COUR D’APPEL
DE
VERSAILLES
Code nac : 80A
19e chambre
ARRET N°
CONTRADICTOIRE
DU 29 JUIN 2022
N° RG 20/01975 – N° Portalis DBV3-V-B7E-UB2D
AFFAIRE :
[P] [Z]
C/
[N] [C] Salarié de la SAS LIFESCAN.
…
Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 11 Juin 2020 par le Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de BOULOGNE- BILLANCOURT
N° Chambre :
N° Section : Enacdrement
N° RG : F18/00585
Copies exécutoires et certifiées conformes délivrées à :
Me Claire BIELAKOFF
la SCP COURTAIGNE AVOCATS
le :
RÉPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
LE VINGT NEUF JUIN DEUX MILLE VINGT DEUX,
La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :
Madame [P] [Z]
née le 13 mars 1963 à [Localité 6] (94)
de nationalité française
[Adresse 3]
[Localité 2]
Représentant : Me Claire BIELAKOFF, Plaidant/Constitué, avocat au barreau de SEINE-SAINT-DENIS, vestiaire : 221
APPELANTE
****************
Monsieur [N] [C] Salarié de la SAS LIFESCAN.
né le 09 août 1969 à [Localité 5] ([Localité 5])
de nationalité française
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 – Représentant : Me Delphine LIAULT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : T03 substitué à l’audience par Me Camille CHAUMIER, avocat au barreau de PARIS
S.A.S. LIFESCAN
N° SIRET : 330 202 334
[Adresse 1]
[Localité 4]
Représentant : Me Isabelle DELORME-MUNIGLIA de la SCP COURTAIGNE AVOCATS, Constitué, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 52 – Représentant : Me Delphine LIAULT, Plaidant, avocat au barreau de PARIS, vestiaire : T03 substitué à l’audience par Me Camille CHAUMIER, avocat au barreau de PARIS
INTIMES
****************
Composition de la cour :
En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 11 Mai 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller chargé du rapport.
Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Madame Isabelle MONTAGNE, Président,
Monsieur Stéphane BOUCHARD, Conseiller,
Monsieur Laurent BABY, Conseiller,
Greffier lors des débats : Madame Anne-Sophie CALLEDE,
Mme [P] [Z] a été embauchée à compter du 25 août 2009 en qualité de déléguée technico-commerciale (statut de cadre) par la société Lifescan, spécialisée dans la commercialisation de systèmes de contôle de la glycémie et appartenant au groupe Johnson & Johnson.
Au début de l’année 2015, M. [N] [C] est devenu le supérieur hiérarchique de Mme [Z].
Du 2 avril au 5 mai 2015, Mme [Z] a travaillé à temps partiel dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique.
Du 5 mai au 16 septembre 2015, Mme [Z] a travaillé à temps partiel à hauteur de 80 % dans le cadre de ce mi-temps thérapeutique.
À compter du 4 octobre 2017, Mme [Z] a été placée en arrêt de travail pour maladie.
À l’issue d’une visite de reprise du 9 avril 2018, le médecin du travail a rendu un avis d’inaptitude de Mme [Z] à son poste ainsi rédigé : ‘inapte à tous les postes dans l’entreprise Lifescan pourrait occuper un poste de technico-commercial ou un autre poste dans une autre entité du groupe Johnson et Johnson. Elle pourrait suivre une formation’.
Le 2 mai 2018, Mme [Z] a saisi le conseil de prud’hommes de Boulogne-Billancourt pour demander la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société Lifescan produisant les effets d’un licenciement nul ou à titre subsidiaire sans cause réelle et sérieuse et la condamnation de cette dernière à lui payer des indemnités de rupture et des dommages-intérêts. Elle a également demandé la condamnation de M. [C] à lui payer des dommages-intérêts.
Par lettre du 27 avril 2018, la société Lifescan a adressé à Mme [Z] une liste de postes de reclassement au sein du groupe Johnson.
