Épuisement professionnel : 2 novembre 2022 Cour d’appel de Rennes RG n° 19/03945

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Épuisement professionnel : 2 novembre 2022 Cour d’appel de Rennes RG n° 19/03945

5ème Chambre

ARRÊT N°-320

N° RG 19/03945 – N° Portalis DBVL-V-B7D-P3KQ

M. [N] [R]

C/

AGIPI, ASSOCIATION GENERALE INTERPROFESSIONNELLE D E PREVOYANCE ET D’INVESTISSEMENT

SA AXA FRANCE VIE

Confirme la décision déférée dans toutes ses dispositions, à l’égard de toutes les parties au recours

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 02 NOVEMBRE 2022

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Virginie PARENT, Présidente,

Assesseur : Madame Sophie RAMIN, Conseiller,

Assesseur : Madame Virginie HAUET, Conseiller,

GREFFIER :

Madame Catherine VILLENEUVE, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 07 Septembre 2022

devant Madame Virginie PARENT et Madame Virginie HAUET, magistrats rapporteurs, tenant seules l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui ont rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 02 Novembre 2022 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [N] [R]

né le 19 Juillet 1954 à [Localité 8]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Représenté par Me Hélène DAOULAS de la SELARL DAOULAS-HERVE ET ASS., Plaidant/Postulant, avocat au barreau de QUIMPER

INTIMÉES :

AGIPI, ASSOCIATION GENERALE INTERPROFESSIONNELLE D E PREVOYANCE ET D’INVESTISSEMENT

[Adresse 1]

[Localité 5]

Représentée par Me Isabelle MALLET-HERRMANN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT

SA AXA FRANCE VIE

[Adresse 4]

[Localité 6]

Représentée par Me Isabelle MALLET-HERRMANN, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de LORIENT

******************

M. [N] [R], exerçant la fonction d’huissier de justice à [Localité 7], a souscrit auprès de l’Association Générale Interprofessionnelle de Prévoyance et d’Investissement (AGIPI) une adhésion CAP (convention d’assurance et de prévoyance) à compter du 24 novembre 1994 pour bénéficier d’une garantie capital décès. Le contrat CAP est un contrat d’assurance de groupe de prévoyance souscrit par 1’AGIPI auprès d’Axa France Vie.

En 1998, il a souscrit une garantie complémentaire de perte de revenus en cas d’incapacité temporaire totale de travail.

M. [N] [R] a été placé en arrêt de travail à compter du 21 janvier 2016 ; l’avis établi par son médecin fait état d’un état anxio-dépressif et d’un épuisement professionnel. Conformément aux prévisions du contrat, M. [N] [R] a fait une déclaration valant demande de prestations à 1’AGIPI et adressé les éléments complémentaires sollicités par cette dernière, notamment un certificat en date du 5 février 2016 faisant état de 1a persistance d’un syndrome anxio-dépressif et d’un burn out.

Par courrier en date du 12 février 2016, 1’AGIPI a indiqué qu’elle n’interviendrait pas immédiatement, faisant valoir que l’incapacité relevait d’une affection pour laquelle 1e contrat prévoyait une franchise de 90 jours, suivie d’une indemnisation de 365 jours.

M. [N] [R] a contesté cette interprétation considérant que l’article 24D du contrat relatif aux limitations de garantie pour les affections nerveuses ne s’appliquait pas à sa maladie, et qu’en conséquence la franchise devait être limitée à 30 jours et que les prestations versées devaient l’être jusqu’aux 1095ème jour. Il a été examiné par son médecin le 11 juillet 2016 qui a confirmé 1e diagnostic de burn out, en indiquant qu’il ne s’agissait pas d’un état dépressif, bien que les désordres soient proches.

Par acte du 10 octobre 2016, M. [N] [R] a fait assigner l’AGIPI en paiement devant le tribunal de grande instance de Lorient.

La SA Axa France Vie est intervenue volontairement à la procédure.

