8ème Ch Prud’homale
ARRÊT N°212
N° RG 20/00631 –
N° Portalis DBVL-V-B7E-QNUE
SAS REXEL FRANCE
C/
Mme [U] [W]
Infirmation partielle
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
– Me Marie VERRANDO
– Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
COUR D’APPEL DE RENNES
ARRÊT DU 30 MAI 2023
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
Monsieur Rémy LE DONGE L’HENORET, Président de chambre,
Monsieur Philippe BELLOIR, Conseiller,
Madame Liliane LE MERLUS, Conseillère,
GREFFIER :
Monsieur Philippe RENAULT, lors des débats et lors du prononcé
DÉBATS :
A l’audience publique du 09 Février 2023
devant Messieurs Rémy LE DONGE L’HENORET et Philippe BELLOIR, magistrats tenant l’audience en la formation rapporteur, sans opposition des représentants des parties, et qui ont rendu compte au délibéré collégial
En présence de Madame [F] [N], Médiatrice judiciaire
ARRÊT :
Contradictoire, prononcé publiquement le 30 Mai 2023 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats
****
APPELANTE et intimée à titre incident :
La SAS REXEL FRANCE prise en la personne de son représentant légal et ayant son siège social :
[Adresse 2]
[Adresse 2]
Représentée par Me Camille SUDRON substituant à l’audience Me Marie VERRANDO de la SELARL LEXAVOUE RENNES ANGERS, Avocats postulants du Barreau de RENNES et par Me Anne CROS substituant à l’audience Me Romain CHISS, Avocats plaidants du Barreau de PARIS
INTIMÉE et appelante à titre incident :
Madame [U] [W]
née le 27 Avril 1982 à [Localité 3]
demeurant [Adresse 1]
[Adresse 1]
Représentée par Me Tiphaine LE BERRE BOIVIN, Avocat postulant du Barreau de RENNES et ayant Me Sandrine PARIS de la SELARL ATALANTE AVOCAT, Avocat au Barreau de NANTES, pour conseil
Mme [U] [W] a été embauchée en qualité d’assistante de Direction par la SAS REXEL FRANCE dans le cadre d’un contrat à durée déterminée du 1er juillet 2010 jusqu’au 27 août 2010 qui s’est poursuivi au delà dans le cadre d’un contrat à durée indéterminée en qualité d’assistante Formation, statut Technicien, niveau 6, échelon 1.
Dans le dernier état des relations contractuelles régies par la Convention collective du Commerce de gros, Mme [U] [W] occupait des fonctions de Chargé de formation, statut Agent de maîtrise, niveau 6, échelon 2 depuis1er août 2012.
En novembre 2015, à son retour de congé maternité, le temps de travail de Mme [W] a été ramené à 80% dans le cadre d’un temps partiel.
Mme [W] a été placée en arrêt de travail du 3 juillet au 2 août 2017, pour syndrome dépressif, du 31 octobre au 28 novembre 2017 pour épuisement professionnel puis à compter du 2 février 2018.
Le 20 mars 2018, Mme [W] a été convoquée à un entretien préalable en vue d’un éventuel licenciement fixé au 29 mars 2018.
Le 11 avril 2018, Mme [W] était licenciée pour insuffisance professionnelle.
Le 24 octobre 2018, Mme [W] a saisi le conseil de prud’hommes de Nantes aux fins de :
‘ Déclarer le plafond d’indemnité du licenciement sans cause réelle et sérieuse non conforme à l’article 24 de la Charte sociale européenne révisée et à l’article 10 de la convention de l’OIT,
‘ Ecarter en conséquence ce plafond au profit d’une appréciation souveraine du Conseil,
‘ Fixer le salaire mensuel moyen de Mme [W] à : 2.118,70 €,
– Condamner la SAS REXEL FRANCE à payer à Mme [W] la somme de :
– 21.187 € (10 mois de salaire) au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 6.356,10 € (3 mois de salaire) au titre de dommages et intérêts pour licenciement dans des conditions vexatoires,
– 6.356,10 € (3 mois de salaire) au titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation,
– 6.356,10 € (3 mois de salaire) au titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,
– 12.712,2 € (6 mois de salaire) au titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de loyauté,
– 3.000 € au titre de l’article 700 du code de Procédure civile,
‘ Condamner la SAS REXEL FRANCE aux entiers dépens,
‘ Assortir la condamnation des intérêts au taux légal à compter du jugement à intervenir,
‘ Ordonner l’exécution provisoire de l’intégralité de la décision à intervenir.
