Les époux [J] ont engagé la SASU Alu Canet pour la fermeture de leur balcon avec un rideau de verre coulissant, après avoir signé un devis de 16 067,70 euros et versé un acompte de 30 %. Insatisfaits des travaux réalisés, qu’ils jugent non conformes et mal informés, ils ont demandé une expertise amiable. En juin 2023, ils ont assigné la SASU en référé pour ordonner une expertise judiciaire. Le tribunal a débouté leur demande, les a condamnés aux dépens et à verser une provision à la SASU. Les époux ont interjeté appel, demandant une nouvelle expertise et le déboutement de la SASU. Celle-ci a demandé la confirmation de l’ordonnance et a sollicité des dommages et intérêts pour procédure abusive. L’instruction a été clôturée en mai 2024.
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REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Grosse + copie
délivrées le
à
COUR D’APPEL DE MONTPELLIER
3e chambre civile
ARRET DU 19 SEPTEMBRE 2024
Numéro d’inscription au répertoire général :
N° RG 24/00029 – N° Portalis DBVK-V-B7I-QCMR
Décision déférée à la Cour :
Ordonnance du 20 DECEMBRE 2023
TJ HORS JAF, JEX, JLD, J. EXPRO, JCP DE PERPIGNAN
N° RG 23/00476
APPELANTS :
Monsieur [F] [J]
né le 14 Octobre 1954 à [Localité 5]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 4]
et
Madame [D] [Z] épouse [J]
née le 07 Juillet 1957 à [Localité 6]
de nationalité Française
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentés par Me Céline PIRET de la SCP VIAL-PECH DE LACLAUSE-ESCALE- KNOEPFFLER-HUOT-PIRET-JOUBES, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substitué sur l’audience par Me Geoffrey PEYRONNET, avocat au barreau des PYRENEES ORIENTALES
INTIMEE :
S.A.S.U. ALU CANET prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité audit siège
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Guillem COLOMER, avocat au barreau des PYRENEES-ORIENTALES substitué sur l’audience par Me Ouiçal MOUFADIL, avocat au barreau de MONTPELLIER
Ordonnance de clôture du 21 Mai 2024
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 28 mai 2024,en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant M. Gilles SAINATI, président de chambre et Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère, chargée du rapport.
Ce(s) magistrat(s) a (ont) rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
M. Gilles SAINATI, président de chambre
M. Fabrice DURAND, conseiller
Mme Emmanuelle WATTRAINT, conseillère
Greffier lors des débats : Mme Sabine MICHEL
ARRET :
– contradictoire ;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par M. Gilles SAINATI, président de chambre, et par Mme Sabine MICHEL, Greffière.
* *
EXPOSÉ DU LITIGE
Les époux [J] sont propriétaires d’un appartement situé à [Localité 3].
Ils ont sollicité la SASU Alu Canet pour la fermeture de leur balcon par un rideau de verre coulissant.
Un devis a été établi pour la réalisation de ces travaux le 19 avril 2022 pour un montant de 16 067,70 euros, et les consorts [J] réglaient le même jour un acompte de 30 %.
Les époux [J], estimant que les travaux n’étaient pas conformes à ce qui avait été convenu, que la SASU Alu Canet avait manqué à son devoir d’information, et qu’ils n’auraient pas contracté s’ils avaient eu connaissance de l’impossibilité de replier les vantaux, ont sollicité un expert amiable, lequel a rendu son rapport le 27 mars 2024.
Par acte de commissaire de justice du 27 juin 2023, les consorts [J] ont assigné la SAS Alu Canet en référé devant le président du tribunal judiciaire de Perpignan afin d’entendre ordonner une expertise fondée sur l’article 145 du code de procédure civile ayant pour objet de décrire les désordres affectant un appartement situé à Canet-en Roussillon et réserver les dépens.