En cours de procédure, M. [N] [R] a fait 1’objet d’une expertise médicale à l’initiative de l’AGIPI par le docteur [S] et le docteur [Y] le 23 janvier 2018.

Par jugement en date du 15 mai 2019, le tribunal a de grande instance de Lorient :

– déclaré irrecevable la demande en paiement de prestations dirigée contre l’Association Générale Interprofessionnelle de prévoyance et d’investissement (AGIPI),

– déclaré recevables les autres demandes,

– débouté M. [N] [R] de ses demandes,

– condamné M. [N] [R] à supporter les dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,

– dit n’y avoir lieu a exécution provisoire.

Le 18 juin 2019, M. [N] [R] a interjeté appel de cette décision et aux termes de ses dernières écritures notifiées le 28 juin 2022, il demande à la cour de :

– le recevoir en son appel et le déclarer fondé,

– débouter l’AGIPI et la société Axa France Vie de toutes leurs demandes, fins et prétentions, contraires ou plus amples aux présentes,

– infirmer le jugement rendu par le tribunal de grande instance de Lorient,

– condamner la société Axa France Vie à lui verser la somme de 15 708 euros correspondant à deux mois de franchise,

– condamner la société Axa France Vie au paiement d’une somme de

196 443,35 euros correspondant aux 730 jours de prestations qu’elle reste à lui devoir,

– condamner l’AGIPI à lui payer la somme de 1 euro au titre du préjudice moral causé par son comportement fautif,

– condamner in solidum l’AGIPI et la société Axa France Vie au paiement d’une somme de 6 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– subsidiairement, si la cour devait ordonner une expertise,

– modifier la mission proposée par la société Axa et retenir celle proposée par M. [N] [R],

– les condamner les intimées in solidum aux entiers dépens.

Par dernières conclusions notifiées le 25 août 2022, l’AGIPI et la société Axa France vie demandent à la cour de :

– faire sommation à M. [N] [R] de communiquer l’ensemble des pièces médicales de son dossier, les certificats médicaux délivrés ou à tout le moins d’autoriser le médecin conseil de l’AGIPI à communiquer ces documents au conseil de l’AGIPI afin que celui-ci puisse les verser aux débats devant la cour,

A titre principal,

– confirmer le jugement dont appel du 15 mai 2019 en toutes ses dispositions,

– à titre subsidiaire, si par extraordinaire la cour d’appel estimait que les éléments médicaux transmis sont insuffisants pour déterminer si oui ou non l’assuré souffre d’une pathologie entrant dans les prescriptions de l’article 24 D et en l’espèce une dépression, ordonner en tant que de besoin une expertise médicale de M. [N] [R] confiée à tel médecin expert qu’il plaira à la cour d’appel de désigner avec la faculté de s’adjoindre le sapiteur de son choix avec pour mission de distinguer pour chaque affection constatée :

* les antécédents médicaux de l’assuré,

* la date d’apparition des premiers symptômes,

* la nature de la maladie, la gravité, l’évolution, le traitement suivi, le pronostic et les séquelles éventuelles,

* la durée d’ITT et de l’ITP à retenir en indiquant précisément les dates,

* si l’ITT est toujours justifiée, l’assuré est-il en mesure de se livrer partiellement à ses activités professionnelles,

* la date de consolidation,

* préciser le mode d’exercice de la profession et le cas échéant les tâches réalisables

– dans l’attente du dépôt du rapport, surseoir à statuer sur l’ensemble des demandes de M. [N] [R],

– débouter M. [N] [R] de toutes demandes, plus amples ou contraires et notamment de sa demande tendant à voir modifier la mission de l’expert telle que sollicitée par la société Axa France Vie, cette demande étant irrecevable et en toutes hypothèses injustifiée, pour les raisons ci-dessus exposées,

A titre infiniment subsidiaire,

– si par extraordinaire, la cour d’appel infirmait le jugement dont appel et considérait que les prestations de la garantie indemnité perte de revenus doivent être versées à M. [N] [R] jusqu’aux 1095 jours après la cessation d’activité,

