sommes dues

La banque produit en sus de l’offre de contrat de crédit qui comporte une clause de déchéance du terme, l’avenant de réaménagement, l’historique de prêt, les tableaux d’amortissement, les mises en demeure avant déchéance du terme du 25 octobre 2021 enjoignant à M. [F] et Mme [C] de régler l’arriéré de 1 031,85 euros sous 15 jours à peine de déchéance du terme et celle notifiant la déchéance du terme du 14 avril 2022 portant mise en demeure de payer le solde du crédit et un décompte de créance.

Il en résulte que la banque se prévaut de manière légitime de la déchéance du terme du contrat et de l’exigibilité des sommes dues.

Aux termes de l’article L. 341-8 du code de la consommation, lorsque le prêteur est déchu du droit aux intérêts, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu, ainsi que, le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Les sommes déjà perçues par le prêteur au titre des intérêts, qui sont productives d’intérêts au taux de l’intérêt légal à compter du jour de leur versement, sont restituées par le prêteur ou imputées sur le capital restant dû.

Il y a donc lieu de déduire de la totalité des sommes empruntées soit 25 000 euros la totalité des sommes payées soit 15 864,54 euros comprenant les frais de dossier et sans qu’il y ait lieu de réintégrer les mensualités d’assurance, la banque ne justifiant pas d’un mandat de recouvrement soit une somme due de 9 135,46 euros.

Le jugement déféré doit donc être infirmé en ce qu’il a retenu une somme de 9 265,55 euros et M. [F] et Mme [C] doivent être solidairement condamnés à payer la somme de 9 135,46 euros.

La limitation légale de la créance du préteur exclut qu’il puisse prétendre au paiement de toute autre somme et notamment de la clause pénale prévue par l’article L. 311-24 devenu L. 312-39 du code de la consommation. La société Sogefinancement doit donc être déboutée sur ce point.

Sur les intérêts au taux légal, la majoration des intérêts au taux légal et la capitalisation des intérêts

Le prêteur, bien que déchu de son droit aux intérêts, demeure fondé à solliciter le paiement des intérêts au taux légal, en vertu de l’article 1153 devenu 1231-6 du code civil, sur le capital restant dû, majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier.

Ces dispositions légales doivent cependant être écartées s’il en résulte pour le prêteur la perception de montants équivalents ou proches de ceux qu’il aurait perçus si la déchéance du droit aux intérêts n’avait pas été prononcée, sauf à faire perdre à cette sanction ses caractères de dissuasion et d’efficacité (CJUE 27 mars 2014, affaire C-565/12, Le Crédit Lyonnais SA / Fesih Kalhan).

Le juge du fond est parfaitement en situation d’apprécier ce point et la suppression de la majoration de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier ne relève pas de la compétence exclusive du juge de l’exécution.

En l’espèce, le crédit personnel a été accordé à un taux d’intérêts annuel fixe de 4,50 %.

Dès lors, les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur au titre des intérêts au taux légal ne seraient pas significativement inférieurs à ce taux conventionnel. Il convient en conséquence de ne pas faire application de l’article 1231-6 du code civil ni a fortiori de l’article L. 313-3 du code monétaire et financier. La somme restant due en capital au titre de ce crédit ne portera donc intérêts ni au taux conventionnel ni au taux légal et aucune majoration de retard ne sera due.

Le jugement doit donc être confirmé sur ce point.

Sur les dépens et les frais irrépétibles

Le jugement non contesté sur ces points à hauteur d’appel doit être confirmé.

La banque qui succombe doit conserver la charge de ses dépens d’appel et de ses frais irrépétibles.

PAR CES MOTIFS

LA COUR,

Statuant par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort,

Confirme le jugement sauf en ce qu’il a condamné M. [I] [F] et Mme [V] [C] solidairement à payer la somme de 9 265,55 euros ;

Statuant à nouveau et y ajoutant,

Ecarte la fin de non-recevoir ;

Donne acte de ce que la société Franfinance vient aux droits de la société Sogefinancement ;

Déclare la société Franfinance venant aux droits de la société Sogefinancement recevable en sa demande ;

Condamne M. [I] [F] et Mme [V] [C] solidairement à payer à la société Franfinance venant aux droits de la société Sogefinancement la somme de 9 135,46 euros ;

Laisse les dépens d’appel à la charge de la société Sogefinancement ;

Rejette toute demande plus ample ou contraire.

La greffière La présidente


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