AFFAIRE PRUD’HOMALE
RAPPORTEUR
N° RG 19/07888 – N° Portalis DBVX-V-B7D-MWI6
[I]
C/
SARL VACUUM TECH
APPEL D’UNE DÉCISION DU :
Conseil de Prud’hommes – Formation paritaire de SAINT ETIENNE
du 05 Novembre 2019
RG : 17/00556
COUR D’APPEL DE LYON
CHAMBRE SOCIALE C
ARRÊT DU 17 NOVEMBRE 2022
APPELANT :
[G] [I]
né le 07 Mars 1971 à [Localité 6]
[Adresse 1]
[Localité 2]
représenté par Me Laetitia PEYRARD, avocat au barreau de SAINT-ETIENNE
INTIMÉE :
SARL VACUUM TECH
[Adresse 3]
[Localité 4]
représentée par Me Véronique DELMOTTE-CLAUSSE, avocat au barreau de THONON-LES-BAINS
DÉBATS EN AUDIENCE PUBLIQUE DU : 09 Juin 2022
Présidée par Thierry GAUTHIER, Conseiller magistrat rapporteur, (sans opposition des parties dûment avisées) qui en a rendu compte à la Cour dans son délibéré, assisté pendant les débats de Elsa SANCHEZ, Greffier.
COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :
– Nathalie PALLE, présidente
– Bénédicte LECHARNY, conseiller
– Thierry GAUTHIER, conseiller
ARRÊT : CONTRADICTOIRE
Prononcé publiquement le 17 Novembre 2022 par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues à l’article 450 alinéa 2 du code de procédure civile ;
Signé par Nathalie PALLE, Président et par Malika CHINOUNE, Greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
********************
FAITS, PROCEDURE ET PRETENTIONS DES PARTIES
M. [I] (le salarié) a été embauché par la société Vacuum tech (l’employeur), le 16 mai 2012, en qualité de vendeur et, en dernier lieu, de responsable de l’agence de [Localité 5] depuis mars 2014.
En arrêt de travail depuis le 26 juin 2015, il a saisi le 20 novembre 2017 le conseil de prud’hommes de Saint-Etienne aux fins de règlement de ses heures supplémentaires et de résiliation du contrat de travail aux torts de l’employeur.
Son arrêt de travail s’étant terminé le 22 janvier 2018 et le salarié ayant été déclaré définitivement inapte à son poste et à tout poste dans l’entreprise par la médecine du travail les 29 janvier et 2 février 2018, l’employeur l’a convoqué à un entretien préalable puis a procédé à un licenciement pour inaptitude le 27 février 2018.
Par jugement du 5 novembre 2019, le conseil de prud’hommes a :
– dit que le licenciement du salarié repose sur une cause réelle et sérieuse ;
– dit qu’il n’y a pas eu harcèlement moral de la part de l’employeur ;
– débouté le salarié de sa demande de résiliation judiciaire ;
– condamné l’employeur à verser au salarié les sommes suivantes :
– 375,31 euros bruts à titre du rappel de salaire sur minimum conventionnel ;
– 37,53 euros bruts à titre des congés payés sur rappel minimum conventionnel ;
– 69 euros brut à titre de rappel d’indemnité de licenciement sur rappel de rémunération conventionnel ;
– 5 307, 03 euros nets à titre d’indemnité de prévoyance non perçue du 24 septembre 2015 au 24 janvier 2016 ;
– 1 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour préjudice subi antérieurement à la rupture du contrat de travail ;
– dit que les intérêts légaux porteront à compter du 30 novembre 2017, pour les condamnations au titre de rappel de salaire conventionnel et congés payés afférents, sur le rappel d’indemnités de licenciement ainsi que sur le rappel d’indemnités de prévoyance ;
– débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires et congés payés afférents ;
– débouté le salarié de sa demande à titre d’indemnité compensatrice de préavis ;
– débouté le salarié de sa demande à titre de dommages et intérêts pour perte de prestations de sécurité sociale et de prévoyance ;
– débouté le salarié de sa demande à titre d’indemnité pour travail dissimulé ;
– débouté le salarié de sa demande à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse ;
– condamné l’employeur, pris en la personne de son représentant légal, à verser au salarié la somme de 1 500 euros net au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– laissé a totalité des dépens à la charge de l’employeur.
Par déclaration d’appel effectuée au RPVJ, le salarié a relevé appel de cette décision.
Dans ses conclusions n° 2 notifiées le 12 avril 2021, le salarié demande à la cour de :
– confirmer le jugement en ce qu’il a condamné la société à lui verser les sommes suivantes:
– 375,31 euros brut à titre du rappel de salaire sur minimum conventionnel ;
– 37,53 euros brut à titre des congés payés sur rappel minimum conventionnel ;
– 69 euros brut à titre de rappel d’indemnité de licenciement sur rappel de rémunération conventionnel ;
– 5 307, 03 euros net à titre d’indemnité de prévoyance non perçue du 24 septembre 2015 au 24 janvier 2016 ;
– réformer le jugement pour le surplus et, statuant à nouveau :
– prononcer la résiliation judiciaire du contrat du travail du salarié au 27 février 2018 ;
– subsidiairement, déclarer son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse ;
– condamner l’employeur à lui verser les sommes suivantes :
– rappel d’heures supplémentaires : 15 389,02 euros ;
– congés payés sur heures supplémentaires : 1 538,90 euros
– rappel d’indemnité de licenciement sur rappel de rémunération:3 022,86 euros ;
– indemnité compensatrice de préavis : 10 305,70 euros ;
– congés payés sur préavis : 1 030,57 euros ;
– dommages-intérêts pour préjudice subi antérieurement à la rupture du contrat de travail : 20 000 euros ;
– dommages-intérêts pour perte de droit à repos compensateurs : 4 000 euros ;
– dommages-intérêts pour perte de prestations de sécurité sociale et de prévoyance : 60 000 euros ;
– indemnité pour travail dissimulé : 30 917,10 euros ;
– dommages-intérêts pour licenciement nul ou dépourvu de cause réelle et sérieuse : 36 000 euros ;
– dire que la moyenne des trois derniers mois de salaire s’élève à 5 152,85 euros ;
– condamner l’employeur au paiement de la somme complémentaire de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Dans ses conclusions notifiées le 13 mai 2020, l’employeur demande à la cour de :
– dire et juger le salarié irrecevable et mal fondé en son appel du jugement ;
– confirmer le jugement en ce qu’il a :
‘ dit que le licenciement du salarié repose sur une cause réelle et sérieuse ;
‘ dit qu’il n’y a pas eu harcèlement moral de la part de l’employeur ;
‘ débouté le salarié de sa demande de résiliation judiciaire ;
‘ débouté le salarié de sa demande de rappel de salaire pour heures supplémentaires et congés payés afférents ;
‘ débouté le salarié de sa demande à titre d’indemnité compensatrice de préavis;
‘ débouté le salarié de sa demande à titre de dommages et intérêts pour perte de prestations de sécurité sociale et de prévoyance ;
‘ débouté le salarié de sa demande à titre d’indemnité pour travail dissimulé ;
