Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE
délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 6 – Chambre 5
ARRET DU 29 SEPTEMBRE 2022
(n° 2022/ , 13 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 19/12194 – N° Portalis 35L7-V-B7D-CBDL5
Décision déférée à la Cour : Jugement du 17 Janvier 2018 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° F14/11007
APPELANTE
Madame [P] [T] épouse [E]
[Adresse 2]
[Localité 3]
Représentée par Me Sarra JOUGLA, avocat au barreau de PARIS, toque : A0200
INTIMÉE
SASU THE KOOPLES DIFFUSION
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentée par Me Johann SULTAN, avocat au barreau de PARIS, toque : R139
COMPOSITION DE LA COUR :
En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 01 juin 2022, en audience publique, les parties ne s’y étant pas opposées, devant Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre chargée du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Madame Marie-Christine HERVIER, Présidente de chambre,
Madame Nelly CAYOT, Conseillère
Madame Lydie PATOUKIAN, Conseillère
Greffier : Madame Julie CORFMAT, lors des débats
ARRÊT :
– contradictoire,
– par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,
– signé par Madame Marie-Christine HERVIER, présidente et par Madame Cécile IMBAR, greffier à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
EXPOSE DU LITIGE
Par contrat de travail à durée indéterminée à effet au 1er février 2010, Mme [P] [T] a été engagée par la société The Kooples diffusion en qualité de vendeuse, position employée, catégorie C. Elle est ensuite devenue vendeuse senior, puis, à compter du 1er janvier 2011, responsable de boutique, position cadre, catégorie A. Par avenant du 1er juin 2013, après avoir connu des promotions régulières, elle est devenue directrice de corner, position cadre, catégorie A2. Elle exerçait son activité au magasin Le Printemps, [Adresse 5] à [Localité 6] mais son contrat de travail contenait une clause de mobilité pour la région Ile de France. Sa rémunération mensuelle s’élevait, dans le dernier état de la relation contractuelle à la somme de 3 500 euros pour une durée de travail de 164,66 heures.
Mme [T] a présenté des arrêts de travail à compter du 6 juin 2014. La première visite de reprise s’est tenue le 5 novembre 2014 et lors de la seconde visite de reprise le 19 novembre 2014, le médecin du travail a conclu qu’elle était ‘inapte à tout poste de travail dans l’entreprise’.
Le 14 août 2014, Mme [T] a saisi le conseil des prud’hommes en résiliation judiciaire de son contrat de travail.
Par courrier recommandé avec accusé de réception du 17 décembre 2014, Mme [T] a été convoquée à un entretien préalable à un éventuel licenciement fixé au 7 janvier 2015 et s’est vu notifier son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement par courrier adressé sous la même forme le 12 janvier 2015.
La société The Kooples diffusion emploie au moins onze salariés et applique la convention collective nationale des maisons à succursales de vente au détail d’habillement du 30 juin 1972
Par jugement du 17 janvier 2018 auquel il convient de se reporter pour l’exposé de la procédure antérieure et des demandes initiales des parties, le conseil de prud’hommes de Paris, section encadrement, a :
– débouté Mme [T] de l’ensemble de ses demandes,
– débouté la société The Kooples diffusion de sa demande reconventionnelle,
– condamné Mme [T] aux dépens.
Mme [T] a régulièrement relevé appel du jugement le 11 décembre 2019.
Aux termes de ses dernières conclusions d’appelante n°2 transmises par voie électronique le 15 avril 2022 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, Mme [T] prie la cour d’infirmer le jugement entrepris et de :
– fixer son salaire reconstitué à la somme de 4 868,18 euros et en tout cas à 4 508,96 euros brut,
– condamner la société The Kooples diffusion à lui verser les sommes de :
* 20 000 euros au titre des dommages et intérêts pour discrimination sexiste,
* 5 500 euros brut au titre des rappels de salaire sur le fondement du principe à travail égal salaire égal,
* 550 euros au titre des rappels d’indemnités de congés payés sur rappel de salaires,
* 16 000 euros de dommages et intérêts pour rupture d’égalité et préjudice moral,
* 1 477,30 euros au titre du rappel de la prime sur objectifs de septembre 2014,
* 56 044,55 euros brut au titre du rappel de salaires sur heures supplémentaires pour la période du 1er février 2010 au 6 juin 2014,
* 5 604,45 euros brut au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés sur heures supplémentaires,
* 29 209,12 euros de dommages et intérêts pour travail dissimulé,
* 5 000 euros brut de dommages et intérêts pour non-respect de la durée du travail et des conditions d’hygiène et de sécurité,
* 8 050,34 euros brut au titre du rappel du maintien du salaire pour la période d’absence de juin 2014 jusqu’à son licenciement,
* 1 560 euros de dommages et intérêts pour refus de remise d’un vestiaire,
– dire qu’elle a été victime de harcèlement moral,
– condamner la société The Kooples diffusion à lui verser :
A titre principal,
* rappel de la demande de résiliation judiciaire du contrat,
* 43 813,68 euros de dommages et intérêts équivalents à ceux versés pour licenciement nul ou illicite,
* 6 000 euros de dommages et intérêt pour harcèlement moral,
* 4 868,18 euros de dommages et intérêts pour préjudice de carrière,
* 4 104 ,56 euros au titre d’un rappel sur préavis,
* 410,45 euros au titre de l’indemnités de congés payés sur préavis,
Subsidiairement sur le motif de la rupture,
– dire que le licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse,
– condamner la société The Kooples diffusion à lui verser les sommes de :
* 43 813,68 euros de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,
* 6 000 euros de dommages et intérêt pour exécution déloyale du contrat de travail,
* 4 868,18 euros de dommages et intérêts pour préjudice de carrière,
* 4 104 ,56 euros au titre d’un rappel sur préavis,
* 410,45 euros au titre de l’indemnité de congés payés sur préavis,
En tout état de cause,
– condamner la société The Kooples diffusion à lui verser la somme de 5 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile
– assortir les condamnations des intérêts au taux légal et capitalisation dans les conditions de l’article 1154 du code civil.