La cour est saisie de l’appel formé le 23 janvier 2020 par la SAS REXEL FRANCE contre le jugement du 17 décembre 2019, par lequel le conseil de prud’hommes de Nantes a :
‘ Rejeté la note en délibéré transmise après clôture des débats et fin d’audience de jugement par la SAS REXEL FRANCE du 4 octobre 2019 conformément à l’article 445 du code de procédure civile,
‘ Jugé le licenciement de Mme [W] sans cause réelle et sérieuse,
‘ Dit qu’il n’y a pas lieu de déclarer le plafond d’indemnité de licenciement non conforme à l’article 24 de la Charte sociale européenne et à l’article 10 de la convention de l’OIT,
‘ Dit qu’il convient d’appliquer le plafonnement d`indemnisation prévu à l`article 1235-3 du code du travail,
‘ Condamné la SAS REXEL FRANCE à payer à Mme [W] les sommes suivantes :
– 16.949, 60 € nets à titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 6.356,10 € nets à titre de dommages et intérêts au titre des conditions vexatoires du licenciement,
– 2.118,70 € nets de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation,
– 6.356,10 € nets dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de loyauté,
– 1.200 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Rappelé que ces condamnations étaient assorties des intérêts au taux légal à compter de la date de prononcé du jugement,
‘ Lesdits intérêts produisant eux mêmes intérêts,
‘ Fixé la moyenne brute des salaires à la somme de 2.118,70 €,
‘ Ordonné l’exécution provisoire du jugement à hauteur de 100% des sommes allouées,
‘ Débouté Mme [W] du surplus de ses demandes,
‘ Débouté la SAS REXEL FRANCE de l’ensemble de ses demandes reconventionnelles,
‘ Condamné la SAS REXEL FRANCE aux entiers dépens et dit qu’à défaut de règlement spontané des condamnations prononcées par la décision à intervenir et qu’en cas d’exécution par voie extrajudiciaire les sommes retenues par l’huissier instrumentaire en application des dispositions de l’article 10 du décret du 8 mars 2001 portant modification du décret du 12 décembre 1996 devront être supportées par la SAS REX EL FRANCE,
‘ Condamné la SAS REXEL FRANCE à rembourser aux organismes intéressés les indemnités chômage versées à Mme [W] dans la limite de 3 mois d’indemnités.
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 10 janvier 2023, suivant lesquelles la SAS REXEL FRANCE demande à la cour de :
‘ Recevoir la SAS REXEL FRANCE en son appel, le dire bien fondé et y faisant droit,
‘ Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nantes du 17 décembre 2019 en ce qu’il a :
– jugé le licenciement de Mme [W] sans cause réelle et sérieuse et en conséquence, condamné la SAS REXEL FRANCE à la somme de 19.949,60 € nets au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– dit que le licenciement de Mme [W] était intervenu dans des conditions vexatoires et en conséquence, condamné la SAS REXEL FRANCE à des dommages-intérêts pour licenciement dans des conditions vexatoires à hauteur de 6.356,10 € nets,
– dit que la SAS REXEL FRANCE avait commis un manquement à son obligation de formation et en conséquence, condamné la SAS REXEL FRANCE à la somme de 2.118,70 € nets au titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation,
– dit que la SAS REXEL FRANCE avait commis un manquement à son obligation de loyauté et en conséquence, condamné la SAS REXEL FRANCE à la somme de 6.356,10 € net au titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de loyauté,
‘ Confirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes de Nantes du 17 décembre 2019 en ce qu’il a débouté Mme [W] du surplus de ses demandes,
Et statuant à nouveau,
A titre principal,
‘ Dire et juger que :
– le licenciement de Mme [W] repose sur une cause réelle et sérieuse,
– le licenciement de Mme [W] n’a pas été prononcé dans des conditions vexatoires,
– la SAS REXEL FRANCE n’a commis aucun manquement à son obligation de formation à l’égard de Mme [W],
– la SAS REXEL FRANCE n’a commis aucun manquement à son obligation de loyauté à l’égard de Mme [W],
– la SAS REXEL FRANCE n’a commis aucun manquement à son obligation de sécurité à l’égard de Mme [W],
En conséquence,
‘ Ordonner la restitution à la SAS REXEL FRANCE de la totalité des sommes versées en exécution du jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nantes du 17 décembre 2019,
‘ Débouter Mme [W] de l’intégralité de ses demandes, fins et conclusions,
A titre subsidiaire,
‘ Réduire le montant des dommages et intérêts alloués à Mme [W] par le conseil de prud’hommes de Nantes à un niveau proportionné et raisonnable au vu des éléments rapportés par la SAS REXEL FRANCE dans les présentes écritures,
En tout état de cause,
‘ Condamner Mme [W] à payer à la SAS REXEL FRANCE la somme de 2.000 € sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Condamner Mme [W] aux entiers dépens avec distraction au profit de l’avocat soussigné aux offres de droit.
