Évaluation de la bonne foi dans le cadre des sanctions administratives liées aux prestations sociales

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Évaluation de la bonne foi dans le cadre des sanctions administratives liées aux prestations sociales

Notification de Pénalité Administrative

La Caisse d’Allocations Familiales (CAF) des Bouches-du-Rhône a notifié à Monsieur [J] [U] une pénalité administrative de 1.625 € le 14 mars 2023, en raison d’une dissimulation de son activité salariée depuis janvier 2019.

Contestations de Monsieur [J] [U]

Monsieur [J] [U] a contesté cette décision en saisissant le tribunal judiciaire de Marseille le 16 mai 2023. Lors de l’audience du 9 octobre 2023, il a demandé la recevabilité de sa contestation, la constatation de son absence de fraude, l’annulation de la pénalité, l’accès à ses données personnelles pour prouver sa bonne foi, ainsi qu’une indemnisation de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Arguments de Monsieur [J] [U]

Monsieur [J] [U] a soutenu qu’il n’y avait pas eu de dissimulation d’activité, précisant qu’il avait cumulé deux emplois jusqu’en 2017, date à laquelle il a été licencié. Il a ensuite informé Pôle emploi et la CAF de son activité salariée tout en percevant des allocations chômage dans le cadre d’un dispositif d’ »activité conservée ».

Position de la CAF des Bouches-du-Rhône

La CAF a contesté le recours de Monsieur [J] [U], affirmant qu’il avait déclaré être au chômage depuis le 10 mai 2019, alors qu’elle avait constaté des revenus perçus en 2019. Elle a demandé la confirmation de la pénalité et a réclamé 50 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Éléments de Preuve Présentés

Monsieur [J] [U] a produit plusieurs documents, dont un courriel de Pôle emploi confirmant qu’il avait informé de son activité professionnelle, ainsi que des déclarations de revenus montrant qu’il avait déclaré des salaires en 2018. Il a également fourni des échanges avec la CAF attestant de son statut d’ »activité conservée ».

Décision du Tribunal

Le tribunal a jugé que la dissimulation d’activité n’était pas établie et que Monsieur [J] [U] avait prouvé sa bonne foi. La pénalité de 1.625 € a été annulée, et la CAF des Bouches-du-Rhône a été condamnée aux dépens. Les parties ont été déboutées de leurs demandes supplémentaires.

Conclusion et Délai de Pourvoi

Le tribunal a déclaré recevable le recours de Monsieur [J] [U] et a annulé la décision de la CAF. Le délai pour former un pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la réception de la notification de la décision.

Questions / Réponses juridiques :

 

Quelle est la base légale de la pénalité administrative imposée par la CAF ?

La pénalité administrative imposée par la Caisse d’Allocations Familiales (CAF) repose sur l’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale. Cet article stipule que :

« I.- Peuvent faire l’objet d’un avertissement ou d’une pénalité prononcée par le directeur de l’organisme chargé de la gestion des prestations familiales ou des prestations d’assurance vieillesse, au titre de toute prestation servie par l’organisme concerné :

1° L’inexactitude ou le caractère incomplet des déclarations faites pour le service des prestations, sauf en cas de bonne foi de la personne concernée ;

2° L’absence de déclaration d’un changement dans la situation justifiant le service des prestations, sauf en cas de bonne foi de la personne concernée ;

3° L’exercice d’un travail dissimulé, constaté dans les conditions prévues à l’article L. 114-15, par le bénéficiaire de prestations versées sous conditions de ressources ou de cessation d’activité ; »

La pénalité est donc justifiée par des faits tels que l’inexactitude des déclarations ou la dissimulation d’une activité salariée.

Il est important de noter que la bonne foi de la personne concernée peut exonérer celle-ci de la pénalité, ce qui est un point central dans le litige entre Monsieur [J] [U] et la CAF.

Comment la bonne foi est-elle appréciée dans le cadre de la contestation d’une pénalité ?

La bonne foi est un élément crucial dans l’appréciation des pénalités administratives. Selon l’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, la bonne foi de la personne concernée peut exonérer celle-ci de la pénalité.

En effet, cet article précise que :

« Peuvent faire l’objet d’un avertissement ou d’une pénalité… sauf en cas de bonne foi de la personne concernée. »

Dans le cas de Monsieur [J] [U], il a produit plusieurs éléments pour prouver sa bonne foi, notamment des échanges avec Pôle emploi et la CAF, ainsi que des déclarations de revenus.