Par ordonnance du 20 décembre 2023, le président du tribunal judiciaire de Perpignan a notamment :
– débouté les époux [J] de leur demande d’expertise ;
– condamné les époux [J] aux dépens ;
– Condamné les époux [J] à payer provisionnellement la somme de 11 247,39 euros TTC à la SASU Alu Canet ;
– Condamné les consorts [J] à payer à la SASU Alu Canet la somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
Par déclaration, enregistrée par le greffe le 2 janvier 2024, les époux [J] ont régulièrement interjeté appel de cette ordonnance.
Par leurs conclusions, enregistrées par le greffe le 2 avril 2024, ils demandent à la cour d’appel d’infirmer l’ordonnance rendu le 20 décembre 2023 par le juge des référés du tribunal judiciaire de Perpignan et, statuant à nouveau, de voir désigner tel expert qu’il plaira avec pour mission de :
o se rendre sur les lieux ;
o prendre connaissance des conventions intervenues entre les parties ;
o déterminer si les travaux ont été réalisés conformément à ce qui avait été convenu entre les parties ;
o déterminer si les travaux, tels que commandés par les époux [J] techniquement réalisables ;
o dans cette hypothèse, décrire la nature des travaux à réaliser pour se conformer à la commande ;
o chiffrer leur coût et leur durée ;
o donner au Tribunal tous éléments permettant de statuer sur les responsabilités et de déterminer si la société Alu Canet a satisfait à son devoir de conseil et d’information;
o donner au Tribunal tous éléments permettant de chiffrer les préjudices par les époux [J] ;
o dire que l’expert déposera un pré-rapport.
Ils demandent en outre à la cour de débouter la société Alu Canet de l’intégralité de ses demandes, de la condamner à leur verser une somme de 4 000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, avec remboursement de toutes sommes qui pourraient être mises à leur charge en application des dispositions du Décret n° 2001-212 du 08 mars 2001, modifiant le Décret 96-1080 du 12 décembre 1996 portant fixation du tarif des Huissiers de Justice en matière civile et commerciale et relatif à la détermination du Droit proportionnel de recouvrement ou d’encaissement mis à la charge des créanciers, et de la condamner également aux entiers dépens de l’instance, dont distraction au profit de la SCP Vial Pech De Laclause Escale Knoepffler Huot Piret Joubes, avocats soussignés, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
Par ses conclusions, enregistrées par le greffe le 17 mai 2024, la SASU Alu Canet demande à la cour d’appel de confirmer en toutes ses dispositions l’ordonnance de référé rendue par le tribunal judiciaire de Perpignan le 20 décembre 2023. A titre reconventionnel, elle sollicite la condamnation des époux [J] au paiement d’une somme de 3 000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive, outre une somme de 3 000 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile. A titre subsidiaire, elle demande à la cour de :
– modifier le point 3 de la mission proposée pour être rédigé comme suit » Déterminer si les travaux ont été réalisés conformément au devis signé entre les parties » ;
– Supprimer de la mission les points 4 et 5 de la mission telle que proposée par les époux [J] ;
– Modifier le point 7 de la mission pour être rédigé comme suit » Donner au Tribunal tous élément permettant de statuer sur les éventuelles responsabilités » ;
– Dire et juger que les frais d’expertise à intervenir seront à la charge des demandeurs à l’expertise.
La clôture de l’instruction est intervenue le 21 mai 2024.
Pour un plus ample exposé des faits et des prétentions des parties, il est expressément renvoyé aux conclusions des parties et à l’ordonnance déférée.
Sur la demande d’expertise
Le juge des référés a rejeté la demande d’expertise aux motifs que les époux [J] ne démontraient pas l’existence d’un potentiel litige eu égard aux photographies de positionnement des vantaux, insuffisantes en elles-mêmes à justifier une expertise judiciaire.
