Établissement de la preuve préalable en vue d’un litige potentiel : conditions et justifications.

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Établissement de la preuve préalable en vue d’un litige potentiel : conditions et justifications.

Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H] ont assigné la SAS PERFECT HOME en référé pour obtenir la désignation d’un expert judiciaire et la communication de documents relatifs à des travaux de réfection de toiture effectués en 2022. Ils avaient engagé la société pour améliorer l’isolation de leur véranda, mais des problèmes sont survenus concernant la conservation des puits de lumière, entraînant un refus de leur part d’accepter un surcoût proposé. La SAS PERFECT HOME n’a pas répondu à leurs demandes et n’a pas assisté à une expertise amiable, qui a révélé des erreurs techniques dans son intervention. Un devis ultérieur a mis en évidence la mauvaise qualité des travaux réalisés. Lors de l’audience, les demandeurs se sont désistés de leur demande de communication de pièces. Le juge a ordonné une expertise pour évaluer les désordres, leur origine, et les responsabilités, tout en fixant une provision pour les frais d’expertise. Les dépens ont été laissés à la charge des demandeurs.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 septembre 2024
Tribunal judiciaire d’Évry
RG
24/00602
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
Au Nom du Peuple Français

Tribunal judiciaire d’EVRY
Pôle des urgences civiles
Juge des référés

Ordonnance du 6 septembre 2024
MINUTE N° 24/______
N° RG 24/00602 – N° Portalis DB3Q-W-B7I-QFBE

PRONONCÉE PAR

Carol BIZOUARN, Première vice-présidente,
Assistée de Alexandre EVESQUE, greffier, lors des débats à l’audience du 16 juillet 2024 et de Fabien DUPLOUY, greffier, lors du prononcé

ENTRE :

Monsieur [E] [H]
demeurant [Adresse 5]

représenté par Maître Pascal HORNY de la SCP HORNY-MONGIN-SERVILLAT, avocat au barreau de l’ESSONNE

Madame [B] [F] épouse [H]
demeurant [Adresse 5]

représentée par Maître Pascal HORNY de la SCP HORNY-MONGIN-SERVILLAT, avocat au barreau de l’ESSONNE

DEMANDEURS

D’UNE PART

ET :

S.A.S. PERFECT HOME
dont le siège social est sis [Adresse 4]

représentée par Maître Aurélie SEGONNE-MORAND de la SCP LEROY-MORIN MERCADE-CHOQUET & ASSOCIES, demeurant [Adresse 6], avocate plaidante au barreau de VERSAILLES, vestiaire : C220, et par Maître Sarah CHICA de la SELARL OÏKOS AVOCATS, avocate postulante au barreau de l’ESSONNE

DÉFENDERESSE

D’AUTRE PART

ORDONNANCE : Prononcée publiquement par mise à disposition au greffe, contradictoire et en premier ressort.

**************

EXPOSÉ DU LITIGE

Par acte délivré le 10 juin 2024, Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H] ont assigné en référé devant le président du tribunal judiciaire d’Evry la SAS PERFECT HOME, au visa des articles 145 et suivants 834 et 835 du code de procédure civile, afin d’obtenir la désignation d’un expert judiciaire.

Ils sollicitent également d’enjoindre à la SAS PERFECT HOME, sous astreinte comminatoire de 100 euros par jour de retard de procéder à la communication :
– des coordonnées de son assureur garantie décennale avec l’ensemble des activités et des garanties souscrites,
– des documents contractuels relatifs à l’intervention d’une ou de plusieurs sociétés sous-traitantes.

Au soutien de leurs demandes, Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H] exposent que :
– en 2022, ils ont fait appel à la SAS PERFECT HOME afin de procéder la réfection de la toiture de leur véranda dans le but d’améliorer les performances d’isolation phonique et thermique et d’améliorer la luminosité de la cuisine par la pose d’un Velux complémentaire, selon devis établi le 28 mars 2022 pour la somme de 31.000 euros TTC,
– les travaux ont débuté au mois d’octobre 2022 et l’entreprise a rapidement évoqué une difficulté pour conserver les puits de lumière existants à l’occasion du remplacement de la couverture et indiqué qu’il convenait de procéder au remplacement des puits de lumière par la pose d’un Velux pour un surcoût complémentaire de 13.000 euros,
– par courrier en date du 7 novembre 2022, Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H] ont refusé et demandé l’exécution du contrat initial et la réparation des désordres sur les Velux existant,
– la SAS PERFECT HOME est restée taisante et n’est plus intervenue,
– l’assureur protection juridique de Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H] a diligenté une expertise amiable, à laquelle bien que régulièrement convoquée, la SAS PERFECT HOME ne s’est pas présentée, dont le rapport a conclu à « une erreur d’origine en indiquant qu’elle était en mesure de conserver des puits de lumière, ce qui semble être inexact sur le plan technique »,
– un devis établi le 29 septembre 2023 pour chiffrer les travaux réparatoires a mis en avant que les travaux réalisés par la SAS PERFECT HOME étaient en réalité de très mauvaise qualité, que les finitions ne répondaient pas aux exigences des règles de l’art et qu’il était à craindre à terme des infiltrations,
– il apparaît donc que non seulement se pose une difficulté concernant la réalisation des travaux initialement commandés à la SAS PERFECT HOME, mais qu’également soit remise en cause la qualité de la totalité des prestations depuis l’origine.

