Épuisement professionnel : 21 juin 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 22/00761

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Épuisement professionnel : 21 juin 2023 Cour d’appel de Reims RG n° 22/00761

Arrêt n°

du 21/06/2023

N° RG 22/00761

MLB/FJ

Formule exécutoire le :

à :

COUR D’APPEL DE REIMS

CHAMBRE SOCIALE

Arrêt du 21 juin 2023

APPELANT :

d’un jugement rendu le 3 mars 2022 par le Conseil de Prud’hommes de REIMS, section Commerce (n° F 20/00474)

Monsieur [I] [S]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Sandy HARANT, avocat au barreau de REIMS

INTIMÉE :

SAS SOCIÉTÉ SC

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentée par la SELARL CAPSTAN RHONE-ALPES, avocats au barreau de LYON

DÉBATS :

En audience publique, en application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 10 mai 2023, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller, chargé du rapport, qui en a rendu compte à la cour dans son délibéré ; elle a été mise en délibéré au 21 juin 2023.

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller faisant fonction de président

Madame Véronique MAUSSIRE, conseiller

Madame Marie-Laure BERTHELOT, conseiller

GREFFIER lors des débats :

Monsieur Francis JOLLY, greffier

ARRÊT :

Prononcé publiquement par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour d’appel, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, et signé par Madame Marie-Lisette SAUTRON, conseiller faisant fonction de président, et Monsieur Francis JOLLY, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

* * * * *

Monsieur [I] [S] a été embauché par la SAS SC à compter du 27 janvier 2014 dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée en qualité de technico-commercial, à hauteur de 151,67 heures de travail par mois.

Sa rémunération était composée d’une partie fixe et d’une partie variable.

Le 27 août 2018, Monsieur [I] [S] a été placé en arrêt-maladie, renouvelé jusqu’au 23 février 2020.

Le 25 février 2020, le médecin du travail le déclarait apte à reprendre son poste dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique jusqu’au 31 mars 2020.

Le 26 février 2020, Monsieur [I] [S] et la SAS SC signaient un avenant au contrat de travail à durée déterminée mi-temps thérapeutique du 24 février au 31 mars 2020, suivi de 3 autres avenants au contrat de travail à durée déterminée mi-temps thérapeutique pour le mois d’avril 2020, du 30 avril au 29 mai et du 30 mai au 30 juin 2020, en raison de la prolongation du mi-temps thérapeutique.

A compter du 1er juillet 2020, Monsieur [I] [S] était de nouveau placé en arrêt de travail pour maladie et ce de façon ininterrompue jusqu’au 1er octobre 2020.

Le 20 juillet 2020, il adressait un courrier de reproches à son employeur auquel celui-ci répondait le 12 août 2020.

Le 4 septembre 2020, il saisissait notamment le conseil de prud’hommes de Reims d’une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur.

Le 2 octobre 2020, le médecin du travail établissait un avis d’inaptitude et précisait que l’état de santé du salarié faisait obstacle à tout reclassement dans un emploi.

Le 9 octobre 2020, Monsieur [I] [S] était convoqué à un entretien préalable à licenciement et le 23 octobre 2020, il était licencié pour inaptitude médicale et impossibilité de reclassement, ce qu’il contestait également devant le conseil de prud’hommes.

Par jugement du 3 mars 2022, le conseil de prud’hommes déboutait Monsieur [I] [S] de l’intégralité de ses demandes, le condamnait à payer à la SAS SC la somme de 250 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et partageait par moitié les dépens entre les parties.

Le 30 mars 2022, Monsieur [I] [S] interjetait appel du jugement en l’ensemble de ses dispositions.

Par conclusions en date du 16 mai 2022, l’appelant demande à la cour d’infirmer le jugement en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :

– de condamner la SAS SC au paiement de la somme de 20000 euros à titre de dommages-intérêts en violation de l’obligation de sécurité et en réparation du préjudice subi au titre du harcèlement moral,

– d’ordonner à la SAS SC de produire aux débats les justificatifs de ses performances commerciales et des autres éléments ayant servi à calculer la prime qui lui a été réglée chaque année en juillet et d’avoir à justifier la ventilation entre sa performance individuelle et les résultats de l’agence de [Localité 5] à laquelle il appartient, lesquels devront être confortés par des pièces comptables,

– à défaut de communication de ces éléments, de condamner la SAS SC au paiement de la somme de 30000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi concernant le règlement de la part variable de sa rémunération,