Aux termes de ses dernières conclusions d’intimée transmises par voie électronique le 28 mai 2020 auxquelles il convient de se reporter pour plus ample exposé des prétentions et moyens en application de l’article 455 du code de procédure civile, la société The Kooples diffusion prie la cour de confirmer le jugement, débouter Mme [T] de l’ensemble de ses demandes et la condamner à lui verser la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux dépens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 18 mai 2022.
MOTIVATION :
Sur l’exécution du contrat de travail :
Sur le rappel de salaires au titre des heures supplémentaires :
Sur la prescription :
Dans ses écritures, la société The Kooples diffusion invoque pour s’opposer à la demande présentée par la salariée un moyen tiré de la prescription pour la période antérieure au 19 août 2011, trois années avant la saisine du conseil de prud’hommes.
Mme [T] réclame des rappels de salaire à compter du mois de février 2010 qui constitue donc le point de départ du délai de prescription lequel était de cinq ans à l’époque en application de l’article L. 3245-1 du code du travail dans sa version alors en vigueur. Ce délai de prescription était en cours lors de l’entrée en vigueur de la loi 2013-504 du 14 juin 2013 ramenant le délai de prescription à trois ans de sorte que les dispositions transitoires prévues par l’article 21 en cas de réduction du délai sont applicables. Il en résulte que le nouveau délai de prescription a couru à compter de l’entrée en vigueur de la loi nouvelle sans que sa durée puisse excéder celle de la loi nouvelle de sorte que l’action diligentée le 14 août 2014 n’est pas couverte par le délai de prescription.
Sur le fond :
Il résulte des articles L. 3171-2, L. 3171-3 et L. 3171-4 du code du travail dans leur version applicable à l’espèce qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
Mme [T] soutient qu’elle a effectué des heures supplémentaires dès l’origine du contrat de travail peu important qu’elle n’ait fait aucune réclamation à ce titre et que l’employeur ait pu lui offrir des vêtements en contrepartie, les dispositions légales prévoyant des majorations des heures et non l’attribution de primes ou de marchandises. Elle verse aux débats, des mails de l’employeur offrant des vêtements en contrepartie du travail effectué, des plannings et un décompte détaillé des heures qu’elle soutient avoir effectuées.
Ces éléments sont suffisamment précis quant aux heures qu’elles prétend avoir effectuées pour permettre à l’employeur d’y répondre en produisant ses propres éléments.
La société The Kooples diffusion fait valoir que la procédure de déclaration des heures supplémentaires était bien établie et connue de Mme [T], que les éléments que celle-ci produit pour démontrer une surcharge de travail sont peu probants, soit parce-qu’en réalité la demande qui lui était faite était simplement d’accueillir une nouvelle salariée pour lui montrer le fonctionnement d’un corner ship, soit parce qu’elle ne tient pas compte des jours de récupération qu’elle posait de façon systématique (mail du 12 janvier 2014 et du 2 avril 2014). Elle critique les tableaux produits par la salariée, établis à posteriori pour les besoins de la cause, et rappelle que Mme [T] établissait elle-même les plannings. Elle fait enfin valoir que celle-ci présente un décompte erroné en ne décomptant aucun jour férié, et en comptabilisant ses congés dans l’assiette de calcul de ses heures supplémentaires.
Au vu de l’ensemble de ces éléments, la cour considère que Mme [T] a effectué des heures supplémentaires mais dans une mesure moindre que celle qu’elle revendique et condamne la société The Kooples diffusion à lui verser la somme de 15 681,51 euros brut à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires outre celle de 1 568,15 euros au titre des congés payés afférents pour la période courant de février 2010 à juin 2014. Le jugement est infirmé en ce qu’il l’a déboutée de ce chef de demande.
