Contexte de l’accidentLa SAS [5] a déclaré un accident du travail le 21 janvier 2021 concernant Mme [W] [L], agent de production. L’accident s’est produit alors qu’elle tentait de manipuler un carton, entraînant une douleur aiguë au dos. Mme [L] a émis des réserves par lettre recommandée le même jour. La caisse primaire d’assurance maladie de la Vienne a pris en charge l’accident par décision du 4 mai 2021. Contestation de la décisionLa société a contesté cette décision en saisissant la commission de recours amiable le 17 mai 2021. Après un rejet implicite, la commission a confirmé la décision de la caisse le 3 novembre 2021. La SAS [5] a ensuite porté l’affaire devant le tribunal judiciaire de Nanterre le 31 août 2021. Arguments des partiesLa SAS [5] demande au tribunal de juger inopposable la décision de prise en charge de l’accident, arguant que la matérialité des faits n’est pas avérée. En réponse, la caisse primaire d’assurance maladie soutient que la preuve de l’accident est établie et que les éléments caractérisant un accident du travail sont réunis. Elle demande également que le recours de la société soit déclaré mal fondé. Éléments de preuveLa caisse, subrogée dans les droits de la victime, doit prouver la matérialité de l’accident. La société remet en cause cette matérialité, affirmant qu’il n’y a pas eu de fait accidentel et que la salariée n’effectuait aucun mouvement particulier. En revanche, la caisse présente des indices sérieux, tels que les déclarations de Mme [L] sur ses manipulations de cartons et son état au moment de l’accident. Décision du tribunalLe tribunal a constaté que l’accident s’est produit au temps et au lieu de travail, et que la caisse a bien fondé sa décision de prise en charge. La société n’a pas prouvé l’existence d’une cause étrangère à l’accident. Par conséquent, le tribunal a rejeté le recours de la SAS [5] et a déclaré opposable la décision de la caisse. Conséquences financièresEn application de l’article 696 du code de procédure civile, la SAS [5] a été condamnée aux dépens de l’instance, suite à sa défaite dans cette affaire. |
Quelles sont les conditions pour qu’un accident soit reconnu comme accident du travail selon le Code de la sécurité sociale ?
L’article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale stipule qu’est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.
Cette définition implique que toute lésion survenue au temps et sur le lieu de travail bénéficie d’une présomption d’imputabilité au travail.
Ainsi, pour qu’un accident soit reconnu comme tel, il doit répondre à plusieurs critères :
1. Survenance d’un événement : L’accident doit être un événement soudain, qui cause une lésion.
2. Lien avec le travail : L’accident doit survenir dans le cadre de l’exécution du travail, c’est-à-dire pendant le temps de travail et sur le lieu de travail.
3. Preuve de la matérialité : La caisse, subrogée dans les droits de la victime, doit établir la matérialité de l’accident, ce qui peut être fait par tous moyens.
Il appartient à la victime de prouver les circonstances exactes de l’accident et son caractère professionnel, ce qui peut inclure des témoignages, des certificats médicaux, ou d’autres éléments de preuve.
Comment la présomption d’imputabilité au travail est-elle appliquée dans le cas d’un accident du travail ?
La présomption d’imputabilité au travail est un principe fondamental dans le droit des accidents du travail. Selon l’article L. 411-1 du Code de la sécurité sociale, toute lésion survenue au temps et sur le lieu de travail bénéficie d’une présomption d’imputabilité au travail.
Cela signifie que, en cas d’accident survenu dans ces conditions, il est présumé que l’accident est lié au travail, sauf preuve du contraire.
Dans le cas présent, la caisse primaire d’assurance maladie a pris en charge l’accident de Mme [L] en se fondant sur cette présomption.
La société a contesté cette décision en arguant qu’il n’y avait pas de fait accidentel, mais elle n’a pas réussi à prouver que l’accident n’était pas lié au travail.
La charge de la preuve incombe à l’employeur qui conteste la prise en charge, et dans ce cas, la société n’a pas apporté d’éléments suffisants pour établir une cause étrangère à l’accident.
Quels sont les recours possibles en cas de contestation d’une décision de prise en charge d’un accident du travail ?
En cas de contestation d’une décision de prise en charge d’un accident du travail, plusieurs recours sont possibles, conformément aux dispositions du Code de la sécurité sociale et du Code de procédure civile.
1. Commission de recours amiable : L’employeur peut saisir la commission de recours amiable dans un délai de deux mois à compter de la notification de la décision de la caisse.
2. Recours contentieux : Si la décision de la commission de recours amiable n’est pas satisfaisante, l’employeur peut saisir le tribunal judiciaire compétent.