Vu les écritures notifiées par voie électronique le 4 janvier 2023, suivant lesquelles Mme [W] demande à la cour de :
‘ Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nantes en ce qu’il a fixé le salaire mensuel moyen de Mme [W] à 2.118,70 €,
‘ Confirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nantes en ses autres dispositions,
‘ Confirmer mais infirmer sur le quantum le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nantes en ce qu’il a :
– jugé le licenciement de Mme [W] sans cause réelle et sérieuse,
– jugé que la SAS REXEL FRANCE avait manqué à son obligation de formation,
– jugé que la SAS REXEL FRANCE avait manqué à son obligation de loyauté,
– condamné la SAS REXEL FRANCE au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
‘ Infirmer le jugement rendu par le Conseil de prud’hommes de Nantes le 17 décembre 2019 en ce qu’il déboute Mme [W] de sa demande de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,
Statuant à nouveau,
‘ Ecarter le plafond au profit d’une appréciation souveraine de la Cour,
‘ Dire et juger que la SAS REXEL FRANCE a manqué à son obligation de sécurité,
‘ Condamner la SAS REXEL FRANCE à verser à Mme [W] la somme de :
– 21.187 € (10 mois de salaire) au titre de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
– 6.356,10 € (3 mois de salaire) au titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation,
– 12.712,2 € (6 mois de salaire) au titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de loyauté,
– 6.356,10 € (3 mois de salaire) au titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité,
– 3.000 € au titre de l’article 700 du Code de procédure civile,
‘ Condamner la SAS REXEL FRANCE aux dépens,
‘ Débouter l’appelante de toutes ses demandes, fins et conclusions autres ou contraires aux présentes.
La clôture de la procédure a été prononcée par ordonnance du 26 janvier 2023.
Pour un plus ample exposé des moyens et prétentions des parties la cour, conformément à l’article 455 du code de procédure civile, renvoie aux conclusions notifiées via le RPVA.
* * *
MOTIFS DE LA DÉCISION
Sur l’exécution du contrat de travail :
– Quant à l’obligation de formation :
Pour infirmation et débouté de la salariée, la SAS REXEL FRANCE entend contester ses affirmations, en faisant valoir que pendant la relation contractuelle, elle a bénéficié de quarante formations et bénéficié d’un plan d’accompagnement à la performance, outre le suivi et la supervision de Mme [P], qu’au demeurant ses insuffisances relatives aux retards à l’exécution des tâches, à sa mauvaise organisation et à son manque de réactivité et de communication comme les qualités qui étaient attendues, ne nécessitaient pas de formation spécifique.
Mme [U] [W] objecte qu’elle n’ a jamais reçu de formation pour son poste de chargée de formation malgré ses demandes, que si elle a eu une formation pour le poste de chef de projet, cette dernière ne correspondait pas à ses besoins.
L’article L6321-1 du Code du travail dans ses différentes versions applicables au litige dispose que ‘ L’employeur assure l’adaptation des salariés à leur poste de travail.
Il veille au maintien de leur capacité à occuper un emploi, au regard notamment de l’évolution des emplois, des technologies et des organisations.
Il peut proposer des formations qui participent au développement des compétences, ainsi qu’à la lutte contre l’illettrisme, notamment des actions d’évaluation et de formation permettant l’accès au socle de connaissances et de compétences défini par décret.
Les actions de formation mises en oeuvre à ces fins sont prévues, le cas échéant, par le plan de formation mentionné au 1° de l’article L. 6312-1. Elles peuvent permettre d’obtenir une partie identifiée de certification professionnelle, classée au sein du répertoire national des certifications professionnelles et visant à l’acquisition d’un bloc de compétences.’
Pour justifier avoir rempli son obligation de formation, l’employeur produit essentiellement deux pièces (22 et 23), la première présentée comme correspondant au programme de formation de management de projet ne comporte pas autre chose que l’intitulé de la formation, sa localisation et ses horaires ainsi que la liste des participants et la seconde est un listing de formation de 2010 à 2018 duquel il ressort qu’hormis la formation au management de projet précitée en juin 2017 et une découverte technique en 2018 en présentiel, les autres formations alléguées en 2016 et 2017 consistaient en des formations en e-learning ou en lecture pour lesquelles seules trois heures ont été créditées sur cette période et qui portaient essentiellement sur la connaissance de secteurs de marchés, en rupture avec les modalités antérieures de formation, systématiquement suivies en présentiel avant 2016.
L’employeur produit également des notes prises durant l’entretien préalable au licenciement de Mme [U] [W] (pièces 24 et 25) qui auraient été établies par Mme [P] et la DRH, non signées et dont rien n’indique qu’elles aient été portées à la connaissance de la salariée, soulignant qu’elle n’avait pas réinvesti les apports de la formation au management et exprimait ses réserves sur une proposition de formation par un organisme (intergros) correspondant à sa demande relative à la législation sur la formation.
La revue de performance et de développement 2016 de Mme [U] [W] (pièce 7) met en évidence plusieurs domaines identifiés ‘à renforcer’ ou ‘à développer’ tels que ‘encourager l’innovation’, ‘impliquer les collaborateurs pour développer leurs talents’, ‘s’épanouir en créant la différence’, ‘analyse et résolution de problème’, ‘culture du résultat’ , ‘gestion des ressources, activité, charge’, ‘communication’, ‘ travail d’équipe’.