Sur les dommages-intérêts pour travail dissimulé :
Aux termes de l’article L. 8223-1 du code du travail, le salarié victime de travail dissimulé peut prétendre en cas de rupture du contrat de travail à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire. Il appartient au salarié qui la réclame de démontrer le caractère intentionnel de la dissimulation allégué. En l’espèce, cette preuve n’est pas rapportée par la seule omission des heures sur les bulletins de salaire d’autant que Mme [T] établissait ses plannings. La demande est donc rejetée et le jugement confirmé en ce qu’il a débouté Mme [T] de ce chef.
Sur la discrimination :
La discrimination en raison du sexe est prohibée par l’article L. 1132-1 du code du travail. En application de l’article L.1134-1 du code du travail, en cas de litige relatif à l’application de l’article L.1132-1 du code du travail, le salarié concerné présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte et il incombe à la partie défenderesse au vu de ces éléments, de prouver que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination, le juge formant sa conviction après avoir ordonné entant que de besoin, toutes les meures d’instruction qu’il estime utiles.
Il en résulte que lorsque le salarié présente des éléments de faits constituant selon lui une discrimination directe ou indirecte, il appartient au juge d’apprécier si ces éléments dans leur ensemble laissent supposer l’existence d’une discrimination et, dans l’affirmative, il incombe à l’employeur de prouver que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs qui y sont étrangers.
En l’espèce, Mme [T] soutient avoir été victime d’une discrimination en raison de son sexe en faisant valoir qu’elle était moins bien payée que ses collègues masculins. Elle soutient qu’elle a pris conscience de cette situation lors d’un entretien qui s’est tenu le 8 novembre 2012 en réalisant que le directeur de la boutique des Ternes, engagé directement à ce poste, contrairement à elle qui a dû faire ses preuves durant 11 mois avant d’accéder à ce niveau de fonction était mieux payé qu’elle. Elle fait également valoir que le système de rémunération de primes de la boutique des Ternes était plus avantageux que le sien et que lors d’un entretien avec Mme [H] [N] en janvier 2014, elle a compris que n’étant pas un homme, elle ne pourrait tenir la boutique du corner et devait envisager des perspectives de carrière en dehors de la société The Kooples.
Mme [T] verse aux débats des mails concernant l’organisation d’un déjeuner, le mail annonçant l’arrivée de M. [F] en qualité de responsable retail Ile de France, un mail concernant son vestiaire et un mail sur l’arrivée d’un vendeur sur le corner du printemps. Ces éléments sont insuffisants pour lui pemettre d’établir la matérialité de faits laissant supposer une discrimination en raison de son sexe.
La cour confirme le jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande de dommages-intérêts en raison d’une discrimination.
Sur la violation du principe de l’égalité de traitement :
Le principe d’égalité de traitement dont le principe ‘à travail égal, salaire égal’ énoncé par les articles L. 2271-1 8° et L. 3221-2 du code du travail constitue une déclinaison, s’applique à tous les droits et avantages accordés aux salariés. Il implique que deux personnes placées dans une situation identique ou similaire, perçoivent la même rémunération ou le même avantage. Si, aux termes de l’article 1315, devenu l’article 1353 du code civil, il appartient au salarié qui invoque une atteinte à ce principe de soumettre au juge les éléments de fait susceptibles de caractériser une inégalité de traitement, il incombe à l’employeur de rapporter la preuve d’éléments objectifs et matériellement vérifiables justifiant cette différence. En conséquence, il appartient à Mme [T] de justifier qu’elle se trouve dans une situation identique ou similaire à celle des salariés auxquels elle se compare et il incombe à la société The Kooples diffusion de démontrer que la différence de traitement est justifiée par des éléments objectifs et matériellement vérifiables.
Aux termes de l’article L. 3221-4 du code du travail, sont considérés comme ayant une valeur égale les travaux qui exigent des salariés un ensemble comparable de connaissances professionnelles consacrées par un titre, un diplôme ou une pratique professionnelle, des capacités découlant de l’expérience acquise, de responsabilités et de charge physique ou nerveuse. S’il n’est pas nécessaire que les fonctions exercées soient strictement identiques, il convient qu’elles impliquent un niveau de responsabilité, de capacité et de charge physique ou nerveuse comparable.
Mme [T] qui se compare à M. [K] [I], explique avoir appris en septembre 2010 que ce salarié travaillant à la boutique [R] était mieux payé qu’elle. Elle s’appuie sur deux mails des 23 et 24 août 2010, l’un lui transmettant un encouragement d’un client, l’autre la félicitant de ses résultats et lui annonçant sa promotion à la catégorie C, ainsi que sur ses avenants établissant ses fonctions et salaires. Ces pièces ne suffisent cependant pas à établir ni la différence de traitement alléguée ni que le salarié auquel elle se compare est placé dans une situation identique ou similaire à la sienne.
La cour ne retient donc pas que Mme [T] a été victime d’une atteinte au principe de l’égalité de traitement. Sa demande de rappel de salaire et congés payés afférents est rejetée. Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur le harcèlement moral :
Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L’article L.1154-1 du même code prévoit dans sa version en vigueur lors de la saisine de la juridiction prud’homale qu’en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il incombe alors à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs qui y sont étrangers.