A l’audience du 16 juillet 2024, Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H], représentés par leur conseil, ont soutenu leur acte introductif d’instance et déposé leurs pièces telles que visées dans l’assignation, précisant se désister de leur demande de communication de pièces sous astreinte.

La SAS PERFECT HOME, représentée par avocat, a formé protestations et réserves sur la mesure sollicitée.

Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, pour plus ample exposé des prétentions et moyens des parties, il est renvoyé à l’assignation introductive d’instance et aux écritures déposées et développées oralement à l’audience ainsi qu’à la note d’audience.

L’affaire a été mise en délibéré au 6 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION

L’article 145 du code de procédure civile dispose que s’il existe un motif légitime de conserver ou d’établir avant tout procès la preuve de faits dont pourrait dépendre la solution d’un litige, les mesures d’instruction légalement admissibles peuvent être ordonnées à la demande de tout intéressé, sur requête ou en référé.

Justifie d’un motif légitime au sens de ce texte la partie qui démontre la probabilité de faits susceptibles d’être invoqués dans un litige éventuel.

Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H] justifient par la production du devis du 28 février 2023 et du bon de commande du 1er mars 2022 de la SAS PERFECT HOME, de courriers recommandés avec accusé de réception, de photographies, du rapport d’expertise du cabinet EUREXO du 19 octobre 2023 et du devis de la société BATIMS du 29 septembre 2023, rendant vraisemblable l’existence des désordres invoqués, d’un motif légitime pour obtenir la désignation d’un expert en vue d’établir, avant tout procès, la preuve des faits dont pourrait dépendre la solution du litige.

Il sera donc fait droit à la demande, aux frais avancés de Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H], dans les termes du dispositif ci-dessous.

PAR CES MOTIFS,

Le juge des référés, statuant publiquement par ordonnance contradictoire et en premier ressort :

PREND acte du désistement des demandes de communication de pièces sous astreinte ;

ORDONNE une mesure d’expertise et DESIGNE en qualité d’expert :

Monsieur [I] [J]
Expert judiciaire près la cour d’appel de Paris
[Adresse 3]
[Localité 9]
Port. : [XXXXXXXX02]
Email : [Courriel 12]

Avec mission de :
– relever et décrire les désordres allégués dans l’assignation et les pièces telles que visées dans le bordereau de communication de pièces annexé affectant le bien immobilier sis [Adresse 5] à [Localité 10],
– en détailler l’origine, les causes et l’étendue et fournir tous éléments permettant à la juridiction de déterminer à quels intervenants ces désordres sont imputables et dans quelles proportions,

– en cas de désordres constatés rechercher si les désordres proviennent également d’une non-conformité aux règles de l’art ou aux documents contractuels, d’une exécution défectueuse, et/ou d’un défaut de conseil,
– indiquer les conséquences de ces désordres, malfaçons et inachèvements quant à la solidité, l’habitabilité, l’esthétique des ouvrages et plus généralement quant à l’usage qui peut en être attendu ou quant à la conformité à sa destination,
– déterminer la date d’apparition des désordres,
– à partir de devis d’entreprises fournis par les parties, sur proposition, le cas échéant du maître d’œuvre de leur choix, donner un avis sur la ou les solutions appropriées pour remédier aux désordres entachant l’ouvrage et sur le coût des travaux utiles,
– donner son avis sur les préjudices et coûts induits par ces désordres et sur leur évaluation, dès lors que ces demandes sont présentées de manière motivée par les parties,
– plus généralement, fournir tous éléments techniques et de fait, de nature à permettre à la juridiction éventuellement saisie de déterminer les responsabilités encourues et d’évaluer s’il y a lieu les préjudices subis,
– faire les comptes entre les parties ;

RAPPELLE qu’en application de l’article 278 du code de procédure civile, l’expert peut prendre l’initiative de recueillir l’avis d’un autre technicien, mais seulement dans une spécialité distincte de la sienne ;