Si la même revue pointe 11 domaines ‘conformes aux attentes’ ou ‘appliqués au quotidien’, il ne ressort pas des pièces produites au débat que l’employeur ait proposé à la salariée une formation en rapport avec son propre inventaire des domaines ‘à renforcer’ ou ‘développer’ identifiés en 2016, la formation ‘ gestion de projet’ réalisée en juin 2017 comme celle de ‘management de projet’ acceptée dans le cadre de la revue de performance de 2017, n’étant pas de nature à permettre à la salariée de se former dans les domaines pointés en 2016 et/ou identifiés en 2017 comme étant en cours d’acquisition concernant particulièrement ‘offrir la meilleure expérience client’, ‘encourager l’innovation, ‘impliquer les collaborateurs pour développer leur talent’ et ‘ développer une confiance mutuelle’.
Il sera au surplus observé qu’il résulte des relevés de notes réalisés par les représentantes de l’employeur lors de l’entretien préalable, que les entretiens hebdomadaires avec sa supérieure n’étaient pas identifiés comme une composante de formation mais comme la possibilité de lui poser des questions sur certaines demandes, de solliciter son aide mais aussi de ‘prendre la main pour me partager ton actualité plutôt que de te questionner’, ce qui ne peut en soi satisfaire l’obligation de formation pesant sur l’employeur et a contribué à la déstabilisation de la salariée qui a indiqué au cours de cet entretien qu’elle venait au travail la boule au ventre.
Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que la SAS REXEL FRANCE avait manqué à son obligation de formation à l’égard de Mme [U] [W]., les premiers juges ayant justement évalué le préjudice qui en est résulté.
– Quant à l’obligation de sécurité :
La SAS REXEL FRANCE conteste le manquement que la salariée lui impute à ce titre, faisant valoir que l’intéressée ne s’est jamais plainte de sa charge de travail, y compris en passant à 80%, que la société ne pouvait avoir connaissance des motifs de ses arrêts de travail, qu’elle a bénéficié de formation lui permettant de gérer sa charge de travail, qu’il n’est pas établi que ses arrêts de travail soient liés à ses conditions de travail, aucun lien n’étant fait à ce titre par les certificats de médecin consultés.
A ce titre, Mme [U] [W] impute à son employeur une surcharge de travail ainsi que des pressions qui ont conduit à ses arrêts de travail, l’aide invoquée consistant à la ‘fliquer’ et à lui faire à toute occasion des reproches, après avoir totalement revu ses objectifs sans lui donner les moyens de les atteindre, afin de pouvoir la dénigrer, qu’elle s’était ouverte de ses difficultés à la DRH sans changement à ses retours d’arrêt maladie et sans réduction de ses objectifs en dépit de la réduction de son temps de travail.
En application de l’article L.4121-1 du code du travail, l’employeur doit prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Ces mesures comprennent :
1° Des actions de prévention des risques professionnels ;
2° Des actions d’information et de formation ;
3° La mise en place d’une organisation et de moyens adaptés.
L’employeur veille à l’adaptation de ces mesures pour tenir compte du changement des
circonstances et tendre à l’amélioration des situations existantes.
L’article L.4121-3 du même code précise que l’employeur, compte tenu de la nature des activités de l’établissement, évalue les risques pour la santé et la sécurité des travailleurs, y compris dans le choix des procédés de fabrication, des équipements de travail, des substances ou préparations chimiques, dans l’aménagement ou le réaménagement des lieux de travail ou des installations et dans la définition des postes de travail. Cette évaluation des risques tient compte de l’impact différencié de l’exposition au risque en fonction du sexe.
A la suite de cette évaluation, l’employeur met en oeuvre les actions de prévention ainsi que les méthodes de travail et de production garantissant un meilleur niveau de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs. Il intègre ces actions et ces méthodes dans l’ensemble des activités de l’établissement et à tous les niveaux de l’encadrement.
Lorsque les documents prévus par les dispositions réglementaires prises pour l’application du présent article doivent faire l’objet d’une mise à jour, celle-ci peut être moins fréquente dans les entreprises de moins de onze salariés, sous réserve que soit garanti un niveau équivalent de protection de la santé et de la sécurité des travailleurs, dans des conditions fixées par décret en Conseil d’Etat après avis des organisations professionnelles concernées.
En l’espèce, il ne peut être imputé à la salariée de ne pas avoir alerté de ses difficultés son employeur lequel aurait dû adapter sa charge de travail à la réduction de son temps de travail, s’interroger sur la récurrence de ses arrêts de travail et leur fréquence à partir du 3 juillet 2017, sans pouvoir se prévaloir de l’absence de mention des motifs d’arrêt sur les arrêts de travail.
Dans les conditions rapportées, l’employeur ne démontre pas avoir rempli son obligation de sécurité à l’égard de Mme [U] [W], à l’encontre de laquelle il a engagé une procédure de licenciement en mars 2018 pour insuffisance pendant le dernier arrêt maladie qui sera prolongé jusqu’au 5 septembre 2018.