‘ débouté le salarié de sa demande à titre de dommages-intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse ;
– réformer le jugement entrepris pour le surplus en ce qu’il a :
– condamné l’employeur à verser au salarié les sommes suivantes :
– 375,31 euros bruts à titre du rappel de salaire sur minimum conventionnel ;
– 37,53 euros bruts à titre des congés payés sur rappel minimum conventionnel ;
– 69 euros bruts à titre de rappel d’indemnité de licenciement sur rappel de rémunération conventionnel ;
– 5 307, 03 euros nets à titre d’indemnité de prévoyance non perçue du 24 septembre 2015 au 24 janvier 2016 ;
– 1 000 euros nets à titre de dommages-intérêts pour préjudice subi antérieurement à la rupture du contrat de travail ;
– dit que les intérêts légaux porteront à compter du 30 novembre 2017, pour les condamnations au titre de rappel de salaire conventionnel et congés payés afférents, sur le rappel d’indemnités de licenciement ainsi que sur le rappel d’indemnités de prévoyance ;
– condamné l’employeur à verser au salarié la somme de 1 500 euros nets au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;
– laissé la totalité des dépens à la charge de l’employeur ;
Statuant à nouveau :
– dire et juger irrecevables comme prescrites les demandes au titre des manquements liés à l’exécution du contrat de travail sur le fondement des dispositions de l’article L.1471-1 du code du travail,
– débouter le salarié de l’intégralité de ses demandes, fins et prétentions,
A titre subsidiaire, si par impossible la cour devait estimer que la rupture du contrat de travail du salarié est abusive :
– fixer le salaire mensuel brut moyen à la somme de 3 194 euros par mois,
– limiter l’indemnité de préavis à la somme de 6 388 euros, outre 638,80 euros au titre des congés payés y afférents,
– limiter les dommages-intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse à la somme de 3 mois de salaire, le salarié ne justifiant pas du préjudice subi,
– condamner le salarié à lui payer la somme de 2 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 10 mai 2022.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il y a lieu de se reporter aux conclusions des parties ci-dessus visées, pour un exposé plus ample des prétentions et moyens des parties.
MOTIFS DE LA DECISION
Sur l’irrecevabilité des demandes liées à l’exécution du contrat de travail pour cause de prescription
L’employeur invoque les dispositions de l’article L. 1471-1 du code du travail et la prescription biennale. Il fait valoir qu’ayant été placé en arrêt de travail ininterrompu le 26 juin 2015, le salarié n’a saisi le conseil de prud’hommes que le 20 novembre 2017, de sorte que, en dehors de la demande concernant le harcèlement moral, ses demandes concernant la période antérieure au 20 novembre 2015 sont prescrites. Il considère que, le contrat de travail ayant été suspendu depuis le 26 juin 2015, toutes les demandes du salarié sont prescrites, à l’exception des manquements qu’il rattache à la période d’arrêt de travail.
Le salarié ne présente aucun moyen de droit ou de fait à cet égard.
La cour relève cependant que, en ce qui concerne la demande de résiliation du contrat de travail, l’action en résiliation, formée le 30 novembre 2017, alors que le contrat de travail était en cours d’exécution n’est atteinte par aucune prescription.
Au surplus, en ce qui concerne les moyens invoqués par le salarié à l’appui de sa demande en résiliation, il sera rappelé qu’il résulte de l’article L. 1231-1 du code du travail que le juge, saisi d’une demande de résiliation judiciaire du contrat de travail, doit examiner l’ensemble des griefs invoqués au soutien de celle-ci, quelle que soit leur ancienneté. Aucun moyen soulevé par le salarié ne saurait dès lors être écarté en raison de son ancienneté.
La demande subsidiaire visant à ce que le licenciement pour inaptitude soit déclaré privé de cause réelle et sérieuse, formée également dans le cours de l’instance prud’homale, et après le prononcé du licenciement, survenu le 27 février 2018, n’est pas plus atteinte de prescription.
Les demandes en versement de dommages-intérêts afférentes ne sont pas affectées par la prescription invoquée par l’employeur.
En outre, en ce qui concerne les demandes relatives à l’exécution du contrat de travail, il y a lieu de constater que le salarié forme des demandes à caractère salarial qui échappent aux dispositions de l’article L. 1471-1 du code du travail, mais sont soumises, comme l’ont d’ailleurs relevé les premiers juges, aux dispositions de l’article L. 3245-1 du code du travail et à la prescription triennale qu’il prévoit.
La fin de non-recevoir invoquée par l’employeur doit être dès lors rejetée.
Sur les heures supplémentaires et le repos compensateur
A titre infirmatif, le salarié soutient qu’il commençait à 7 h 30 et finissait à 20 h 00, sans compter les sollicitations de ses supérieurs en dehors des heures de travail.
Sur la base d’un travail six jours par semaine, avec une pause méridienne, il estime avoir accompli 65 heures par semaines, soit 8 heures majorées à 25 % et 22 heures majorées à 50 %, soit un total hebdomadaire de 496,42 euros, ce qui porte sa demande, pour la période de novembre 2014 à juin 2015, à 15 389,02 euros, outre congés payés (1 538,90 euros).
Il soutient que ces heures supplémentaires dépassaient largement le contingent annuel et il chiffre à 210 les heures hors contingent en 2014 et à 500 les heures hors contingent en 2015, ce qui représente (à hauteur de 50 %) 355 heures de repos compensateur et un salaire de (355 X 11,5448 =) 4 098,40 euros.
Il demande à ce titre le versement de la somme de 4 000 euros.
A titre confirmatif, l’employeur soutient que le salarié était soumis aux horaires collectifs de travail, soit de 8 h 30 à 12 h et de 14 h à 17 h 30, du lundi au vendredi, soit 35 heures par semaine et que seuls les heures accomplies à la demande de l’employeur peuvent donner lieu à rémunération. Il conteste que le salarié ait pu, comme il le prétend, avoir travaillé à sa demande de 7 h 30 à 22 heures six jours par semaine.
Il verse aux débats un tableau des horaires de travail qui ne prévoit aucun horaire le samedi matin, créneau qui a pu être utilisé mais uniquement pour des téléprospectrices. Il précise que le tableau concerne les horaires de l’agence de [Localité 5], dont le salarié est parti en 2014 et au sein de laquelle il exerçait les fonctions de vendeur à domicile indépendant (VDI), rappelant que le salarié était directeur à [Localité 6] depuis septembre 2014. Il conteste la valeur probante des attestations produites par le salarié, ne faisant pas état de ce qu’ils ont personnellement constaté.