Dans le cas présent, la SAS [5] a saisi la commission de recours amiable, qui a confirmé la décision de la caisse.
Par la suite, la société a porté l’affaire devant le pôle social du tribunal judiciaire de Nanterre, ce qui est une voie de recours légale.
Il est important de noter que le tribunal examinera les éléments de preuve présentés par les deux parties et rendra une décision sur la recevabilité et le bien-fondé du recours.
Quelles sont les conséquences d’un jugement déclarant une décision de prise en charge opposable à l’employeur ?
Lorsqu’un jugement déclare une décision de prise en charge d’un accident du travail opposable à l’employeur, cela signifie que l’employeur est tenu de respecter cette décision et d’en assumer les conséquences financières et juridiques.
1. Obligation de prise en charge des frais : L’employeur doit prendre en charge les frais médicaux et les indemnités journalières liés à l’accident, conformément à la décision de la caisse primaire d’assurance maladie.
2. Impossibilité de contester : L’employeur ne peut plus contester la décision de prise en charge, sauf à prouver des éléments nouveaux qui pourraient justifier une révision de la décision.
3. Dépens de l’instance : En cas de rejet du recours, l’employeur peut être condamné aux dépens de l’instance, ce qui signifie qu’il devra payer les frais de justice engagés par la caisse.
Dans le cas présent, le tribunal a rejeté le recours de la SAS [5] et a déclaré la décision de la caisse opposable, entraînant ainsi des conséquences financières pour l’employeur.
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
DE NANTERRE
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PÔLE SOCIAL
Affaires de sécurité sociale et aide sociale
JUGEMENT RENDU LE
13 Novembre 2024
N° RG 21/01502 – N° Portalis DB3R-W-B7F-W5O5
N° Minute : 24/01605
AFFAIRE
S.A.S. [5]
C/
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA VIENNE
Copies délivrées le :
DEMANDERESSE
S.A.S. [5]
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Nathalie VIARD-GAUDIN, avocate au barreau de LYON, vestiaire : 1486
Substituée à l’audience par Me Françoise SEILLER, avocate au barreau de PARIS
DEFENDERESSE
CAISSE PRIMAIRE D’ASSURANCE MALADIE DE LA VIENNE
[Adresse 1]
[Localité 2]
représentée par Mme [M] [X], munie d’un pouvoir régulier
*
L’affaire a été débattue le 07 Octobre 2024 en audience publique devant le tribunal composé de :
Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Première vice-présidente
Gérard BEHAR, Assesseur, représentant les travailleurs salariés
Patricia TALIMI, Assesseur, représentant les travailleurs non-salariés
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats et du prononcé : Stéphane DEMARI, Greffier.
JUGEMENT
Prononcé en premier ressort, par décision contradictoire et mise à disposition au greffe du tribunal conformément à l’avis donné à l’issue des débats.
La SAS [5] a établi, le 21 janvier 2021, une déclaration d’accident du travail concernant l’une de ses salariées, Mme [W] [L], exerçant en qualité d’agent de production. Il est fait mention d’un accident survenu le jour même dans les circonstances suivantes : Mme [L] aurait voulu manipuler un carton (sans le soulever), douleur aiguë au dos. Par lettre recommandée du même jour, elle a émis des réserves. Ces éléments ont été transmis à la caisse primaire d’assurance maladie de la Vienne, laquelle a pris en charge l’accident déclaré au titre de la législation sur les risques professionnels par décision du 4 mai 2021.
La société a saisi la commission de recours amiable par courrier du 17 mai 2021 aux fins de contester cette décision, laquelle après un premier rejet implicite, a confirmé la décision de la caisse par décision du 3 novembre 2021. La société a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Nanterre le 31 août 2021.
L’affaire a été appelée à l’audience du 7 octobre 2024, devant le tribunal judiciaire de Nanterre.
Aux termes de ses conclusions, la SAS [5] demande au tribunal :
– De juger inopposable à son égard, la décision de prise en charge, au titre de la législation professionnelle, de l’accident de Mme [W] [L] du 21 janvier 2021, au motif suivant : la matérialité des faits allégués n’est pas avérée du fait de l’absence de fait accidentel.
En réplique, la caisse primaire d’assurance maladie de la Vienne demande au tribunal :
– De déclarer ses écritures recevables et bien fondées ;
– De déclarer le recours formé par la société recevable mais mal fondé ;
– De juger que la preuve de la matérialité du fait accidentel est rapportée ;
– De juger que les éléments de caractérisation d’un accident du travail sont réunis ;
– De juger que la sa décision de prendre en charge au titre de la législation professionnelle l’accident de Mme [L] est opposable à la société ;
– De débouter purement et simplement la société de son recours.
