Contexte de l’accidentLe 22 mai 2019, Mme [T] [V], gardienne salariée de la SA [13], a été victime d’une agression physique par un locataire alors qu’elle était dans sa loge. Elle a subi des blessures aux genoux, à l’oreille gauche, à la tête, au dos, aux côtes et aux doigts de la main droite. La société a déclaré l’accident du travail le 24 mai 2019, sans émettre de réserves. Un certificat médical a été établi le même jour, indiquant des douleurs musculaires et rachidiennes, entraînant un arrêt de travail initial jusqu’au 29 mai 2019, prolongé jusqu’au 1er septembre 2022. Prise en charge et contestationLa caisse primaire d’assurance maladie a pris en charge le sinistre le 28 juin 2019. Cependant, la société a contesté l’imputabilité des arrêts de travail liés à l’accident, saisissant la commission médicale de recours amiable, qui a rejeté sa demande le 25 juin 2021. La société a ensuite porté l’affaire devant le tribunal judiciaire de Nanterre le 1er septembre 2021. Demandes de la sociétéLors de l’audience du 7 octobre 2024, la SA [13] a demandé la recevabilité et le bien-fondé de son recours, l’infirmation de la décision de la commission, ainsi qu’une expertise médicale pour établir le lien entre les lésions de Mme [V] et l’accident. Elle a également requis que la caisse remette tous les éléments médicaux à l’expert désigné et a demandé la condamnation de la caisse à 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile. Réponse de la caisse primaire d’assurance maladieLa caisse a demandé le rejet du recours de la société, arguant qu’il n’existait pas de preuve d’une cause étrangère aux arrêts de travail. Elle a également souligné que Mme [V] bénéficiait d’une présomption d’imputabilité en raison de l’accident survenu dans le cadre de son travail, et que la commission médicale avait confirmé cette imputabilité. Décision du tribunalLe tribunal a ordonné une consultation médicale pour examiner les éléments du dossier de Mme [V] et déterminer les lésions causées par l’accident, ainsi que la durée des arrêts de travail. Il a également précisé que la caisse devait transmettre tous les documents médicaux nécessaires à l’expert et que le rapport de l’expert devait être remis dans un délai de trois mois. Le tribunal a réservé les dépens et a mis l’affaire en délibéré. |
Quelles sont les obligations de l’employeur en matière d’accident du travail ?
L’employeur a plusieurs obligations en matière d’accidents du travail, notamment en vertu du Code de la sécurité sociale. Selon l’article L. 411-1, tout accident survenu à un salarié dans le cadre de son travail est présumé être un accident du travail, sauf preuve du contraire.
Cette présomption d’imputabilité s’applique tant que l’arrêt de travail est prescrit, et s’étend jusqu’à la consolidation de l’état de santé de la victime. L’employeur qui conteste cette présomption doit apporter la preuve qu’il n’existe aucun lien de causalité entre l’accident et les lésions subies par le salarié.
De plus, l’article L. 452-1 du Code de la sécurité sociale stipule que l’employeur doit déclarer tout accident du travail à la caisse primaire d’assurance maladie dans les 48 heures suivant l’accident.
Il est également tenu de veiller à la santé et à la sécurité de ses employés, conformément à l’article L. 4121-1 du Code du travail, qui impose une obligation de sécurité de résultat.
En cas de contestation, l’employeur doit justifier ses arguments par des éléments probants, comme des certificats médicaux ou des rapports d’expertise.
Quels sont les droits de la victime d’un accident du travail ?
La victime d’un accident du travail bénéficie de plusieurs droits, notamment en matière de prise en charge médicale et d’indemnisation. Selon l’article L. 431-1 du Code de la sécurité sociale, la victime a droit à la prise en charge de ses soins médicaux liés à l’accident.
Elle peut également bénéficier d’indemnités journalières, conformément à l’article L. 323-1, qui prévoit le versement d’indemnités en cas d’incapacité temporaire de travail. Ces indemnités sont calculées sur la base du salaire brut de la victime.