Le 16 mai 2018, les délégués du personnel ont été consultés sur le reclassement de Mme [Z].
Par lettre du 30 mai 2018, la société Lifescan a indiqué à Mme [Z] que son reclassement était impossible.
Par lettre du 6 juillet 2018, la société Lifescan a notifié à Mme [Z] son licenciement pour inaptitude et impossibilité de reclassement.
En cours d’instance prud’homale, Mme [Z] a contesté la validité et le bien-fondé de son licenciement.
Par jugement du 11 juin 2020, le conseil de prud’hommes (section encadrement) a :
– débouté Mme [Z] de sa demande de résiliation judiciaire du contrat de travail et dit le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse ;
– débouté Mme [Z] de l’ensemble de ses demandes ;
– débouté la société Lifescan de ses demandes ;
– dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile.
Le 22 août 2020, Mme [Z] a interjeté appel de ce jugement à l’encontre de la société Lifescan et de M. [C].
Aux termes de ses conclusions du 31 mai 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé des moyens, Mme [Z] demande à la cour d’infirmer le jugement attaqué en ce qu’il l’a déboutée de ses demandes et, statuant à nouveau, de :
1°) à titre principal :
– prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la société Lifescan et dire qu’elle produit les effets d’un licenciement nul ;
– condamner la société Lifescan à lui payer les sommes suivantes :
* 15 300 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 1 530 euros brut au titre des congés payés afférents ;
* 122 400 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul à raison d’un harcèlement moral ;
– condamner M. [C] à lui payer une somme de 10 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et financier causé par ses agissements fautifs ;
2°) à titre subsidiaire :
– dire que son licenciement est entaché de nullité ;
– condamner la société Lifescan à lui payer les sommes suivantes :
* 15 300 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 1 530 euros brut au titre des congés payés afférents ;
* 122 400 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul à raison d’un harcèlement moral ;
– condamner M. [C] à lui payer une somme de 10 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et financier causé par ses agissements fautifs ;
3°) à titre infiniment subsidiaire :
– dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
– condamner la société Lifescan à lui payer les sommes suivantes :
* 15 300 euros brut à titre d’indemnité compensatrice de préavis et 1 530 euros brut au titre des congés payés afférents ;
* 45 900 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
– condamner M. [C] à lui payer une somme de 10 000 euros de dommages-intérêts en réparation du préjudice moral et financier causé par ses agissements fautifs ;
4°) en tout état de cause :
– ordonner la remise des bulletins de salaire rectifiés pour la période de préavis, un certificat de travail et une attestation pour pôle emploi rectifiés ;
– assortir les condamnations des intérêts au taux légal à compter de la saisine du conseil de prud’hommes ;
– condamner la société Lifescan à lui payer une somme de 3 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi qu’aux entiers dépens.
Aux termes de ses conclusions du 13 septembre 2021, auxquelles il convient de se reporter pour l’exposé des moyens, la société Lifescan et M. [C] demandent à la cour de confirmer le jugement attaqué sauf sur le débouté de la demande de dommages-intérêts formée par M. [C] à l’encontre de Mme [Z] et statuant à nouveau de :
– condamner Mme [Z] à payer à M. [C] une somme de 1 500 euros à titre de dommages-intérêts en raison du préjudice moral subi et la même somme au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner Mme [Z] à payer à la société Lifescan une somme de 1 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– condamner Mme [Z] aux dépens d’appel.
Une ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 19 avril 2022.