Il y a lieu en conséquence d’infirmer le jugement entrepris de ce chef et de condamner la SAS REXEL FRANCE à lui verser la somme de 5.000 € à titre de dommages et intérêts à ce titre.
Sur le bien fondé du licenciement :
Pour voir infirmer le jugement entrepris de ce chef, la SAS REXEL FRANCE fait observer qu’en matière d’insuffisance professionnelle, la preuve est partagée et qu’en l’espèce, la salariée ne développe aucun élément opposant, qu’il est avéré qu’elle répondait avec retard sur des tâches basiques, de l’ordre d’un mois et demi de retard sans explication, en se prévalant d’un arrêt maladie, qu’elle accuse un retard pour l’ensemble des formations, qu’elle fait l’objet de relances de la part d’un des prestataires, que son problème de réactivité déjà souligné, induit des pertes de temps et une mauvaise image.
En ce qui concerne ses absences, elle ne prévient pas immédiatement son employeur, se met en arrêt sans prévenir, sans se préoccuper des autres et de la bonne marche de l’entreprise, qu’elle n’a pas mis en oeuvre les axes de développements recommandés, qu’elle n’hésite pas à renvoyer une responsable des ressources humaines à aller chercher ailleurs, contraignant sa supérieure à en assurer la gestion.
La SAS REXEL FRANCE soutient également que la salariée ne peut imputer ses insuffisances à un manque de formation, qu’elle n’a pas pris en compte la bonne marche de la société, que c’est elle qui transmet la liste de ses attributions, que le devoir d’adaptation de la salariée à son poste a été respecté, que l’absence de passif disciplinaire est indifférent, s’agissant de l’appréciation de son insuffisance, sachant qu’elle ne s’est pas reprise malgré les premiers reproches de M. [H], prédécesseur de Mme [P], que rien ne caractérise la dégradation des conditions de travail, que la période invoquée par l’intéressée ne correspond pas, que les attestations qu’elle produit émanent de salariés partis depuis longtemps, que si elle a été absente pour maladie pendant deux mois en 2017, il lui en restait dix pour performer.
L’insuffisance professionnelle peut constituer une cause réelle et sérieuse de licenciement lorsqu’elle repose sur des éléments précis, objectifs et imputables au salarié’; le juge apprécie le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur en formant sa conviction au vu des éléments fournis par les parties.
Selon l’article L.1235-1 du code du travail, en cas de litige relatif au licenciement, le juge, à qui il appartient d’apprécier la régularité de la procédure et le caractère réel et sérieux des motifs invoqués par l’employeur, forme sa conviction au vu des éléments fournis par les parties, au besoin après toutes mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si un doute subsiste, il profite au salarié.
Ainsi l’administration de la preuve en ce qui concerne le caractère réel et sérieux des motifs du licenciement n’incombe pas spécialement à l’une ou l’autre des parties, l’employeur devant toutefois fonder le licenciement sur des faits précis et matériellement vérifiables.
Au terme de la lettre de licenciement qui circonscrit les limites du litige et qui lie le juge, il est reproché à Mme [U] [W] de :
– répondre avec beaucoup de retard aux demandes qui lui sont formulées et de ne pas suivre adéquatement les projets et dossiers qui lui sont confiés,
– être mal organisée et faire défaut de communiquer d’importantes informations à son équipe,
– n’avoir pas mis en oeuvre les axes d’amélioration indiqués lors de l’entretien de performance de janvier 2017 malgré la formation dispensée,
– Quant au retard des réponses apportées aux demandes formulées et au suivi non adéquat des projets et dossiers confiés :
* Concernant la préparation de la page catalogue d’une formation en anglais :
A l’appui de ce grief, la SAS REXEL FRANCE invoque et produit un courriel du 1er septembre 2017 au terme duquel Mme [P] lui adresse la synthèse du point hebdo du même jour détaillant les attentes pour le vendredi suivant :
‘ Anglais :
‘rédaction de la page catalogue (avec partie prise en charge au titre du plan partie CPF HTL) qui viendra alimenter la page CPF de [C] (mini topo)
‘benchmark des prestataires (sous la forme d’un tableau) pour préconisation et décision :
‘les presta avec lesquels on a travaillé : nbre de formés + taux de retour/satisfaction/forme/coût
‘les nouveaux presta que l’on pourrait tester : format /coût
‘ Vodeclic
‘Rédaction page catalogue notamment en utilisant tout ce qui a déjà été fait ou en t’appuyant sur Vodeclic
‘RDV à fixer le 25 sept. pour point avec le presta et renegociation
‘ Format envisagé pour communication siège et assistantes
‘Bilan formations en région : sur la base du doc de [D] (en P.J.) à compléter : formations concernées et lieux + volumétrie
Nous ferons le point sur la programmation et les relances sur la base de ton tableau de suivi renseigné (V3)
Il est établi qu’au cours des réunions d’équipe des 4 et 11 septembre 2017, Mme [P] a rappelé à la salariée sa demande concernant le dossier ‘anglais’ et que cette commande comme celle relative à la première version de la présentation de la formation en e-learning (Vodeclic) n’a été finalisée que le 27 octobre 2017.