La jurisprudence constante indique que le juge doit vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés, ainsi que l’adéquation du montant de la pénalité à l’importance de l’infraction.

Il est également établi que la présomption de bonne foi, prévue par l’article 2274 du code civil, doit être écartée au profit de la disposition spéciale de l’article L. 114-17, qui inverse la charge de la preuve.

Quelles sont les conséquences de l’annulation de la pénalité pour Monsieur [J] [U] ?

L’annulation de la pénalité a plusieurs conséquences pour Monsieur [J] [U]. Tout d’abord, la décision de la CAF des Bouches-du-Rhône, qui lui imposait une pénalité de 1.625 €, est annulée.

Cela signifie qu’il n’est plus tenu de payer cette somme, ce qui a un impact direct sur sa situation financière.

De plus, le tribunal a également condamné la CAF aux dépens, ce qui signifie que l’organisme devra prendre en charge les frais de justice engagés par Monsieur [J] [U].

Enfin, le jugement précise que le délai pour former un pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la réception de la notification de la décision. Cela offre à Monsieur [J] [U] une certaine sécurité juridique, car il a gagné son recours et n’est pas soumis à d’autres pénalités pour les mêmes faits.

Quelles sont les implications de l’article 700 du code de procédure civile dans ce litige ?

L’article 700 du code de procédure civile permet au juge de condamner la partie perdante à verser à l’autre partie une somme d’argent au titre des frais exposés pour la défense de ses droits.

Dans le cas présent, la CAF des Bouches-du-Rhône a demandé à être condamnée au paiement de 50,00 € en vertu de cet article, tandis que Monsieur [J] [U] a demandé 1.500 €.

Cependant, le tribunal a décidé que l’équité ne commandait pas de faire application des dispositions de l’article 700 dans ce litige.

Cela signifie que, bien que Monsieur [J] [U] ait gagné son recours, il ne recevra pas de compensation financière pour ses frais de justice, ce qui peut être perçu comme une limitation de ses droits.

Il est important de noter que cette décision est à la discrétion du juge, qui peut choisir de ne pas allouer de frais en fonction des circonstances de l’affaire.

 

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

11 décembre 2024
Tribunal judiciaire de Marseille
RG
23/01760
REPUBLIQUE FRANCAISE
TRIBUNAL JUDICIAIRE
DE MARSEILLE

POLE SOCIAL
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 2]

JUGEMENT N°24/04392 du 11 Décembre 2024

Numéro de recours: N° RG 23/01760 – N° Portalis DBW3-W-B7H-3OOG

AFFAIRE :
DEMANDEUR
Monsieur [J] [U]
[Adresse 5]
[Adresse 5]
[Localité 1]
comparant en personne assisté de Me Anouck TEBOUL-FARTOUKH, avocat au barreau de MARSEILLE

c/ DEFENDERESSE
Organisme CAF DES BOUCHES-DU-RHONE
Service Contentieux
[Adresse 4]
[Localité 3]
représentée par Monsieur [Z] [O] (Agent audiencier), muni d’un pouvoir spécial

DÉBATS : À l’audience publique du 09 Octobre 2024

COMPOSITION DU TRIBUNAL lors des débats et du délibéré :

Président : BOUAFFASSA Myriam, Juge

Assesseurs : MOLINO Patrick
MARTOS Francis

L’agent du greffe lors des débats : MULLERI Cindy

À l’issue de laquelle, les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le : 11 Décembre 2024

NATURE DU JUGEMENT

contradictoire et en dernier ressort

EXPOSÉ DU LITIGE

Par lettre en date du 14 mars 2023, la Caisse d’Allocations Familiales (CAF) des Bouches-du-Rhône a notifié à Monsieur [J] [U] une pénalité administrative d’un montant de 1.625 € au motif tiré d’une dissimulation de son activité salariée exercée depuis janvier 2019.

Par requête réceptionnée par le greffe le 16 mai 2023, Monsieur [J] [U] a saisi le pôle social du tribunal judiciaire de Marseille aux fins de contestation de la décision de la CAF des Bouches-du-Rhône d’appliquer une pénalité administrative.

L’affaire a été évoquée à l’audience du 9 octobre 2023.