SUR CE :
Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail et ses conséquences :
Considérant que Mme [Z] soutient qu’elle a été victime d’agissements de harcèlement moral de la part de M. [C] à compter de 2015 et d’une discrimination liée à son état de santé, ayant dégradé son état de santé, constitués par des pratiques managériales génératrices d’humiliations et de perte de confiance avec utilisation de termes virulents dans le cadre des échanges ainsi que des critiques systématiques et une organisation de l’activité aboutissant à des situations d’échec et à un épuisement professionnel ;
Qu’elle ajoute que la société Lifescan a manqué à son obligation de sécurité en ne prenant aucune mesure concrète pour faire cesser ces faits alors qu’elle en avait été alertée depuis trois années ;
Qu’elle en déduit que ces manquements sont suffisamment graves pour entraîner la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de l’employeur à la date du 6 juillet 2018 et la condamnation de ce dernier à lui payer des dommages-intérêts pour licenciement nul ;
Considérant que la société Lifescan conclut au débouté ;
Considérant qu’un salarié est fondé à poursuivre la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de l’employeur en cas de manquement, par ce dernier, à ses obligations ; qu’il appartient au juge de rechercher s’il existe à la charge de l’employeur des manquements d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail afin de prononcer cette résiliation, lesquels s’apprécient à la date à laquelle il se prononce ;
Considérant, sur le harcèlement moral, qu’aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; qu’en application de l’article L. 1154-1 du même code, lorsque survient un litige relatif à l’application de l’article L. 1152-1, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral dans la rédaction applicable au litige (pour les faits antérieurs à l’entrée en vigueur de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016) ou présente des éléments de fait laissant supposer l’existence d’un harcèlement (pour les faits postérieurs à l’entrée en vigueur de la loi sus-mentionnée), et au vu de ces éléments, il incombe à la partie défenderesse de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu’en application de l’article L. 1152-3 toute rupture du contrat de travail intervenue en méconnaissance des dispositions des articles L. 1152-1 et L. 1152-2, toute disposition ou tout acte contraire est nul ;
Qu’en l’espèce, il ressort des pièces versées que l’échange de courriels du 12 mars 2015 avec M. [C] ne fait pas ressortir que l’appelante a été contrainte de répondre à une demande de ce dernier pendant son arrêt de travail pour maladie ;
Que les comptes-rendus de visites commerciales dites ‘en duo’ réalisés par M. [C] contiennent quelques critiques éparses sur la qualité du travail de la salariée, rédigées en des termes neutres et non humiliants et dont le bien-fondé a été reconnu par la salariée ;
Que la mise en place d’un plan de retour à la performance individuelle (PRPI) a été décidée dès septembre 2014 par le prédécesseur de M. [C] et non par ce dernier, à raison d’insuffisances professionnelles qui ont été reconnues par la salariée ;
Que la surcharge de travail ne résulte que des allégations de Mme [Z] et ne ressort pas des quelques mails épars envoyés à des heures tardives sans précision quant à l’heure de prise de poste pour les journées en cause ;
Que l’évaluation professionnelle pour l’année 2015 établie par M. [C] prend en compte les progrès réalisés à la fin de l’année contrairement à ce que soutient Mme [Z] puisqu’il est indiqué ‘une année qui se termine beaucoup mieux qu’elle avait débuté , le PRPI a aider [P] à trouver le bon chemin , de continuer dans cette voie’ (sic) ;
Que le courriel adressé par erreur par M. [C] à Mme [Z] le 3 décembre 2017, dans lequel il l’affuble du sobriquet de ‘O’Cedar’, par référence à sa coupe de cheveux, est l’unique agissement dégradant qui est présenté et qui est donc insusceptible de constituer un harcèlement moral faute de répétition ;
Que le rapport d’enquête du CHSCT à la suite de ce courriel ne fait pas ressortir l’existence d’un harcèlement moral de la part de M. [C] à l’encontre de Mme [Z] ;
