Intéressé par une annonce parue sur le site eBay concernant la vente d’un véhicule NISSAN au prix de 11 300 €, un acheteur a procédé à trois virements bancaires au profit du vendeur par l’intermédiaire de Western Union. L’annonce en cause s’étant révélée être une escroquerie, l’acheteur a poursuivi la société eBay en responsabilité.
Responsabilité d’eBay
Dans cette affaire, la responsabilité de la société eBay a été partiellement retenue en raison de son intervention trop tardive après avoir connaissance du caractère frauduleux de l’annonce de vente.
La directive 200/31/CE du 8 juin 2000 dite « directive sur le commerce électronique » énonce en son article 15 une absence d’obligation générale en matière de surveillance à la charge des prestataires de services de la société de l’information, non sans avoir auparavant posé le principe en son article 14 d’une absence de responsabilité des informations stockées à la condition que le prestataire, dès le moment où il a connaissance du caractère illicite, agisse promptement pour retirer les informations ou rendre impossible l’accès à celles-ci.
Afin de bénéficier d’une limitation de responsabilité, le prestataire d’un service de la société de l’information consistant dans le stockage d’informations doit, dès qu’il prend effectivement connaissance ou conscience du caractère illicite des activités, agir promptement pour retirer les informations concernées ou rendre l’accès à celles-ci impossible.
En conformité avec ce dispositif européen, l’article 6-I-2 de la loi n°2004-575 du 21 juin 2004 pour la confiance dans l’économie numérique (LCEN) pose que les personnes physiques ou morales qui assurent, même à titre gratuit, pour mise à disposition du public par des services de communication au public en ligne, le stockage des signaux, d’écrits, d’images, de sons ou de messages de toute nature fournis par des destinataires de ces services ne peuvent pas voir leur responsabilité civile engagée du fait des activités ou des informations stockées à la demande d’un destinataire de ces services si elles n’avaient pas effectivement connaissance de leur caractère illicite ou de faits et circonstances faisant apparaître ce caractère ou si, dès le moment où elles en ont eu connaissance, elles ont agi promptement pour retirer ces données ou en rendre l’accès impossible.
Délais imposé à eBay pour agir
La LCEN pose le principe d’une intervention prompte de l’hébergeur après que ce dernier ait été informé d’un contenu illicite. La société eBay considérait comme une réaction prompte l’exonérant de toute responsabilité le délai de 72 heures écoulé jusqu’au retrait de l’annonce frauduleuse. Or, en l’espèce, il était établi (sur la base d’un mail) que la société eBay avait en sa possession certains indices laissant penser qu’une fraude était en cours. Le délai de 72 heures a été jugé incompatible avec les exigences de célérité et diligence requises au vu de la rapidité des échanges sur internet. La société eBay ne pouvait prétendre être exonérée de sa responsabilité laquelle a bien été engagée à raison d’un traitement tardif et défaillant de la connaissance qu’elle avait du caractère illicite de l’annonce hébergée par son site.
Notification de contenus illicites
Sur la forme de la notification de contenus illicites, les juges ont précisé que la société eBay ne pouvait se retrancher derrière le fait que la dénonciation du caractère frauduleux ne lui aurait pas été faite dans les formes voulues par l’article 6-I-5 de la loi de 2004, alors qu’elle avait accepté de traiter l’information / plainte reçue et se devait dès lors de le faire avec célérité et efficacité.
Partage des responsabilités
Les juges ont conclu à un partage des responsabilités. Le caractère novice dans l’utilisation du site eBay devait inciter l’acheteur à une plus grande vigilance et tout spécialement à veiller aux nombreuses mises en garde dont eBay ponctue son site, en particulier quant aux risques des transactions réalisées sans suivre ses recommandations et aux dangers de payer via Western Union ou d’autres services de virement d’argent.
L’acheteur n’avait pas scrupuleusement respecté les instructions sur le site eBay : il avait communiqué au vendeur ses coordonnées personnelles et l’avait contacté directement depuis son adresse personnelle e-mail, alors même que l’annonce frauduleuse apparaissait sur le site eBay avec en commentaire « Ne payer pas avec Western Union ou d’autres services de virement d’argent ». En outre, les fautes de syntaxe, grammaire et orthographe que comportaient les échanges avec le présumé vendeur auraient du alerter l’acheteur. La société eBay a été jugée responsable à concurrence de 25% du préjudice de l’acheteur.
Mots clés : Escroquerie
Thème : Escroquerie
A propos de cette jurisprudence : juridiction : Cour d’appel de Metz | Date : 2 juillet 2013 | Pays : France