Il considère que les relevés ou photos de sms sont dénués de valeur probante et que, au surplus, ils ne démontrent pas les horaires de travail du salarié.
Il produit des attestations qui, selon lui, contredisent les dires du salarié quant à ses horaires.
Il indique que le salarié n’avait aucune contrainte particulière pour envoyer les résultats des ventes de la semaine à la direction, qu’il pouvait envoyer le matin, vers 8 heures, mais de sa seule initiative.
A titre subsidiaire, il considère les demandes du salarié exorbitantes.
La cour retient qu’il résulte des dispositions de l’article L. 3171-4 du code du travail qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suf’samment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies a’n de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires applicables, notamment les articles L. 3171-2 et L. 3171-3 du code du travail et, après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.
La cour rappelle, comme l’indique d’ailleurs lui-même le salarié dans ses écritures, que sa demande ne peut prospérer que pour les heures supplémentaires qu’il accomplies dans les limites du délai de prescription triennale, soit entre novembre 2014 et novembre 2017, mois durant lequel il a introduit son action devant le conseil de prud’hommes, et, ce, en application de l’article L. 3245-1 du code du travail.
Il doit être en outre rappelé que, chronologiquement, le salarié, est devenu responsable de l’agence de [Localité 5] en mars 2014, puis de celle de [Localité 6] en septembre 2014 et qu’il a été placé en arrêt de travail du 26 juin 2015 jusqu’à son licenciement pour inaptitude non-professionnelle, le 27 février 2018.
Ses demandes à ce titre ne sont dès lors recevables que pour la période de novembre 2014 à juin 2015.
La cour relève que le salarié soutient avoir effectué en moyenne trente heures supplémentaires par semaine pour la période considérée.
Le salarié produit des copies de courriels adressés par ses soins en fin de journée, pour partie durant la période non-prescrite (pièce n° 52), pour l’essentiel, entre 17 et 20 heures.
Toutefois, il n’établit aucun récapitulatif hebdomadaire ou mensuel des heures qu’il aurait effectuées durant la période non prescrite, qu’il évalue ainsi forfaitairement.
Les éléments que le salarié invoque de manière générale – sans en préciser le sens particulier dans ses écritures – sont constitués de documents qui ne mentionnent pas la date des faits dont ils doit rapporter l’existence (pièce n° 10, 11, 12, 13, 16, 17, 18, 19, 20, 22), qui concernent des périodes couvertes par la prescription susvisée (attestation : pièce n° 14), parfois en partie (pièces n° 49, 52), ou qui sont insuffisamment précises quant à la période qu’elles couvrent ou les horaires qui ont pu être réalisés par le salarié (attestations : pièces n° 15, 25, 27, 28, 29, 30, 31).
Certains documents n’apportent aucun élément concernant les heures supplémentaires accomplies par le salarié (attestation : pièce n° 26, 30, 31).
Le salarié produit en outre des pièces qui, en l’insuffisance d’indication de leur provenance ou de leurs conditions d’établissement, ou d’explicitation, n’apparaissent pas suffisamment précises pour révéler la réalisation d’heures supplémentaires (pièces n° 46, 48).
Il sera noté à cet égard que, le salarié joignant dans certaines pièces (pièce n° 49) de très nombreux documents, de natures différentes (la pièce n° 49 mélange ainsi des courriels et des photographies), sans les identifier précisément dans son bordereau de communication de pièces, ne met pas la cour en situation de retenir ces documents à l’égard de sa demande.
En cet état, la cour considère que le salarié ne produit pas d’éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies a’n de permettre à l’employeur d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments.
La demande en paiement d’heures supplémentaires doit donc être rejetée.
La demande pour indemnisation du repos compensateur non pris doit être également rejetée.
La décision de première instance est confirmée de ces chefs.
Sur le travail dissimulé
Le salarié soutient que l’employeur l’a traité comme un cadre en forfait jours alors qu’il n’était qu’un simple agent de maîtrise, ce qui traduit le caractère intentionnel de l’absence de mention, sur les bulletins de salaires, de toutes les heures accomplies au-delà de la durée légale, ce qui justifier l’allocation de l’indemnité pour travail dissimulé de 6 mois de salaires, soit 30 917,10 euros.
L’employeur soutient que le salarié ne démontre pas le caractère volontaire de la dissimulation d’emploi de la part de l’employeur et que sa demande doit être rejetée.
La cour relève qu’en l’absence de condamnation de l’employeur à verser au salarié des sommes au titre des heures supplémentaires non rémunérées, cette demande n’est nécessairement pas fondée.
Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur le rappel de salaire sur classification
A titre infirmatif, l’employeur estime que cette demande est infondée, dans la mesure où le salarié percevait tous les mois des commissions importantes, de sorte que son salaire moyen, entre juillet 2014 et juin 2015, était de 3 194 euros par mois, supérieur au minimum conventionnel.
A titre confirmatif, le salarié revendique l’application du minimum conventionnel du niveau 6, et non 2.2, de la convention collective nationale de la distribution directe, ce qui correspond aux premiers postes de responsable d’une structure ou d’un service, soit 1 751 euros par mois en 2014 et 2015.
En appliquant ce salaire à compter de novembre 2014, compte tenu de la prescription de trois ans, il estime pouvoir prétendre à un rappel de (1 751 – 1 703,25 X 7,86 mois =) 375,31 euros, outre congés payés afférents (37,53 euros).
La cour approuve les premiers juges en ce qu’ils ont déduit des fonctions réellement exercées par le salarié, responsable d’agence, telles qu’elles découlent de l’avenant du 1er septembre 2014, qu’elles correspondent au niveau 6, agent de maîtrise de la convention collective nationale des commerce de détail non alimentaires et que, en conséquence et en application de l’accord du 13 novembre 2013 relatif à la revalorisation de la rémunération minimale, le salarié devait percevoir un salaire conventionnel minimal de 1 751 euros par mois.
Il en résulte que le salaire contractuel prévu ne peut être inférieur à ce minima.
Or, il est constant que, au titre de son contrat de travail, le salarié percevait non seulement un salaire de base mais également des commissions.
L’examen des fiches de paye pour la période de novembre 2014 à juin 2015, le salarié a perçu un salaire brut qui a été toujours supérieur au minimum conventionnel susvisé.
Les demandes du salarié de ce chef doivent être rejetées et le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur le manque à gagner au titre des indemnités de sécurité sociale et de prévoyance
Le salarié soutient qu’en raison du non-paiement des heures supplémentaires, il a subi un manque à gagner au titre des indemnités de sécurité sociale et des indemnités de prévoyance destinées à lui assurer un maintien de salaire. Il chiffre ce manque à gagner en fonction du rappel mensuel d’heures supplémentaires, soit 496,42 X 4,33 = 2 134,60 euros par mois, ce qui représente sur toute la durée de son arrêt de travail de 31 mois, la somme de 66 6172,60 euros.