À l’audience, Monsieur [J] [U], représentée par son conseil, demande au tribunal de :
Prononcer la recevabilité de sa contestation concernant la pénalité administrative ;Constater l’absence de fraude ;Dire que la CAF ne peut lui réclamer une pénalité de 1.625 € ;Lui autoriser l’accès de ses données personnelles afin qu’il puisse prouver sa bonne foi ;Condamner la CAF à lui verser la somme de 1.500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses demandes, Monsieur [J] [U] conteste toute dissimulation d’activité et fait valoir qu’il cumulait deux emplois jusqu’en 2017, date de son licenciement pour motif économique et que, à compter de cette date, après avoir consulté Pôle emploi, il a cumulé son second emploi avec l’allocation chômage dans le cadre du dispositif dit  » activité conservée « , ce dont il avait informé l’organisme.

La CAF des Bouches-du-Rhône, par conclusions soutenues oralement par un inspecteur juridique, demande au tribunal de :
Dire et juger non-fondé le recours de Monsieur [U] ;Dire et juger qu’elle est bien fondée en son recours ;Constater le bienfondé de la pénalité Fraude appliquée suite à la dissimulation de l’activité salariée de Monsieur [U] depuis le mois de janvier 2019 ;Condamner Monsieur [U] au paiement de la somme de 50,00 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Au soutien de ses prétentions, la CAF des Bouches-du-Rhône fait valoir que Monsieur [J] [U] lui a déclaré être au chômage depuis le 10 mai 2019 et que suite à un échange de fichiers, elle s’est rendue compte qu’il avait perçu des revenus au titre de l’année 2019.

Il sera expressément référé aux conclusions des parties pour un plus ample exposé des moyens et des prétentions, conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’affaire a été mise en délibéré au 11 décembre 2024.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur le bien-fondé de la pénalité

L’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale dispose que  » I.- Peuvent faire l’objet d’un avertissement ou d’une pénalité prononcée par le directeur de l’organisme chargé de la gestion des prestations familiales ou des prestations d’assurance vieillesse, au titre de toute prestation servie par l’organisme concerné :

1° L’inexactitude ou le caractère incomplet des déclarations faites pour le service des prestations, sauf en cas de bonne foi de la personne concernée ;

2° L’absence de déclaration d’un changement dans la situation justifiant le service des prestations, sauf en cas de bonne foi de la personne concernée ;

3° L’exercice d’un travail dissimulé, constaté dans les conditions prévues à l’article L. 114-15, par le bénéficiaire de prestations versées sous conditions de ressources ou de cessation d’activité ;

4° Les agissements visant à obtenir ou à tenter de faire obtenir le versement indu de prestations servies par un organisme mentionné au premier alinéa, même sans en être le bénéficiaire ;

5° Les actions ou omissions ayant pour objet de faire obstacle ou de se soustraire aux opérations de contrôle exercées, en application de l’article L. 114-10 du présent code et de l’article L. 724-7 du code rural et de la pêche maritime, par les agents mentionnés au présent article, visant à refuser l’accès à une information formellement sollicitée, à ne pas répondre ou à apporter une réponse fausse, incomplète ou abusivement tardive à toute demande de pièce justificative, d’information, d’accès à une information, ou à une convocation, émanant des organismes chargés de la gestion des prestations familiales et des prestations d’assurance vieillesse, dès lors que la demande est nécessaire à l’exercice du contrôle ou de l’enquête.

Le montant de la pénalité est fixé en fonction de la gravité des faits, dans la limite de deux fois le plafond mensuel de la sécurité sociale. Tout fait ayant donné lieu à une sanction devenue définitive en application du présent article peut constituer le premier terme de récidive d’un nouveau manquement sanctionné par le présent article. Cette limite est doublée en cas de récidive dans un délai fixé par voie réglementaire. Le directeur de l’organisme concerné notifie le montant envisagé de la pénalité et les faits reprochés à la personne en cause, afin qu’elle puisse présenter ses observations écrites ou orales dans un délai d’un mois. A l’issue de ce délai, le directeur de l’organisme prononce, le cas échéant, la pénalité et la notifie à l’intéressé en lui indiquant le délai dans lequel il doit s’en acquitter ou les modalités selon lesquelles elle sera récupérée sur les prestations à venir.

La mesure prononcée est motivée et peut être contestée devant le tribunal des affaires de sécurité sociale. La pénalité ne peut pas être prononcée s’il a été fait application, pour les mêmes faits, des articles L. 262-52 ou L. 262-53 du code de l’action sociale et des familles. « .