Il est fait référence aux écritures ainsi déposées de part et d’autre à l’audience pour un plus ample exposé des moyens proposés par les parties au soutien de leurs prétentions, en application de l’article 455 du code de procédure civile.
A l’issue des débats, l’affaire a été mise en délibéré au 13 novembre 2024 par mise à disposition au greffe.
Au titre de la matérialité de l’accident
L’article L. 411-1 du code de la sécurité sociale dispose qu’est considéré comme accident du travail, quelle qu’en soit la cause, l’accident survenu par le fait ou à l’occasion du travail à toute personne salariée ou travaillant, à quelque titre ou en quelque lieu que ce soit, pour un ou plusieurs employeurs ou chefs d’entreprise.
Il en résulte que toute lésion survenue au temps et sur le lieu de travail bénéficie d’une présomption d’imputabilité au travail.
La caisse, subrogée dans les droits de la victime, doit établir la matérialité de l’accident. Cette preuve peut être apportée par tous moyens.
Il appartient à celui qui prétend avoir été victime d’un accident du travail d’établir autrement que par ses propres affirmations les circonstances exactes de l’accident et son caractère professionnel.
La société remet en cause la matérialité de l’accident dont aurait été victime sa salariée, en soutenant d’une part, qu’il n’y a eu aucun fait accidentel et d’autre part, en soulignant que la commission de recours amiable le reconnait dans son avis du 3 novembre 2021. Elle fait valoir que la salariée n’effectuait aucun mouvement particulier. Elle rappelle que la salariée ne manipulait aucun carton au moment des faits. Elle relève par ailleurs qu’il n’y avait aucun témoin direct et que cette douleur s’apparente selon elle à une douleur évoluant pour son propre compte puisque que la salariée avait des antécédents médicaux évoqués dans sa lettre de réserves.
En réplique, la caisse soutient que la matérialité de l’accident est établie par un faisceau d’indices sérieux, graves et concordantes. Elle rappelle qu’une instruction a été menée lors de laquelle l’assurée a répondu à un questionnaire faisant état de manipulations de cartons plus ou moins lourds. Elle relate que l’assurée a également fait savoir qu’elle était constamment penchée.
Il résulte de la déclaration d’accident du travail établie par l’employeur le 21 janvier 2021 que Mme [L] a indiqué s’être blessée le 21 janvier 2021 à 10 h et c’est quasiment immédiatement, 30 minutes après, qu’elle en a informé son employeur.
L’accident a été donc été déclaré le jour même et décrit comme étant survenu aux temps et lieu du travail.
Le certificat médical initial, fait état d’un lumbago avec sciatique et prescrit un arrêt de travail jusqu’au 24 janvier 2021 inclus.
Ces éléments sont en parfaite cohérence, constituent un faisceau d’indices suffisant, précis, graves et concordants permettant de retenir la matérialité du fait accidentel allégué.
Dès lors qu’il est constant qu’il s’est produit au temps et au lieu du travail, la caisse, subrogée dans les droits de la victime, est bien fondée à se prévaloir du bénéfice de la présomption d’imputabilité qui résulte des dispositions précitées.
La société ne rapporte pas la preuve qui lui incombe de l’existence d’une cause totalement étrangère au travail ou d’un état pathologique antérieur évoluant pour son propre compte et ne verse aux débats aucun élément susceptible de constituer un commencement de preuve en ce sens.
Il s’ensuit que c’est à juste titre que la caisse a pris en charge de l’accident et la décision de prendre en charge l’ensemble des soins et arrêts prescrits à Mme [L] est bien fondée et sera déclarée opposable à la société.
Sur les demandes accessoires
En application de l’article 696 du code de procédure civile, il convient de condamner la SAS [6] aux dépens de l’instance, dès lors qu’elle succombe.
Le tribunal, statuant par jugement contradictoire, rendu en premier ressort et par mise à disposition au greffe ;
REJETTE le recours présenté ;
DÉCLARE opposable à la SAS [5] la décision de la caisse primaire d’assurance maladie de la Vienne du 4 mai 2021 reconnaissant le caractère professionnel de l’accident dont a été victime Mme [W] [L], le 21 janvier 2021, et les soins et arrêts subséquents ;
CONDAMNE la SAS [5] aux entiers dépens.
Et le présent jugement est signé par Chantal IHUELLOU-LEVASSORT, Première vice-présidente et par Stéphane DEMARI, Greffier, présents lors du prononcé.
LE GREFFIER, LA PRÉSIDENTE,