Il en résulte que lorsque le salarié établit la matérialité de faits précis et concordants constituant selon lui un harcèlement, il appartient au juge dans un premier temps d’apprécier si ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral.
Mme [T] soutient qu’elle a connu une dégradation de ses conditions de travail dès l’arrivée de Mme [H] [N], directrice retail France, sa nouvelle supérieure hiérarchique qui lors d’un entretien le 27 janvier 2014 lui a fait comprendre qu’elle n’était pas légitime à son poste, étant la seule femme à occuper de telles fonctions et n’étant pas diplomée d’une école de commerce, et lui a dit que si elle ne parvenait pas à la surprendre, elle devrait envisager son avenir professionnel ailleurs que dans la société The Kooples.
Elle expose que depuis, elle a connu :
– une perte d’autonomie dans la gestion de ses collaborateurs, tant pour leurs recrutements que pour la gestion de leurs fins de contrat. Elle explique qu’ayant voulu se faire assister d’une adjointe pour gérer son corner et ayant proposé de promouvoir à ce poste une de ses collaboratrices, sa demande présentée le 26 novembre 2013 est restée vaine, tandis qu’on lui a imposé en décembre 2013 une personne incompétente. Elle verse aux débats, son mail du 26 novembre 2013 proposant la promotion de sa collaboratrice, le mail du 29 novembre où on lui répond qu’on reviendra vers elle, le mail du 16 décembre 2013 où la coordinatrice recrutement retail lui annonce la nomination d’une autre salariée, et le mail du 29 janvier 2014 de la coordinatrice retail recrutement juridique annonçant la rupture de la période d’essai de cette salariée. Elle s’appuie également sur des mails de refus de valider ses propositions de recrutement en date des 28 avril 2014 et 2 mai 2014,
– une convocation pendant ses congés à un entretien qui s’est finalement tenu le 13 mai 2014, après le passage d’une coach sur le corner et une visite surprise de nature à la déstabiliser ce dont elle a été informée par ses collaborateurs, versant aux débats les mails établissant la chronologie alléguée,
– un entretien tenu par ses deux supérieures hiérarchiques qui s’est avéré être un véritable réquisitoire, versant aux débats le compte rendu d’entretien établi par Mme [V] [Z], responsable grands magasins, par mail du 13 mai 2014,
– des reproches infondés dans la mesure où ses résultats étaient excellents en mai 2014, qu’elle avait en février 2014 reçu les félicitations du contrôleur de gestion versant aux débats le mail de félicitations du contrôleur de gestion retail du 26 février 2014 et la liste des meilleurs points de vente pour le 14 mai 2014 faisant apparaître son corner, le mail de félicitations collectif adressé par Mme [V] [Z] le 14 mai 2014 et les scores de vente,
– des demandes de justifications incessantes alors que la direction était en possession de tous les éléments, ainsi ses absences lui ont été reprochées alors qu’elle avait sollicité des congés régulièrement, versant aux débats les mails adressés le 2 avril 2014 et la réponse du 2 mai 2014 et son mail du 16 avril 2014, le mail du 21 mai 2014 par lequel on lui demande de renseigner un tableau déjà rempli, un mail de Mme [V] [Z], la veille de son départ en congé. Enfin, elle s’appuie sur son mail du 18 avril 2014 informant un salarié du refus de Mme [V] [Z] de lui accorder un congé pour son mariage en période de pré soldes,
– l’absence de réponse de sa direction quand elle rencontrait des difficultés, faisant état de ce que sa direction lui a refusé l’accès à des primes pour son équipe alors que ses résultats étaient bons comparés à ceux des autres corners et rentraient dans les critères d’attribution, versant aux débats son mail du 1er avril 2014, réclamant le versement de la prime et le mail du service retail définissant les critères d’attribution de celle-ci. Elle invoque aussi l’absence totale de soutien de la direction lorsque son équipe a refusé de travailler sans contrepartie les jours fériés, l’amenant à alerter la direction du Printemps, versant aux débats ses mails des 8, 11, 16 et 18 avril 2014 avisant la direction de ce que personne ne voulait travailler le lundi de Pâques, expliquant que finalement, au dernier moment, une solution a été trouvée,
– l’absence de réponse de sa direction à sa demande d’évolution comme directrice de corner senior, présentée par mails des 28 novembre 2013 et 21 mai 2014, restés sans réponse malgré ses très bons résultats, communiquant ses scores de décembre 2013,
– l’absence de réponse à sa demande d’amélioration de la réserve comuniquant le mail du 31 janvier 2014,
– l’absence de réponse à ses demandes de congés versant aux débats ses différents mails de demandes des 12 janvier 2014, 2 et 16 avril 2014,
– la nécessité dans laquelle elle s’est trouvée d’acheter un téléphone portable pour installer sa boîte mail sur son téléphone, mais à cet égard, la cour relève que la facture produite n’établit en rien le lien entre cet achat et l’activité professionnelle de Mme [T],
– les ordres contradictoires qui lui étaient donnés s’appuyant sur un mail du 11 avril 2014 lui demandant de superviser l’organisation de vente presse au sein de la boutique ‘[M] [S]. Elle soutient que sa présence lui a ensuite été reprochée mais ne verse aucun élément à ce titre. Les faits ne sont donc pas retenus d’autant que Mme [T] ne vise aucune autre pièce dans ses écritures.
