ARRET
N° 668
CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 7]
C/
CPAM DU HAINAUT
RD
COUR D’APPEL D’AMIENS
2EME PROTECTION SOCIALE
ARRET DU 20 SEPTEMBRE 2022
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N° RG 20/04245 – N° Portalis DBV4-V-B7E-H2YW
JUGEMENT DU POLE SOCIAL DU TRIBUNAL JUDICIAIRE DE VALENCIENNES EN DATE DU 03 juillet 2020
PARTIES EN CAUSE :
APPELANT
CENTRE HOSPITALIER DE [Localité 7]
M.P : Madame [W] [C]
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 3]
[Localité 7]
Représenté par Me BAVAY, avocat au barreau de LILLE, substituant Me Jean-françois SEGARD de la SELARL SHBK AVOCATS, avocat au barreau de LILLE, vestiaire : 0380
ET :
INTIME
CPAM DU HAINAUT
agissant poursuites et diligences de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège
[Adresse 6]
[Adresse 6]
[Localité 4]
Représentée et plaidant par Mme [G] [L], dûment mandatée
DEBATS :
A l’audience publique du 14 Octobre 2021 devant Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller, siégeant seul, sans opposition des avocats, en vertu des articles 786 et 945-1 du Code de procédure civile qui a avisé les parties à l’issue des débats que l’arrêt sera prononcé par sa mise à disposition au greffe le 1er février 2022.
GREFFIER LORS DES DEBATS :
Mme Marie-Estelle CHAPON
Le prononcé de la décision initialement prévu au 1er février 2022 a été prorogé au 20 septembre 2022
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DELIBERE :
Monsieur Renaud DELOFFRE en a rendu compte à la Cour composée en outre de:
Mme Elisabeth WABLE, Président,
Mme Graziella HAUDUIN, Président,
et Monsieur Renaud DELOFFRE, Conseiller,
qui en ont délibéré conformément à la loi.
PRONONCE :
Le 20 Septembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au 2e alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, Mme Elisabeth WABLE, Président a signé la minute avec Mme Audrey VANHUSE, Greffier.
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DECISION
Madame [W] [C], pharmacien au Centre Hospitalier de [Localité 7], a adressé à la Caisse primaire d’assurance maladie du Hainaut une déclaration de maladie professionnelle établie le 17 avril 2017, déclarant être atteinte de « HTA symptomatique, malaise, épuisement professionnel » à laquelle était joint un certificat médical initial, en date du 30 mars 2017, dressé par le Docteur [B] comportant le diagnostic précité.
A l’issue du premier colloque médico-administratif, le médecin conseil a fixé la date de première constatation médicale au 2 février 2017 et estimé l’incapacité prévisible supérieure ou égale à 25%.
Lors du second colloque médico-administratif, il a été décidé conjointement par le service médical et le service administratif de la caisse la transmission du dossier au Comité Régional de Reconnaissance des Maladies professionnelles (CRRMP), dans le cadre de l’alinéa 4 de l’article L.461-1 dans sa rédaction applicable.
Le Comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Tourcoing Hauts de France, saisi pour une maladie hors tableau, a indiqué que « Madame [C] [W], née en 1959, exerce depuis juin 1986 en tant que pharmacien en Centre Hospitalier. Elle a été successivement pharmacien chef de service de juin 1986 à octobre 2003, puis depuis novembre 2003, elle est chef de service hygiène, référent hygiène et coordonnateur de la gestion des risques associés aux soins. Le dossier nous est présenté au titre du 4ème alinéa pour des troubles de l’adaptation constatés le 02.02.17. Après avoir étudié les pièces du dossier communiqué, le CRRMP constate la réalité de la pathologie. Les éléments communiqués dans le dossier rapportent un contexte professionnel délétère comportant notamment différentes formes de violences, une perte d’autonomie décisionnelle et un manque de soutient hiérarchique. Il n’est noté aucun facteur confondant dans ce dossier. Cet environnement professionnel permet donc d’expliquer la survenue de la pathologie déclarée. Pour toutes ces raisons, il convient de retenir un lien direct et essentiel « .