– débouter M. [N] [R] de sa demande tendant à voir condamner la société Axa France Vie à lui verser la somme de 196 443,35 euros, pour les causes sus énoncées, le montant des prestations restant dès lors dues (730 jours) jusqu’au 19 janvier 2019, et limiter la réclamation à la somme de

168 057,54 euros,

– débouter M. [N] [R] de toutes ses demandes, fins et conclusions, plus amples ou contraires,

En tout état de cause,

– confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a débouté M. [N] [R] de sa demande de dommages et intérêts formée à l’encontre de l’AGIPI pour toutes les causes sus énoncées ;

– débouter M. [N] [R] de toutes ses demandes, fins et conclusions plus amples ou contraires,

– condamner M. [N] [R] à verser à l’AGIPI la somme de 5 000 euros et à la société Axa France Vie la somme de 5 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ainsi que les entiers dépens tant de première instance que d’appel qui seront recouvrés par Me Isabelle Mallet Herrmann, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture est intervenue le 7 septembre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la demande de sommation à communiquer des pièces médicales

L’AGIPI et la société Axa France Vie entendent obtenir par voie de sommation judiciaire la production aux débats par M. [R] de pièces médicales couvertes par le secret médical.

La cour constate qu’une telle demande n’a pas été présentée devant le conseiller de la mise en état qui pouvait en connaître en application de l’article 788 du code de procédure civile, auquel renvoie l’article 907 du même code.

Il est observé que le conseil des intimés a sollicité de sa consoeur, conseil de M. [R], par sommation du 9 octobre 2020, communication des arrêts de travail et notamment trois arrêts de travail (du 13 janvier 2017 au 10 février 2017, du 27 septembre 2017 au 8 novembre 2017, du 6 mars 2018 au 3 avril 2018) ainsi que des certificats médicaux délivrés à M. [R]. Les arrêts de travail ont été communiqués.

M. [R] verse aux débats un certificat de son médecin traitant le docteur [Z] [F] en date du 5 avril 2016, un certificat du docteur [W] psychiatre en date du 11 juillet 2016, ainsi qu’un questionnaire médical.

La cour estime n’y avoir lieu à communication d’autres éléments et rejette cette demande.

Sur l’application de la clause 24 D du contrat opposée à M. [R]

Au soutien de sa demande tendant à écarter l’application de cette clause à sa situation, M. [R] fait valoir les éléments suivants :

– il a souffert d’un épuisement professionnel (non visé par cette clause) et non d’une dépression nerveuse ou d’une affection d’origine psychique ou névrotique ou d’une maladie mentale,

– un épuisement professionnel est à l’origine de ses arrêts de travail,

– le syndrome d’épuisement professionnel ou burn out est distinct de la dépression nerveuse,

– les conditions générales du contrat ont fait l’objet d’une modification en 2016 pour y inclure la référence au burn out, de sorte que le burn out ne peut être considéré comme prévu par la clause 24 D qu’AGIPI et Axa France lui opposent,

– s’agissant d’une clause de limitation, elle est soumise à un principe d’interprétation stricte,

– les intimés ont admis par conclusions de première instance que l’état de santé de M. [N] [R] relevait d’un syndrome d’épuisement professionnel ou burn out,

– la mission dévolue à l’expert dans le cadre de la procédure de contrôle prévue par l’article 30 de la convention d’assurances et de prévoyance, n’était pas de se prononcer sur l’application ou non de la clause de limitation de garantie,

– les conclusions de l’expert sont péremptoires et contredisent l’avis de son psychiatre.

