Épuisement professionnel : 21 septembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/00733

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Épuisement professionnel : 21 septembre 2022 Cour d’appel de Paris RG n° 20/00733

Copies exécutoiresREPUBLIQUE FRANCAISE

délivrées le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 6 – Chambre 10

ARRET DU 21 SEPTEMBRE 2022

(n° , 9 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 20/00733 – N° Portalis 35L7-V-B7E-CBKH4

Décision déférée à la Cour : Jugement du 11 Décembre 2019 -Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de PARIS – RG n° 18/08859

APPELANT

Monsieur [Z] [X]

[Adresse 2]

[Adresse 2]

Représenté par Me Isabelle BENAZETH-GREGOIRE, avocat au barreau de MELUN, toque : A0908

INTIMEES

SELARL ATHENA en qualité de Mandataire liquidateur de la « SARL ADAB SERVICES » représenté par Maître [K] [U] de la SELARL ATHENA

[Adresse 3]

[Adresse 3]

n’ayant constitué ni avocat ni défenseur syndical bien qu’ayant été régulièrement assignée par voie d’huissier le 24 mars 2020 (PV658)

Association AGS CGEA IDF OUEST prise en la personne de son représentant légal [Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Hélène NEGRO-DUVAL, avocat au barreau de PARIS, toque : L0197

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 18 Mai 2022, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Anne MEZARD, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 28 Avril 2022,chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, entendu en son rapport, composée de :

Monsieur Nicolas TRUC, Président de la chambre

Madame Gwenaelle LEDOIGT, Présidente de la chambre

Madame Anne MEZARD, Vice Présidente placée faisant fonction de conseillère par ordonnance du Premier Président en date du 28 Avril 2022

Greffier : lors des débats : Madame Sonia BERKANE

ARRET :

– réputé contradictoire

– mis à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile.

– signé par Monsieur Nicolas TRUC, Président et par Madame Sonia BERKANE,Greffière, à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

FAITS ET PROCÉDURE

Après avoir réalisé plusieurs missions pour la société en qualité d’auto-entrepreneur entre le 26 février 2010 et le 18 avril 2016, M. [Z] [X] a été engagé par la société Adab services par contrat à durée indéterminée à effet au 19 avril 2016 en qualité de formateur/administratif non cadre, 2ème degré D1, coefficient 200 de la convention collective nationale des organismes de formation.

M. [Z] [X], soutenant avoir pris acte de la rupture de son contrat de travail par courrier du 29 août 2018, a saisi le 22 novembre 2018 le conseil de prud’hommes de Paris aux fins de prononcer la rupture du contrat aux torts exclusifs de l’employeur.

Par jugement du 1er avril 2019 du tribunal de commerce de Paris, la société Adab Services a été placée en liquidation judiciaire, et la selarl Athena prise en la personne de Me [U] [K] a été désignée en qualité de mandataire liquidateur.

Par décision du 11 décembre 2019, le conseil de prud’hommes de Paris, section activités diverses, a

rejeté la nullité de la requête soulevée par l’Unedic délégation AGS CGEA Ile de France Ouest,

débouté M. [Z] [X] de l’ensemble de ses demandes,

condamné M. [Z] [X] aux dépens.

M. [Z] [X] a interjeté appel du jugement, dont il a reçu notification le 27 décembre 2019, par déclaration électronique déposée le 24 janvier 2020.