– de prononcer la résiliation judiciaire de son contrat de travail, à effet à la date du licenciement,

En tout état de cause

– de déclarer sans cause réelle et sérieuse son licenciement,

– de condamner la SAS SC à lui payer les sommes suivantes :

23670,12 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement abusif et irrégulier,

773,56 euros à titre de solde d’indemnité de licenciement,

3945,02 euros à titre d’indemnité compensatrice de préavis,

394,50 euros à titre de congés payés afférents,

2000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– d’assortir les condamnations de nature salariale des intérêts au taux légal à compter de la convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation et à compter de la décision pour les créances indemnitaires,

– d’ordonner la capitalisation des intérêts,

– de condamner l’employeur aux dépens de première instance et d’appel.

Par conclusions en date du 27 juillet 2022, l’intimée demande à la cour de confirmer le jugement en toutes ses dispositions, de débouter Monsieur [I] [S] de l’ensemble de ses demandes et de le condamner au paiement de la somme de 2000 euros sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

Il est renvoyé aux écritures des parties pour un plus ample exposé.

Motifs :

– Sur l’injonction de communication de pièces et à défaut sur la demande de dommages-intérêts :

Il ressort du contrat de travail de Monsieur [I] [S] que la partie variable de sa rémunération comprenait une prime annuelle/résultats-marge brute, des commissions sur chiffres d’affaires et un intéressement sur le bénéfice de l’agence et le contrat de travail renvoyait pour les modalités de calcul à des annexes.

Il est établi que la partie variable de sa rémunération, au titre des exercices compris entre le 1er avril et le 31 mars, était versée à Monsieur [I] [S] au mois de juillet, déduction faite des avances déjà perçues au cours de l’année.

Monsieur [I] [S] a été débouté en première instance de sa demande tendant à obtenir qu’il soit délivré injonction à la SAS SC de produire aux débats les justificatifs de ses performances commerciales et des autres éléments ayant servi à calculer la prime qui lui a été réglée chaque année en juillet et d’avoir à justifier la ventilation entre sa performance individuelle et les résultats de l’agence de [Localité 5] à laquelle il appartient, confortés par des pièces comptables, et en outre de sa demande de dommages-intérêts si la SAS SC ne satisfaisait pas à l’injonction, demandes qu’il reprend à hauteur d’appel.

La SAS SC réplique à raison qu’au vu des pièces qu’elle produit -détail du calcul de la rémunération variable au titre des 3 années non couvertes par la prescription, black book, montant du chiffre d’affaires réalisé par chaque représentant commercial- Monsieur [I] [S] dispose de tous les éléments pour procéder aux vérifications souhaitées.

En effet, ses pièces 45 à 47 détaillent le calcul de la prime variable sur la partie non prescrite de la demande de Monsieur [I] [S]-soit pour les exercices 2017-2018, 2018-2019 et 2019-2020- et permettent à ce dernier de s’assurer qu’elle a été calculée conformément aux annexes à son contrat de travail et à partir des données du black-book fourni par l’employeur au sujet duquel il admet qu’il lui permet de faire un lien entre la baisse de résultat et les impayés et retards de paiement des clients, et qui retrace les résultats de chaque commercial et les résultats de l’agence elle-même.

Monsieur [I] [S] doit donc être débouté de sa demande de délivrance d’une injonction en ce que les premiers juges ont retenu à juste titre qu’elle n’était pas justifiée.

C’est encore à raison que les premiers juges l’ont débouté de sa demande tendant à obtenir la condamnation de la SAS SC à lui payer la somme de 30000 euros à titre de dommages-intérêts en réparation du préjudice subi.

Pas plus qu’en première instance, il ne caractérise dans ses écritures un préjudice, n’ayant procédé à aucun calcul et alors même que la SAS SC établit au travers de ses calculs, notamment pour l’exercice 2018-2019 pendant lequel Monsieur [I] [S] n’a travaillé que 5 mois, que celui-ci s’est vu attribuer le bénéfice de commissions au titre de ventes effectuées par ses collègues pendant son arrêt de travail.

Le jugement doit donc être confirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [I] [S] de sa demande de délivrance d’une injonction et de sa demande de dommages-intérêts.

– Sur les dommages-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité et en réparation du préjudice subi en raison du harcèlement moral :

Les premiers juges ont débouté Monsieur [I] [S] de sa demande de dommages-intérêts pour violation de l’obligation de sécurité et en réparation du préjudice subi en raison du harcèlement moral.