Il demande à ce titre la somme de 60 000 euros.
La cour retient qu’en ce qu’elle est basée sur l’accomplissement d’heures supplémentaires qui ont été rejetées plus avant, cette demande est nécessairement non fondée.
Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur le rappel de l’indemnité de licenciement
A titre réformatif, le salarié soutient qu’il avait au moment du licenciement, une ancienneté de 5 ans, 9 mois et 12 jours, soit 5,78 ans et que son indemnité de licenciement devait être égale à : 5,78 X 1/4 X 5 152,85 = 7 445,86 euros.
Il indique que le cumul du salaire versés entre juin 2014 et mai 2015 s’élève à 35 644,23 euros, soit une moyenne mensuelle de 2 970,35 euros mais que, compte tenu du rappel mensuel de salaire de base de 47,75 euros, et d’un rappel d’heures supplémentaires mensuel de 496,42 par semaine, soit 2 134,60 euros par mois, son salaire mensuel de référence doit être fixé à 5 152,85 euros.
N’ayant perçu que la somme de 4 423 euros, il s’estime créancier de la somme de 3 022,86 euros.
La cour relève que, ayant rejeté la demande du salarié au titre des heures supplémentaires ainsi que celle formée au titre du rappel de salaire conventionnel, cette demande est nécessairement mal fondée et doit être rejetée.
Le jugement, qui avait alloué à ce titre au salarié la somme de 69 euros, est infirmé de ce chef.
Sur le rappel de l’indemnité de prévoyance
A titre infirmatif, l’employeur estime que cette demande ne peut être dirigée contre lui puisque c’est l’organisme de prévoyance qui doit verser ces indemnités. Il indique que l’organisme de prévoyance prend la suite des indemnités journalières de la sécurité sociale au bout de trois mois, ce qui résulte des conditions générales du contrat.
A titre confirmatif, le salarié fait valoir que le délai de franchise était de trois mois et non de six mois comme appliqué par l’employeur. Retenant que les prestations de la société Generali sont de 57,71 euros par jour, il estime pouvoir revendiquer le versement de cette indemnité entre le 24 septembre 2015 et le 24 janvier 2016, soit la somme de 5 367,03 euros.
La cour retient qu’il n’est plus débattu que le délai de carence de l’organisme de prévoyance était de 90 jours, de sorte que le salarié, placé en arrêt de travail le 26 juin 2015, pouvait prétendre au versement des indemnités contractuelles à compter du 25 septembre 2015.
Le salarié indique n’avoir perçu ces prestations qu’à compter du 25 janvier 2016, à défaut pour l’employeur d’avoir transmis les éléments à la prévoyance.
Pour autant, le débiteur du versement des indemnités n’est pas l’employeur mais l’organisme de prévoyance.
La demande du salarié visant à ce que l’employeur, dont il n’est pas soutenu ni justifié à hauteur d’appel qu’il ait perçu les indemnités correspondantes, soit tenu à assurer personnellement cette prestation, n’est dès lors pas fondée.
La demande du salarié sera rejetée et le jugement sera infirmé de ce chef.
Sur la fixation du salaire moyen des trois derniers mois
Le salarié soutient qu’il avait au moment du licenciement, une ancienneté de 5 ans, 9 mois et 12 jours, soit 5,78 ans et que son indemnité de licenciement doit être égale à : 5,78 X 1/4 X 5 152,85 = 7 445,86 euros.
Il indique que le cumul du salaire versés entre juin 2014 et mai 2015 s’élève à 35 644,23 euros, soit une moyenne mensuelle de 2 970,35 euros mais que, compte tenu du rappel mensuel de salaire de base de 47,75 euros, et d’un rappel d’heures supplémentaires mensuel de 496,42 par semaine, soit 2 134,60 euros par mois, le salaire de référence des trois derniers mois doit être fixé à 5 152,85 euros.
L’employeur soutient que le salaire du salarié a été, entre juillet 2014 et juin 2015, commissions comprises, de 38 329 euros, soit un salaire mensuel brut moyen de 3 194 euros.
La cour relève que, en l’état du rejet des demandes du salarié relatives aux heures supplémentaires et du rappel de salaire conventionnel, cette demande est nécessairement mal fondée.
Sur le harcèlement moral et la rupture du contrat de travail
La cour note que le salarié soutient tout d’abord que l’employeur a fait preuve de harcèlement moral à son égard, ce qui l’amène à former une demande indemnitaire à ce titre, avant de reprendre les éléments constitutifs du harcèlement qu’il retient pour considérer qu’ils constituent également des manquements graves de l’employeur à ses obligations justifiant la résiliation judiciaire du contrat de travail.
A titre infirmatif, le salarié fait ainsi valoir qu’il a subi une charge de travail excessive dans un climat de pression et de mépris, ayant entraîné une détérioration durable de son état de santé, ce qui caractérise une situation de harcèlement moral, résultant des méthodes de gestion de ses supérieurs hiérarchiques.
Il fait particulièrement état de sa charge de travail, qui comprenait le démarchage, les visites de service après-vente, le nettoyage de l’agence outre, en application de son contrat de travail, la définition des orientations stratégiques de l’agence, l’organisation et la mise en place des modalités de fonctionnement de la structure, la supervision des ressources humaines, la gestion des moyens budgétaires et matériels de la structure ou la planification des opérations financières, le suivi et l’analyse des données d’activité du service et la proposition d’axes d’évolution, la communication des résultats à sa hiérarchie ou aux partenaires. Il en conclut que sa charge de travail était inadaptée et qu’il devait effectuer de nombreuses heures supplémentaires, étant obligé de commencer ses journées à 7 h 30.
Il indique que son manager, M. [X], lui mettait une pression et n’exerçait aucun droit à la déconnexion, le sollicitant notamment en dehors des heures normales de travail, cette pression résultant d’ailleurs du gérant de la société, M. [W], organisant ainsi un management par objectifs intensifs, générateur de stress et impliquant des dépassements d’horaires dans des proportions excessives.
Il précise n’avoir jamais passé de visite auprès de la médecine du travail.
Il soutient que ces manquements ont perduré durant son arrêt de travail, ses compléments de salaires étant payés avec retard et les indemnités de prévoyance n’étant versées qu’avec irrégularité et retard.
L’employeur réplique qu’il appartient au salarié de prouver le comportement fautif de l’employeur, qui doit être d’une gravité suffisante pour justifier la rupture du contrat de travail et ont rendu impossible la poursuite du contrat de travail, ce qui implique que les faits ne doivent pas être pour la plupart anciens.
Concernant le harcèlement moral, il fait valoir que le salarié a travaillé sous l’autorité de M. [X] qu’à compter de septembre 2014, lorsqu’il a été affecté à l’agence de [Localité 6].