Par des écritures transmises par voie électronique le 16 mars 2020, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits et des moyens développés, M. [Z] [X] demande à la cour de :

Infirmer le jugement rendu par le conseil de prud’hommes et statuant à nouveau :

Requalifier la prise d’acte en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Fixer la créance de M. [Z] [X] au passif de la société Adab services aux sommes suivantes et dire que les sommes seront garanties par l’AGS CGAE IdF Ouest dans les limites des garanties de l’AGS’:

– la somme de 9 800 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse

– la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts pour harcèlement moral

– rappel de salaire heures supplémentaires’: 8 277,16 euros

– congés payés y afférents’: 827,71 euros

– non respect des temps de repos’: 5 000 euros

– travail dissimulé’: 16 903,08 euros

– indemnité compensatrice de préavis’: 5 634,36 euros

– congés payés sur préavis’: 563,43 euros

– indemnité de licenciement’: 1 878,21 euros

– 140 euros à titre de rappel de salaire août 2018

– 14 euros à titre de congés payés y afférents

– 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– aux dépens,

Condamner la société Adab services à remettre à M. [Z] [X] sous astreinte de 100 euros par jours de retard à compter de la décision à intervenir, un bulletin de paie août 2018 et un certificat de travail conformes à la décision à intervenir,

Dire que les condamnations porteront intérêt au taux légal avec capitalisation des intérêts.

Par acte du 24 mars 2020, M. [Z] [X] a signifié sa déclaration d’appel, une assignation en intervention forcée et ses écritures d’appelant à la Sarl Athena représentée par Me [U] [K] en qualité de mandataire liquidateur de la Sarl Adab services.

Par des écritures transmises par voie électronique le 13 juin 2020, auxquelles il est renvoyé pour un plus ample exposé des faits et des moyens développés, la délégation unique AGS-CGEA Ile de France Ouest (ci-après l’AGS) demande à la cour de :

Donner acte à la concluante des conditions et limites de l’intervention et de la garantie de l’AGS,

Dire que la décision à intervenir n’est opposable à l’AGS que dans les conditions, limites et plafonds de sa garantie,

Confirmer le jugement dont appel,

Débouter M. [Z] [X] de ses demandes, fins et conclusions,

Rejeter les demandes de fixation de créances qui ne sont ni fondées dans leur principe ni justifiées dans leur montant,

En tout état de cause, réduire aux seuls montants dûment justifiés les montants des créances susceptibles d’être fixées, notamment à titre de salaires et à titre d’indemnités.

L’ordonnance de clôture a été prononcée le 16 mars 2022.

SUR CE

I ‘ Sur le harcèlement moral

Il résulte des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail que, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

M. [Z] [X] fonde sa demande au titre du harcèlement exclusivement sur «’les insultes et traitement dégradant et humiliant subis par lui de manière inacceptable’» et appuie sa demande par les deux courriels aux termes desquels l’employeur spécifie qu’un mot de la RATP ne saurait le prémunir des sanctions possibles, dont le licenciement, outre le courriel du 25 avril 2018 lui faisant injonction de se remettre au travail. Il évoque également le refus opposé à sa demande de congés payés du 22 avril 2018.

Concernant les insultes, il soutient que l’employeur lui a dit «’vous faites bien la paire, bande de bouffons ridicules que vous êtes. On va vous ridiculiser’»

Mais la cour relève que ces propos rapportés au conditionnel par l’inspectrice du travail dans une correspondance, n’est établie par aucune attestation, notamment de la collègue de travail qui en aurait été également la destinataire.

Faute pour M. [X] de reprendre au titre du harcèlement moral les autres moyens énoncés au titre de sa prise d’acte de rupture du contrat de travail aux torts de l’employeur, la cour relève que les trois seuls courriels susvisés ne permettent pas de retenir que les insultes et traitements dégradants dénoncés par le salarié sont matériellement établis.

M. [Z] [X] sera en conséquence débouté de sa demande au titre du harcèlement moral.

II ‘ Sur la prise d’acte de la rupture du contrat de travail

Dans le cadre de l’exception d’inexécution, il est admis que les manquements de l’employeur à l’exécution de bonne foi du contrat de travail peuvent justifier la prise d’acte de la rupture de son contrat de travail par le salarié dès lors que ce dernier établit que ces manquements sont suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail, peu important que la lettre par laquelle le salarié prend acte ne stigmatise qu’une partie des griefs finalement évoqués à l’appui de la demande dès lors que cette lettre ne fixe pas les limites du litige.