– la méconnaisance de ses jours de congés pour la prévenir de l’arrivée d’une coach et l’organisation d’un rendez vous, de sorte qu’elle avait dû solliciter le report du rendez vous, communiquant les mails de Mme [V] [Z] en ce sens.
Mme [T] fait encore valoir que son avenir au sein de la société était compromis puisque le 14 mai 2014, ses deux supérieures hiérarchiques ont fait paraître une annonce dans le journal Fashionjobs pour le recrutement de son remplaçant, versant aux débats une annonce de recrutement. Elle soutient que la volonté de l’effacer de la société était d’autant plus forte que la formation au management qui lui avait été proposée par Mme [V] [Z] dans son mail du 13 mai 2014 qu’elle verse aux débats n’a jamais été concrétisée. Enfin, elle fait valoir que lors d’une réunion des directeurs qui s’était tenue en juin 2014, elle était la seule à ne pas avoir été informée de la réorganisation prévue en septembre, communiquant son mail du 5 juin 2014. Toutefois ce dernier mail ne suffit pas à établir la réalité des faits allégués lesquels ne sont donc pas retenus.
Enfin Mme [T] verse aux débats une feuille d’arrêt maladie du 6 au 17 juin 2014 puis du 13 au 30 juin 2014 avec la mention ‘burn out’et les avis de prolongation portant la mention ‘burn out’ ou syndrome dépressif réactionnel jusqu’aux avis d’inaptitude établis par le médecin du travail lors des deux visites de reprise.
Ces éléments pris dans leur ensemble permettent de présumer des agissements de harcèlement moral et il appartient à la société The Kooples diffusion de prouver qu’ils ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
La société The Kooples diffusion fait valoir que :
– Mme [T] ne s’est jamais plaint de harcèlement moral au cours de l’exécution du contrat de travail, mais la cour observe que cet argument est inopérant au regard de la charge de la preuve qui pèse sur l’employeur,
– la dégradation des conditions de travail qu’elle invoque n’existe pas puisqu’elle a toujours continué à être félicitée pour ses bons résultats, s’appuyant sur un mail du 25 mars 2014 de Mme [A], mais la cour observe que l’employeur reste taisant sur le fait que les équipes de Mme [T] qui remplissaient les conditions d’attribution de la prime partielle décrites par ce mail n’ont pas perçu cette prime,
– il ne lui a aucunement été reproché de prendre ses journées de récupération, mais juste de ne pas avoir été informée comme l’établit le mail de Mme [D], responsable des managers qui lui écrit qu’elle est une des meilleures, le 16 novembre 2012 ; toutefois la cour observe que ce mail est inopérant puisque remontant à une période antérieure à l’arrivée de la nouvelle supérieure hiérarchique de Mme [T] coïncidant selon celle-ci à la dégradation de ses conditions de travail,
– elle n’était pas isolée puisqu’elle a reçu en copie le mail du 18 avril 2014 dont elle prétend qu’elle n’aurait pas été destinataire, mais la cour relève que ce mail concerne en réalité la journée du lundi de Pâques 2014 pour laquelle Mme [T] craignait de ne pouvoir ouvrir et démontre que contrairement à ce qu’elle affirme elle avait bien reçu une réponse et un soutien de Mme [V] [Z] pour la recherche de volontaires acceptant de travailler un jour férié,
– elle a bien reçu un mail pendant ses congés l’informant de la visite sur son stand d’une coach de vente chargée d’accompagner les salariés dans leurs missions, ce mail ayant été adressé à toutes les personnes concernées et n’impliquant aucune réaction immédiate de sa part,
– elle ne pouvait éprouver d’angoisse lors des échanges de mails entre le 3 et le 9 mai 2014, ceux-ci revêtant un caractère tout à fait normal, mais la cour observe que l’employeur reste taisant sur les faits établis par la salariée s’agissant de l’absence de validation de ses propositions de recrutement notamment pour sa collaboratrice prénommée [O],
– le compte rendu établi par Mme [V] [Z] n’établit en rien le réquisitoire évoqué par Mme [T] et la cour observe qu’effectivement ce compte rendu se contente d’établir un plan d’action et ne suffit pas à établir les allégations de la salariée, étant rappelé que l’entretien avec la supérieure hiérarchique entrant dans le pouvoir de contrôle et de direction de l’employeur,
– la demande de congés de M. [Y] qui a été refusée ne regarde pas Mme [T],
– le recrutement d’une salariée en contrat de travail à durée déterminée n’est pas du ressort de Mme [T],
– aucun élément des débats n’établit que l’annonce de recrutement d’un directeur de corner communiquée par Mme [T] visait à la remplacer d’autant qu’elle était toujours en poste à cette époque, et qu’elle n’a pas été remplacée avant son départ effectif du poste en janvier 2015,
– aucune des pièces médicales n’établit le lien entre l’état de santé de Mme [T] et sa situation professionnelle, cependant à cet égard la cour observe que plusieurs des avis d’arrêts de travail font état de ‘burn out’ et que le médecin du travail l’a déclarée inapte à tout travail dans l’entreprise.