Il conteste la nature des fonctions exercées par le salarié, lui déniant l’activité de réalisation des ventes, de service après-vente, son travail se concentrant sur l’activité de l’agence et sa rémunération variable ne dépendant pas des ventes effectuées par lui-même mais celle des vendeurs de l’agence. Il précise qu’il percevait ainsi chaque mois des commissions sur ses ventes, portées sur ses bulletins de salaires.
Il soutient que le salarié était soumis aux horaires collectifs de travail, soit de 8 h 30 à 12 h et de 14 h à 17 h 30, du lundi au vendredi, soit 35 heures par semaine et que seules les heures accomplies à la demande de l’employeur peuvent donner lieu à rémunération. Il conteste que le salarié ait pu, comme il le prétend, travailler de 7 h 30 à 22 heures six jours par semaine.
Il considère que le salarié ne rapporte pas la preuve des propos dénigrants et de la pression professionnelle qui lui était appliquée, les sms non datés et non authentifiés qu’il produit devant être écartés des débats. Il estime que les documents internes produits par le salarié ne sont que destinés à motiver les vendeurs et que le salarié fait abstraction des compliments.
Il soutient que le salarié entretenait de bons rapports avec ses supérieurs hiérarchiques.
Il fait valoir que le salarié n’a jamais adressé à ses supérieurs des revendications sur ses conditions de travail ou sur les prétendues pressions dont il aurait été victime. Il contredit le salarié quant à la qualité des relations de travail.
Il considère que si ses bulletins de salaires visent la convention collective nationale des commerces de détail non alimentaires et non celle de la distribution directe aux particuliers, c’est une simple erreur de son expert-comptable.
Il soutient que le contrat de travail du salarié indiquait effectivement [Localité 5] comme lieu de travail mais prévoyait une affectation différente.
Il conteste que la retenue de salaire d’avril 2015, de 7 heures, ne corresponde pas à une absence non rémunérée, ce qui n’avait fait l’objet d’aucune contestation.
Il estime que le salarié, responsable d’agence, devait également organiser ses propres visites à la médecine du travail et précise que le seul défaut d’organisation de ces visites, par négligence, ne constitue pas un motif suffisamment grave pour empêcher la poursuite du contrat de travail.
Il fait valoir que le salarié ne démontre aucun manquement récent justifiant de la résiliation judiciaire du contrat de travail.
Sur le harcèlement moral
La cour rappelle qu’aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation de ses conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel.
L’article L. 4121-1 dispose que l’employeur est tenu de prendre les mesures nécessaires pour assurer la sécurité et protéger la santé physique et mentale des travailleurs.
Il résulte de la combinaison de l’article L. 1152-1 susvisé et de l’article L. 1154-1 du code du travail, en sa rédaction applicable à l’espèce, que pour se prononcer sur l’existence d’un harcèlement moral , il appartient au juge d’examiner l’ensemble des éléments invoqués par le salarié, en prenant en compte les documents médicaux éventuellement produits, et d’apprécier si les faits matériellement établis, pris dans leur ensemble, permettent de présumer l’existence d’un harcèlement moral au sens de l’article L. 1152-1 du code du travail. Dans l’affirmative, il revient au juge de vérifier si l’employeur prouve que les agissements invoqués ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que ses décisions sont justifiées par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.
Un acte isolé et unique ne peut pas constituer un harcèlement moral, quand bien même cet acte se serait maintenu dans le temps.
La cour relève que le salarié fait tout d’abord état de sa charge de travail et de la réalisation de nombreuses heures supplémentaires.
Il relie au demeurant l’un avec l’autre, estimant que ses fonctions, trop lourdes, lui imposaient de réaliser des heures supplémentaires.
Concernant l’accomplissement d’heures supplémentaires, Il a été retenu précédemment que, pour la période de novembre 2014 à juin 2015, il ne pouvait être considéré que le salarié justifiait d’une créance d’heures supplémentaires.
Pour la période antérieure à celle pour laquelle il demande le paiement d’heures supplémentaires, non couverte par la prescription au regard du grief de harcèlement moral, il ne précise pas dans ses écritures quelle était l’importance de ces heures supplémentaires.
Le salarié ne fait état que de considérations générales, ou, à l’inverse, de faits ponctuels qui ne permettent pas déterminer la réalité des heures supplémentaires qu’il a pu effectuer habituellement, tel qu’il s’en prévaut.
Par exemple, il soutient qu’il était tenu de débuter ses journées de travail à 7 h 30 afin de rendre compte des chiffres réalisés la veille, ou encore d’être sollicité par ses vendeurs, lui rendant eux-mêmes compte de leurs ventes, à des heures tardives.
L’une des attestations qu’il produit (pièce n° 14) à cet égard n’est pas pertinente dans la mesure où elle vise une période de 2012 et 2013, antérieure à la période où le salarié est devenu responsable, et où elle ne vise pas particulièrement la situation du salarié.
Dans une autre attestation (pièce n° 15), un ancien vendeur de l’entreprise qui décrit les horaires du salarié au bureau de [Localité 5] – qu’il a occupé de mars à septembre 2014 – comme arrivant à 7 h 30 et partant souvent vers 22 heures et de ce qu’il lui rendait compte de ses ventes, parfois après 22 heures.
Il doit être noté néanmoins que le vendeur n’explicite pas les conditions dans lesquelles il a pu lui-même se convaincre des horaires de travail du salarié, ce qui aurait notamment supposé qu’il ait les mêmes.
Le salarié soutient qu’il était tenu d’adresser les résultats de la veille tous les matins, à 7 h 30. Cependant, le document qu’il produit à cette fin (pièces n° 48 et 49, laquelle comporte aussi des photographies, non explicitées), amène à constater l’envoi de fichiers plutôt aux alentours de 8 h 00 du matin et, parfois beaucoup plus tardivement.
En outre, alors qu’il produit de nombreux courriels de sa messagerie professionnelle, le salarié ne fait état précisément d’aucun des messages adressés par des vendeurs, le soir, pour lui rendre compte des ventes réalisées.
Par ailleurs, le salarié produit un exemplaire d’un document qu’il indique avoir été affiché dans l’entreprise précisant la possibilité de travail le samedi matin (pièce n° 44). Cependant, cela ne saurait suffire pour établir que le salarié travaillait le samedi.
Le salarié, pour justifier des sollicitations professionnelles durant le week-end, se prévaut également de l’analyse des chiffres de son employeur (pièce n° 45), qui nécessiteraient une communication des chiffres par les agences durant le week-end. Toutefois, les documents qu’il produit dans cette pièce paraissent parfois mensuels et il ne ressort pas en tout cas que les responsables d’agence étaient sollicités nécessairement durant leurs jours de repos pour fournir leurs chiffres à l’employeur.
