Épuisement professionnel : 17 mai 2023 Cour d’appel de Limoges RG n° 22/00542

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Épuisement professionnel : 17 mai 2023 Cour d’appel de Limoges RG n° 22/00542

ARRET N° .

N° RG 22/00542 – N° Portalis DBV6-V-B7G-BILJ2

AFFAIRE :

Mme [T] [G]

C/

S.A. LES TROIS CHENES

JPC/MS

Demande d’indemnités ou de salaires

Grosse délivrée à Me Nazanine FARZAM, Me Suzanne DUMONT, le 17 mai 2023.

COUR D’APPEL DE LIMOGES

CHAMBRE ECONOMIQUE ET SOCIALE

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ARRÊT DU 17 MAI 2023

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Le dix sept Mai deux mille vingt trois la Chambre économique et sociale de la cour d’appel de LIMOGES a rendu l’arrêt dont la teneur suit par mise à disposition du public au greffe :

ENTRE :

Madame [T] [G]

née le 01 Juillet 1968 à [Localité 2], demeurant [Adresse 1]

représentée par Me Suzanne DUMONT, avocat au barreau de LIMOGES

APPELANTE d’une décision rendue le 13 JUIN 2022 par le CONSEIL DE PRUD’HOMMES – FORMATION PARITAIRE DE BRIVE LA GAILLARDE

ET :

S.A. LES TROIS CHENES, demeurant [Adresse 3]

représentée par Me Nazanine FARZAM, avocat au barreau de LYON

INTIMEE

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Suivant avis de fixation du Président de chambre chargé de la mise en état, l’affaire a été fixée à l’audience du 13 Mars 2023. L’ordonnance de clôture a été rendue le 08 mars 2023.

Conformément aux dispositions de l’article 805 du Code de Procédure Civile, Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller, magistrat rapporteur, assisté de Mme Sophie MAILLANT, Greffier, a tenu seul l’audience au cours de laquelle il a été entendu en son rapport oral.

Les avocats sont intervenus au soutien des intérêts de leurs clients et ont donné leur accord à l’adoption de cette procédure.

Après quoi, Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller, a donné avis aux parties que la décision serait rendue le 04 Mai 2023 par

mise à disposition au greffe de la cour, après en avoir délibéré conformément à la loi.

La mise à disposition de cette décision a été prorogée au 17 mai 2023, et les avocats des parties en ont été régulièrement informés.

Au cours de ce délibéré, Monsieur Jean-Pierre COLOMER, Conseiller, a rendu compte à la Cour, composée de Monsieur Pierre-Louis PUGNET, Président de Chambre, de Madame Géraldine VOISIN, Conseiller, et de lui même. A l’issue de leur délibéré commun, à la date fixée, l’arrêt dont la teneur suit a été mis à disposition au greffe.

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LA COUR

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EXPOSE DU LITIGE :

Mme [G] a été engagée par la société Les trois chênes le 4 janvier 2010 dans le cadre d’un contrat de travail à durée indéterminée en qualité d’attachée commerciale.

Elle a démissionné de son emploi le 30 août 2013.

Le 26 mai 2015, elle a été réengagée pour une durée indéterminée pour exercer les mêmes fonctions avec reprise de son ancienneté.

Le 14 août 2017, elle a été promue au poste de directrice régionale des ventes, statut cadre.

Un accord d’entreprise instituant un dispositif de décompte du temps de travail sous la forme d’une convention annuelle de forfait en jours a été conclu le 10 décembre 2020 et, dès le 17 décembre 2020,un avenant au contrat de travail de Mme [G] a été conclu afin d’y intégrer une telle convention de forfait.

Le 5 mars 2021, elle a fait l’objet d’un arrêt maladie qui a ensuite fait l’objet de prolongations successives.

Par lettre recommandée du 12 mai 2021, elle a réclamé le paiement d’heures supplémentaires en faisant valoir que la convention de forfait était irrégulière et qu’elle avait exécuté des heures supplémentaires au-delà de la durée légale du temps de travail.

La société Les trois chênes lui a répondu par écrit le 31 mai 2021, en indiquant qu’elle n’avait jamais eu connaissance de la réalisation d’heures supplémentaires et a rejeté sa demande.

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Par requête enregistrée le 2 juillet 2021, Mme [G] a saisi le conseil de prud’hommes de Brive-La-Gaillarde en vue d’obtenir la condamnation de son employeur à lui payer des heures supplémentaires, des dommages et intérêts pour travail dissimulé, une prime pour le travail de nuit, d’une part, et la résiliation de son contrat de travail aux torts de l’employeur avec paiement de diverses sommes au titre de la rupture du contrat, d’autre part.