Monsieur [I] [S] demande à la cour d’infirmer une telle disposition dès lors qu’il a été victime d’un harcèlement moral, résultant d’agissements indélicats de la part de son supérieur hiérarchique lorsqu’il a refusé de continuer à répondre à ses demandes incessantes le soir et le week-end, du non-respect de ses temps de repos, de son droit à la déconnexion, du non-respect de ses horaires de travail et de leur amplitude conduisant à un rythme de travail excessif à l’origine de répercussions sur sa santé se traduisant par un long arrêt de travail à compter du mois d’août 2018, de manoeuvres d’intimidation pendant son arrêt de travail, de brimades de la part de son supérieur hiérarchique à la reprise de son travail en mi-temps thérapeutique et d’une mise à l’écart. Il soutient que le manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, lequel n’a mis en place aucun système de prévention du harcèlement moral, est établi.

La SAS SC demande à la cour de confirmer le jugement en ce qu’il a débouté Monsieur [I] [S] de sa demande de dommages-intérêts. Elle soutient que les faits invoqués par ce dernier antérieurement à son arrêt de travail du 27 août 2018, pendant son arrêt de travail et à son retour d’arrêt de travail, sont soit non établis et contredits par les pièces qu’elle produit, soit justifiés par des éléments objectifs étrangers à toute situation de harcèlement. Elle conteste tout manquement à l’obligation de sécurité dès lors que le salarié ne l’a jamais alertée de la moindre difficulté dans l’exercice de ses missions, qu’elle a respecté les préconisations du médecin du travail et que la prévention des risques psychosociaux était assurée.

Il convient en premier lieu de s’attacher à la demande au titre du harcèlement moral.

En application des articles L.1152-1 et L.1154-1 du code du travail, pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral, il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L.1152-2 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge d’apprécier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

Monsieur [I] [S] invoque en premier lieu des brimades de la part de son supérieur hiérarchique mais ne produit aucune pièce à ce titre.

Monsieur [I] [S] produit les conversations professionnelles Whats App avec son supérieur hiérarchique de janvier 2016 jusqu’au mois d’août 2018, desquelles il ressort, comme l’écrit la SAS SC, des échanges matinaux ou tardifs à l’initiative de ce dernier, qui ont lieu, selon les chiffres qu’elle fournit et qui ne sont pas contestés par Monsieur [I] [S], en moyenne 3,91 jours par mois en 2016, 5,75 jours par mois en 2017 et 4,57 jours par mois en 2018, ce qui ne traduit pas des demandes incessantes mais caractérise toutefois des manquements réguliers de la SAS SC au respect des horaires de travail, aux temps de repos du salarié et à son droit à la déconnexion.

De surcroît, les horaires de travail applicables à Monsieur [I] [S], tels qu’il les avait signés, étaient du lundi au vendredi de 9 h à 12 h et de 14 h à 18 h. Or, au vu de la pièce n°29 dont la SAS SC se prévaut dans ses écritures, il ressort qu’elle demandait à Monsieur [I] [S] à compter du 19 octobre 2015, une présence sur le terrain de 8 h à 16 h afin de revenir vers 16 h 30 à l’agence pour gérer son administratif (devis, mise en place des conditions clients en informatique), soit bien au-delà des horaires pour 35 heures de travail.

Monsieur [I] [S] verse aussi aux débats des attestations de clients desquelles il ressort qu’il les rencontrait tôt le matin ou tard le soir (pièces n°81, 82, 83, 86).

Il est donc établi qu’en travaillant dans de telles conditions, Monsieur [I] [S] était soumis à un rythme de travail excessif.

Monsieur [I] [S] établit par ailleurs avoir été suivi par une psychologue de janvier à septembre 2015. Dans un mail du 11 octobre 2019 qu’elle envoie à Monsieur [I] [S] qui sollicitait un résumé de ses notes dans le cadre d’un suivi mis en place auprès d’un psychiatre depuis son arrêt-maladie, elle écrivait notamment que Monsieur [I] [S] était alors depuis un an sur un poste de technico commercail et qu’il consultait pour la pression subie de son employeur : horaires (70 heures/ semaine – de 7 h à 22 h pour un contrat de 35 heures a priori). Monsieur [I] [S] établit aussi qu’il était suivi à la date du 27 janvier 2020 depuis plusieurs mois par un psychiatre, lequel atteste qu’il souffrait des conséquences tant psychiques que physiques d’un épuisement professionnel d’origine pluri-factorielle. Dans un courrier du 19 septembre 2020, le médecin traitant de Monsieur [I] [S] indique que celui-ci est suivi très régulièrement pour un problème de souffrance au travail avec burn out et syndrome anxio-dépressif. Monsieur [I] [S] établit enfin avoir été en arrêt de travail continu d’août 2018 au 23 février 2020, puis de nouveau à compter du juillet 2020, le médecin du travail concluant à un avis d’inaptitude le 2 octobre 2020.