S’agissant du retard dans le traitement de ces deux dossiers dont la salariée ne discute pas véritablement la réalité, elle met en cause le pouvoir de Mme [P] de conduire l’entretien préalable et de prononcer son licenciement au regard du détail de sa fiche de poste mais n’en tire véritablement aucune conséquence, sachant au demeurant qu’au sein d’une SAS, l’exercice du pouvoir disciplinaire peut être délégué et que l’entretien préalable a été conduit en présence de la responsable des ressources humaines.
Sur le fond, la salariée entend se prévaloir de la charge de travail qui lui incombait, avec des objectifs maintenus en dépit de la réduction de son temps de travail, de l’absence d’avertissements antérieurs sur la qualité de son travail et des commentaires élogieux d’anciens salariés de la société à son égard et à l’égard de la qualité de son travail, ce qui n’a pas pour effet de remettre en cause la réalité des deux retards qui lui sont imputés.
Pour autant, ainsi que le fait remarquer la salariée, les deux retards litigieux étaient identifiés comme tels dès le 8 septembre et a fortiori lors du point hebdomadaire du 11 septembre et ils n’ont été reprochés à la salariée qu’en mars 2018 alors qu’elle était en arrêt de travail, alors que la page en anglais a été finalisée le 27 octobre 2017 et que la mise en oeuvre de la formation en e-learning n’a été repoussée que de deux semaines en mars 2018.
La salariée souligne également sans être contredite, avoir bénéficié d’une prime sur objectif au titre de l’année 2017, de sorte qu’il ne peut être considéré qu’à eux seuls ces retards qui lui sont imputés, soient signifiants de l’insuffisance alléguée.
* Concernant la mauvaise organisation et non communication d’informations importantes à son équipe :
L’employeur reproche essentiellement à la salariée de ne pas l’avoir rapidement informée de ses absences en particulier des 28 et 29 décembre 2017, l’empêchant de pourvoir à son remplacement sur une période tendue, empêchant par ailleurs son équipe de s’organiser, ce qui démontrerait un manque d’implication et d’esprit d’équipe quand bien même la salariée aurait respecté le délai de 48 heures pour l’informer.
La salariée objecte qu’elle a toujours respecté le délai de 48 heures qui lui était imparti, qu’elle ne disposait pas de scanner à domicile et qu’il ne peut lui être reproché de ne pas avoir adressé un sms à sa supérieure qui était en vacances à cette date pour l’informer plus rapidement.
Au regard de sa formulation concernant l’absence d’information importante à son équipe, a fortiori pendant une période de congés de fin d’année, le grief articulé à ce titre apparaît d’autant plus dépourvu de sérieux qu’une éventuelle communication par voie électronique n’aurait pas eu pour effet d’informer plus avant d’éventuels interlocuteurs et que non seulement il est établi que la salariée a justifié de son absence dans les délais et qu’il n’est rapporté aucune information tangible concernant une éventuelle désorganisation induite par la carence alléguée, la référence à une critique antérieure à ce titre dans le cadre de son évaluation de l’année 2016 ne pouvant donner corps à un tel grief et pallier son manque de sérieux.
* Concernant la non mise en ‘uvre les axes d’amélioration qui ont été indiqués lors de l’entretien de performance de janvier 2017, malgré la formation qui lui avait été dispensée.
A ce titre, il est reproché à la salariée les carences relevées lors de l’entretien de performance de 2018 et qui avaient déjà été relevées lors de l’entretien de 2017 concernant :
– Des difficultés dans la gestion du temps de travail et dans l’organisation de son travail,
– Des défaillances dans la communication avec son équipe,
– Un manque de proactivité et de réactivité,
– Des difficulté dans la priorisation des demandes,
– Un manque d’autonomie dans la conduite des projets et dans ses relations avec les prestataires,
– Une lacune en matière d’analyse et de résolution de problème.
Cependant, s’il y a effectivement des similitudes entre certains points de l’entretien de performance de 2017 et celui de 2018, il n’en demeure pas moins qu’en fixant des objectifs à la salariée lors de l’entretien de janvier 2018, l’employeur ne peut a posteriori venir lui reprocher de ne pas avoir mis en oeuvre les axes d’amélioration indiqués lors de l’entretien de 2017, étant relevé qu’à ce titre, hormis les occurrences ‘encourager l’innovation’, ‘impliquer les collaborateurs pour développer leurs talents’, similaires à des carences pointées dès 2016, les griefs portaient principalement sur celles relatives à ‘offrir la meilleure expérience client’ et ‘ développer une confiance mutuelle’.