Enfin, la cour relève que l’employeur reste taisant sur le fait que les demandes de promotion de Mme [T], sont restées sans réponse, qu’il lui était demandé des explications ou renseignements alors qu’elle les avait fournis, que la proposition de formation ne s’est pas concrétisée et en définitive, l’employeur n’établit pas que tous les faits matériellement établis par la salariée sont justifiés par des éléments objectifs étrangers à tous agissements de harcèlement moral.
La cour retenant que Mme [T] a bien été victime d’agissements de harcèlement moral condamne la société The Kooples diffusion à lui verser la somme de 5 000 euros de dommages-intérêts suffisant à réparer son entier préjudice. Le jugement est infirmé en ce qu’il l’a déboutée de ce chef de demande.
Sur le rappel de prime d’objectif 2014 :
Mme [T] fait valoir que son contrat de travail prévoyait le bénéfice d’une prime d’objectif, que celle-ci était versée en septembre et correspondait à 0,2% du chiffre d’affaires hors taxes généré par le point de vente. Elle précise qu’ainsi en 2013, elle avait perçu une somme de 2 116 euros. Sur la base d’un chiffres d’affaires de 1 278 179 euros TTC, elle réclame donc une somme de 1 477,30 euros à ce titre dans le dispositif de ses écritures saisissant la cour et sollicite l’infirmation du jugement qui l’a déboutée de sa demande sur ce point.
La société The Kooples diffusion s’oppose à la demande en faisant valoir que Mme [T] n’apporte aucun élément de nature à démontrer le chiffre d’affaires sur lequel elle fonde sa demande, n’établit aucun décompte, ne rapproche pas les éléments variables qui lui ont été réglés des bulletins de paie établis et qu’elle a été intégralement rémunérée.
La cour relève que l’avenant au contrat de travail du 30 mai 2013 élevant Mme [T] à la position de directrice de corner, prévoyait le paiement d’une prime d’objectif de 0,2% du chiffre d’affaires HT généré par son point de vente Par ailleurs, il ressort d’un mail de M. [B], responsable du recrutement retail en date du 19 septembre 2013 qu’elle a reçu à ce titre en septembre 2013, une somme de 2 116 euros. Enfin, dans son courrier du 24 octobre et signé par la responsable des ressources humaines, Mme [G], le chiffre d’affaires avancé par la salariée n’est pas critiqué.
Mme [T] établissant son droit au versement de la prime réclamée et son montant n’étant pas sérieusement critiqué par la société The Kooples diffusion qui dispose de tous les éléments comptables pour déterminer le montant du chiffre d’affaires de Mme [T] et ne les produit pas, la cour condamne la société The Kooples diffusion à payer à Mme [T] la somme réclamée de 1 477,30 euros. Le jugement est infirmé en ce qu’il a débouté Mme [T] de ce chef de demande.
Sur la demande de dommages-intérêts pour refus de remise du vestiaire :
Mme [T] fait valoir que l’usage au sein de la société était de remettre un vestiaire aux salariés ainsi que cela ressort de plusieurs mails qu’elle communique et l’employeur ne le conteste pas. En revanche, elle explique qu’elle n’a pas reçu de vestiaire en septembre 2014 et elle réclame un dédommagement à ce titre correspondant au montant du vestiaire et de l’entretien des pièces.
L’employeur s’oppose à la demande en faisant valoir que la salariée ne justifie pas de la charge particulière par rapport à l’entretien de ses effets personnels.
La cour relève qu’il n’est pas justifié du préjudice allégué de sorte que la demande de dommages-intérêts est rejetée, le jugement est confirmé en ce qu’il a débouté Mme [T] de ce chef de demande.
Sur la demande présentée au titre du maintien du salaire :
Mme [T] soutient qu’en application de l’article 18 de l’avenant cadre de la convention collective, le maintien de salaire lui est dû à hauteur de 100% pendant deux mois puis 75% alors que l’employeur lui a appliqué seulement 66,66% sur le troisième mois et n’a pas pris en compte l’intégralité de son salaire pour calculer le maintien du salaire à 100%. Elle reproche également à l’employeur d’avoir soustrait sur le bulletin de paie une somme de 4 656,97 euros sous prétexte du versement de la prévoyance à hauteur de 3 110 euros alors que cette somme correspondait à la prévoyance du mois d’octobre au 5 novembre 2014.
La société The Kooples diffusion s’oppose à la demande en faisant valoir que le décompte de Mme [T] est incompréhensible, erroné puisqu’elle ne tient pas compte des sommes complémentaires qu’elle a perçues postérieurement et qui couvrent le maintien de salaire à 100% étant précisé que le décalage s’explique par l’absence d’envoi des documents nécessaires dans les délais et soutient que Mme [T] a été remplie de ses droits.