Suite à l’avis du Comité Régional de Reconnaissance des Maladies Professionnelles de la région Tourcoing Hauts de France, la Caisse primaire d’assurance maladie a notifié à l’employeur sa décision de prise en charge de la maladie professionnelle » hors tableau » par courrier du 12 février 2018
Saisie par le Centre Hospitalier de [Localité 7] d’une contestation de la décision de prise en charge, la commission de recours amiable a rejeté la requête le 27 septembre 2018.
Par lettre recommandée avec avis de réception postée le 30 novembre 2018, l’établissement public Centre Hospitalier de [Localité 7] a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale de Valenciennes d’une contestation du taux prévisible d’incapacité reconnu à Madame [C] et d’un recours tendant à se voir déclarer inopposable la décision de prise en charge de la maladie professionnelle dont a été reconnue atteinte cette dernière.
Par jugement avant dire droit du 24 mai 2019, le pôle social du tribunal de grande instance de Valenciennes a dit qu’il y avait lieu de recueillir l’avis du CRRMP de la région Nord-Est.
Le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région Nancy Nord-Est a rendu un avis motivé le 4 septembre 2019, réceptionné au greffe le 3 octobre 2019 et dont il résulte que « Madame [C] a rédigé le 17/04/2017 une demande de reconnaissance de maladie professionnelle hors tableau au titre de l’article L.461-1 du code de la sécurité sociale (troubles de l’adaptation), appuyée par un certificat médical initial établi le 30/03/2017. L’intéressée est pharmacienne en Centre Hospitalier depuis 1986, affectée à un poste de chef de service référent hygiène coordinateur de la gestion des risques à compter de novembre 2003. Les éléments présents au dossier mettent en évidence une exposition avérée à des risques psychosociaux (dysfonctionnement organisationnelle et relationnelle, mise à l’écart) ayant conduit à l’apparition de la maladie déclarée. On ne retrouve d’ailleurs pas de facteurs extraprofessionnels pouvant expliquer l’apparition de la pathologie. En conséquence, les membres du CRRMP estiment qu’un lien direct et essentiel peut être établi entre la pathologie présentée et l’activité professionnelle exercée « .
L’affaire a été entendue à l’audience du pôle social du tribunal judiciaire de Valenciennes du 19 juin 2020.
Par jugement en date du 3 juillet 2020, le Tribunal a décidé ce qui suit :
Déclare irrecevable la contestation par le Centre Hospitalier de [Localité 7] du taux d’incapacité de 25% retenu concernant [W] [C] ;
Déboute le Centre Hospitalier de [Localité 7] de l’ensemble de ses demandes ;
Déboute le Centre Hospitalier de [Localité 7] de sa demande sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
Condamne le Çentre Hospitalier de [Localité 7] aux dépens.
Le Tribunal a retenu qu’aux termes de l’article R.142-10-2 du code de la sécurité sociale, » le tribunal est saisi par requête remise ou adressée au greffe par lettre recommandée avec avis de réception. […] Outre les mentions prescrites par l’article 57 du code de procédure civile, elle contient un exposé sommaire des motifs de la demande. Elle est accompagnée : […] 2° D’une copie de la décision contestée ou en cas de décision implicite, de la copie de la décision initiale de l’autorité administrative et de l’organisme de sécurité sociale ainsi que de la copie de son recours préalable », que si le Centre Hospitalier de [Localité 7] conteste le taux d’incapacité supérieur ou égal à 25% retenu pour la caractérisation de la maladie professionnelle hors tableau, force est de constater qu’il ne produit pas la décision lui notifiant le taux retenu qu’il conteste, qu’en conséquence, la contestation du taux d’incapacité supérieur ou égal à 25% retenu concernant [W] [C] par le Centre Hospitalier de [Localité 7] est irrecevable, que la caisse primaire d’assurance maladie du Hainaut a mené une enquête administrative suite à la déclaration de maladie professionnelle, clôturée le 20 septembre 2017, au cours de laquelle un certain nombre de pièces ont été jointes au dossier : courrier employeur du 19 juin 2017, courrier envoyé au médecin du travail, organigrammes de l’établissement et courrier de [W] [C] suite au remaniement d’août 2016, lettre du Dr [S] [U] [I], président de la commission médicale d’établissement au directeur en date du 19 février 2015, échanges concernant la revue morbide mortalité, courriers adressés à la victime par Monsieur [H], directeur d’établissement, mails de novembre 2016 à février 2017 pour lesquels [W] [C] ne figurait