DIT que pour procéder à sa mission l’expert devra :
– convoquer et entendre les parties, assistées, le cas échéant, de leurs conseils, et recueillir leurs observations à l’occasion de l’exécution des opérations ou de la tenue des réunions d’expertise,
– se faire remettre toutes pièces utiles à l’accomplissement de sa mission, notamment, s’il le juge utile, les pièces définissant le marché, les plans d’exécution, le dossier des ouvrages exécutés,
– se rendre sur les lieux et si nécessaire en faire la description, au besoin en constituant un album photographique et en dressant des croquis,
– à l’issue de la première réunion d’expertise, ou dès que cela lui semble possible, et en concertation avec les parties, définir un calendrier prévisionnel de ses opérations, l’actualiser ensuite dans le meilleur délai :
– en faisant définir une enveloppe financière pour les investigations à réaliser, de manière à permettre aux parties de préparer le budget nécessaire à la poursuite de ses opérations ;
– en les informant de l’évolution de l’estimation du montant prévisible de ses frais et honoraires et en les avisant de la saisine du juge du contrôle des demandes de consignation complémentaire qui s’en déduisent ;
– en fixant aux parties un délai pour procéder aux interventions forcées ;
– en les informant, le moment venu, de la date à laquelle il prévoit de leur adresser son document de synthèse ;
– au terme de ses opérations, adresser aux parties un document de synthèse, sauf exception dont il s’expliquera dans son rapport (par ex: réunion de synthèse; communication d’un projet de rapport), et y arrêter le calendrier de la phase conclusive de ses opérations :
– en fixant, sauf circonstances particulières, la date ultime de dépôt des dernières observations des parties sur le document de synthèse,
– en rappelant aux parties, au visa de l’article 276 alinéa 2 du code de procédure civile, qu’il n’est pas tenu de prendre en compte les observations transmises au-delà de ce délai.
DIT qu’en cas d’urgence ou de péril en la demeure reconnue par l’expert, l’expert déposera un pré-rapport, ou une note aux parties valant pré-rapport, précisant la nature, l’importance et le coût de ces travaux ;

DIT que sur avis de l’expert, le demandeur ou tout autre partie concernée par lesdits désordres pourra faire exécuter à ses frais avancés, pour le compte de qui il appartiendra, les travaux estimés indispensables par l’expert, sous la direction du maître d’œuvre de la demanderesse, par des entreprises qualifiées de son choix ;

FIXE à la somme de 3.000 (trois mille) euros le montant de la provision concernant les frais d’expertise qui devra être consignée par Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H], auprès du régisseur d’avances et de recettes de ce tribunal, [Adresse 8] à [Localité 11] ([Courriel 13] / tél : [XXXXXXXX01] ou [XXXXXXXX07]) dans un délai de six semaines au plus tard après la date de délivrance par le greffe aux parties de la présente ordonnance, sans autre avis ;

DIT que faute de consignation de la provision dans ce délai impératif, ou demande de prorogation sollicitée en temps utile, la désignation de l’expert sera caduque et de nul effet ;

DIT que l’expert sera saisi de sa mission par l’envoi d’une copie certifiée conforme de la présente ordonnance et ne commencera ses opérations qu’après avis de la consignation qui lui sera adressée par le greffe ;

DIT que l’expert effectuera sa mission conformément aux dispositions des articles 232 à 248, 263 à 284-1du code de procédure civile et qu’il déposera l’original de son rapport, auquel sera joint, le cas échéant, l’avis du technicien qu’il s’est adjoint, sous la forme d’un exemplaire papier et numérique sous la forme d’un fichier PDF (CD ou clé USB) au greffe du service du contrôle des expertises du tribunal judiciaire d’Evry, [Adresse 8] à [Localité 11] dans un délai de 6 mois à compter de l’avis de la consignation effectuée qui lui sera adressée par le greffe, sauf prorogation de ce délai dûment sollicitée en temps utile de manière motivée auprès du juge du contrôle ;

DIT que l’expert judiciaire adressera un exemplaire de son rapport à chacune des parties sous la forme papier ou numérique en fonction du choix des parties et à défaut de précision sous la forme numérique et en fera mention dans son rapport ;

DIT qu’en déposant son rapport, l’expert adressera aux parties et à leurs conseils une copie de sa demande de rémunération ;

DIT que l’exécution de la mesure d’instruction sera suivie par le magistrat en charge du contrôle des expertises ;

INVITE les parties, dans le but de limiter les frais d’expertise, à utiliser la voie dématérialisée via l’outil OPALEXE pour leurs échanges contradictoires avec l’expert et la communication des documents nécessaires à la réalisation de la mesure d’expertise ;

LAISSE les dépens à la charge de Monsieur [E] [H] et Madame [B] [F] épouse [H].

Ainsi fait et prononcé par mise à disposition au greffe, le 6 septembre 2024, et nous avons signé avec le greffier.

Le Greffier, Le Juge des Référés,


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