Les appelants soutiennent au contraire que le litige qui les oppose à la SASU Alu Canet serait bien réel puisque les travaux réalisés ne correspondraient pas à ceux prévus. Selon eux, il importe qu’un expert judiciaire se prononce sur la faisabilité technique de l’ouvrage et sa correspondance avec les conventions passées entre les parties. Ils ajoutent que les photographies qu’ils versent aux débats sont le seul élément susceptible d’être produit, le devis étant totalement taisant sur les demandes des concluants et aucun plan d’exécution ne leur ayant été fourni, et qu’un rapport d’expertise privée conclut désormais à la possibilité d’une installation conforme à leurs souhaits. Selon eux, le non-respect par la société Alu Canet de son devoir d’information et de conseil et la réalisation de travaux non conformes à la commande suffisent à caractériser leur intérêt légitime à une mesure d’expertise judiciaire.
L’intimée fait pour sa part valoir qu’une mesure d’expertise est une mesure d’instruction technique qui ne peut tendre à se prononcer sur le devoir de conseil, comme les époux [J] le demandent pourtant. Elle ajoute que l’intérêt légitime à expertise n’est pas démontré, en l’absence de démonstration que les travaux réalisés différeraient du devis.
Si, aux termes des photographies, du rapport d’expertise amiable et du devis de la société STAL versés aux débats (pièces 2, 5 et 6 des appelants), les époux [J] apportent des éléments tendant à démontrer qu’il était possible de faire ouvrir le mur de verre en totalité sur la droite afin que les vitrages soient tout le long du mur comme ils le souhaitent, pour autant ils ne rapportent pas le moindre commencement de preuve s’agissant de la prétendue non-conformité des travaux à la commande et du défaut de conseil qu’ils imputent à la société Alu Canet, étant précisé que le devis qu’ils ont accepté (pièce 1 des appelants) mentionne expressément un ‘refoulement des deux côtés, une partie haute et une partie gauche’.
Dans ces conditions, il n’existe en l’espèce aucun motif légitime démontré de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige au sens de l’article 145 du code de procédure civile et l’ordonnance sera confirmée.
Sur la provision
Le juge des référés a estimé qu’aucun élément du dossier ne justifiait l’absence de paiement de la somme sollicitée par la SAS Alu Canet au titre du solde de sa facture.
Les époux [J] soutiennent au contraire que seul un examen approfondi des documents contractuels pourrait permettre de connaître la commune intention des parties et de trancher cette question, qui relèverait de ce fait d’une analyse au fond.
Aucun élément du dossier ne laissant apparaître que les travaux, interrompus à la demande expresse du maître de l’ouvrage, n’auraient pas été réalisés conformément au devis accepté.
Dans ces conditions, l’obligation de paiement des époux [J] à l’égard de la SAS Alu Canet n’apparaît pas sérieusement contestable au regard des dispositions de l’article 835 du code de procédure civile.
Dès lors, l’ordonnance sera confirmée.
Sur la demande de condamnation à des dommages et intérêts pour procédure abusive
Si la demande des époux [J] n’est pas fondée, pour autant aucun élément du dossier ne laisse apparaître qu’elle aurait dégénéré en abus de droit.
Dans ces conditions, la SAS Alu Canet sera déboutée de sa demande.
Sur les frais irrépétibles et les dépens
Eu égard à l’issue du litige, l’ordonnance sera confirmée.
Les époux [J], succombants, seront condamnés à payer à la SAS Alu Canet la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Ils seront également condamnés aux entiers dépens d’appel.
La cour,
Confirme en toutes ses dispositions l’ordonnance rendue le 20 décembre 2023 par le juge des référés près le tribunal judiciaire de Perpignan ;
Y ajoutant,
Déboute la SAS Alu Canet de sa demande de dommages et intérêts pour procédure abusive ;
Condamne monsieur [F] [J] et madame [D] [Z] épouse [J] à payer à la SAS Alu Canet la somme de 1 500 euros en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne monsieur [F] [J] et madame [D] [Z] épouse [J] aux entiers dépens d’appel.
Le greffier, Le président,