pas dans la liste des destinataires, mail du Dr [K], chirurgien, courrier du directeur du 11 octobre 2016 adressé au président la CME et aux médecins du CH, qu’aux termes de l’article D.461-29 du code de la sécurité sociale, les conclusions des enquêtes conduites par les caisses font partie du dossier constitué par la caisse transmis au CRRMP, que contrairement à ce qu’affirme le Centre Hospitalier de [Localité 7], les CRRMP qui ont statué dans le cas de [W] [C] ne disposaient donc pas uniquement, pour apprécier son environnement de travail, des déclarations de cette dernière et du certificat médical initial, que ces deux avis sont clairs, motivés et concordants, que si le Centre Hospitalier de [Localité 7] apporte des attestations qui témoignent de ce que le comportement de [W] [C] n’aurait pas été adapté vis-à-vis de certains de ses collègues ou subordonnés, ces éléments ne sont pour autant pas incompatibles avec une exposition de [W] [C] à un environnement de travail délétère avec sa propre hiérarchie et ses collègues, entraînant un lien direct et essentiel entre son travail et la pathologie déclarée, que le Centre Hospitalier de [Localité 7] sera donc débouté de l’intégralité de ses demandes.
Appel du jugement du 3 juillet 2020 a été interjeté par le Centre Hospitalier de [Localité 7] par courrier recommandé avec accusé de réception de son avocat expédié au greffe de la Cour en date du 15 juillet 2020.
Par sa déclaration d’appel valant conclusions enregistrées par le greffe à la date du 17 juillet 2020 et soutenue oralement, l’appelant demande à la Cour de :
Réformer le jugement entrepris,
Juger que la maladie déclarée par Mme [C] ne peut être reconnue en tant que maladie professionnelle,
Juger en tout état de cause que le taux de 25% notifié par la CPAM n’est pas justifié
En conséquence, annuler les décisions du 12 février 2018 et du 27 septembre 2018,
Condamner la CPAM du Hainaut au paiement d’une somme de 2.500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’en tous les frais et dépens.
Il fait valoir qu’il n’existe à l’encontre de Madame [C] aucune situation de harcèlement moral, que les accusations portées par elle à l’encontre du CH [Localité 7] sont absolument sans fondement et ne reposent sur aucune pièce ou élément probant, qu’elle a déposé une plainte pénale pour harcèlement, que les éléments recueillis lors de l’instruction de cette plainte font apparaître à l’inverse son comportement difficile qui pourrait s’analyser comme une situation de harcèlement moral, Mme [C] succombe dans la preuve qui lui incombe d’un lien de causalité entre son état personnel et ses fonctions au sein de l’établissement et sur ce point le jugement entrepris doit être réformé, que le CH [Localité 7] entend démentir les accusations de l’intimée visant sa supposée » mise à l’écart « , laquelle serait constituée par une modification des conditions d’exercice de ses fonctions de référent hygiène et de coordonnateur de la gestion des risques associés aux soins, qu’elle ne s’est jamais vu imposer un changement d’affectation ou de fonctions, qu’aucun élément ne permet de comprendre le mode d’évaluation du taux d’incapacité retenu, alors même que ce taux détermine la prise en charge de la maladie par l’employeur, que rien ne permet d’expliquer le taux approximatif » égal au moins à 25% » d’incapacité physique permanent retenu en l’espèce, que de façon erronée, le comité précise que Mme [C] ne présenterait pas d’antécédents médicaux. Il ressort pourtant de l’instruction de son dossier initial que Mme [C] bénéficiait d’un traitement pour son hypertension artérielle sévère, que cette erreur révèle le caractère très superficiel de l’instruction de ce dossier par le comité, que cette situation légitime absolument la position de l’établissement qui entend contester le taux d’incapacité permanent retenu : l’état antérieur de Mme [C] aurait dû être pris en compte dans l’évaluation de son taux d’incapacité permanent, que l’ensemble des éléments fournis au tribunal ne permettent aucunement de déterminer le taux d’incapacité effectivement subi par Mme [C], qu’il est dès lors demandé au pôle social d’annuler la décision prise par la CPAM du Hainaut., qu’à titre subsidiaire, et si la Cour ne s’estimait pas suffisamment informée quant à l’état réel de l’intimée ni sur l’existence d’un éventuel lien de causalité entre l’état déclaré et les conditions d’exercice professionnel, il lui appartiendrait de diligenter avant dire droit une mesure d’expertise sur ce point, les parties demeurant contraires en fait.
