Évaluation de l’Inaptitude et de l’Invalidité : Vers une Nouvelle Expertise Médicale pour Clarifier les Droits à Pension

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Évaluation de l’Inaptitude et de l’Invalidité : Vers une Nouvelle Expertise Médicale pour Clarifier les Droits à Pension

Licenciement de Monsieur [C] [O]

Monsieur [C] [O], né le 1er avril 1982, agent [6] depuis 2006, a été licencié pour inaptitude non professionnelle le 15 décembre 2018. Il a été en arrêt de travail à partir du 29 août 2017, en affection de longue durée pour des troubles dépressifs récurrents, jusqu’au 30 août 2022.

Reconnaissance de l’incapacité

La Maison Départementale des Personnes Handicapées (MDPH) a reconnu à Monsieur [C] [O] un taux d’incapacité compris entre 50% et 79%, lui accordant l’Allocation aux Adultes Handicapés à partir du 1er avril 2018 jusqu’au 31 mars 2023. Il a également demandé une pension d’invalidité, qui lui a été refusée le 28 janvier 2020.

Examen médical et recours

Un examen par le médecin conseil a eu lieu le 14 octobre 2019, concluant à une « mauvaise orientation du dossier ». Monsieur [C] [O] a saisi la commission médicale de recours amiable le 26 janvier 2021. Une consultation avec le médecin conseil a été programmée pour le 31 janvier 2022, mais le compte-rendu d’examen n’a pas été produit.

Décisions de la CCAS

Le 15 février 2022, la CCAS de la [6] a informé Monsieur [C] [O] que la Commission Médicale d’Appel avait donné un avis défavorable à sa demande d’invalidité. Le 23 mars 2022, la CCAS a rejeté sa demande, estimant qu’il ne présentait pas une invalidité réduisant au moins des 2/3 sa capacité de travail.

Recours judiciaire

Monsieur [C] [O] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Paris le 24 juin 2022, demandant une expertise médicale en raison de deux pathologies invalidantes. Le tribunal a déclaré son recours recevable le 27 juin 2023 et a ordonné une consultation médicale pour évaluer son état de santé à des dates précises.

Expertise médicale et conclusions

Le rapport du 24 janvier 2024 du Dr. [T] a conclu que Monsieur [C] [O] pouvait travailler avec un poste adapté, mais ne s’est pas prononcé sur la catégorie d’invalidité. Le tribunal a donc décidé d’ordonner une nouvelle consultation médicale pour clarifier la situation.

Ordonnances du tribunal

Le tribunal a désigné le Dr. [E] [J] pour procéder à cette nouvelle consultation médicale, avec des instructions précises sur l’examen et la remise d’un rapport écrit. La Caisse de Coordination aux Assurance Sociales de la [6] doit également transmettre l’intégralité des rapports médicaux au médecin désigné.

Prochaines étapes

L’affaire a été renvoyée à l’audience du 19 mars 2025, et les dépens ont été réservés.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 novembre 2024
Tribunal judiciaire de Paris
RG
22/01787
TRIBUNAL
JUDICIAIRE
DE PARIS [1]

[1] 2 Expéditions délivrées aux parties en LRAR le :
2 Expéditions délivrées aux avocats en LS le :

PS ctx protection soc 3

N° RG 22/01787 – N° Portalis 352J-W-B7G-CXMF6

N° MINUTE :

Requête du :

24 Juin 2022

JUGEMENT
rendu le 06 Novembre 2024
DEMANDEUR

Monsieur [C] [O]
[Adresse 1]
[Localité 3]

Représenté par Maître Carole YTURBIDE, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, avocat plaidant

DÉFENDERESSE

C.C.A.S. DE LA [6]
[Adresse 2]
[Localité 3]

Représentée par Maître Catherine LANFRAY MATHIEU de la SELEURL CLMC AVOCATS, avocats au barreau de PARIS, avocats plaidant

COMPOSITION DU TRIBUNAL

Madame RANDOULET, Magistrate
Monsieur MAIGNE, Assesseur
Monsieur PETIT, Assesseur

assistés de Marie LEFEVRE, Greffière

Décision du 06 Novembre 2024
PS ctx protection soc 3
N° RG 22/01787 – N° Portalis 352J-W-B7G-CXMF6

DEBATS

A l’audience du 11 Septembre 2024 tenue en audience publique, avis a été donné aux parties que le jugement serait rendu par mise à disposition au greffe le 06 Novembre 2024.