Que les pièces médicales versées aux débats ne font ressortir aucun lien de causalité entre la dégradation de l’état de santé de Mme [Z] et ses condition de travail dans l’entreprise ou ne font que reprendre ses dires sur l’existence d’un tel lien ;
Qu’en conséquence, Mme [Z] n’établit pas de faits précis et concordants ni ne présente d’éléments de faits qui, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral ;
Considérant, sur la discrimination liée à l’état de santé, qu’aux termes de l’article L. 1132-1 du code du travail, dans sa rédaction en vigueur à la date de la saisine du conseil de prud’hommes, qu’aucune personne ne peut être écartée d’une procédure de recrutement ou de l’accès à un stage ou à une période de formation en entreprise, aucun salarié ne peut être sanctionné, licencié ou faire l’objet d’une mesure discriminatoire, directe ou indirecte, telle que définie à l’article 1er de la loi n° 2008-496 du 27 mai 2008 portant diverses dispositions d’adaptation au droit communautaire dans le domaine de la lutte contre les discriminations, notamment en matière, de formation, de reclassement, d’affectation, de qualification, de classification, de promotion professionnelle, de mutation ou de renouvellement de contrat en raison de son origine, de son sexe, de ses moeurs, de son orientation ou identité sexuelle, de son âge, de sa situation de famille, de ses caractéristiques génétiques, de son appartenance ou de sa non-appartenance, vraie ou supposée, à une ethnie, une nation ou une race, de ses opinions politiques, de ses activités syndicales ou mutualistes, de ses convictions religieuses, de son apparence physique, de son nom de famille ou en raison de son état de santé ou de son handicap ; qu’en application de l’article L. 1134-1, lorsque survient un litige en raison d’une méconnaissance de ces dispositions, il appartient au salarié qui se prétend lésé par une mesure discriminatoire de présenter au juge des éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte au vu desquels il incombe à l’employeur de prouver que les mesures prises sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à toute discrimination ;
Qu’ainsi qu’il a été dit ci-dessus, l’évaluation professionnelle pour l’année 2015 prend en compte les résultats de fin d’année de Mme [Z] à l’instar de celles des autres salariés ; que Mme [Z] ne présente donc pas d’éléments de fait laissant supposer l’existence d’une discrimination directe ou indirecte liée à son état de santé ;
Considérant sur l’obligation de sécurité, que ne méconnaît pas l’obligation légale lui imposant de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs, notamment en matière de harcèlement moral, l’employeur qui justifie avoir pris toutes les mesures de prévention prévues par les articles L. 4121-1 et L. 4121-2 du code du travail et qui, informé de l’existence de faits susceptibles de constituer un harcèlement moral, a pris les mesures immédiates propres à le faire cesser ;
Qu’en l’espèce, le courriel du 25 février 2016 adressé par Mme [Z] à la direction de la société Lifescan ne contient pas d’accusation de harcèlement moral à l’encontre de M. [C] et fait seulement état d’une mésentente ; que de plus, la société Lifescan a organisé à la suite de ce courriel une réunion de conciliation entre Mme [Z] et M. [C] ; qu’il a en outre été proposé par la suite à Mme [Z] d’être placée sous la responsabilité d’un autre supérieur hiérarchique, ce qu’elle a refusé, sans qu’elle n’établisse de quelque manière que ce soit qu’elle était alors sous ‘l’emprise psychologique déstabilisante’ de son supérieur ;
Que le courriel du 12 octobre 2017 adressé par Mme [Z] à la direction de la société Lifescan, qui dénonce l’utilisation par M. [C] du sobriquet O’Cedar a été immédiatement suivie d’une enquête du CHSCT et d’une mise à pied d’une journée de son auteur;
Que par ailleurs, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, aucun harcèlement moral de la part de M. [C] à l’encontre de Mme [Z] ne ressort des débats ;
Qu’il n’est pas non plus établi qu’elle présentait des ‘signes de stress intense’ que sa hiérarchie ne pouvait ignorer ;
Que dans ces conditions, aucun manquement de la société Lifescan à son obligation de sécurité n’est établi ;