L’AGIPI et la société Axa France Vie concluent à l’application de la clause, comme jugé par le tribunal et font valoir que :

– l’AGIPI n’a jamais reconnu que l’arrêt de travail de M. [R] devait être réglé sur 1095 jours,

– la pathologie dont souffre l’appelant est un état dépressif majeur visé par la clause 24D,

– au regard de la divergence de vue entre les parties quant à l’origine des arrêts de travail, une expertise médicale a été demandée, conformément à la notice du contrat CAP (article 30B),

– M. [R] a été examiné par le docteur [S] en présence du docteur [Y] le 23 janvier 2018, et le rapport a été communiqué le 7 mai 2018 ; ces derniers ont conclu que la pathologie à l’origine de l’arrêt de travail était un état dépressif majeur,

– ces conclusions rejoignent les indications mentionnées sur plusieurs arrêts de travail, sur le questionnaire médical rempli par le médecin, et le certificat de son psychiatre,

– la modification ultérieure des conditions générales est sans incidence,

– l’argumentaire tiré du caractère formel et limité de la clause n’est applicable qu’aux seules clauses d’exclusion ; au demeurant, les dispositions de la clause 24 D sont claires et limpides.

La clause 24 D discutée entre les parties est la suivante :

Les dépressions nerveuses et plus généralement les affections d’origine psychique ou névrotique et les maladies mentales non justiciables de soins psychiatriques intensifs – hospitalisation en établissement spécialisé- et quelle qu’en soit l’origine, sont indemnisées après déduction d’une franchise de 90 jours. Le montant total versé au titre des garanties applicables en cas d’incapacité temporaire de travail ne peut excéder plus de 365 jours de prestations pour un même assuré, services en une ou plusieurs fois.

Cette clause figure à l’article 24 intitulé ‘Limitations de garanties’.

Les parties intimées objectent à raison qu’il ne s’agit pas d’une clause d’exclusion de garantie.

Le formalisme des caractères très apparents est limité aux clauses visées par la loi (clauses d’exclusion selon l’article L113-1 du code des assurances), il ne s’applique pas aux clauses définissant les limitations des garanties contractuelles.

Dès lors, M. [R] n’est pas fondé à objecter une inopposabilité de cette clause au motif d’une absence de clarté de la clause litigieuse. Au demeurant, l’AGIPI et la société Axa France Vie relèvent à raison que les stipulations précitées sont parfaitement claires et limitent les garanties contractuelles à certains types de maladies énumérées.

Pas davantage, M. [R] ne peut déduire l’existence d’un aveu judiciaire valant reconnaissance de garantie, des conclusions de première instance du 4 mai 2017 d’AGIPI et de la société Axa France Vie, aux termes desquelles AGIPI a demandé de lui décerner acte de ce qu’elle accepte de régler à M. [R] la somme de 15 708 euros correspondant à deux mois de franchise et demande de dire que les prestations de la garantie ‘ indemnité pour perte de revenus ‘ seront versées tant que durera l’incapacité de travail au plus tard jusqu’au 1095ème jour après la cessation d’activité, alors que, comme très justement relevé par les premiers juges, cette position est assortie d’une réserve faite par l’AGIPI de faire expertiser M. [R] par un médecin indépendant en application de l’article 30 ‘contrôle’ des conditions générales de la convention d’assurance, une telle mesure de contrôle ne trouvant sa légitimité que dans la nécessité de discuter les conditions de la garantie.

Sur ce point, s’il est exact qu’il n’appartient pas à l’expert désigné par AGIPI de se prononcer sur l’application ou non de la clause limitative de garantie, de la seule compétence de l’assureur, il revient néanmoins à l’expert de décrire l’état de santé à l’origine de l’arrêt de travail de l’assuré et donc de fournir à l’assureur l’éclairage nécessaire pour apprécier l’application ou non d’une limitation de garantie.