JUGEMENT

Rendu par mise à disposition au greffe
Contradictoire
en premier ressort

EXPOSE DU LITIGE

Monsieur [C] [O], né le 1er avril 1982, agent [6] depuis 2006 a été licencié pour inaptitude non professionnelle le 15 décembre 2018.

Il a été arrêté à compter du 29 août 2017 et en affection de longue durée du 30 août 2017 au 30 août 2022, pour troubles dépressifs récurrents.

La MDPH lui a reconnu un taux d’incapacité compris entre 50% et 79% lui accordant le bénéfice de l’Allocation aux Adultes Handicapés à compter du 1er avril 2018 jusqu’au 31 mars 2023.

Il a sollicité l’attribution d’une pension d’invalidité qui lui a été refusée le 28 janvier 2020.

Il avait été examiné le 14 octobre 2019 par le médecin conseil, qui concluait notamment à « une mauvaise orientation du dossier ».

Monsieur [C] [O] a saisi la commission médicale de recours amiable d’un recours le 26 janvier 2021.

Il a été convoqué pour une consultation devant le médecin conseil le 31 janvier 2022.

Le compte-rendu d’examen n’a pas été produit.

Le procès-verbal du 14 février 2022, ne mentionnait pas de cochage des cases « oui » ou « non » (à la question sur la réduction des 2/3) mais mentionnait un avis négatif à la question « une révision à l’initiative de la Caisse est-elle prévisible? »

Le médecin du Conseil de prévoyance s’était déclaré favorable à l’attribution d’une invalidité de catégorie 1.

Le 15 février 2022, le médecin conseil de la Caisse de Coordination aux Assurance Sociales de la [6] (ci-après la CCAS de la [6]) a informé Monsieur [O], que les médecins siégeant à la Commission Médicale d’Appel du 14 février 2022 avaient donné un avis défavorable à sa demande d’invalidité.

Par décision du 23 mars 2022, la CCAS de la [6] avait rejeté sa demande au motif que sa commission d’invalidité, après avoir pris connaissance du dossier transmis par le Comité Médical d’Expertise, avait estimé qu’il ne présentait pas une invalidité réduisant au moins des 2/3 sa capacité de travail ou de gain.

Suivant recours enregistré le 24 juin 2022, Monsieur [O] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Paris (contentieux de l’incapacité) d’un recours à l’encontre de cette décision et a sollicité la mise en œuvre d’une expertise, précisant qu’il souffre de deux pathologies invalidantes (dépression très sévère et asthme important).

Par jugement avant dire droit du 27 juin 2023, le Tribunal a déclaré le recours de Monsieur [C] [O] recevable et sursis à statuer dans l’attente de la réalisation d’une consultation médicale confiée
au Docteur [Y] [T], médecin psychiatre, avec notamment pour mission de dire si l’état de santé de Monsieur [C] [O] au 14 avril 2019 et 14 octobre 2019, justifiait son classement dans la catégorie 1 ou 2 ou 3 des invalides au regard des dispositions des articles L341-3 et L341-4 du code de la sécurité sociale.

Les parties ont été reconvoquées à l’audience 31 janvier 2024. Dans l’attente de la transmission du rapport de l’expert judiciaire, l’affaire a été renvoyée à l’audience du 11 septembre 2024 à laquelle elle a été retenue.

A l’audience, Monsieur [O], assisté, a sollicité la réalisation d’une nouvelle expertise. Il soutient que le rapport d’expertise du Docteur [T] reconnait qu’il peut travailler « un peu », que cela correspondrait donc à la catégorie 1 d’invalidité, mais que pour autant, il ne se prononce pas sur cette catégorie. Par ailleurs, il fait valoir que l’expertise n’est ni claire, ni explicite ni dénuée d’ambiguïté.