Par conclusions visées par le greffe le 14 octobre 2021 et soutenues oralement par sa représentante, la caisse primaire d’assurance maladie du Hainaut demande à la Cour de confirmer le jugement déféré en toutes ses dispositions.
Elle fait valoir que les deux avis des CRRMP successifs sont clairs et que le lien entre la maladie et l’activité professionnelle peut être retenu, que l’employeur est fondé à faire des observations sur l’évaluation du taux d’incapacité prévisible lors de la consultation du dossier soumis au CRRMP, qu’il ne justifie pas avoir formulé de telles réserves, que le CRRMP est fondé à remettre en cause le taux et que son avis porte à la fois sur l’évaluation de l’incapacité de la victime et sur le lien direct et essentiel entre cette maladie et le travail habituel de la victime, que le taux d’IP devient ainsi une composante de l’avis rendu par le médecin-conseil qui se substitue à l’avis précédemment rendu par le médecin-conseil et de d’autant que l’avis motivé du CRRMP s’impose à la caisse, que l’argumentation de l’appelant sur la non-justification de ce taux prévisible inférieur à 25 % ne saurait prospérer.
MOTIFS DE L’ARRET.
Attendu que la charge de la preuve de la réunion des conditions exigées par l’article L. 461-1 CSS pèse sur l’organisme social lorsque ce dernier a décidé d’une prise en charge (en ce sens notamment Civ. 2ème, 30 juin 2011, no10-20.148).
Vu les articles L. 461-1, alinéa 4, R. 461-8, D. 461-29 et D. 461-30 du code de la sécurité sociale ;
Attendu, selon le premier de ces textes, que peut être également reconnue d’origine professionnelle une maladie caractérisée non désignée dans un tableau des maladies professionnelles lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux évalué dans les conditions mentionnées à l’article L. 434-2 et au moins égal à un pourcentage fixé à 25 % par le deuxième ; que, selon le dernier, la caisse primaire d’assurance maladie saisit le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles après avoir recueilli, notamment, le rapport du service du contrôle médical qui, aux termes du troisième, comprend, le cas échéant, le rapport d’évaluation du taux d’incapacité permanente partielle de la victime ; que pour l’application de ces dispositions, le taux d’incapacité permanente à retenir pour l’instruction d’une demande de prise en charge d’une maladie non désignée dans un tableau des maladies professionnelles est celui évalué par le service du contrôle médical dans le dossier constitué pour la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles, et non le taux d’incapacité permanente partielle fixé après consolidation de l’état de la victime pour l’indemnisation des conséquences de la maladie ;
Qu’il résulte du premier texte précité qu’en cas de contestation par l’employeur, à l’appui d’une demande d’inopposabilité d’une décision de prise en charge effectuée sur le fondement de l’alinéa 4 (devenu 7) de l’article L.461-1, il appartient au juge d’apprécier, au vu des éléments du débat et notamment des avis des CRRMP, le lien direct et essentiel entre le travail et la maladie déclarée mais qu’il lui appartient au préalable de se prononcer, s’il est contesté, sur le taux d’incapacité permanente partielle prévisible de l’assuré et ce dans les conditions prévues par l’article L.434-2, l’existence d’un taux d’incapacité prévisible d’au moins 25 % qui constitue la condition préalable de saisine du CRRMP et une des conditions médicales de la prise en charge de la maladie.
Attendu qu’en l’espèce la caisse fait valoir que les avis rendus par les deux CRRMP porteraient à la fois sur l’évaluation de l’incapacité de la victime et sur le lien direct et essentiel entre la maladie déclarée et l’activité professionnelle de l’assurée et elle en déduit que les deux avis en question établiraient suffisamment le taux prévisible de Madame [C].