A cette même fin, le salarié produit une liste de fichiers de résultats ou de chiffres, horodatés (pièce n° 46), sans l’expliciter ni justifier de ce qu’elle lui semble justifier.
Il doit être dès lors considéré que le salarié ne parvient pas à établir la matérialité des heures supplémentaires qu’il revendique pour la période antérieure au mois de novembre 2014, sa demande pour la période postérieure ayant été considérée comme non-fondée.
La matérialité de ces faits n’est pas établie.
Concernant la lourdeur des tâches qui lui étaient confiées, le salarié dresse la liste des tâches qui lui incombaient et qu’il estime trop importantes.
Tout en indiquant qu’il avait, contre les prévisions de son contrat de travail et ce que soutient l’employeur, une activité directe auprès de la clientèle, il ne produit aucun justificatif de rendez-vous pris avec un client particulier.
La pièce n° 42 produite par le salarié établit en revanche qu’il a pu être chargé, mais il ne l’établit que pour une occurrence seulement, d’effectuer le service après-vente, contrairement à ce que soutient l’employeur.
Le salarié fait état des tâches résultant de ses fonctions d’encadrement des vendeurs, ce qui paraît conforme avec les stipulations de son contrat de travail, mais n’apporte aucun élément précis quant à la charge horaire que cette fonction représentait.
A cet égard, et une nouvelle fois, il ne justifie pas avoir été appelé ou avisé tardivement dans la journée par les vendeurs.
Le salarié n’établit la matérialité des faits qu’il allègue sur ce point.
En outre, en l’absence de démonstration suffisante de ce que les heures normalement rémunérées ne suffisaient pas à accomplir ces tâches, il ne peut être retenu que le salarié établisse matériellement qu’il était investi d’un nombre excessif de tâches ou de fonctions. Au demeurant, il sera noté que le salarié n’invoque, ni ne justifie d’aucune alerte adressée à l’employeur sur ce point.
Concernant les méthodes managériales de l’employeur, le salarié justifie de la réalité de ce que, à trois reprises, l’employeur se soit adressé à lui dans des termes inadaptés (pour lui enjoindre de conserver son portable, même lorsqu’il se rend aux toilettes : pièce n° 17), ou encore de la réponse de l’employeur à la demande d’absence du salarié, pour des raisons médicales (« l’employeur répondant : je n’ai pas le choix »).
Il justifie par ailleurs de ce que, dans certains des messages qu’il adressait quotidiennement à ses responsables d’agence, l’employeur a, à six reprises, tenu des propos stigmatisants, et d’une certaine façon disqualifiants (les 8 avril, 25 septembre, 15 octobre, 22 octobre 2014 et 20 janvier, 7 mai et 26 mai 2015, tels que visés dans les écritures du salarié, p. 9).
Ces faits sont matériellement établis.
En revanche, le salarié s’appuie sur la pièce n° 10 pour soutenir que l’employeur lui a demandé des comptes des conditions de réalisation du ménage dans les locaux professionnels un samedi. Cependant, cette pièce, qui correspond à la reproduction de messages communiqués par smartphone, ne fait qu’indiquer que l’employeur a demandé au salarié de l’appeler.
Les faits soutenus par le salarié ne sont pas matériellement établis.
Concernant une forme « d’imprécision statutaire », le salarié fait valoir une erreur sur son bulletin de salaire mentionnant une convention collective erronée.
Cette erreur est matériellement établie.
Le salarié fait valoir que son contrat de travail prévoyait comme lieu de travail [Localité 5] mais qu’il indiquait également la possibilité d’affectation différente, de sorte qu’il a été muté en septembre à l’agence de [Localité 6].
Ces faits ne sont pas contestés et sont établis.
Le salarié indique en outre que 7 heures de travail lui ont été enlevées en avril 2015 (pièce n° 24). Cette mention figure sur la fiche de paye correspondante.
Ces différents faits sont donc matériellement établis.
Concernant l’absence de visite auprès du médecin du travail. L’employeur ne conteste pas ce fait et il n’est en tout cas pas justifié d’une telle visite.
Ce fait est matériellement établi.
Sur les troubles de santé, le salarié invoque l’aggravation de problème osseux et paradontaux. Le certificat qu’il produit (pièce n° 33) atteste de cette pathologie.
Le fait allégué est matériellement établi.
Il convient de relever à cet égard que le salarié produit une attestation de son épouse qui indique que le salarié était complètement absorbé par ses fonctions.
Elle fait état des griefs repris par le salarié concernant ses horaires de travail et les sollicitations pour le travail en dehors de ses horaires. Toutefois, la nature des relations entre le témoin et le salarié, de même que l’absence de pièces extérieures permettant de retenir la matérialité de ces faits, comme ci-dessus évoqués, conduisent à ne pas retenir cette attestation comme permettant d’établir les faits qu’elle indique.
Sur l’attitude de l’employeur durant l’arrêt de travail,
Le salarié soutient, mais par seules affirmations que l’employeur a réglé les compléments de salaires en retard « entre janvier 2016 et l’été 2015 » (sic).
Il indique également avoir subi une carence de 4 mois, de septembre 2015 à janvier 2016, avant la prise en charge par le régime de prévoyance et avoir perçu des indemnités avec irrégularités et retard.
Le salarié cite et produit à cet égard différentes pièces (n° 34, 35 et 36, ce dernier étant un tableau établi par ses soins), sans les expliciter et sans qu’il en résulte manifestement la réalité des faits qu’il allègue.
La matérialité des faits invoqués n’est pas établie.
Le salarié soutient également que l’employeur lui a annoncé qu’il serait affecté à [Localité 5], à son retour d’arrêt de travail et qu’il a indiqué dans un courriel du 14 janvier 2016 à l’employeur qu’il s’étonnait de cette possibilité. La réalité de ce fait ne repose que sur le courriel produit par le salarié auquel, selon ce document, l’employeur répond en indiquant qu’il n’a « encore pris aucune décision » et qu’il est prêt à en discuter avec le salarié. Le fait allégué, consistant dans une affectation du salarié lors de son retour d’arrêt de travail sur un poste qu’il ne souhaitait pas, ne peut être considéré comme établi.
Sur l’ensemble des faits matériellement établis.
Il résulte de ce qui précède que le salarié établit la matérialité de ce que l’employeur a pu avoir des pratiques managériales particulières à différentes reprises, de ce qu’il l’a affecté à [Localité 6] alors que son contrat de travail prévoyait son affectation à [Localité 5] et permettait donc la possibilité de son retour à cette agence, qu’il a commis une erreur concernant le visa de la convention collective nationale applicable dans les fiches de paye et déduit 7 heures de travail en avril 2015 et n’a pas fait passer de visite médicale au salarié tandis que le salarié a connu des troubles de santé (d’ordre parodontal).