M. [R] soutient à tort que le seul objet du contrôle est d’apprécier l’existence de l’incapacité de travail ou de son invalidité alors que :

– d’une part, l’article 30 B chapitre ‘contrôle’ prévoit que l’assuré doit apporter la preuve de son incapacité de travail ou de son invalidité, fournir à ce titre les éléments justificatifs qui peuvent être demandés par l’AGIPI, se soumettre aux examens de contrôle effectués par le médecin délégué par celle-ci, et que par courrier du 12 février 2016, réceptionnant les documents de M. [R], AGIPI a fait connaître à ce dernier qu’elle entendait limiter les garanties au regard de l’affection à l’origine de l’arrêt de travail,

– d’autre part, la mission donnée à l’expert par AGIPI est de se prononcer sur les antécédents médicaux, la date d’apparition des premiers symptômes, la nature de la maladie, la gravité, l’évolution, le traitement suivi, le pronostic, les séquelles éventuelles, la durée de l’ITT et de l’ITP à retenir en indiquant précisément les dates, dire si l’ITT est toujours justifiée ou si l’assuré peut se livrer partiellement à ses activités professionnelles, se prononcer sur la date de consolidation et en cas de non consolidation et d’affection durable, préciser la date d’un nouvel examen (cf expertise du docteur [S]).

La cour approuve donc le tribunal en ce qu’il retient que la demande de ‘décerner acte’ ne correspond pas, dans ces circonstances, à une offre ferme et définitive de l’assureur de prise en charge de M. [R] dans les conditions sollicitées par lui, susceptible de lui être opposée.

Il convient donc en l’espèce de vérifier si l’arrêt de travail de M. [N] [R] a ou non pour origine une pathologie visée par la clause 24 D.

Ces pathologies sont les dépressions nerveuses et plus généralement les affections d’origine psychique ou névrotique et les maladies mentales non justiciables de soins psychiatriques intensifs- hospitalisation en établissement spécialisé- et quelle qu’en soit l’origine.

Il est acquis et non contesté que M. [R] n’a pas fait l’objet d’une hospitalisation en établissement spécialisé.

S’il est exact que la clause 24D ne vise pas expressément l’état de burn out ou d’épuisement professionnel, alors que la nouvelle notice de la convention CAP en 2016 inclut dans les affections susceptibles des limitations de garanties opposées, le surmenage professionnel (burn out), aucune incidence ne résulte de cette modification au regard de la popularisation d’une notion encore peu employée en 1994, date de souscription du contrat. La cour partage donc l’analyse des premiers juges sur ce point.

Le docteur [S], expert a examiné M. [N] [R] le 23 janvier 2018 en présence du docteur [Y], sapiteur psychiatre. Dans un rapport en date du 11 avril 2018, il conclut de la manière suivante :

M. [N] [R] a commencé à présenter des manifestations de l’axe digestif, sans doute au début de l’année 2015 ; les diverses investigations menées par un gastro-entérologue n’ont pas permis d’éclairer l’origine de ces troubles.

Le contexte d’asthénie, de troubles du sommeil, etc.. a orienté le diagnostic vers un tableau anxieux à manifestations psychosomatiques.

L’aggravation du tableau, l’apparition de difficultés dans l’accomplissement de ses obligations professionnelles ont amené le médecin traitant à prescrire un anxiolytique et un antidépresseur à dose modérée. Un arrêt de travail a été établi le 21 janvier 2016. À partir du 5 avril 2016, des consultations ont eu lieu auprès d’un psychiatre …

Depuis 2015, on peut retenir l’apparition insidieuse d’un tableau anxio-dépressif typique à manifestations anxieuses somatiformes.

On peut citer les symptômes cardinaux retrouvés définissant l’Etat Dépressif Majeur : tristesse, anhédonie, asthénie chronique, perturbations émotionnelles avec troubles du caractère et retrait social, altérations de l’attention et de la concentration.. idéations morbides (qui ont disparu).

Les autres pièces médicales produites font état :

– d’un état anxio-dépressif – épuisement professionnel (arrêt de travail initial du 21 janvier 2016 établi par le docteur [F]),

– de la persistance d’un syndrome anxieux dépressif (questionnaire médical rempli par le docteur [F]),

– d’une décompensation anxio-dépressive dans le cadre d’un burn out (arrêt de travail établi par le docteur [W] du 8 novembre 2017),

– d’un état dépressif majeur dans le cadre d’un burn out(arrêts de travail établis par le docteur [W] les 13 janvier 2017, 27 septembre 2017, et 6 mars 2018),

– d’un état dépressif majeur (rapport du docteur [Y] du 23 janvier 2018).