L’article 18 de l’avenant cadre de la convention collective du 30 juin 1972 dispose que : ‘les absences justifiées par l’incapacité résultant de maladie et notifiées par un certificat médical adressé à l’employeur par l’intéressé dans les 48 heures, sauf cas de force majeure, ne constituent pas de plein droit une rupture du contrat de travail.
L’employeur aura la possibilité de faire procéder à une contre-visite médicale par un médecin de la sécurité sociale.
Toutefois, dans le cas où ces absences imposeraient le remplacement effectif des intéressés, la notification de l’obligation du remplacement éventuel sera faite à ces derniers par lettre recommandée avec avis de réception au plus tôt après la fin de la période d’indemnisation prévue ci-après ; cette notification tiendra compte du préavis de licenciement prévu au présent avenant.
Lorsqu’ils perçoivent des indemnités journalières au titre de la sécurité sociale et éventuellement au titre du régime de prévoyance des cadres ou de tout autre régime obligatoire dans l’entreprise, les cadres bénéficieront d’une indemnité complémentaire (tous éléments de salaires compris) calculée de façon qu’ils reçoivent :
– après 1 an de présence dans l’entreprise : 2 mois à 100 % et 1 mois à 75 % ;
[…]
Si plusieurs congés de maladie sont pris au cours d’une même année (à compter du jour anniversaire d’entrée dans l’entreprise), la durée totale d’indemnisation ne peut dépasser, au cours de cette même année, la durée à laquelle l’ancienneté de l’intéressé lui donne droit.
Pendant la durée de la période d’indemnisation, sous réserve de 2 ans de présence dans l’entreprise, les cadres malades ne pourront faire l’objet d’une mesure de licenciement. Passé ce délai, en cas de licenciement, les indemnités prévues au présent avenant seront applicables.’
Il en ressort que comme Mme [T] le soutient et contrairement à ce que lui avait écrit l’employeur le maintien de salaire est de 75% le troisième mois et il doit englober tous les éléments de rémunération.
Dans la limite de la moyenne de salaire revendiquée par la salariée sur la base des bulletins de salaire des douze mois précédant son arrêt maladie, non critiquée utilement par l’employeur, la cour évalue à la somme de 4 508,96 euros l’assiette de calcul du maintien de salaire de sorte qu’au vu des bulletins de salaire faisant état postérieurement au mois de juin 2014 de maintien de salaire, et déduction faite des indemnités journalières perçues à hauteur de la somme de 3 849,30 euros, reste due à la salariée une somme de 3 393,37 euros, l’employeur ne démontrant pas que les sommes figurant sur le bulletin de salaire du mois d’octobre 2014 au titre de la prévoyance et au titre de la prime exceptionnelle correspondaient en réalité au maintien de salaire revendiqué.
S’agissant de la prévoyance, l’employeur n’apporte aucune explication sur la retenue de 4 656,97 euros à laquelle il a procédé sur le bulletin de salaire du mois de novembre 2014. La cour fait donc droit à la réclamation de la salariée.
La société The Kooples diffusion est condamnée à payer à Mme [T] une somme de 8 050,34 euros au titre du maintien de salaire pendant l’arrêt maladie et la prévoyance et le jugement est infirmé en ce qu’il a débouté la salariée de ce chef de demande.
Sur la demande de dommages-intérêts pour non-respect de la durée du travail et des conditions d’hygiène et de sécurité :
Mme [T] reproche à l’employeur de ne pas avoir protégé sa santé en ne respectant pas la durée du travail de sorte qu’elle a connu un épuisement professionnel, d’avoir dénigré son travail de sorte qu’elle a connu un épuisement psychique, de ne pas lui avoir donné du matériel pour travailler de sorte qu’elle a dû utiliser son i-phone personnel et a connu une baisse de sa vue, et fait enfin valoir que depuis son licenciement, elle n’a plus eu besoin de consulter son angiologue.
La cour la déboute de sa demande, faute pour elle de démontrer la réalité des fautes alléguées alors que :
– la durée légale de travail n’a pas été dépassée,
– le travail de Mme [T] n’a pas été dénigré puisque nombre de mails font état des félicitations reçues,
– aucun élément des débats n’établit que la baisse de vision de Mme [T] est due à l’utilisation pour le compte de son employeur de son iPhone personnel,
– aucun élément des débats n’établit que Mme [T] n’est plus allée consulter son angiologue depuis qu’elle a quitté son emploi au sein de la société The Kooples diffusion.
Le jugement est donc confirmé de ce chef.
Sur la demande présentée au titre du préjudice de carrière :
Aucun moyen n’étant soutenu à l’appui de cette demande, elle est rejetée et le jugement confirmé en ce qu’il a débouté Mme [T] de ce chef.
Sur la rupture du contrat de travail :
Mme [T] sollicite la résiliation judiciaire du contrat de travail aux motifs du harcèlement moral subi, subsidiairement de l’exécution déloyale du contrat de travail.