Attendu cependant que ce moyen manque en droit, le CRRMP n’étant saisi que de l’existence d’un lien direct et essentiel et la vérification par lui du taux prévisible n’entrant pas dans sa mission, le texte de l’article D.461-30 rappelant d’ailleurs expressément qu’il appartient à la caisse, préalablement à la saisine, de « statuer, le cas échéant, sur l’incapacité permanente de la victime » ce dont il résulte qu’il ne rentre pas dans la mission du CRRMP de se prononcer sur le taux prévisible d’incapacité fixé par la caisse sur avis de son praticien-conseil.
Qu’il manque également en fait, le CRRMP ne s’étant à aucun moment prononcé sur le bien-fondé du taux de 25% qui figure d’ailleurs, comme il se doit, dans son avis parmi les motifs de la saisine, à savoir le motif médical constitué par la nature de la maladie » trouble de l’adaptation », le motif administratif tiré du fait qu’elle ne figure dans aucun tableau et le motif médical tiré du taux d’incapacité prévisible au moins égal à 25%, et non dans les conclusions de l’avis qui consistent uniquement à indiquer s’il existe ou non un lien direct et essentiel entre la maladie caractériser soumise à instruction et le travail habituel de la victime.
Attendu ensuite que la partie qui sollicite la confirmation du jugement est, en application de l’article 954 du code de procédure civile, réputée s’approprier les motifs du premier juge sauf énonciation de nouveaux moyens.
Que dans la mesure où il ne résulte pas des éléments du dossier que la caisse ait énoncé de nouveaux moyens par rapport à ses écritures de première instance, il s’ensuit qu’elle est réputée s’approprier les motifs retenus par les premiers juges.
Attendu que pour justifier l’irrecevabilité de la contestation par l’employeur du taux prévisible d’incapacité de Madame [C] retenu par le praticien-conseil de la caisse, le Tribunal a retenu que si le centre hospitalier de [Localité 7] conteste ce taux, force est de constater qu’il ne produit pas la décision lui notifiant le taux retenu qu’il conteste.
Attendu qu’en application de l’article R.142-10-2 du code de la sécurité sociale le Tribunal est saisie par requête contenant, outre les mentions prescrites par l’article 57 du Code de procédure civile, un exposé sommaire des motifs et de la demande et qui est accompagnée d’une copie de la décision contestée ou, en cas de décision implicite, de la copie de la décision initiale de l’autorité administrative et de l’organisme de sécurité sociale ainsi que de la copie de son recours préalable.
Attendu que le Tribunal, qui n’était aucunement saisi par la Caisse d’une nullité pour vice de forme de l’assignation, a méconnu doublement les dispositions de l’article 114 du Code de procédure civile en relevant d’office, sans respect d’ailleurs du contradictoire, une nullité ne présentant aucun caractère d’ordre public et en la prononçant sans relever l’existence d’un quelconque grief, lequel était d’autant moins constitué que la décision non jointe était aux débats puisque le Tribunal fait état à plusieurs reprises du colloque médico-administratif, constitutif de la décision de fixation du taux prévisible ( dans le sens qu’est une nullité pour vice de forme l’absence de copie en annexe de la déclaration d’appel devant le Conseil des Prud’hommes de la décision attaquée Soc., 1 avril 2009, pourvoi n° 08-40.551)
Attendu qu’en toute hypothèse la caisse ne fait pas grief au Centre Hospitalier de [Localité 7] de ne pas avoir produit cette pièce et qu’au surplus le colloque précité est produit par la caisse en pièce n°8 ce dont il résulte qu’elle ne subirait aucun grief du fait de cette absence de transmission de cette décision à l’appui de sa requête.
Que le motif d’irrecevabilité tiré de l’absence de production par l’employeur de la décision fixant le taux prévisible étant inopérant il convient de réformer les dispositions du jugement déféré retenant d’office l’irrecevabilité de la contestation du taux d’incapacité prévisible de Madame [C] et, statuant à nouveau de ce chef, de déclarer cette contestation recevable.