Par jugement du 13 juin 2022, le conseil de prud’hommes de Brive-La-Gaillarde a :

– dit que la réalité de l’existence d’heures supplémentaires n’est pas apportée ;

– débouté Mme [G] de l’intégralité de ses demandes principales et incidentes ;

– condamné Mme [G] au paiement d’une somme de 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile ;

– mis à la charge de Mme [G] les éventuels dépens de l’instance.

Mme [G] a interjeté appel de la décision le 11 juillet 2022. Son appel porte sur l’ensemble des chefs de jugement.

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Postérieurement au jugement, Mme [G] a effectué une visite de reprise auprès de la médecine du travail qui l’a déclarée inapte à son poste le 1er juillet 2022 avec impossibilité de reclassement.

Elle a été licenciée pour inaptitude le 25 juillet 2022.

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Par conclusions notifiées par voie électronique le 22 février 2023, Mme [G] demande à la cour de :

– réformer en toutes ses dispositions le jugement dont appel ;

Statuant à nouveau, de :

– déclarer recevable sa demande pour l’intégralité de la période réclamée ;

– condamner la société Les trois chênes à lui payer les sommes de :

168 607,70 € de rappel sur heures supplémentaires et 16 860,70 € d’indemnité de congés payés sur heures supplémentaires ;

46 996 € de dommages-intérêts pour travail dissimulé ;

8 600 € au titre de la prime pour les heures de travail effectuées de nuit et le repos compensateur ;

121 825 € d’indemnité pour rupture du contrat produisant les effets d’un licenciement sans cause réelle et sérieuse ;

28 097 € d’indemnité conventionnelle de licenciement, calculé sur la base de la moyenne de la rémunération des trois derniers mois (10 305 €) ;

29 067 € d’indemnité compensatrice de préavis (base de calcul, moyenne annuelle : 9 689 €) et 2 907 € d’indemnité de congés payés sur préavis ;

– condamner la même à lui payer un montant de 10 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.

A l’appui de son recours, elle soutient, concernant les heures supplémentaires, que sa demande n’est pas prescrite dans la mesure où l’avenant du 17 décembre 2020 qui constitue une reconnaissance explicite par l’employeur de l’exécution d’heures supplémentaires, a eu pour effet d’interrompre la prescription. Sur le fond, elle fait valoir qu’elle a accompli de nombreuses heures supplémentaires, que la quotité de son travail effectif était connue de son employeur au regard des tâches qui étaient les siennes et de l’étendue du secteur géographique placé sous sa responsabilité.

Par ailleurs, elle indique qu’elle a effectué du travail de nuit et qu’elle n’a jamais été indemnisée de ces heures. Elle considère que l’employeur s’est rendu coupable de travail dissimulé.

Elle demande donc la résiliation de son contrat de travail en faisant valoir le non-paiement des heures supplémentaires et son épuisement professionnel généré par un rythme de travail soutenu et non contrôlé par l’employeur.

Par conclusions notifiées par voie électronique le 28 février 2023, la société Les trois chênes demande à la cour de :

– juger irrecevables les demandes de rappels d’heures supplémentaires et de congés payés afférents pour la période antérieure au 5 juillet 2018 du fait de leur prescription ;

– rejeter les pièces adverses n°34 et 35 en ce qu’elles n’ont pas été communiquées régulièrement dans le cadre de la procédure d’appel en violation du principe du contradictoire 

En conséquence, de :

– confirmer dans toutes ses dispositions le jugement dont appel ;

En tout état de cause, de :

– condamner Mme [G] à lui verser la somme de 2 500 € au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.

L’employeur soulève la prescription de la demande en paiement des heures supplémentaires et conteste la réalité des heures dont le paiement est demandé. Il considère que les tâches confiées à la salariée ne nécessitaient pas la réalisation d’heures supplémentaires pour lesquelles il n’a jamais donné son accord.

Il conclut en conséquence au rejet de l’ensemble des demandes de la salariée.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 8 mars 2023.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure, des moyens, des prétentions et de l’argumentation des parties, il est expressément renvoyé au jugement déféré et aux écritures déposées.

SUR CE,

Sur les heures supplémentaires :

– Sur la prescription :

L’article L. 3245-1 du code du travail prévoit : « L’action en paiement ou en répétition du salaire se prescrit par trois ans à compter du jour où celui qui l’exerce a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer. La demande peut porter sur les sommes dues au titre des trois dernières années à compter de ce jour ou, lorsque le contrat de travail est rompu, sur les sommes dues au titre des trois années précédant la rupture du contrat. »

L’article 2240 prévoit que la reconnaissance par le débiteur du droit de celui contre lequel il prescrivait interrompt le délai de prescription.

En l’espèce, Mme [G] a été promue directrice régionale des ventes le17 août 2017 et son contrat de travail du 26 mai 2015 a fait l’objet d’une nouvelle modification le 17 décembre 2020 concernant la durée du travail. Il a ainsi été convenu par les parties qu’à compter du 1er janvier 2021, la durée annuelle de travail de la salariée serait fixée à 217 jours par année civile complète d’activité, journée de solidarité incluse.

Il est indiqué en préambule dans l’avenant du 17 décembre 2020 :

« Cet avenant intervient dans le cadre de l’adéquation du régime de durée du travail avec la réalité de la situation de la salariée.

Il est en effet apparu aux parties qu’une convention de forfait annuel en jours serait adaptée à la réalité de l’organisation du temps de travail de la salariée dans la mesure où elle dispose d’une totale autonomie dans l’organisation de son temps de travail.

De même, la nature de ses fonctions ainsi que le niveau de responsabilité qu’elles impliquent ne la conduisent pas à suivre l’horaire collectif de l’entreprise.

Dès lors, et compte tenu de sa position de cadre, les parties ont constaté que la salariée a vocation à se voir appliquer le statut de cadre en forfait jours prévu par l’accord d’entreprise signé le 10 décembre 2020.’ »

Il se déduit de ce préambule que l’employeur reconnaît que la durée de travail telle que définie initialement n’est pas adaptée aux fonctions exercées par la salariée mais il ne peut en être déduit l’existence d’une reconnaissance implicite d’une créance d’heures supplémentaires, d’autant qu’à la date de cet avenant, il n’existait aucune demande de la salariée concernant le paiement d’heures supplémentaires.

En conséquence, cet avenant n’a pas interrompu la prescription.

Mme [G] a saisi le conseil de prud’hommes le 02 juillet 2021. Il s’ensuit que les demandes relatives aux heures supplémentaires prétendument effectuées antérieurement au 02 juillet 2018 sont prescrites.

– Sur le fond :

Il résulte des dispositions des articles L. 3121-27 à L. 3121-29 du code du travail que la durée légale de travail effectif des salariés à temps complet est fixée à trente-cinq heures par semaine, que toute heure accomplie au-delà de la durée légale hebdomadaire ou de la durée considérée comme équivalente est une heure supplémentaire qui ouvre droit à une majoration salariale ou, le cas échéant, à un repos compensateur équivalent et que les heures supplémentaires se décomptent par semaine.

Il résulte des dispositions des articles L. 3171-2, alinéa 1er, L. 3171-3, dans sa rédaction antérieure à celle issue de la loi n° 2016-1088 du 8 août 2016, et L. 3171-4 du code du travail, qu’en cas de litige relatif à l’existence ou au nombre d’heures de travail accomplies, il appartient au salarié de présenter, à l’appui de sa demande, des éléments suffisamment précis quant aux heures non rémunérées qu’il prétend avoir accomplies afin de permettre à l’employeur, qui assure le contrôle des heures de travail effectuées, d’y répondre utilement en produisant ses propres éléments. Le juge forme sa conviction en tenant compte de l’ensemble de ces éléments au regard des exigences rappelées aux dispositions légales et réglementaires précitées.

Après analyse des pièces produites par l’une et l’autre des parties, dans l’hypothèse où il retient l’existence d’heures supplémentaires, il évalue souverainement, sans être tenu de préciser le détail de son calcul, l’importance de celles-ci et fixe les créances salariales s’y rapportant.

En l’espèce, Mme [G] produit à l’appui de sa demande un décompte précisant les heures supplémentaires accomplies chaque semaine ainsi que le montant et le fondement des sommes qu’elle réclame.

Ce document est suffisamment précis pour que son employeur puisse y répondre.

Ce dernier soutient dans ses conclusions (p27) que : « Jamais il n’a été demandé à Madame [T] [G] de réaliser ses fonctions en dehors de l’horaire collectif et que les tâches qui lui étaient confiées n’impliquaient en aucun cas la réalisation d’heures supplémentaires. »

Cette affirmation est en contradiction avec les dispositions du préambule de l’avenant du 17 décembre 2020 dans laquelle l’employeur reconnaît expressément que « la nature de ses fonctions ainsi que le niveau de responsabilité qu’elles impliquent ne conduisent pas [la salariée] à suivre l’horaire collectif d’entreprise » et que cet avenant à « pour objet de formaliser une situation de fait ».

Il se déduit de cet aveu que les fonctions confiées à la salariée étaient incompatibles avec l’application de l’horaire collectif. Pour autant, l’employeur qui n’a pu prévoir une convention de forfait en jours dès la nomination de la salariée à son poste de directrice régionale des ventes en l’absence d’accord l’entreprise, n’a pas pour autant mis en place un système de décompte de son temps de travail.

Il reconnaît également dans ce même préambule que sa salariée dispose d’une totale autonomie dans l’organisation de son emploi du temps, ce qui signifie qu’il a abandonné le contrôle de son temps de travail et, dans ces conditions, il ne peut sans mauvaise foi arguer du fait qu’il n’aurait pas autorisé la réalisation d’heures supplémentaires.

Certes, il justifie que M. [L] [W] a demandé à divers salariés dont Mme [G], de respecter « les horaires et jours de travail définis » (courriers électroniques des 18 septembre 2019 et 16 janvier 2020) mais, comme il a été observé, les horaires collectifs n’étaient pas adaptés à sa mission et aucun autre horaire n’a été fixé à la salariée.

Par ailleurs, s’agissant du décompte des heures supplémentaires présentées par la salariée, il apparaît, comme le relève pertinemment l’employeur, que cette dernière a inclus dans les heures de travail les temps de repas ainsi que les temps de trajet alors même que s’agissant de ces derniers, il ne résulte pas des éléments produits par les parties que durant les trajets effectués de son domicile à son lieu d’intervention, elle demeurait à la disposition constante de son employeur. Ils demeurent donc des temps de trajets et non des temps de travail.

L’analyse des courriers électroniques envoyés par la salariée montre que celle-ci pouvait adresser de tels courriers dans la soirée, voire dans la nuit, et que de tels envois, s’ils n’étaient pas journaliers, intervenaient néanmoins régulièrement.

L’analyse des courriers électroniques reçus ne permet pas de caractériser une activité tardive la concernant. En revanche, elle fait clairement apparaître que, tout comme elle, certains de ses collègues transmettaient en soirée des courriers électroniques.

Ces éléments démontrent que contrairement aux témoignages produits par l’employeur, la charge de travail des directeurs régionaux impliquait l’accomplissement d’un travail en soirée au moins certains jours de la semaine.

Au regard de ces éléments, il apparaît que Mme [G] a effectivement accompli des heures supplémentaires pour un montant qui sera fixé à 20 232,47 € brut.

L’employeur sera condamné à payer cette somme ainsi que les congés payés y afférents.

Sur le travail dissimulé :

Il résulte des dispositions de l’article L. 8221-5 du code du travail que le fait, pour un employeur, de se soustraire intentionnellement à la déclaration préalable d’embauche ou à la remise du bulletin de salaire ou encore de mentionner sur le bulletin de paie un nombre d’heures de travail inférieur à celui réellement effectué constitue le délit de dissimulation d’emploi salarié.

L’article L.8223-1 du même code prévoit qu’en cas de rupture de la relation de travail, le salarié auquel un employeur a eu recours dans les conditions de l’article L. 8221-3 ou en commettant les faits prévus à l’article L. 8221-5 a droit à une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire.

En l’espèce, le recours à la convention de forfait en jours n’a été possible qu’à la suite de l’accord d’entreprise signé de 10 décembre 2020 de sorte que pour la période antérieure, l’organisation du temps de travail de Mme [G] était incompatible avec ses missions comme l’a reconnu l’employeur.

Les parties ont également reconnu dans l’avenant du 17 décembre 2020 que Mme [G] avait bénéficié d’une grande autonomie de sorte que l’employeur n’a manifestement pas contrôlé son temps de travail. La réalisation des heures supplémentaires non rémunérées trouve son origine dans un défaut d’organisation et de contrôle du temps de travail de la salariée sans pour autant présenter un caractère intentionnel.

En conséquence, la décision des premiers juges sera confirmée en ce qu’ils ont rejeté ce chef de demande.

Sur le rappel de salaire concernant le travail de nuit :

Selon l’article 2 de l’Accord du 30 septembre 2002 relatif au travail de nuit des salariés relevant de la Convention collective nationale de commerces de gros, « est considéré comme travailleur de nuit, pour l’application du présent accord, tout salarié qui:

– soit accompli, selon son horaire de travail habituel, au moins deux fois chaque semaine travaillée de l’année, au moins 3 heures de travail effectif quotidien au cours de la plage horaire comprise entre 21 heures et 6 heures;

– soit effectue, sur une période de 12 mois consécutifs, au moins 270 heures de travail effectif au cours de la plage horaire comprise entre 21 heures et 6 heures. »

L’article 3 du même accord prévoit :

«3.1. Contrepartie sous forme de repos compensateur (1)

Le travailleur de nuit bénéficie, à titre de contrepartie sous forme de repos compensateur, de :

– 1 journée de repos à compter de 270 heures de travail effectif de nuit ;

– 2 journées de repos à compter de 540 heures de travail effectif de nuit ;

– 3 journées de repos à compter de 940 heures de travail effectif de nuit ;

– 4 journées de repos à compter de 1 180 heures de travail effectif de nuit.

3.2. Contrepartie sous forme de rémunération

Tout salarié travaillant habituellement de nuit ou par équipe bénéficie d’une prime indépendante du salaire égale à 10 % du taux de son salaire réel pour chaque heure de travail située entre 21 heures et 6 heures. Les avantages déjà acquis à ce titre sont imputables sur cette prime.

Tout salarié travaillant exceptionnellement de nuit bénéficie d’une prime indépendante du salaire égale à 25 % du taux horaire de son salaire réel pour chaque heure de travail située entre 21 heures et 6 heures.

Outre les majorations prévues ci-dessus, tout salarié effectuant au moins 4 heures de travail entre 21 heures et 6 heures bénéficie d’une indemnité de casse-croûte d’un montant égal à une fois et demie le minimum garanti.»

En l’espèce, quelles que soient les affirmations de Mme [G], il ne résulte pas des pièces produites qu’elle a accompli au moins deux fois chaque semaine travaillée de l’année, au moins 3 heures de travail effectif quotidien au cours de la plage horaire comprise entre 21 heures et 6 heures. En effet, les courriers électroniques produits ne permettent pas d’établir la preuve de l’accomplissement de tâches d’une telle durée selon le rythme prévu par l’accord précité. Par ailleurs, les éléments fournis concernant les déplacements ne permettent pas davantage d’établir la réalité d’un tel travail.

De même, ces mêmes pièces ne permettent pas d’établir qu’elle a effectué, sur une période de 12 mois consécutifs, au moins 270 heures de travail effectif au cours de la plage horaire comprise entre 21 heures et 6 heures.

La demande sera donc rejetée.

Sur la demande de résiliation du contrat de travail :

Préalablement, il convient d’indiquer que le licenciement pour inaptitude de la salariée ne fait pas obstacle à ce que soit examinée sa demande de résiliation de son contrat de travail dès lors que le conseil de prud’hommes a été saisi antérieurement au licenciement.

Suite de sa promotion du 14 août 2017, Mme [G] a exercé les fonctions de directrice régionale des ventes sur un secteur comportant vingt-huit départements ainsi que la principauté d’Andorre. Il est indiqué dans l’avenant du 14 août 2017 que sa disponibilité pour toute mission ponctuelle, pour toute réunion, séminaire ou salon pour lesquelles son assistance serait demandée par l’employeur, y compris les week-ends, est considérée comme une clause déterminante.

Il a été retenu ci-dessus que l’employeur n’a pas rémunéré un certain nombre d’heures supplémentaires accomplies par la salariée. Au regard du volume desdites heures supplémentaires retenues mais aussi de l’exigence de l’employeur concernant la disponibilité de sa salariée, de l’absence de mise en place d’un système de contrôle du temps de travail de cette dernière, il apparaît que celui-ci a été gravement défaillant dans le contrôle du temps de travail de sa salariée et de l’adéquation de sa charge de travail au nombre d’heures initialement fixé.

Mme [G] a fait l’objet d’un arrêt de travail alors que le docteur [I], son médecin traitant, a observé une dégradation de son état de santé depuis 2018 avec la reprise de son asthme, des contractures lombaires, des douleurs abdominales, une aggravation du terrain rhumatologique alors que la patiente présentait lors de chaque consultation un état de stress et d’anxiété. Les éléments médicaux complémentaires produits par la salariée de manière non contradictoire (pièce 34 et 35) doivent être écartés des débats et, au regard, du seul certificat médical établi par le docteur [I] le lien de causalité entre les conditions de travail et le développement d’un état de stress de même que le lien de causalité entre l’état de stress et les pathologies constatées demeurent simplement hypothétiques.

Cela étant, les manquements de l’employeur sont suffisamment graves pour justifier la résiliation du contrat de travail à ses torts.

Le contrat de travail a été rompu le 25 juillet 2022, la résiliation prendra effet à cette date.

La décision des premiers juges sera donc infirmée de ce chef

Sur les conséquences de la résiliation du contrat de travail :

Mme [G] a été engagée le 26 mai 2015 et son contrat de travail a pris fin le 25 juillet 2022.

Pour le calcul de son ancienneté, il convient de prendre en compte la reprise contractuelle d’ancienneté de son premier contrat conclu du 4 janvier 2010 au 30 août 2013.

Par ailleurs, conformément aux dispositions de l’article L. 1234-11 du code du travail, sauf dispositions conventionnelles contraires, les périodes de suspension du contrat de travail pour cause de maladie ne sont pas prises en compte dans le calcul de l’ancienneté propre à déterminer le montant de l’indemnité de licenciement. En conséquence, il ne peut être tenu compte de la période du 5 mars 2021 au 25 juillet 2022 durant laquelle Mme [G] a été placée en arrêt maladie.

L’indemnité de licenciement doit donc être calculée sur la base d’une ancienneté de neuf ans et cinq mois. Le salaire de référence de Mme [G], calculé sur la base des trois derniers mois travaillés, plus favorable, en prenant en compte prorata temporis les heures supplémentaires, s’élève à 8 325,13 € bruts.

L’indemnité conventionnelle de licenciement s’élève donc à 23’865,38 € brut.

Mme [G] est également fondée à réclamer l’indemnité de préavis d’une durée de trois mois selon la convention collective des commerces de gros. L’employeur sera donc condamné à lui payer la somme de 24’975,39 € brut et les congés payés y afférents.

Enfin, compte tenu notamment de l’effectif de l’entreprise (plus de dix salariés), des circonstances de la rupture, du montant de sa rémunération versée, de son âge (53 ans), de son ancienneté, de sa capacité à trouver un nouvel emploi et des conséquences du licenciement à son égard, tels qu’ils résultent des pièces et des explications fournies, il y a lieu de lui allouer, en application de l’article L. 1235-3 du code du travail, une somme de 49 950,78 € à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse.

Sur les autres demandes :

A la suite de la présente procédure, Mme [G] a exposé des frais non compris dans les dépens. L’équité commande de l’en indemniser. La société Les Trois chênes sera condamnée à lui payer la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du Code de procédure civile.

—==oO§Oo==—

PAR CES MOTIFS

—==oO§Oo==—

La Cour statuant publiquement, par arrêt contradictoire, en dernier ressort et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Confirme le jugement du conseil de prud’hommes de Brive-La-Gaillarde en date du 13 juin 2022 en ses dispositions ayant débouté Mme [G] de ses demandes relatives au travail dissimulé et au travail de nuit ;

L’infirme pour le surplus

Statuant à nouveau,

Déclare prescrite la demande en paiement des heures supplémentaires pour la période antérieure au 02 juillet 2018 ;

Condamne la société Les Trois chênes à payer à Mme [G] la somme de 20 232,47 € brut au titre des heures supplémentaires ainsi que 2023,25 € brut au titre des congés payés y afférents ;

Prononce la résiliation du contrat de travail aux torts de la société Les Trois chênes;

Dit que la résiliation prendra effet à la date du 25 juillet 2022 ;

En conséquence, condamne la société Les Trois chênes à payer à Mme [G] les sommes suivantes :

24’975,39 € bruts au titre de l’indemnité de préavis ainsi que 2 497,54 au titre des congés payés y afférents ;

23’865,38 € bruts au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement ;

49 950,78 € de dommages et intérêts au titre de l’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse prévue par l’article L. 1235-3 du code du travail ;

Condamne la société Les Trois chênes aux entiers dépens de première instance et d’appel et à payer à Mme [G] la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

LE GREFFIER, LE PRÉSIDENT,

Sophie MAILLANT. Pierre-Louis PUGNET.

 


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