Lorsque la prise d’acte est justifiée par des manquements suffisamment graves, elle produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ou nul en cas de discrimination. A défaut, elle produit les effets d’une démission.

La charge de la preuve des manquements de l’employeur incombe au salarié, le doute sur la réalité des faits allégués profite à l’employeur.

En l’espèce, M. [Z] [X] justifie de sa prise d’acte de la rupture par la production du courrier adressé à l’employeur ainsi que par le justificatif du dépôt de l’envoi avec avis de réception du 28 août 2018.

Il fait valoir que la rupture doit être prononcée aux torts de l’employeur en raison :

du harcèlement moral dont il a été victime, constitué par des insultes et traitement dégradant et humiliant, des mails de nature à dénigrer la qualité de son travail et son implication alors que les appréciations des participants aux formations sont élogieuses, des menaces de licenciements pour cause de retards de trains dûment justifiés, des injures et menaces régulières,

d’une surcharge excessive du travail matérialisée par le non-respect du temps de préparation conventionnel des formations et par des mails reçus à toute heure,

du non-paiement des heures supplémentaires, et de l’absence de récupération des jours fériés travaillés,

de la visite d’un médecin contrôleur et de l’absence de paiement de la subrogation de salaire,

des menaces et injures,

du retard dans le paiement des salaires,

du refus injustifié de ses demandes de congés.

L’AGS fait valoir que l’appelant n’apporte pas plus d’élément de preuve en appel qu’en première instance au titre de l’envoi effectif du courrier de prise d’acte de rupture allégué, cependant que les documents de fin de contrat font état d’une démission.

Subsidiairement, elle sollicite le rejet de la demande indemnitaire faute de justification de son préjudice par le salarié, en l’absence de communication de pièces relatives à sa situation professionnelle postérieure à la rupture du contrat.

Mais la cour relève que M. [Z] [X] communique la lettre de prise d’acte de la rupture datée du 27 août 2018 ainsi que le récépissé d’envoi de ce courrier en recommandé avec accusé de réception à l’employeur, daté du 28 août 2018, de sorte que la preuve de la prise d’acte de la rupture est rapportée.

Au soutien des motifs graves évoqués, M. [Z] [X] produit’notamment:

les courriels récurrents adressés à l’employeur [J] [C] pour se plaindre de sa programmation en tant que formateur chaque jour ouvré du mois alors que l’article 10-2 de la convention collective prévoit que le temps de formation ne peut excéder 72% de la durée de travail effective compte tenu des temps de préparation matérielle et personnelle des formations, de sorte qu’il s’épuise en temps de préparation tardifs voire nocturnes,

de nombreux courriels d’envoi des supports de formation préparés par lui et adressés à l’employeur, au cours des années 2016 à 2018, à des heures très tardives (pièce 15 – 23h44, 00h28, 22h55, 01h21 ‘),

son courriel du 24 avril 2018 dans lequel il rappelle que ses demandes de temps de préparation des formations sont restés sans réponse, et précise «’je suis partant sans problème [pour établir de nouveaux documents] mais pas en dehors de mes formations. Or, je suis en formation chaque semaine. Je travaille chaque soir et chaque week-end pour maintenir la qualité de mes formations. Travailler tous les soirs 3 à 4 heures pour bâtir des contenus et documents est impossible, déjà parce que nous sommes hors temps de travail et que ce temps est prévu pour le bien être du salarié en famille. Comme nous en avions déjà parlé, il faut me libérer une semaine par logiciel pour pouvoir te fournir ce que tu me demandes’».