De tels éléments pris dans leur ensemble laissent présumer des agissements de harcèlement moral, de sorte qu’il n’est pas nécessaire d’examiner les autres éléments invoqués par Monsieur [I] [S].

Sur le rythme de travail, la SAS SC oppose vainement à Monsieur [I] [S] l’autonomie dont il disposait dans l’organisation de son temps de travail du fait de ses fonctions de commercial itinérant, alors même qu’il était soumis à des horaires de travail, qu’elle doit respecter ainsi que les temps de repos et le droit à la déconnexion du salarié.

Dans ces conditions, le harcèlement moral est établi.

Le manquement de la SAS SC à son obligation de sécurité telle qu’elle ressort des articles L.1152-4 et L.4121-1 du code du travail est caractérisé.

La SAS SC ne justifie en effet d’aucune mesure de prévention du harcèlement moral contemporaine du harcèlement moral que Monsieur [I] [S] a subi.

Si Monsieur [I] [S] a subi un préjudice moral découlant du harcèlement moral qui s’est déroulé sur une longue période, il n’établit pas avoir subi un préjudice distinct de celui-ci, résultant du manquement de l’employeur à son obligation de sécurité.

Dans ces conditions, en réparation du préjudice subi au titre du harcèlement moral, la SAS SC doit être condamnée à payer à Monsieur [I] [S] la somme de 3500 euros à titre de dommages-intérêts et il doit être débouté de sa demande de dommages-intérêts au titre du manquement à l’obligation de sécurité.

Le jugement doit donc être infirmé en ce qu’il a débouté Monsieur [I] [S] de sa demande de dommages-intérêts pour harcèlement moral et confirmé du chef du rejet de sa demande de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité.

– Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la SAS SC :

Les premiers juges ont débouté Monsieur [I] [S] de sa demande tendant au prononcé de la résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts de la SAS SC.

Monsieur [I] [S] reprend à hauteur d’appel les manquements de l’employeur invoqués en première instance, étant toutefois précisé qu’il n’invoque pas à ce titre dans les développements qu’il consacre dans son paragraphe III A. relatif au bien-fondé de la résiliation judiciaire, ni le manquement de l’employeur à l’obligation de sécurité, ni le harcèlement moral dont il a été victime. Or, soit il n’établit pas les manquements qu’il invoque, soit ceux-ci ne sont pas suffisamment graves pour avoir empêché la poursuite de la relation contractuelle, de sorte que le jugement qui a débouté Monsieur [I] [S] de sa demande tendant à voir prononcer la résiliation judiciaire du contrat de travail aux torts de la SAS SC doit être confirmé.

– Sur le licenciement :

Monsieur [I] [S] avait notamment sollicité en première instance que son licenciement soit déclaré sans cause réelle et sérieuse, soutenant que son inaptitude trouvait sa source dans des manquements de l’employeur à ses obligations, le manquement à l’obligation de sécurité et le harcèlement moral, ce que les premiers juges n’ont pas retenu et ce qu’il reprend à hauteur d’appel.

La SAS SC réplique que le licenciement pour inaptitude est parfaitement fondé en l’absence de tout manquement de sa part.

Monsieur [I] [S] a subi des faits de harcèlement moral pendant plusieurs années jusqu’au mois de juillet 2018. A cette date, il a été placé en arrêt de travail pour un syndrome anxio-dépressif de façon continue jusqu’au mois de février 2020. Il n’a repris son travail que dans le cadre d’un mi-temps thérapeutique et pour une durée de 4 mois avant d’être de nouveau placé en arrêt de travail puis de faire l’objet d’un avis d’inaptitude. La durée du harcèlement, celle de l’arrêt-maladie et son objet, la reprise tout au plus d’un travail à mi-temps thérapeutique pour une courte durée avant un nouvel arrêt, établissent que l’inaptitude trouve son origine au moins pour partie dans les faits de harcèlement moral.