La C.C.A.S de la [6], représentée, s’oppose à la demande d’expertise. Elle soutient que le rapport d’expertise judiciaire confirme que Monsieur [O] a des troubles qui ne sont pas suffisants pour l’empêcher de travailler. Elle demande à ce que le Tribunal entérine le rapport d’expertise dont les conclusions ne viennent que confirmer les deux décisions médicales prises antérieurement.

L’affaire a été mise en délibéré au 06 novembre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

Sur la pension d’invalidité

Aux termes des articles L341-1 et R341-2 du code de la sécurité sociale, l’assuré a droit à une pension d’invalidité lorsqu’il présente une invalidité réduisant d’au moins des 2/3 sa capacité de travail ou de gain, c’est-à-dire le mettant hors d’état de se procurer un salaire supérieur au tiers de la rémunération normale perçue dans la même région par des travailleurs de la même catégorie, dans la profession qu’il exerçait avant la date de l’interruption de travail suivie d’invalidité ou la date de la constatation médicale de l’invalidité si celle-ci résulte de l’usure prématurée de l’organisme.

Aux termes de l’article L341-3 du code de la sécurité sociale, l’état d’invalidité est apprécié en tenant compte de la capacité de travail restante, de l’état général, de l’âge et des facultés physiques et mentales de l’assuré, ainsi que de ses aptitudes et de sa formation professionnelle:
soit après consolidation de la blessure en cas d’accident non régi par la législation sur les accidents du travail,soit l’expiration de la période pendant laquelle l’assuré a bénéficié d’indemnités journalières,soit après stabilisation de son état intervenue avant l’expiration de cette période, soit au moment de la constatation médicale de l’invalidité, lorsque cette invalidité résulte de l’usure prématurée de l’organisme.
Aux termes de l’article L341-4 du même code, en vue de la détermination du montant de la pension, les invalides sont classés comme suit :
1°) invalides capables d’exercer une activité rémunérée,
2°) invalides absolument incapables d’exercer une profession quelconque,
3°) invalides qui, étant absolument incapables d’exercer une profession, sont, en outre, dans l’obligation d’avoir recours à l’assistance d’une tierce personne pour effectuer les actes ordinaires de la vie.

Aux termes de l’article R142-16 du code de la sécurité sociale, la juridiction peut ordonner toute mesure d’instruction.

Le 27 juin 2023, le Tribunal avait ordonné avant dire droit une consultation médicale au regard du fait que :
la Caisse avait refusé l’attribution de toute pension d’invalidité à Monsieur [C] [O] au motif que le collège des médecins en appel avait rendu son avis après consultation médicale du 22 janvier 2022 et étude des documents médicaux produits par monsieur [O] qui ne produisait pas d’élément médical pertinent ou nouveau ; la Caisse ne produisait pas le rapport médical soumis au collège de médecin ni le compte rendu d’examen du 22 janvier 2022 Monsieur [C] [O] produisait aux débats divers certificats médicaux récents – du docteur [H] du 18 mars 2022 attestant que son état de santé de justifiait « l’obtention d’une pension d’invalidité catégorie 2 », et du professeur [R] psychiatre du 6 janvier 2022 qui déclarait que « l’intensité des symptômes entrain[ait] une invalidité qui rédui[sait] d’au moins des 2/3 sa capacité de travail ou de gain » – contredisant les arguments de la Caisse,
La consultation médicale ordonnée avait notamment pour but de dire si l’état de santé de Monsieur [C] [O] au 14 avril 2019 et 14 octobre 2019, justifiait son classement dans la catégorie 1 ou 2 ou 3 des invalides au regard des dispositions des articles L341-3 et L341-4 du code de la sécurité sociale.

Or, il ressort du rapport du 24 janvier 2024 que le Dr. [T] conclut que « Monsieur [C] [O] bénéficie de prises en charge adaptées mais erratique depuis longtemps, ce qui ne justifie pas une classification en invalidité de catégorie deux ou trois. Il reste capable de travailler, mais requiert un poste plus adapté ou protégé ».