la réponse de l’employeur du 25 avril 2018’: «’je prends bonne note que tu ne souhaites plus effectuer les heures supplémentaires payées au titre de la préparation des cours. Je vais donc à l’avenir te libérer du temps sur le temps de travail «’normal’» ‘ Il faut d’urgence te remettre au travail …’»

sa réponse précisant que les heures supplémentaires rémunérées concernent uniquement les temps de formation et non de préparation de celles-ci puisque sa durée effective d’actions de formation quotidienne est 8h40 – 17h15 avec 45 minutes de pause méridienne, (soit 39h10 par semaine),

le mail de son employeur du 6 septembre 2017 au terme duquel il explique ne pas avoir pu lui régler les heures supplémentaires dues pour ne pas dépasser les maxima légaux «’en clair je ne peux pas te faire «’travailler’» (et payer) plus de 41 heures par semaine (limite légale à 42 h) donc on n’a pas pu compter les heures habituelles ce mois-ci vu la durée de tes congés. Rattrapage bientôt pas de soucis’» (la cour souligne)

la lettre du 4 juin 2018 de l’inspectrice du travail à l’employeur précisant avoir été saisie par deux salariés de faits pouvant revêtir la qualification de harcèlement moral s’ils étaient avérés,

le mail du 24 avril 2018 de refus non motivé par l’employeur de la demande de congés de M. [X] aux dates sollicitées,

le mail de l’employeur spécifiant qu’un mot de la RATP ne saurait prémunir des sanctions possibles, dont le licenciement, en cas de retard habituels, et la réponse de contestation du salarié,

les mails relatifs aux retard de paiement du salaire du mois de mai 2018,

ses arrêts de travail portant mention «’burn out’» et l’avis du médecin contrôleur du 31 mai 2018 précisant «’arrêt justifié jusqu’au 20 juin 2018’».

Si les menaces et insultes mentionnées par le salarié dans son courrier de prise d’acte ne sont corroborées par aucun élément ou attestation de tiers, la cour relève que M. [Z] [X] établit sa surcharge de travail durable et le dépassement constant des maxima légaux, ayant de fait entraîné son épuisement professionnel, ainsi que le management culpabilisant de l’employeur en cas de demande de diminution de sa cadence de travail.

Ces éléments, outre les retards de paiement des salaires et le refus de congés, constituent des manquements suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite du contrat de travail.

Par suite, la prise d’acte de la rupture de M. [Z] [X] suivant lettre recommandée avec avis de réception du 28 avril 2018 produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse à cette date.

III- Sur les demandes financières

3.1 – Sur le rappel d’heures supplémentaires et l’indemnité de congés payés afférente

Aux termes de l’article L. 3171-2, alinéa 1er, du code du travail, lorsque tous les salariés occupés dans un service ou un atelier ne travaillent pas selon le même horaire collectif, l’employeur établit les documents nécessaires au décompte de la durée de travail, des repos compensateurs acquis et de leur prise effective, pour chacun des salariés concernés. Selon l’article L. 3171-3 du même code, l’employeur tient à la disposition de l’inspecteur ou du contrôleur du travail les documents permettant de comptabiliser le temps de travail accompli par chaque salarié. La nature des documents et la durée pendant laquelle ils sont tenus à disposition sont déterminées par voie réglementaire.

Selon l’article L. 3171-4 du code du travail, en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, l’employeur fournit au juge les éléments de nature à justifier les horaires effectivement réalisés par le salarié. Au vu de ces éléments et de ceux fournis par le salarié à l’appui de sa demande, le juge forme sa conviction après avoir ordonné, en cas de besoin, toutes les mesures d’instruction qu’il estime utiles. Si le décompte des heures de travail accomplies par chaque salarié est assuré par un système d’enregistrement automatique, celui-ci doit être fiable et infalsifiable.

Il résulte de ces dispositions, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées. Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

L’article 10-3 de la convention collective stipule que pour les formateurs des niveaux D et E, les parties conviennent que le temps de FFP (face à face pédagogique) ne pourra excéder 70 % de la totalité du temps de travail. Le formateur reste à la disposition de l’employeur pendant le reste de la durée conventionnelle du travail pour effectuer toutes les autres activités contractuelles (préparation recherches et autres activités).