Il convient de relever que :
– le changement d’affectation de [Localité 5] à [Localité 6] n’a pu être un facteur d’insécurité statutaire puisque le salarié reconnaît lui-même (pièce n° 56) qu’il avait particulièrement investi ce dernier poste, et que la possibilité de changement d’affectation découle, comme l’indique le salarié sans en remettre en cause la validité, des dispositions du contrat de travail;
– l’examen de la communication de l’employeur (pièces n° 47 et 54) permet de constater que celui-ci adressait à ses responsables des appréciations quotidiennes ou quasi-quotidiennes, sur les résultats de leur agence et que le salarié a fait l’objet d’observations élogieuses (entre mars et juillet 2014 : pièce n° 47) tandis que pour la période postérieure, de septembre 2014 à juin 2015, qui a donné lieu à de très multiples billets d’appréciation de l’employeur (pièce n° 54), il ne relève que six critiques, au demeurant non consécutives, de l’employeur ;
– en considération de cette pratique managériale de communication, et de ce que la relation de travail s’est exécutée de mai 2012 à juin 2015, le salarié justifie de trois interpellations de son employeur avec un ton peu adapté (pièces n° 10, 18 et 19), qui, mise cependant en lien avec les compliments dont le salarié a pu bénéficier à plusieurs reprises, ne permettent pas de considérer qu’elles révèlent un mode de communication préjudiciable de la part de l’employeur ;
– l’erreur sur la désignation de la convention collective nationale applicable ne figurait que sur les fiches de paye, tandis que le contrat de travail visait la convention valablement applicable et le salarié n’a pas alerté l’employeur durant l’exécution du contrat de travail ;
– les problèmes de santé que le salarié, si le médecin indique qu’il peuvent être liés « au stress » et à son « rythme de vie », ne sont pas directement reliés à son travail ;
– à l’interrogation du salarié concernant la retenue de salaire d’avril 2015, si une personne de l’entreprise a répondu – selon la reproduction des échanges que comporte la pièce n° 24 de l’appelant – l’identité exacte de cette personne n’est pas précisée de sorte que la réponse apportée, au demeurant assez absconse, ne peut être considérée comme émanant de l’employeur.
En regard de ces faits, la situation du salarié apparaît ainsi être le résultat d’un management qui, sans être proprement abusif ou inadapté, étant rappelé que l’objet de l’activité de l’entreprise consistait dans la vente à domicile, était très direct quant aux fins d’obtention des résultats de vente espérés, et du fort investissement de ses responsabilités professionnelles dont a fait preuve le salarié, sans qu’il puisse être établi que ce surinvestissement résultait des pressions de l’employeur.
Il reste le grief d’absence de visite à la médecine du travail.
Pour établis, ce fait, qui apparaît ainsi isolé, témoigne d’une exécution défectueuse, ponctuelle, du contrat de travail par l’employeur et ne permet pas de laisser supposer l’existence d’un harcèlement moral.
La demande en reconnaissance de tels faits, formée par le salarié, sera rejetée.
Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur l’indemnisation du préjudice résultant des manquements de l’employeur antérieurs à la rupture du contrat de travail
Le salarié, se référant à la démonstration d’une situation de harcèlement moral à son égard, ou de manquement de l’employeur à son obligation de sécurité, demande la somme de
20 000 euros.
L’employeur, estimant que les faits invoqués par le salarié ne peuvent fonder les manquements qu’il invoque, conclut au rejet de cette demande, toute demande concernant des faits antérieurs du 30 novembre 2015 étant prescrite en application de l’article L. 1471-1 du code du travail.
Il conclut à la réformation du jugement de ce chef.
La cour relève tout d’abord que la fin de non-recevoir invoquée par l’employeur concerne en réalité des moyens, et non la demande d’indemnisation, qui ne tombent pas sous le coup de la prescription. Ce moyen est inopérant.
Par ailleurs, la demande en reconnaissance de faits de harcèlement moral ayant été rejetée, la demande du salarié visant à la reconnaissance d’une situation de harcèlement moral, cette demande ne peut qu’être rejetée.
Du reste, des faits invoqués dans le cadre du harcèlement moral et dont la matérialité a été établie, il ne résulte pas que l’employeur ait manqué à son obligation de sécurité à l’égard du salarié.
En revanche, étant établi que l’employeur a manqué à son obligation de faire passer des visites médicales au salarié, le jugement sera confirmé en ce qu’il a condamné l’employeur à verser au salarié la somme de 1 000 euros à titre de dommages-intérêts.
Sur la rupture du contrat de travail
Il est de principe que lorsqu’un salarié demande la résiliation judiciaire de son contrat de travail et que son employeur le licencie ultérieurement, le juge doit d’abord rechercher si la demande de résiliation était justifiée et que c’est seulement s’il l’estime non fondée qu’il doit statuer sur le licenciement.
Le salarié soutient que l’employeur a manqué à son devoir d’exécution loyale du contrat de travail et à son obligation de sécurité, en raison de la charge de travail et les horaires excessifs qu’il lui étaient imposés, l’absence de reconnaissance, les pressions, la retenue sur salaire injustifiée, l’incertitude sur son affectation, le non-paiement des heures supplémentaires, la classification inappropriée et le non-respect du minimum conventionnel, l’absence de toute visite médicale auprès du médecin du travail et l’absence de transmission des éléments nécessaires au paiement de la prévoyance.
Il en déduit que chacun de ces griefs justifie une rupture imputable aux torts de l’employeur.
Il indique que cette résiliation judiciaire, à la date de l’envoi de la lettre de licenciement, soit le 27 février 2018, produit les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse.
Il réclame en conséquence le versement de la somme de 10 305,70 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis et des dommages-intérêts pour licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse équivalents à sept mois de salaires, soit 36 000 euros.
A titre subsidiaire, il soutient que le licenciement pour inaptitude résulte des manquements de l’employeur relatifs à la surcharge de travail, les horaires extensibles, les pressions à l’origine d’un burn out, l’arrêt de travail du 26 juin 2015 ayant été prescrit pour épuisement professionnel et la déclaration d’inaptitude faisant suite à cet arrêt de travail.
L’employeur, estimant que les griefs de harcèlement moral ou de manquement de son chef à ses obligations contractuelles ne sont pas fondés, conclut au rejet de cette demande.
Il souligne que, hors harcèlement moral, les manquements ne doivent pas être antérieurs à deux ans à la saisine du conseil de prud’hommes, soit au 30 novembre 2015. Il en déduit que les faits invoqués par le salariés sont prescrits.
Il considère en outre que le salarié ne justifie pas des préjudices qu’il invoque.
Concernant la cause réelle et sérieuse du licenciement, il estime qu’en l’absence de tout harcèlement moral, la nullité du licenciement ne peut dès lors être prononcée et qu’en l’absence de tout manquement de sa part à ses obligations contractuelles, le licenciement est fondé sur une cause réelle et sérieuse.