L’article R. 114-14 du code de la sécurité sociale dispose que  » le montant de la pénalité est fixé proportionnellement à la gravité des faits reprochés, en tenant compte notamment de leur caractère intentionnel ou répété, du montant et de la durée du préjudice et des moyens et procédés utilisés « .

Il est de jurisprudence constante qu’il appartient au juge du contentieux de la sécurité sociale saisi d’un recours formé contre la pénalité prononcée de vérifier la matérialité, la qualification et la gravité des faits reprochés à la personne concernée ainsi que l’adéquation du montant de la pénalité à l’importance de l’infraction commise par cette dernière.

Il est de jurisprudence constante que l’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale ne nécessite nullement la preuve d’une intention frauduleuse mais seulement la preuve de  » l’inexactitude ou le caractère incomplet des déclarations faites pour le service des prestations, l’absence de déclaration d’un changement dans la situation justifiant le service des prestations « . La qualification de fraude ne présente d’intérêt qu’en matière de prescription, d’éventuelles poursuites pénales et d’inscription au BNFA, le tribunal étant en outre incompétent sur ce dernier point.

Si la bonne foi reste présumée en vertu de l’article 2274 du code civil, cette disposition générale doit être écartée au profit de la disposition spéciale de l’article L. 114-17 du code de la sécurité sociale, laquelle inverse la charge de cette preuve lorsque notamment est établi « l’inexactitude ou le caractère incomplet des déclarations faites pour le service des prestations, ou l’absence de déclaration d’un changement dans la situation justifiant le service des prestations ».

En l’espèce, la CAF des Bouches-du-Rhône a notifié à Monsieur [J] [U] une pénalité d’un montant de 1.625 € au motif tiré de la dissimulation de l’exercice d’une activité salariée depuis janvier 2019.

À l’appui de sa contestation, Monsieur [J] [U] se prévaut de sa bonne foi et indique avoir informé l’organisme Pôle emploi ainsi que la CAF des Bouches-du-Rhône de son activité professionnelle qu’il a cumulé avec le chômage dans le cadre d’une  » activité conservée « , dispositif prévu par décret n° 2019-797 du 26 juillet 2019.

Il verse aux débats un courriel du Pôle emploi en date du 3 mai 2023 confirmant que lors de l’ouverture de droits en mai 2017, il exerçait toujours son activité professionnelle, lui permettant d’être indemnisé en totalité et qu’il avait été convenu qu’il ne déclare pas chaque mois cette activité.

Monsieur [J] [U] produit également ses échanges avec la CAF des Bouches-du-Rhône et ses déclarations de revenus dont il résulte qu’il avait déclaré des salaires au cours de l’année 2018.

Il produit également un formulaire de déclaration de situation mensuelle spécifique ainsi qu’une déclaration de ressources du 22 avril 2020 mentionnant une activité conservée.

Enfin, il résulte d’un courriel du 28 novembre 2017 que Monsieur [J] [U] a informé la CAF des Bouches-du-Rhône que Pôle emploi lui attribuait le statut de  » formation professionnelle avec activité conservée « .

Il ressort de l’ensemble de ces éléments que la dissimulation d’activité professionnelle n’est pas établie et que, au contraire, Monsieur [J] [U] a informé la CAF des Bouches-du-Rhône de ce qu’il avait conservé une activité professionnelle pour laquelle il percevait des salaires cumulés avec ses allocations chômage, situation qui existait depuis 2017 et qui perdurait en 2019.

Monsieur [J] [U] fait donc la preuve de sa bonne foi, et la pénalité financière, qui ne repose sur aucun motif justifié, sera donc annulée.

Sur les dépens et l’article 700 du code de procédure civile

La CAF des Bouches-du-Rhône, qui succombe, sera condamné aux dépens de l’instance.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

Le tribunal, statuant par mise à disposition au greffe après en avoir délibéré, par jugement contradictoire et en dernier ressort :

DÉCLARE recevable le recours formé par Monsieur [J] [U] ;

ANNULE la décision de la CAF des Bouches-du-Rhône du 14 mars 2023 portant notification à Monsieur [J] [U] d’une pénalité financière d’un montant de 1.180 € ;

CONDAMNE CAF des Bouches-du-Rhône aux dépens ;

DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes ;

DIT que le délai à peine de forclusion pour former un pourvoi en cassation est de deux mois à compter de la réception de la notification de la présente décision.

LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE


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