M. [Z] [X] chiffre à 37% de son temps de travail le quantum des heures supplémentaires nécessité par l’application des dispositions de la convention collective, après déduction de celles qui lui ont été rémunérées à compter du mois d’avril 2016.

Il produit à l’appui de ses demandes les pièces susvisées, notamment ses échanges de courriels du 25 avril 2018 aux termes desquels l’employeur ne conteste pas que son salarié effectuait 7h50 par jour en face à face pédagogique chaque jour de la semaine, soit 39 heures de travail hebdomadaire en formation. Il produit, en outre, les courriels dénonçant le fait de devoir travailler 3 à 4 heures chaque soir et chaque week-end pour bâtir des contenus et documents et maintenir la qualité de ses formations, outre de nombreux courriels d’envoi à des heures nocturnes desdits matériels de préparation des formations dispensées.

Le fait que l’employeur soit en liquidation judiciaire n’a pas d’incidence sur les règles de preuve applicables, puisque que le mandataire liquidateur aurait pu solliciter les observations du dirigeant et la désignation d’un avocat à l’aide juridictionnelle.

En l’absence d’éléments fournis par l’employeur pour contredire ceux apportés par le salarié et pouvant étblir la réalité des horaires accomplis, il sera fait droit aux heures supplémentaires non prescrites à hauteur de 8 277,16 euros, outre l’indemnité de congés payés afférente.

3.2 -Sur la demande d’indemnité pour non respect des temps de repos

M. [Z] [X] sollicite 5 000 euros de dommages-intérêts pour non-respect des temps de repos légaux, compte tenu de sa surcharge de travail et des courriels reçus le week-end et tard le soir.

Mais il ne produit qu’un courriel de son employeur reçu à 23h25 et mentionnant «’il n’y a pas urgence’».

Sa surcharge de travail, établie précédemment, est insuffisante à caractériser, en elle-même, le non-respect des temps de repos quotidiens et hebdomadaires obligatoires visés aux articles L. 3131-1 et L.3132-1 du code du travail.

M. [Z] [X] qui ne fonde pas sa demande sur le dépassement par l’employeur des maxima légaux de temps de travail mais uniquement sur le non-respect des temps de repos sera débouté de sa demande à ce titre.

3.3 -Sur la demande d’indemnité de travail dissimulé

Des articles L 8221-3, 8221-5 et 8223-1 du Code du Travail, il résulte qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours en mentionnant intentionnellement sur un bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement accompli, a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

De ce qui précède, il résulte que l’employeur n’a pas porté sur les bulletins de salaire le nombre exact d’heures travaillées par M. [Z] [X].

Le caractère intentionnel de la dissimulation est établi notamment par le courriel de l’employeur du 6 septembre 2017 aux termes duquel il explique ne pas avoir pu lui régler les heures supplémentaires dues pour ne pas dépasser les maxima légaux «’en clair je ne peux pas te faire «’travailler’» (et payer) plus de 41 heures par semaine (limite légale à 42 h) donc on n’a pas pu compter les heures habituelles ce mois-ci vu la durée de tes congés.»

Il sera en conséquence alloué l’indemnité forfaitaire sollicitée.

3.4 – Sur la demande de rappel de salaire du mois d’août 2018

Aux termes de l’article 1353 du code civil, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver. Réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Par suite, nonobstant la délivrance d’une fiche de paie, c’est à l’employeur, débiteur de cette obligation, qu’il incombe de prouver le paiement du salaire et des indemnités de congés payés.

M. [Z] [X] sollicite 140 euros bruts à titre de rappel de salaire et l’indemnité de congés payés afférente pour avoir reçu deux bulletins de paie en août 2018, dont l’un mentionnait un taux horaire de 12,91 euros, l’autre son taux horaire normal soit 17,21 euros.

L’AGS ne démontre pas que l’employeur a satisfait à son obligation et ne conteste pas le montant sollicité.