Considérant qu’il résulte de ce qui précède que Mme [Z] n’établit pas l’existence de manquements d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite de la relation de travail ; qu’il y a donc lieu de la débouter de sa demande de résiliation du contrat de travail et de ses demandes d’indemnités de rupture ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;
Sur la validité du licenciement et ses conséquences :
Considérant que Mme [Z] soutient que son licenciement pour inaptitude est la conséquence des agissements de harcèlement moral et de la discrimination mentionnés ci-dessus ;
Mais considérant que, ainsi qu’il a été dit ci-dessus, aucun harcèlement moral ni aucune discrimination liée à l’état de santé ne ressortent des débats et que par ailleurs aucun élément ne démontre un lien de causalité entre l’inaptitude de Mme [Z] à son poste et ses conditions de travail dans l’entreprise ;
Qu’il y a donc lieu de la débouter de sa demande de nullité de son licenciement et de ses demandes d’indemnités de rupture subséquentes ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ces points ;
Sur le bien-fondé du licenciement et ses conséquences :
Considérant que Mme [Z] soutient que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse aux motifs que :
– des postes de reclassement lui ont été proposés par courrier du 27 avril 2018 avant la consultation des délégués du personnel intervenue le 16 mai 2018 ;
– aucune proposition de formation ne lui a été faite contrairement aux préconisations du médecin du travail ;
– les recherches de postes de reclassement n’ont été faites que dans le secteur d’activité du groupe Johnson & Johnson lié aux dispositifs médicaux et non dans l’ensemble des secteurs d’activité du groupe ;
Qu’elle réclame en conséquence l’allocation d’une indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse et d’une indemnité compensatrice de préavis ;
Considérant que la société Lifescan conclut au débouté ;
Considérant qu’aux termes de l’article L. 1226-2 du code du travail, dans sa version applicable au litige : ‘Lorsque le salarié victime d’une maladie ou d’un accident non professionnel est déclaré inapte par le médecin du travail, en application de l’article L. 4624-4, à reprendre l’emploi qu’il occupait précédemment, l’employeur lui propose un autre emploi approprié à ses capacités, au sein de l’entreprise ou des entreprises du groupe auquel elle appartient le cas échéant, situées sur le territoire national et dont l’organisation, les activités ou le lieu d’exploitation assurent la permutation de tout ou partie du personnel./ Pour l’application du présent article, la notion de groupe désigne le groupe formé par une entreprise appelée entreprise dominante et les entreprises qu’elle contrôle dans les conditions définies à l’article L. 233-1, aux I et II de l’article L. 233-3 et à l’article L. 233-16 du code de commerce./ Cette proposition prend en compte, après avis du comité social et économique lorsqu’il existe, les conclusions écrites du médecin du travail et les indications qu’il formule sur les capacités du salarié à exercer l’une des tâches existantes dans l’entreprise. Le médecin du travail formule également des indications sur la capacité du salarié à bénéficier d’une formation le préparant à occuper un poste adapté./ L’emploi proposé est aussi comparable que possible à l’emploi précédemment occupé, au besoin par la mise en oeuvre de mesures telles que mutations, aménagements, adaptations ou transformations de postes existants ou aménagement du temps de travail’ ;
Qu’aux termes de l’article L. 1226-2-1 du même code, dans sa version applicable au litige : ‘Lorsqu’il est impossible à l’employeur de proposer un autre emploi au salarié, il lui fait connaître par écrit les motifs qui s’opposent à son reclassement./ L’employeur ne peut rompre le contrat de travail que s’il justifie soit de son impossibilité de proposer un emploi dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, soit du refus par le salarié de l’emploi proposé dans ces conditions, soit de la mention expresse dans l’avis du médecin du travail que tout maintien du salarié dans un emploi serait gravement préjudiciable à sa santé ou que l’état de santé du salarié fait obstacle à tout reclassement dans un emploi./ L’obligation de reclassement est réputée satisfaite lorsque l’employeur a proposé un emploi, dans les conditions prévues à l’article L. 1226-2, en prenant en compte l’avis et les indications du médecin du travail./ S’il prononce le licenciement, l’employeur respecte la procédure applicable au licenciement pour motif personnel prévue au chapitre II du titre III du présent livre’ ;