Tout salarié peut demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail en cas d’inexécution par l’employeur de ses obligations contractuelles conformément aux dispositions de l’article 1227 du code civil. Il appartient au salarié de rapporter la preuve des faits qu’il allègue à l’encontre de l’employeur à l’appui de sa demande et les manquements de celui-ci à ses obligations doivent être d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail. Lorsqu’un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail en raison de faits qu’il reproche à son employeur tout en continuant à travailler à son service et que ce dernier le licencie ultérieurement comme c’est le cas en l’espèce, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation du contrat était justifiée et, si tel est le cas, fixer la date de la rupture à la date d’envoi de la lettre de licenciement.
La cour ayant retenu que Mme [T] avait été victime d’agissements de harcèlement moral à l’origine de l’aggravation de son état de santé et ce manquement étant de nature à empêcher la poursuite du contrat de travail prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail et dit qu’elle produit les effets d’un licenciement nul à la date du licenciement soit le 12 janvier 2015.
Sur les conséquences du licenciement nul :
Le salarié victime d’un licenciement illicite est fondé à réclamer outre les indemnités de rupture une indemnité correspondant au préjudice subi ne pouvant être inférieure à l’indemnité allouée sur le fondement de l’article L. 1235-3 du code du travail.
Sur les dommages-intérêts pour rupture illicite du contrat de travail :
Eu égard à l’ancienneté de Mme [T] dans l’entreprise (prés de 5 ans), à son âge au moment du licenciement (née en 1983), au montant de sa rémunération des six derniers mois, aux circonstances de la rupture, à ce qu’elle justifie de sa situation postérieure au licenciement (aucun élément), la cour condamne la société The Kooples diffusion à lui verser la somme de 35 000 euros de dommages-intérêts au titre de la rupture illicite du contrat de travail suffisant à réparer son entier préjudice. Le jugement est infirmé en ce qu’il l’a déboutée de ce chef de demande.
Sur l’indemnité compensatrice de préavis :
Il ressort du bulletin de salaire de Mme [T] du mois de janvier 2015, quelle a perçu une somme de 10 500 euros correspondant au délai congé de trois mois prévu par l’article 13 de l’avenant cadre de la convention collective sur la base d’un salaire brut de 3 500 euros. Mme [T] réclame un complément dont la reconstitution par la cour de l’évaluation permet de comprendre qu’il est basé sur la moyenne de salaire, alors que l’indemnité compensatrice de préavis doit correspondre à la rémunération que la salariée aurait perçu si elle avait continué à travailler pendant le temps du préavis soit une somme de 3 500 euros. Mme [T] a donc été remplie de ses droits et sa demande est rejetée.
Sur les autres demandes :
Les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale sont dus à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature indemnitaire sont dus à compter de la présente décision.
La capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière est ordonnée en application de l’article 1343-2 du code civil.
La société The Kooples diffusion, partie perdante, est condamnée aux dépens de première instance et d’appel et doit indemniser Mme [T] des frais exposés par elle et non compris dans les dépens à hauteur de la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile, sa propre demande sur ce même fondement étant rejetée.
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant contradictoirement et par mise à disposition au greffe,
INFIRME le jugement sauf en ce qu’il a débouté Mme [P] [T] de ses demandes de dommages-intérêts pour travail dissimulé, préjudice de carrière, discrimination sexiste, violation des règles sur la durée de travail et manquement aux conditions d’hygiène et de sécurité, et de rappel de salaire pour violation du principe de l’égalité de traitement outre les congés payés afférents, rappel d’indemnité compensatrice de préavis et congés payés afférents,
Statuant à nouveau des chefs infirmés et y ajoutant :
PRONONCE la résiliation judiciaire du contrat de travail et dit qu’elle produit les effets d’un licenciement nul au 12 janvier 2015,
CONDAMNE la société The Kooples diffusion à payer à Mme [P] [T] les sommes de :
– 1 477,30 euros à titre de rappel de prime sur objectif de septembre 2014,
– 15 681,51 euros brut à titre de rappel de salaire sur heures supplémentaires outre 1 568,15 euros au titre des congés payés afférents pour la période courant de février 2010 à juin 2014,
– 8 050,34 euros au titre du maintien de salaire pendant l’arrêt maladie et la prévoyance,
– 35 000 euros de dommages-intérêts au titre de la rupture illicite du contrat de travail,
– 5 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi pour harcèlement moral,
DIT que les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature salariale sont dus à compter de la réception par l’employeur de sa convocation devant le bureau de conciliation et que les intérêts au taux légal portant sur les condamnations de nature indemnitaire sont dus à compter de la présente décision,
ORDONNE la capitalisation des intérêts échus dus au moins pour une année entière,
DÉBOUTE les parties du surplus de leurs demandes,
CONDAMNE la société The Kooples diffusion aux dépens de première instance et d’appel et à verser à Mme [P] [T] une somme de 2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.
LA GREFFIÈRELA PRÉSIDENTE