Dans les termes de la demande qui lient la cour, le licenciement doit être déclaré, non pas nul, mais sans cause réelle et sérieuse.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

– Sur les conséquences financières du licenciement :

Dès lors que le licenciement est sans cause réelle et sérieuse, Monsieur [I] [S] est bien-fondé en sa demande de préavis d’un montant de 3945,02 euros correspondant à deux mois de salaire outre les congés payés y afférents.

Monsieur [I] [S] demande la condamnation de la SAS SC à lui payer la somme de 773,56 euros correspondant au solde de l’indemnité de licenciement. Or, la SAS SC lui oppose à raison qu’il n’est pas fondé à la calculer en retenant les périodes de suspension de son contrat de travail.

Toutefois, il y a lieu d’inclure dans l’ancienneté du salarié les deux mois au titre du préavis, de sorte que Monsieur [I] [S] est bien-fondé en sa demande de rappel d’indemnité de licenciement à hauteur de 82,18 euros correspondant aux deux mois que l’employeur n’a pas pris en compte.

Monsieur [I] [S], âgé de 39 ans lors de son licenciement, avait une ancienneté en années complètes de 6 ans, de sorte qu’il peut prétendre à une indemnité comprise entre 3 et 7 mois de salaire, sur le fondement de l’article L.1235-3 du code du travail. Il établit avoir perçu l’ARE de novembre 2020 à mai 2022.

Au vu de ces éléments, la SAS SC sera condamnée à payer à Monsieur [I] [S] la somme de 11835,06 euros, laquelle répare le préjudice subi.

Le jugement doit être infirmé en ce sens.

**************

Les conditions s’avèrent réunies pour condamner l’employeur fautif, en application de l’article L.1235-4 du code du travail, à rembourser à l’organisme intéressé les indemnités chômage versées au salarié, du jour de son licenciement au jour de la décision judiciaire, dans la limite de six mois.

Les condamnations à caractère salarial porteront intérêts à compter du 8 septembre 2020, date de réception par la SAS SC de sa convocation devant le bureau de conciliation et d’orientation et à compter du présent arrêt pour les condamnations à caractère indemnitaire.

Il y a lieu de dire que les condamnations sont prononcées sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables.

Il sera fait droit à la demande de capitalisation des intérêts présentée par Monsieur [I] [S] selon les modalités reprises au dispositif de la présente décision, conformément à l’article 1343-2 du code civil.

Le jugement doit être infirmé du chef des dépens et de la condamnation de Monsieur [I] [S] au paiement d’une indemnité de procédure.

Partie succombante, la SAS SC doit être condamnée aux dépens de première instance et d’appel, déboutée de sa demande d’indemnité de procédure au titre des deux instances et condamnée en équité à payer à Monsieur [I] [S] la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel.

Par ces motifs :

La cour, statuant publiquement, contradictoirement, après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Infirme le jugement déféré sauf en ce qu’il a débouté Monsieur [I] [S] de ses demandes de délivrance d’une injonction de communication de pièces, de dommages-intérêts à hauteur de 30000 euros et de dommages-intérêts pour manquement à l’obligation de sécurité ;

Le confirme de ces chefs ;

Statuant à nouveau dans cette limite et y ajoutant :

Condamne la SAS SC à payer à Monsieur [I] [S] la somme de 3500 euros à titre de dommages-intérêts pour harcèlement moral ;

Dit que le licenciement de Monsieur [I] [S] est privé de cause réelle et sérieuse ;

Condamne la SAS SC à payer à Monsieur [I] [S] les sommes de :

– 3945,02 euros au titre de l’indemnité de préavis, avec intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2020 ;

– 394,50 euros au titre des congés payés y afférents, avec intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2020 ;

– 82,18 euros au titre du solde de l’indemnité de licenciement, avec intérêts au taux légal à compter du 8 septembre 2020 ;

– 11835,06 euros à titre de dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, avec intérêts au taux légal à compter du présent arrêt ;

Ordonne la capitalisation des intérêts dus au moins pour une année entière ;

Dit que les condamnations sont prononcées sous déduction des éventuelles cotisations sociales salariales applicables ;

Condamne la SAS SC à rembourser à l’organisme intéressé, dans la limite de six mois, les indemnités chômage versées au salarié, du jour de son licenciement à celui de la présente décision ;

Condamne la SAS SC à payer à Monsieur [I] [S] la somme de 2000 euros au titre de ses frais irrépétibles de première instance et d’appel ;

Déboute la SAS SC de sa demande d’indemnité de procédure au titre des deux instances ;

Condamne la SAS SC aux dépens de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE CONSEILLER

 


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