A travers ces conclusions, bien que reconnaissant la capacité pour M. [O] de travailler avec un poste adapté ou protégé, le Docteur [T] ne se prononce pas sur la question de savoir si M. [O] doit se voir reconnaitre une invalidité de catégorie 1 en application de l’article L.341-4 du code de la sécurité sociale.

Au regard de cette lacune et compte tenu de l’utilité d’une consultation médicale pour parvenir à trancher le litige comme cela avait d’ores et déjà été relevé par le jugement du 27 juin 2023, il y a lieu d’ordonner avant dire droit une nouvelle consultation médicale.

En l’espèce, le médecin consultant devra prendre en compte l’état de santé de Monsieur [C] [O] à la date de la demande de la pension d’invalidité (14 avril 2019), et le cas échéant – en l’absence de contestation de la Caisse à la date de l’examen du 14 octobre 2019 – et qu’en cas d’aggravation de son état de santé depuis cette date, il appartiendra à Monsieur [C] [O] de déposer une nouvelle demande de pension d’invalidité.

En outre, Monsieur [C] [O] avançant par ailleurs une pathologie asthmatique, le médecin consultant pourra se faire assister d’un sapiteur dans cette spécialité s’il l‘estime utile.

Au surplus, le Tribunal rappelle que :
le praticien-conseil ou l’autorité compétente pour examiner le recours préalable transmet l’expert ou au médecin consultant désigné par la juridiction compétente, sans que puisse lui être opposé l’article 226-13 du code pénal, l’intégralité du rapport médical ayant fondé sa décision (article L142-10 du code de la sécurité sociale),le tribunal demande par tous moyens, selon le cas l’organisme de sécurité sociale de transmettre l’expert ou au consultant désigné l’intégralité du rapport médical mentionné l’article L142-6 ayant fondé sa décision, sous pli fermé avec la mention  » confidentiel  » apposée sur l’enveloppe (article R142-16-3 du m me code),Monsieur [C] [O] pourra se faire assister par tout médecin de son choix, rémunéré par ses soins, lors de la consultation.
Sur les dépens

Les dépens seront réservés.

PAR CES MOTIFS

LE TRIBUNAL, après en avoir délibéré conformément à la loi, statuant publiquement par jugement avant dire droit, contradictoire rendu par mise à disposition au greffe,

SURSOIT A STATUER et avant dire droit ORDONNE une nouvelle consultation médicale ;

DESIGNE pour y procéder le Docteur [E] [J], médecin psychiatre, [[Courriel 5]], [Adresse 4], avec pour mission :

Convoquer les parties et le cas échéant leurs avocats,
Rendre connaissance du dossier médical de Monsieur [C] [O],
Procéder l’examen clinique de Monsieur [C] [O] en son cabinet,
Dire si l’état de santé de Monsieur [C] [O] au 14 avril 2019 et 14 octobre 2019, justifiait son classement dans la catégorie 1 ou 2 ou 3 des invalides au regard des dispositions des articles L341-3 et L341-4 du code de la sécurité sociale,
Faire toutes observations utiles,
Remettre un rapport écrit au tribunal de céans dans un délai de quatre mois à compter de la date du présent jugement ;

INVITE Monsieur [C] [O] à transmettre au médecin désigné l’intégralité de son dossier médical, dès réception du présent jugement ;

DIT que la Caisse de Coordination aux Assurance Sociales de la [6] devra transmettre au médecin désigné l’intégralité du rapport médical et des éléments et informations à caractère secret ayant fondé sa décision ;

DIT que la Caisse fera l’avance des frais d’expertise conformément à l’article L.142-11 du Code de la sécurité sociale ;

RENVOIE l’affaire à l’audience du 19 mars 2025 à 9 heures ;

DIT que la notification du présent jugement vaudra convocation des parties à ladite audience ;

RESERVE les dépens.

Fait et jugé à Paris le 06 novembre 2024

La Greffière La Présidente


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