Le docteur [Y] précise que le 5 mars 2015, on repère une prescription d’anti-dépresseur (Seroplex 10) molécule qui aurait été prorogée jusqu’à l’ITT (21 janvier 2016), le 21 janvier 2016, son médecin traitant (docteur [F]) renforce la posologie du Seroplex (passant de 10 à 20mg) et ajoute de l’Alprazolam à dose modérée (0,75mg/jour), cette spécialité sera remplacée rapidement par un équivalent (Lysanxia 10 toujours à dose filée), le 5 avril 2016, M. [R] est adressé à un psychiatre de [Localité 7] (docteur [W]) qui va le suivre régulièrement, à partir du 19 avril 2017, l’antidépresseur Seroplex a été modifié au profit de la Venlafaxine (150mg), le lysanxia étant inchangé (30mg), lors de l’examen (23 janvier 2018), les soins spécialisés consistent en une consultation mensuelle chez le psychiatre et la prise d’un antidépresseur.

Au vu de ces éléments, M. [R] ne peut contester avoir présenté un état dépressif majeur, avoir été soigné pour cet état, avec mise en place d’un protocole thérapeutique avec notamment prescription d’un antidépresseur et suivi régulier auprès d’un psychiatre, de sorte que quant bien même un épuisement professionnel a pu être un élément déclenchant de cet état, c’est à bon droit que les premiers juges relèvent que l’état décrit par les docteurs [S] et [Y] dans leur rapport d’expertise, par ailleurs conforme aux constatations des docteurs [F] et [W], contrairement à ce qui est soutenu par l’appelant, entre dans le champ d’application de la clause 24 D litigieuse, laquelle vise de manière claire et non équivoque ‘ les dépressions et plus généralement les affections d’origine psychique ou névrotique, quelle s’en soit l’origine’, et ce par opposition, aux affections physiologiques.

La cour confirme le jugement déboutant M. [R] de ses demandes en paiement de deux mois de franchise et de prestations durant 790 jours, ce dernier ayant été rempli de ses droits après application de la clause 24D à sa situation.

Sur la demande indemnitaire formée contre l’AGIPI

Au soutien de celle-ci, M. [R] entend reprocher à l’AGIPI un comportement proche du harcèlement, lui réclamant à des intervalles très courts de fournir une attestation indiquant s’il avait liquidé ou non ses droits à retraite, des comptes rendus de consultations spécialisées, alors qu’il avait pleinement conscience que M. [R] était atteinte du syndrome de burn out et que la dépression, l’un des symptômes du burn out, rend difficile voire impossible l’accomplissement des actes du quotidien, ce qui a généré pour celui-ci un préjudice moral.

La cour souligne que M. [R] après avoir contesté avoir souffert d’une dépression, argue ici d’un tel état pour justifier l’existence d’un préjudice au regard des démarches particulièrement compliquées qu’il lui a été demandé de faire.

Aucune faute de l’AGIPI n’est mise en évidence, alors que la demande de prise en charge de l’incapacité de travail est soumise contractuellement à la fourniture de justificatifs à la demande de l’assureur. La cour confirme le rejet de cette prétention.

Sur les frais irrépétibles et les dépens

La cour confirme les dispositions du jugement à ce titre, et condamne M. [N] [R], qui succombe en son appel, aux dépens d’appel.

L’équité ne commande pas de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant publiquement, contradictoirement et par mise à disposition au greffe,

Confirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Y ajoutant,

Déboute l’AGIPI et la société Axa France Vie de leur demande de sommation de communiquer des pièces ;

Rejette les demandes formées en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [N] [R] aux dépens d’appel.

Le Greffier La Présidente

 


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