Il sera en conséquence fait droit à la demande.

3.5 – Sur les demandes résultant de la rupture du contrat de travail

Par application des articles L.1234-1 et R 1234-2 du code du travail, repris à l’article 9.1 de la convention collective, M. [Z] [X] aurait dû bénéficier d’un préavis de deux mois.

L’AGS ne conteste pas la fixation du salaire mensuel à hauteur de 2 817,18 euros.

Il sera, en conséquence, fixé au passif de la société Adab Services la somme de 5 634,36 euros bruts au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre 563,43 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférente.

Par application des articles L. 1234-9 et R 1234-2 du même code, il sera fixé au passif de la société Adab Services une indemnité de 1 878,21 euros au titre de l’indemnité de licenciement.

Par application des dispositions de l’article L.1235-3 du même code, la société Adab services comprenant moins de onze salariés au moment de la rupture du contrat de travail, et M. [X] ayant produit les justificatifs de ses arrêts maladie pour «’burn out’», il sera fixé au passif de la société Adab Services une indemnité correspondant à 3 mois de salaires, soit la somme de 8 451,54 euros au titre de l’indemnité de licenciement sans cause réelle et sérieuse.

IV- Sur les autres demandes

Les dépens seront fixés au passif de la liquidation judiciaire de la société Adab services qui succombe.

Il sera également fixé au passif de la société Adab services au profit de M. [Z] [X] la somme de 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.

Le présent arrêt sera déclaré opposable à l’Unedic délégation AGS CGEA IdF Ouest dans les limites de sa garantie pour couvrir ces indemnités.

Par application de l’article 621-28 du code de commerce, l’ouverture d’une procédure collective interrompant le cours des intérêts, M. [Z] [X] sera débouté de sa demande relative aux intérêts légaux et à leur capitalisation.

En vertu des articles L.622-28 et L.641-3 du code de commerce, toutes demandes de condamnation au paiement d’une astreinte dirigée contre un débiteur soumis à une procédure de liquidation judiciaire est irrecevable. Par suite, le mandataire liquidateur devra remettre au salarié un bulletin de salaire récapitulatif conforme à la décision, ainsi qu’un certificat de travail conforme mentionnant la date d’entrée du salariée exacte soit le 25 janvier 2016, sans qu’une astreinte ne soit prononcée.

PAR CES MOTIFS,

La Cour,

Infirme le jugement entrepris sauf en ce qu’il a

rejeté la nullité de la requête soulevée par l’Unedic délégation AGS CGEA Ile de France Ouest,

Statuant à nouveau et y ajoutant

requalifie la prise d’acte par M. [Z] [X] de la rupture de son contrat de travail le 29 août 2018 en licenciement sans cause réelle et sérieuse,

Déboute M. [Z] [X] de sa demande au titre du harcèlement moral,

Fixe la créance de Monsieur [X] au passif de la société Adab services aux sommes suivantes’:

– 8 277,16 euros au titre de rappels des heures supplémentaires,

– 827,71 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférente,

– 16 903,08 euros au titre de l’indemnité de travail dissimulé,

– 140 euros à titre de rappel de salaire août 2018,

– 14 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférente,

– 5 634,36 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

– 563,43 euros au titre de l’indemnité de congés payés afférente,

– 878,21 euros au titre de l’indemnité de licenciement,

– 8 451,54 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse,

– 1 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

Déboute M. [Z] [X] de sa demande au titre du non-respect des temps de repos et de ses plus amples demandes,

Ordonne au mandataire liquidateur de remettre au salarié un certificat de travail et un bulletin de paie récapitulatif conformes à l’arrêt,

Dit que l’arrêt sera opposable à l’Unedic délégation AGS CGEA IdF Ouest dans la limite de sa garantie,

Inscrit les dépens de première instance et d’appel au passif de la société Adab services.

LA GREFFIERE LE PRESIDENT

 


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