Il soutient en outre que le salarié ne démontre pas le lien entre son inaptitude et ses conditions de travail, son arrêt de travail étant justifié par une maladie non-professionnelle à l’égard de laquelle le salarié n’apporte aucun élément.
Il indique que les certificats médicaux produits par le salarié ne comportent que les faits qu’il a relatés.
A titre subsidiaire, et sur la base d’un salaire moyen des trois derniers mois de 3 194 euros, il soutient que le montant de l’indemnité de préavis ne saurait excéder 6 388 euros, outre 638,80 euros de congés payés.
Il considère par ailleurs que le montant de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, correspondant à 11 mois de salaire, dépasse le référentiel obligatoire de l’article L. 1235-3 du code du travail ce qui, au regard de l’ancienneté de 5 ans et 9 mois, doit entraîner le versement d’une indemnité minimale légale de 3 mois et au maximum de 6 mois. Il considère que le salarié ne justifie pas des sommes qu’il demande.
La cour relève que, ayant écarté l’existence de la situation de harcèlement moral invoquée par le salarié, elle ne peut prononcer la résiliation du contrat de travail aux torts exclusifs de l’employeur pour harcèlement moral.
Le salarié soutient à titre subsidiaire que le licenciement pour inaptitude dont il a fait l’objet est privé de cause réelle et sérieuse dans la mesure où son inaptitude résulte des manquements de l’employeur à ses obligations.
Effectivement, est dépourvu de cause réelle et sérieuse le licenciement pour inaptitude lorsqu’il est démontré que l’inaptitude était consécutive à un manquement préalable de l’employeur qui l’a provoquée.
Il a été précédemment considéré que le salarié établit la matérialité de ce que l’employeur a pu avoir des pratiques managériales particulières à différentes reprises, de ce qu’il l’a affecté à [Localité 6] alors que son contrat de travail prévoyait la possibilité de son affectation et permettait son éventuel retour dans cette agence, qu’il a commis une erreur concernant le visa de la convention collective nationale applicable dans les fiches de paye et déduit 7 heures de travail en avril 2015 et n’a pas fait passer de visite médicale au salarié tandis que le salarié a connu des troubles de santé (d’ordre parodontal).
En revanche, les griefs tenant à la surcharge de travail, aux horaires extensibles et les pressions de l’employeur ont été écartés, comme non matériellement établis.
De la teneur des griefs du salarié, qui ont été matériellement établis, notamment au regard de la durée de la relation contractuelle entre les parties, il résulte qu’il ne justifie pas que les manquements de l’employeur matériellement constatés ait rendu impossible la poursuite de la relation contractuelle et la demande de résiliation judiciaire n’est donc pas fondée.
Il doit être relevé par ailleurs qu’est constant que l’arrêt de maladie non-professionnelle a été prescrit le 26 juin 2015 pour « épuisement professionnel – grande lassitude » (pièce n° 2 de l’appelant) et que l’avis d’inaptitude a été établi de manière définitive le 2 février 2018.
Le salarié produit un certificat médical du 22 décembre 2017 (pièce n° 32) qui indique qu’il présente depuis août 2015 un tableau anxio-dépressif réactionnel à une situation professionnelle.
Il verse également à son dossier un certificat médical (pièce n° 33) qui indique qu’il présente une maladie parodontale aggravée par le stress et son rythme de vie.
Toutefois, il ne peut qu’être relevé que l’avis d’inaptitude est daté du 2 février 2018 tandis que son arrêt de travail initial a été prescrit le 26 juin 2015, soit plus de trois ans auparavant, et qu’il ne justifie pas, notamment par la production des certificats médicaux correspondants, des raisons ayant conduit à la reconduction de son arrêt durant toute cette période.
Il résulte de ce qui précède qu’il n’est pas établi par le salarié, alors qu’il a fait l’objet d’arrêt de travail pour maladie d’origine non-professionnelle, la cause de son inaptitude et dès lors la possibilité d’établir un lien entre les manquements qu’il reproche à l’employeur et cette inaptitude.
Sa demande en reconnaissance de l’absence de cause réelle et sérieuse de son licenciement ne peut dès lors qu’être rejetée et e jugement est confirmé de ce chef.
Les demandes du salarié en versement d’une indemnité compensatrice de préavis et pour licenciement nul ou dépourvu de cause réelle et sérieuse doivent être rejetées.
Le jugement est confirmé de ce chef.
Sur les autres demandes
Les demandes en paiement de rappel d’heures supplémentaires, de congés payés sur heures supplémentaires, de rappel d »indemnité de licenciement sur rappel de rémunération et d’indemnité compensatrice de préavis, outre congés payés sur préavis, étant rejetées, la demande du salarié visant à assortir les condamnations correspondantes des intérêts légaux à compter de la demande, est sans objet et sera rejetée.
Les demandes des parties visant à la fixation du salaire mensuel brut sont sans objet.
Le salarié, perdant en cette instance, doit en supporter les dépens.
Au vu de l’équité, les demandes fondées à hauteur d’appel sur l’article 700 du code de procédure civile sont rejetées.
La condamnation prononcée en première instance sur ce même fondement est confirmée.
PAR CES MOTIFS
La cour,
Statuant par arrêt contradictoire, rendu en dernier ressort et par mise à disposition au greffe,
REJETTE la fin de non-recevoir invoquée par la société Vacuum Tech, tirée de la prescription des demandes liées à l’exécution du contrat de travail ;
CONFIRME le jugement, sauf en ce qu’il a fait droit aux demandes de M. [G] [I] en paiement:
– d’un rappel de salaire sur minimum conventionnel, outre congés payés afférents,
– d’un rappel d’indemnité de licenciement sur rappel de rémunération conventionnelle
– d’une somme à titre d’indemnité de prévoyance non perçues depuis le 24 septembre 2015 jusqu’au 24 janvier 2016
et en ce qu’il a assorti ces condamnations des intérêts légaux.
Statuant à nouveau sur les chefs infirmés,
REJETTE les demandes de M. [G] [I] en paiement d’un rappel de salaire sur minimum conventionnel, outre congés payés afférents, d’un rappel d’indemnité de licenciement sur rappel de rémunération conventionnelle et d’une somme à titre d’indemnité de prévoyance non perçues depuis le 24 septembre 2015 jusqu’au 24 janvier 2016, ainsi qu’en sa demande visant à ce que ces condamnations soient assorties des intérêts légaux ;
REJETTE le surplus des demandes de M. [G] [I] ;
Y ajoutant,
REJETTE les demandes des parties fondées sur l’article 700 du code de procédure civile,
CONDAMNE M. [G] [I] aux dépens.
LA GREFFIERE LA PRESIDENTE