Attendu qu’il résulte de l’article L.461-1 précité du Code de la sécurité sociale que la preuve de ce que le taux d’incapacité prévisible du salarié est d’au moins 25%, dans la perspective de la saisine du CRRMP, peut être rapportée par l’avis du praticien-conseil de la caisse mais à la condition que ce dernier soit fondé sur un élément extrinsèque (en ce sens en ce qui concerne la preuve de ce que la maladie prise en charge est bien celle figurant au tableau 2e Civ., 21 octobre 2021 n° 19-24.237 ; 2e Civ., 21 octobre 2021, pourvoi n° 20-13.946 ; 2e Civ., 7 novembre 2019, pourvoi n° 18-21.742).
Attendu qu’en l’espèce, il n’est produit aux débats par la caisse aucun élément extrinsèque à l’avis du praticien-conseil permettant de fonder l’appréciation de ce dernier quant au taux prévisible d’incapacité retenu par lui.
Attendu qu’aux termes de l’article R.142-16 du Code de la sécurité sociale la juridiction peut ordonner toute mesure d’instruction, qui peut prendre la forme d’une consultation clinique ou sur pièces exécutée à l’audience, par un consultant avisé de sa mission par tous moyens, dans des conditions assurant la confidentialité en cas d’examen de la personne intéressée.
Qu’aux termes de l’article R.142-16-4 à la demande de l’employeur, lorsque ce dernier est partie à l’instance dans les contentieux de nature médicale formés dans les matières mentionnées aux 1°,4°, 5° et 6° de l’article L.142-1, tout rapport de l’expert désigné ou du consultant est notifié au médecin qu’il mandate à cet effet. L’expert adresse son rapport médical intégral au greffe dans le délai imparti.
Qu’en présence d’une contestation par l’employeur du taux d’incapacité permanente partielle prévisible de Madame [C], il convient d’ordonner une mesure de consultation selon les modalités prévues au dispositif du présent arrêt.
PAR CES MOTIFS.
La Cour, statuant par arrêt contradictoire rendu en audience publique par sa mise à disposition au greffe et ne pouvant faire l’objet d’un recours indépendamment de la décision sur le fond,
Réforme le jugement déféré en ses dispositions déclarant irrecevable la contestation par le Centre Hospitalier de [Localité 7] du taux d’incapacité de 25% retenu concernant Madame [W] [C] et déclare cette contestation recevable.
Avant dire droit sur la contestation par l’employeur du taux prévisible d’incapacité,
Ordonne en application de l’article R.142-16 du Code de la sécurité sociale une mesure de consultation sur pièces.
Commet à cet effet le Docteur [J], expert Doctorat en médecine, CES en médecine légale , CES de médecine du travail, Diplôme de réparation du Dommage corporel [Adresse 1] [Localité 5]
avec pour mission de prendre connaissance des pièces figurant dans les dossiers remis à la Cour par les parties, de se faire remettre par le service-médical de la caisse primaire d’assurance maladie du Hainaut en application de l’article R.142-16-3 du Code de la sécurité sociale l’intégralité du rapport médical mentionné à l’article L.142-6 du même Code justifiant la décision du praticien-conseil de retenir un taux d’incapacité permanente partielle prévisible de Madame [W] [C] ( n° de sécurité sociale [XXXXXXXXXXX02]) d’au moins 25 %, de donner son avis sur ce taux d’incapacité permanente partielle prévisible à la date à laquelle le praticien-conseil s’est prononcé et d’adresser au greffe de la Cour son rapport contenant cet avis dans le délai de quatre mois à compter de la réception du présent arrêt.
Rappelle qu’en application de l’article R.142-16-4, le rapport du médecin-consultant sera notifié par le greffe de la Cour au médecin-conseil mandaté par l’employeur si ce dernier en fait la demande et dit qu’en application du principe d’égalité des armes résultant du droit à un procès équitable posé par l’article 6 de la Convention Européenne des droits de l’homme le rapport du médecin-consultant sera également notifié au praticien-conseil de la caisse si cette dernière en fait la demande.
Dit que la cause sera à nouveau évoquée à l’audience du 19 juin 2023 à 13h30
Dit que la notification du présent arrêt vaudra convocation des parties à l’audience de réouverture des débats.
Réserve les dépens et les frais non répétibles.
Le Greffier,Le Président,