Ainsi que l’ont relevé les premiers juges, il ne peut être reproché à la salariée de ne pas avoir pu mettre en oeuvre ces axes d’amélioration postérieurement à l’entretien de performance de janvier 2018, en faisant référence à celui de 2017, a fortiori dès lors que la salariée a été placée en arrêt maladie dès le 2 février 2018.
Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a déclaré le licenciement de Mme [U] [W] dépourvu de cause réelle et sérieuse.
Sur les conséquences de la rupture :
– Quant à la conventionnalité du Barème de l’article L. 1235-3 du code du travail :
En droit français, si le licenciement est dénué de cause réelle et sérieuse, le juge peut proposer la réintégration du salarié dans l’entreprise. Lorsque la réintégration est refusée par l’une ou l’autre des parties, le juge octroie au salarié une indemnité à la charge de l’employeur dans les limites de montants minimaux et maximaux. Le barème prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail est écarté en cas de nullité du licenciement, par application des dispositions de l’article L.1235-3-1 du même code. Il s’en déduit que les dispositions de l’article L. 1235-3 du code du travail, qui fixent un barème applicable à la détermination par le juge du montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, sont compatibles avec les stipulations de l’article 10 de la Convention n° 158 de l’OIT.
Il y a lieu par conséquent de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a rejeté la demande de Mme [U] [W] tendant à voir écartée l’application du barème critiqué.
– Quant à l’indemnisation du préjudice résultant de la rupture :
Compte tenu de l’effectif du personnel de l’entreprise, de la perte d’une ancienneté de 8 ans pour une salariée âgée de 36 ans ainsi que des conséquences matérielles et morales du licenciement à l’égard de l’intéressée qui a été en arrêt de travail jusqu’au 5 septembre 2018 et qui justifie de ses recherches d’emploi mais sans verser de pièces concernant son nouvel emploi qu’elle indique moins rémunérateur, il lui sera alloué, en application de l’article L. 1235-3 du Code du travail dans sa rédaction postérieure à l’ordonnance n°2017-1387 du 22 septembre 2017 une somme de 16.949 € net à titre de dommages-intérêts, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef ;
Sur les autres conséquences de la rupture :
– Quant à l’obligation de loyauté :
Pour infirmation de la décision entreprise de ce chef, la SAS REXEL FRANCE expose que la salariée ne peut se prévaloir d’un tel manquement dès lors que les insuffisances qui lui sont imputées ont fait l’objet d’observations dans le cadre des trois derniers entretiens de performance de 2016, 2017 et 2018, qu’il ne peut être retenu comme l’ont fait les premiers juges que l’entretien préalable aurait été mené à charge, a fortiori avec une DRH qui ne connaissait pas le dossier de la salariée, sachant que Mme [P] avait la faculté de conduire seule cet entretien au cours duquel la parole a été laissée à la salariée qui ne justifie d’aucun préjudice distinct.
Mme [U] [W] réfute l’argumentation développée par son employeur à ce titre, arguant de ce que dans sa volonté de trouver des prétextes pour réorganiser le service formation, l’employeur lui a soudainement adressé des reproches sans qu’elle ait été destinataire du moindre reproche pendant toute la relation contractuelle.
En application des dispositions de l’article L. 1222-1 du Code du travail, le contrat de travail est présumé exécuté de bonne foi, de sorte que la charge de la preuve de l’exécution de mauvaise foi dudit contrat incombe à celui qui l’invoque.
En l’espèce, l’examen des entretiens d’évaluation de Mme [U] [W] tels que précédemment rapporté, permet de relever que contrairement à ce que soutient la salariée, son supérieur hiérarchique en 2016 soulignait déjà des domaines ‘à renforcer’ ou ‘à développer’ , de sorte qu’indépendamment de la carence de l’employeur à mettre en oeuvre des formations adaptées à ses constats, il ne peut être soutenu que la relation contractuelle était dépourvue de reproches antérieurement à l’évaluation faite par Mme [P], ni que cette évaluation aurait eu pour but de préparer le licenciement à la faveur de la réorganisation du service.
Il y a lieu par conséquent d’infirmer le jugement entrepris et de débouter la salariée de la demande formulée à ce titre.
– Quant aux circonstances vexatoires du licenciement :
Pour infirmation, la SAS REXEL FRANCE fait valoir qu’il est faux de laisser supposer que le licenciement a été brutal au motif que la salariée n’aurait pas fait l’objet de critiques antérieures alors que les reproches sont identiques à ceux formulés au cours des entretiens de performance précédents et que la salariée a été relancée à plusieurs reprises par sa responsable, que le seul fait de ne pas avoir fait l’objet de reproches antérieurs ne confère pas en soi un caractère vexatoire au licenciement qui n’a pas été annoncé aux autres salariés antérieurement à sa notification à l’intéressée qui s’abstient d’en produire l’avis de réception.