Qu’en l’espèce, sur le moment de la consultation des délégués du personnel, il ressort des débats et des pièces versées que cette consultation est intervenue en tout état de cause avant d’engager la procédure de licenciement ;
Que par ailleurs, sur le reclassement au sein du groupe, il ressort des pièces versées que la société a consulté le 20 avril 2018 par courriel les directions des ressources humaines chapeautant l’ensemble des entités du groupe Johnson & Johnson situées sur le territoire national et relevant non seulement du secteur des dispositifs médicaux mais aussi du secteur santé et beauté et du secteur pharmaceutique ; que huit postes de reclassement ont été proposés à Mme [Z] le 27 avril 2018 et qu’elle n’y a pas donné de suite ; que de plus, les directions des ressources humaines du groupe ont indiqué par courriels des 7 et 9 mai 2018 qu’aucun autre poste de reclassement n’était disponible dans le groupe ; qu’il s’ensuit que la société Lifescan justifie avoir rempli son obligation de reclassement de manière loyale et sérieuse et d’une impossibilité de reclassement au sein du groupe ;
Qu’enfin le moyen tiré d’un défaut de proposition de formation est inopérant ;
Qu’en conséquence, Mme [Z] n’est pas fondée à soutenir que son licenciement pour inaptitude est dépourvu de cause réelle et sérieuse et à demander à ce titre l’allocation d’une indemnité pour licenciement sans cause et sérieuse et d’une indemnité compensatrice de préavis ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ces points ;
Sur la demande de dommages-intérêts à l’encontre de M. [C] :
Considérant qu’aux termes de l’article L. 1411-3 du code du travail : ‘Le conseil de prud’hommes règle les différends et litiges nés entre salariés à l’occasion du travail’ ;
Qu’en l’espèce, ainsi qu’il a été dit, aucun harcèlement moral de la part de M. [C] n’est établi et seul l’envoi d’un courriel affublant Mme [W] du sobriquet ‘O’Cedar’ est avéré ; que toutefois, aucun élément ne vient démontrer que cette puérilité est à l’origine de la dégradation de l’état de santé de Mme [Z] et lui a par ailleurs créé un préjudice moral certain, étant précisé que M. [C] a présenté ses excuses à l’appelante lors de l’audience de jugement du conseil de prud’hommes ; qu’il y a donc lieu de débouter l’appelante de sa demande de dommages-intérêts à ce titre ; que le jugement attaqué sera confirmé sur ce point ;
Sur la demande de dommages-intérêts formée par M. [C] à l’encontre de Mme [Z] :
Considérant que M. [C] ne justifie d’aucun préjudice moral à raison de sa mise en cause devant la juridiction prud’homale ; que le débouté de cette demande sera donc confirmé;
Sur la remise de documents sociaux :
Considérant qu’eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le débouté de cette demande ;
Sur l’article 700 du code de procédure civile et les dépens :
Considérant qu’eu égard à la solution du litige, il y a lieu de confirmer le jugement entrepris en ce qu’il statue sur l’application de l’article 700 du code de procédure civile, étant précisé qu’il a omis de statuer sur les dépens ;
Que Mme [Z], qui succombe en son appel, sera condamnée à payer à la société Lifescan une somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel et une somme de 100 euros à ce titre à M. [C] ;
Qu’elle sera en outre condamnée aux dépens de première instance et d’appel ;
PAR CES MOTIFS :
La cour, statuant par arrêt contradictoire,
Confirme le jugement attaqué en toutes ses dispositions,
Y ajoutant,
Condamne Mme [P] [Z] à payer à la société Lifescan une somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,
Condamne Mme [P] [Z] à payer à M. [N] [C] une somme de 100 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile pour la procédure suivie en appel,
Condamne Mme [P] [Z] aux dépens de première instance et d’appel,
Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.
Signé par Madame Isabelle MONTAGNE, Président, et par Madame Anne-Sophie CALLEDE, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
Le greffier,Le président,