En cas de séquelles permanentes, l’article L. 434-1 prévoit le droit à une rente d’incapacité permanente, qui est déterminée en fonction du taux d’incapacité reconnu par la commission des droits des victimes.
La victime a également le droit de contester la décision de la caisse primaire d’assurance maladie, comme le stipule l’article L. 142-1, en saisissant la commission médicale de recours amiable.
Enfin, la victime peut demander des dommages et intérêts pour le préjudice subi, en vertu de l’article 1240 du Code civil, qui impose à toute personne de réparer le dommage causé par sa faute.
Comment se déroule la procédure d’expertise médicale dans le cadre d’un litige sur l’accident du travail ?
La procédure d’expertise médicale est encadrée par le Code de la sécurité sociale et le Code de procédure civile. Selon l’article R. 142-8-5 du Code de la sécurité sociale, la commission médicale de recours amiable doit établir un rapport motivé sur les cas examinés.
En cas de contestation, comme dans le litige en question, le tribunal peut ordonner une expertise judiciaire. L’article 146 du Code de procédure civile précise que cette mesure d’instruction peut être ordonnée si la partie qui l’allègue ne dispose pas d’éléments suffisants pour prouver ses dires.
L’expert désigné a pour mission d’examiner le dossier médical de la victime, de déterminer les lésions causées par l’accident et d’évaluer la durée des arrêts de travail. Il doit également établir si l’accident a révélé ou aggravé un état pathologique préexistant.
L’expert doit remettre un rapport écrit au tribunal dans un délai imparti, généralement de trois mois, et ce rapport est communiqué aux parties. Les frais d’expertise sont généralement à la charge de la caisse primaire d’assurance maladie, conformément à l’arrêté du 29 décembre 2020.
Enfin, les parties peuvent contester les conclusions de l’expert, et le tribunal statuera en fonction des éléments présentés.
Quelles sont les conséquences d’une contestation de l’imputabilité d’un accident du travail ?
La contestation de l’imputabilité d’un accident du travail a des conséquences significatives tant pour l’employeur que pour la victime. Selon l’article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale, tant que l’accident est reconnu comme tel, la victime bénéficie d’une présomption d’imputabilité.
Si l’employeur conteste cette imputabilité, il doit apporter la preuve qu’il n’existe aucun lien de causalité entre l’accident et les lésions subies. En cas de succès dans cette contestation, la victime pourrait perdre ses droits à l’indemnisation et à la prise en charge de ses soins.
De plus, si la caisse primaire d’assurance maladie rejette la demande de prise en charge, la victime devra assumer elle-même les frais médicaux liés à l’accident. Cela peut également affecter le versement des indemnités journalières, qui sont conditionnées à la reconnaissance de l’accident.
En cas de litige, la victime peut saisir le tribunal, qui examinera les éléments de preuve présentés par les deux parties. Si le tribunal confirme l’imputabilité, la caisse devra prendre en charge les frais et indemniser la victime.
En revanche, si la contestation est jugée fondée, cela peut entraîner des conséquences financières pour la victime, qui pourrait être amenée à rembourser des sommes indûment perçues.
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE NANTERRE
■
PÔLE SOCIAL
Affaires de sécurité sociale et aide sociale
JUGEMENT RENDU LE
13 Novembre 2024
N° RG 21/01481 – N° Portalis DB3R-W-B7F-W5IW
N° Minute : 24/01603
AFFAIRE
S.A. [13]
C/
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 16] [Localité 11]- [Localité 9]
Copies délivrées le :
DEMANDERESSE
S.A. [13]
[Adresse 2]
BP 135
[Localité 7]
représentée par Me William IVERNEL, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE, vestiaire : 1702
substitué à l’audience par Me Rodolphe MENEUX, avocat au barreau des HAUTS-DE-SEINE
DEFENDERESSE
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE [Localité 16] [Localité 11]- [Localité 9]
[Adresse 5]
Service Contentieux
[Localité 6]
représentée par Mme [Y] [A], munie d’un pouvoir régulier
*
L’affaire a été débattue le 07 Octobre 2024 en audience publique devant le tribunal composé de :
Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Première vice-présidente
Gérard BEHAR, Assesseur, représentant les travailleurs salariés
Patricia TALIMI, Assesseur, représentant les travailleurs non-salariés
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats et du prononcé : Stéphane DEMARI, Greffier.
JUGEMENT
Prononcé par décision contradictoire, avant dire droit et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
La SA [13] a renseigné le 24 mai 2019, une déclaration d’accident du travail concernant Mme [T] [V], salariée en qualité de gardienne, faisant mention d’un accident survenu le 22 mai 2019 à 17h05 dans ces termes : Mme [V] était dans sa loge en train de signer un contrat avec une nouvelle locataire. Elle a vu un autre locataire déposer des encombrants près du container. Elle lui a gentiment rappelé qu’il y a des dates à respecter. Il n’a pas apprécié la remarque et l’a insulté et agressé physiquement – mains-pieds – les 2 genoux, oreille gauche, tête, cheveux, dos, côtes et les doigts de la main droite. La société n’a émis aucune réserve. Le certificat médical initial établi le même jour fait état de douleurs musculaires diffuses, douleurs rachidiennes et est assorti d’un premier arrêt de travail jusqu’au 29 mai 2019, puis prolongé jusqu’au 1er septembre 2022 de manière continue. Le 28 juin 2019, la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 15]-[Localité 11]-[Localité 9] a pris en charge le sinistre au titre de la législation professionnelle. L’état de santé de Mme [V] a été déclaré consolidé à la date du 1er septembre 2022.
Contestant l’imputabilité des arrêts de travail pris en charge au titre de l’accident du travail, la société a saisi le 21 mars 2021 la commission médicale de recours amiable de la caisse, laquelle a rendu un avis de rejet en sa séance du 25 juin 2021. Par requête enregistrée le 1er septembre 2021, la société a alors saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Nanterre.
L’affaire a été appelée à l’audience du 7 octobre 2024, date à laquelle les parties représentées ont comparu et pu émettre leurs observations.
Aux termes de ses dernières conclusions, la SA [13] demande de :
– Déclarer recevable et bien fondé son recours ;
– Infirmer la décision de rejet de commission,
A titre principal,
– Ordonner, avant dire droit, une expertise ou une consultation sur pièces du dossier médical de Mme [V] ;
– Rappeler que le praticien-conseil pour examiner le recours préalable transmet à l’expert ou au médecin consultant désigné par la juridiction compétente, sans que puisse lui être opposé l’article 226-13 du code pénal, l’intégralité du rapport médical ayant fondé sa décision ;
– Ordonner à la caisse de remettre à l’expert nommé les pièces en sa possession, le rapport d’évaluation des séquelles détenu par le praticien-conseil ainsi que tous les éléments ayant participé à sa rédaction ainsi que le rapport de la CMRA sous pli confidentiel ;
– Prendre acte que la société désigne le Dr [O] -[Adresse 4] afin de recevoir les éléments médicaux et donner à la caisse de transmettre audit médecin les éléments communiqués à l’expert désigné, par application de l’article R 142-16-3 alinéa 2 du CSS, ce dans le délai de 20 jours suivant la notification du jugement avant dire droit à l’intervenir ;
– Dire que l’expert pourra également se faire remettre les éléments médicaux détenus par le ou les médecins ayant prescrits les arrêts de travail de Mme [V] ainsi que le dossier médical professionnel détenu par le médecin du travail, en tant que de besoin, sur simple sollicitation et présentation du jugement avant dire droit à intervenir ;
– Dire que la mission de l’expert consistera à prendre connaissance des éléments médicaux et administratifs communiqués par les parties, retracer les arrêts de travail de Mme [V] et dire si l’ensemble des lésions ou la pathologie de celle-ci est en relation directe et unique avec l’accident du travail du 22/05/2019 ; dire si l’évolution des lésions de Mme [V] est due à un état pathologique préexistant évoluant pour son propre compte, à un nouveau fait accidentel ou à un état séquellaire ; déterminer quels sont les arrêts de travail directement et uniquement imputables à l’accident du travail du 22/05/2019 ; fixer la date de consolidation des lésions dont a souffert Mme [V] suite à l’accident du travail du 22/05/2019 ; établir un pré-rapport et transmettre celui-ci au Dr [O] désigné par l’employeur, afin de recueillir ses éventuelles observations ; établir ensuite un rapport définitif et remettre celui-ci au greffe du tribunal de céans dans un délai de 3 mois à compter de la saisine ;
– Ordonner l’exécution provisoire par application de l’article R 142-10-6 du code de la sécurité sociale ;
– Dire que les frais d’expertise ou de consultation seront aux frais avancés de la société [13];
– Renvoyer l’affaire à une prochaine audience afin qu’il soit statué au vu du rapport de l’expert ;
En tout état de cause,
-Condamner la caisse à 1000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Aux termes de ses dernières conclusions, la caisse primaire d’assurance maladie de la [Localité 15]-[Localité 11]-[Localité 9] requiert de :
A titre principal,
– Rejeter le recours et l’ensemble des demandes de la société ;
– Condamner la société aux dépens ;
A titre subsidiaire,
– si le tribunal devrait ordonner la mise en œuvre d’une expertise médicale judiciaire sur pièce: la mission qui sera confiée à l’expert ne pourra être que la suivante : dire si les arrêts de travail et soins prescrits à Mme [V] à compter du 29 mai 2019 jusqu’au 1er septembre 2022 ont une cause totalement étrangère à l’accident du travail dont elle a été victime le 22 mai 2019.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se référer aux conclusions déposées pour l’audience du 7 octobre 2024 pour un plus ample exposé de leurs moyens et prétentions.
A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 13 novembre 2024 par mise à disposition au greffe.
Il sera rappelé qu’il n’entre pas dans les pouvoirs du tribunal d’annuler, de réformer ou de confirmer une décision prise par un organisme chargé d’une mission de service public, le tribunal étant saisi du litige, et non de la décision querellée.
La société sollicite une mesure d’expertise faute pour la commission médicale de recours amiable d’avoir pu prendre en compte les observations médicales de son médecin-conseil, le Dr [O] décrites le 13 mai 2021. Elle estime que les arrêts de prolongation prescrits à compter du 29 mai 2019, faisant mention d’une lésion différente à la lésion initiale, sont sans relation directe avec l’accident du travail, de sorte que si la caisse n’avait pas l’obligation de mettre en œuvre une procédure contradictoire à l’égard de la société, il lui appartenait néanmoins de solliciter l’avis du médecin-conseil.
La caisse entend voir rejeter la demande d’expertise, faute pour la société d’apporter tout élément de preuve d’ordre médical ou de commencement de preuve quant à l’existence d’une cause totalement étrangère au travail. Elle fait valoir en outre qu’elle n’avait aucune obligation légale d’informer la société de l’existence d’une nouvelle lésion du 6 septembre 2019, ni de diligenter une procédure d’instruction sur ce point. De surcroît, elle indique que Mme [V], victime d’accident au temps et au lieu de son travail, bénéficiait d’une présomption d’imputabilité, qui ne pouvait s’interrompre à la date d’une nouvelle lésion, puisque la présomption d’imputabilité couvre l’ensemble des prestations servies jusqu’à la date de consolidation déclarée le 1er septembre 2022. Enfin, elle fait observer que la commission médicale, composée de deux experts, a confirmé l’imputabilité.
Il résulte de la combinaison des articles 1353 du code civil et L. 411-1 du code de la sécurité sociale que la présomption d’imputabilité au travail des lésions apparues à la suite d’un accident du travail ou d’une maladie professionnelle, dès lors qu’un arrêt de travail a été initialement prescrit ou que le certificat médical initial d’accident du travail est assorti d’un arrêt de travail, s’étend à toute la durée d’incapacité de travail précédant soit la guérison complète, soit la consolidation de l’état de la victime, et qu’il appartient à l’employeur qui conteste cette présomption d’apporter la preuve contraire.
Par application des dispositions de l’article 146 du code de procédure civile, une mesure d’instruction ne peut être ordonnée sur un fait que si la partie qui l’allègue ne dispose pas d’éléments suffisants pour le prouver et en aucun cas, une mesure d’instruction ne peut être ordonnée en vue de suppléer la carence de la partie dans l’administration de la preuve.
Selon l’article R. 142-8-5 du code de la sécurité sociale dans sa rédaction applicable au litige dispose que la commission médicale de recours amiable établit, pour chaque cas examiné, un rapport comportant son analyse du dossier, ses constatations et statue par une décision comportant des conclusions motivées.
En l’espèce, la caisse produit le certificat médical initial du 22 mai 2019 lequel prescrit un arrêt de travail à compter du même jour. Dès lors, la présomption d’imputabilité trouve s’appliquer jusqu’au 1er septembre 2022, date de consolidation déclarée.
Il appartient alors à l’employeur d’administrer la preuve qu’il n’existe aucun lien de causalité même indirect, entre les lésions et arrêts et le travail habituel de la victime de la maladie.
Pour apporter cette preuve, ou à tout le moins solliciter l’organisation d’une expertise judiciaire, la société se prévaut de l’avis de son médecin-conseil, Dr [N] [O] établi le 13 mai 2021 qu’elle a mandaté pour soutenir d’une part qu’aucun avis précis ne peut être rendu en raison de la pauvreté des éléments communiqués rendant l’analyse médicolégale impossible pour cinq raisons:
– l’absence de compte rendu d’examen clinique durant toute la durée de l’arrêt de travail soit deux ans,
– la longueur disproportionnée des arrêts compte tenu de la lésion initiale,
– l’arrêt de travail du 29 mai au 5 juin 2019, justifié par deux certificats établis par le Dr [U], mentionnant agression sur le lieu de travail et agression sur le lieu de travail, choc psychologique, hématome genou + trauma costal,
– les certificats établis par le Dr [L] mentionnant aucune référence à un accident du travail et font état de diagnostics divers, sans lien avec les lésions mentionnées sur le certificat médical initial,
– et enfin le médecin conseil a conclu que le certificat médical initial et les arrêts de prolongation sont compatibles avec la déclaration d’accident du travail sans examiner la salariée, sans avis spécialisé, ni d’éventuels traitements prescrits.
D’autre part, la société fait valoir que les observations formulées par son médecin-conseil, Dr [O] le 13 mai 2021 au vu des documents transmis étaient destinées à la commission médicale de recours amiable, qui les a réceptionnées le 17 mai 2021, mais selon l’avis rendu en sa séance du 25 juin 2021, la commission a indiqué ne pas être en possession des observations du Dr [O].
Cependant, il apparaît que dans le rapport médical de la commission médicale, elle indique ne pas avoir reçu les observations du Dr [O], médecin mandaté par la société. Or celui-ci conteste largement la durée des arrêts et soins, et la société justifie de la réception de sa note par lettre recommandée avec accusé de réception du 17 mai 2021, soit bien avant que la commission ne statue.
Selon les principes généraux de la procédure de recours, notamment le respect du contradictoire et l’obligation de motiver les décisions, la commission médicale de recours amiable doit prendre en compte toutes les données médicales pertinentes, y compris celle fournies par le médecin mandaté par l’employeur, permettant ainsi de garantir que les décisions prises sont justes et fondées sur des informations complètes.
Dès lors, la violation du principe du contradictoire justifie de recourir à une consultation médicale aux frais de la CNAM dans les termes du dispositif.
Il sera sursis à statuer sur les autres demandes des parties dans l’attente du dépôt du rapport de l’expert.
Les dépens seront également réservés dans cette attente.
Le tribunal, statuant contradictoirement par jugement avant dire droit et mis à disposition au greffe,
AVANT DIRE DROIT, ORDONNE une consultation et commet pour y procéder :
Dr [P] [Z]
domicilié [Adresse 3]
– [Courriel 12] –
Tél : [XXXXXXXX01]
qui pourra se faire assister de tout spécialiste de son choix, avec pour mission, de :
– consulter les pièces du dossier qui lui seront transmises par les parties et leur médecin conseil ;
– procéder à l’examen sur pièces du dossier de Mme [T] [V] ;
– déterminer les lésions provoquées par l’accident du travail du 22 mai 2019 de Mme [T] [V];
– fixer la durée des arrêts de travail et des soins en relation directe avec ces lésions ;
– dire si l’accident a seulement révélé ou s’il a temporairement aggravé un état pathologique antérieur ou survenu postérieurement et totalement étranger aux lésions initiales et dans ce dernier cas, dire à partir de quelle date cet état est revenu au statu quo ante ou a recommencé à évoluer pour son propre compte ;
– dire, en tout état de cause, à partir de quelle date la prise en charge des lésions, prestations soins et arrêts au titre de la législation professionnelle n’est plus médicalement justifiée au regard de l’évolution du seul état consécutif à l’accident déclaré ;
– préciser à partir de quelle date cet état pathologique évoluant pour son propre compte est devenu la cause exclusive des arrêts et soins.
ORDONNE au service médical de la caisse d’adresser exclusivement par courriel dans un délai maximum de 15 jours à compter de la notification de la présente, au tribunal ([Courriel 14] en précisant le n° de RG et avec la mention » Dossier pour expert « ) et au médecin conseil de la société, le Dr [O] ( [Courriel 10] ) l’ensemble des éléments médicaux concernant Mme [T] [V] (certificat médical initial, certificats de prolongation, certificat de nouvelle lésion éventuelle, décision de consolidation et de séquelles, rapport d’évaluation, avis rendus…) ;
ORDONNE également au médecin conseil de la société d’adresser au tribunal ([Courriel 14]) en précisant le numéro de RG et avec la mention » Dossier pour expert « ) et au service médical de la caisse primaire d’assurance maladie de [Localité 15]-[Localité 9] ([Courriel 8]) en spécifiant » Confidentiel – à l’intention du service médical « , dans un délai maximum d’1 mois suivant le délai imparti à la caisse, toute pièce ou avis qui lui semblerait utile ;
RAPPELLE que ces délais valent injonction de communication et que le non-respect de ceux-ci expose les parties à ce que le tribunal en tire toutes les conséquences ;
DIT que le consultant devra adresser un rapport écrit au greffe du présent tribunal dans un délai de trois mois à compter de la date à laquelle il aura été avisé de sa mission par le tribunal ;
DIT qu’il en adressera directement copie aux parties et au médecin conseil de la société de préférence par mail ;
RAPPELLE que la rémunération du médecin consultant est réglementée par l’arrêté du 29 décembre 2020 et prise en charge par la CNAM à hauteur de 80,50 € ;
ORDONNE un sursis à statuer ;
DIT que le dossier sera rappelé à l’audience dès le dépôt des conclusions d’une des parties après rapport de l’expert désigné, sauf aux parties à accepter une procédure sans audience ou à la société requérante à se désister de son action ;
RÉSERVE les dépens.
Et le présent jugement est signé par Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Première vice-présidente et par Stéphane DEMARI, Greffier, présents lors du prononcé.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,