La SAS REXEL FRANCE ajoute qu’il est établi qu’au cours de l’entretien préalable, la salariée a été mise en mesure de s’exprimer librement et de donner ses explications et observations sur les griefs qui lui étaient reprochés dans des conditions que ne reflètent pas le ressenti de la déléguée syndicale assistant la salariée qui ne justifie pas d’un préjudice particulier.
Mme [U] [W] objecte qu’elle n’avait jamais fait l’objet du moindre reproche par la hiérarchie sur sa façon de travailler, qu’elle a appris par ses collègues informés par courriel du 13 avril 2018, qu’elle était finalement licenciée, étant de surcroît privée le jour même d’accès au logiciel REXEL, qu’elle a été confrontée durant l’entretien préalable à une attitude à charge de Mme [P] à son encontre, étant en outre contrainte de se déplacer à [Localité 4] alors qu’elle était en arrêt de travail.
En l’espèce, s’il est établi que la lettre recommandée avec accusé de réception de notification du licenciement de Mme [U] [W] lui a été présentée le 12 avril 2018, la pièce produite par l’employeur ne permet pas de considérer que ladite lettre avait effectivement été remise à la salariée et rien ne justifie la précipitation de Mme [P] à informer dès le 13 avril 2018 les autres salariés de ce licenciement dès lors que Mme [U] [W] en arrêt de travail disposait d’un délai de deux semaines pour retirer son courrier.
Par ailleurs, l’assertion de la salariée selon laquelle ses accès aux logiciels de l’entreprise lui auraient été supprimés immédiatement alors que son préavis qu’elle était dispensée d’exécuter, n’était pas à son terme, n’est pas sérieusement discutée par l’employeur, circonstance de nature à conférer au licenciement une dimension coercitive inappropriée s’agissant d’un licenciement pour inaptitude.
Dans ces conditions et au delà du ressenti par la salariée et la déléguée syndicale de la conduite de l’entretien préalable par Mme [P] en présence de la DRH de la société, les éléments rapportés confèrent aux circonstances dans lesquelles est intervenu le licenciement un caractère vexatoire pour la salariée, la circonstance qu’elle ait pu faire l’objet d’observations similaires lors des entretiens d’évaluation antérieurs étant indifférente au regard de leur objet spécifique de permettre un échange sur l’évolution professionnelle.
Il y a lieu en conséquence de confirmer le jugement entrepris de ce chef mais d’évaluer le préjudice subi à ce titre à la somme de 2.500 €.
Sur la capitalisation des intérêts :
En application de l’article 1343-2 du code civil, la capitalisation des intérêts est de droit dès lors qu’elle est régulièrement demandée ; il doit être fait droit à cette demande, le jugement entrepris étant confirmé de ce chef’;
Sur le remboursement ASSEDIC
En application de l’article L.1235-4 du Code du travail, dans les cas prévus aux articles L.1235-3 et L.1235-11, le juge ordonne le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés de tout ou partie des indemnités de chômage versées au salarié licencié, du jour de son licenciement au jour du jugement prononcé, dans la limite de six mois d’indemnités de chômage par salarié intéressé. Ce remboursement est ordonné d’office lorsque les organismes intéressés ne sont pas intervenus à l’instance ou n’ont pas fait connaître le montant des indemnités versées
Les conditions d’application de l’article L 1235-4 du Code du travail étant réunies en l’espèce, le remboursement des indemnités de chômage par l’employeur fautif, est de droit ; le jugement entrepris est confirmé de ce chef ;
Sur l’article 700 du Code de procédure civile
Les éléments de la cause et la situation économique respective des parties justifient qu’il soit fait application de l’article 700 du code de procédure civile dans la mesure énoncée au dispositif ; la société appelante qui succombe en appel, doit être déboutée de la demande formulée à ce titre et condamnée à indemniser le salarié intimé des frais irrépétibles qu’il a pu exposer pour assurer leur défense en cause d’appel.
PAR CES MOTIFS,
LA COUR,
Statuant en dernier ressort et par arrêt contradictoire mis à la disposition des parties au greffe,
INFIRME partiellement le jugement entrepris,
et statuant à nouveau,
DÉBOUTE Mme [U] [W] de sa demande au titre du manquement à l’obligation de loyauté,
CONDAMNE la SAS REXEL FRANCE à payer à Mme [U] [W] :
– 5.000 € net à titre de dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de formation,
– 2.500 € net à titre de dommages et intérêts pour licenciement vexatoire,
RAPPELLE que les sommes de nature salariale porteront intérêts au taux légal à compter de la date de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation, les autres sommes, à caractère indemnitaire porteront intérêts au taux légal à compter de la décision qui les alloue ;
ORDONNE la capitalisation des intérêts,
CONFIRME le jugement entrepris pour le surplus,
et y ajoutant,
CONDAMNE la SAS REXEL FRANCE à payer à Mme [U] [W] 2.800 € en application de l’article 700 du code de procédure civile,
DÉBOUTE la SAS REXEL FRANCE de sa demande fondée sur les dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE la SAS REXEL FRANCE aux entiers dépens de première instance et d’appel,
LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT.