Épuisement professionnel : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 20/03991

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Épuisement professionnel : 15 décembre 2022 Cour d’appel de Rouen RG n° 20/03991

N° RG 20/03991 – N° Portalis DBV2-V-B7E-IT3R

COUR D’APPEL DE ROUEN

CHAMBRE SOCIALE ET DES AFFAIRES DE

SECURITE SOCIALE

ARRET DU 15 DECEMBRE 2022

DÉCISION DÉFÉRÉE :

Jugement du CONSEIL DE PRUD’HOMMES DE ROUEN du 02 Novembre 2020

APPELANTE :

Madame [D] [O]

[Adresse 4]

[Localité 2]

représentée par Me David VERDIER de la SELARL VERDIER MOUCHABAC, avocat au barreau de l’EURE substituée par Me Johann PHILIP, avocat au barreau de l’EURE

INTIME :

Monsieur [G] [V]

[Adresse 1]

[Localité 3]

représenté par Me François GARRAUD de la SCP GARRAUD OGEL LARIBI HAUSSETETE, avocat au barreau de DIEPPE

COMPOSITION DE LA COUR  :

En application des dispositions de l’article 805 du Code de procédure civile, l’affaire a été plaidée et débattue à l’audience du 09 Novembre 2022 sans opposition des parties devant Madame BERGERE, Conseillère, magistrat chargé du rapport.

Le magistrat rapporteur a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour composée de :

Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente

Madame BACHELET, Conseillère

Madame BERGERE, Conseillère

GREFFIER LORS DES DEBATS :

M. GUYOT, Greffier

DEBATS :

A l’audience publique du 09 Novembre 2022, où l’affaire a été mise en délibéré au 15 Décembre 2022

ARRET :

CONTRADICTOIRE

Prononcé le 15 Décembre 2022, par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du Code de procédure civile,

signé par Madame LEBAS-LIABEUF, Présidente et par Mme DUBUC, Greffière.

EXPOSÉ DES FAITS, DE LA PROCÉDURE ET DES PRÉTENTIONS DES PARTIES

Le 17 novembre 2010, Mme [D] [O] a été engagée en qualité d’assistante commerciale par M. [G] [V], agent général d’assurance Aviva Assurances, par contrat de travail à durée indéterminée.

Les relations des parties étaient soumises à la convention collective nationale du personnel des agences générales d’assurances.

Mme [O] a été placée en arrêt de travail du 1er au 11 décembre 2018, lequel a été prolongé jusqu’au 21 décembre suivant. Elle a de nouveau été placée en arrêt de travail à compter du 12 janvier 2019.

Mme [O] a saisi la conseil de prud’hommes de Rouen en sa formation de référé le 3 mai 2019 aux fins de se voir restituer son véhicule de fonction et d’obtenir le paiement de dommages et intérêts en réparation de plusieurs préjudices.

Par ordonnance du 9 juillet 2019, la formation de référé a jugé qu’il y avait des contestations sérieuses sur l’ensemble des demandes et s’est déclaré incompétent pour statuer, a débouté les parties au titre de l’article 700 du code de procédure civile et condamné Mme [O] aux dépens.

Cette décision a été partiellement infirmée par la cour d’appel de Rouen, qui dans son arrêt du 18 décembre 2019, a :

– confirmé l’ordonnance en ce qu’elle a dit qu’il y avait une contestation sérieuse concernant la demande de rappel de salaire ;

– ordonné à M. [V] de restituer le véhicule de fonction à Mme [O] dans un délai de 8 jours à compter de la notification de la présente décision, sous astreinte de 100 euros par jour de retard au delà de ce délai, pendant une durée de trois mois ;

– condamné M. [V] à payer à Mme [O] les sommes de :

800 euros à titre de provision à valoir sur le préjudice résultant de la privation du véhicule de fonction,

1 000 euros à titre de provision à valoir sur le préjudice résultant de l’adhésion tardive de l’employeur à un service de santé au travail,

2 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,

– débouté les parties du surplus de leurs demandes et condamné M. [V] aux dépens de première instance et d’appel.

Parallèlement, suivant requête du 30 juillet 2019, Mme [O] a saisi le conseil de prud’hommes de Rouen aux fins de résiliation judiciaire de son contrat de travail aux torts exclusifs de son employeur et en paiement de rappels de salaire et indemnités.

Le 4 mai 2020, Mme [O] a été licenciée pour inaptitude et impossibilité de reclassement.

Par jugement du 2 novembre 2020, le conseil de prud’hommes a :

– constaté que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est postérieure au licenciement, débouté, en conséquence, Mme [O] de sa demande de résiliation judiciaire de son contrat de travail,

– constaté l’absence de harcèlement moral sur Mme [O],

– dit que son licenciement repose sur une cause réelle et sérieuse,

– constaté que Mme [O] s’est vue offrir à titre de libéralités de la part de son employeur un smartphone S9 plus en mai 2018, un sac à main Lancel, des palettes de maquillage Guerlain, des paires de collants directement glissés dans son sac à main,

– constaté que Mme [O] a restitué les clés et qu’elle ne dispose plus d’aucun matériel appartenant à l’agence,

– condamné M. [V] à payer à Mme [O] les sommes suivantes :

remboursement des frais de location à raison de la privation illégitime de son véhicule de fonction : 300,25 euros,

dommages et intérêts pour privation illégitime de son véhicule de fonction : 3 000 euros,

dommages et intérêts pour absence d’adhésion à un service de santé : 4 000 euros,

paiement des commission de janvier 2019 : 463 euros,

congés payés afférents : 46,30 euros,

solde dû sur son indemnité de licenciement : 293,50 euros nets,

solde dû sur son indemnité compensatrice de congés payés : 2498,74 euros,

rappel de salaire sur la période allant du 20 mars au 4 mai 2020 : 1 778,52 euros,

exécution déloyale du contrat de travail : 20 000 euros,

article 700 du code de procédure civile : 1 500 euros,

– ordonné la remise des documents de fin de contrat conformes au jugement à intervenir sous astreinte de 10 euros par jour de retard et par document à compter de 60 jours après la notification du jugement, en se réservant le droit de liquider l’astreinte, débouté les parties du surplus de leurs demandes et condamné M. [V] aux entiers dépens.

M. [V] a interjeté appel de cette décision le 27 novembre 2020. Toutefois, suivant ordonnance du 27 mai 2021, le conseiller de la mise en état a prononcé la caducité de la déclaration d’appel.

Parallèlement, le 7 décembre 2020, Mme [O] a interjeté un appel limité aux chefs de jugement ayant rejeté ses demandes de résiliation judiciaire, au titre du harcèlement moral et au titre du maintien de salaire et constaté que son licenciement reposait sur une cause réelle et sérieuse.

Par conclusions remises le 19 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, Mme [D] [O] demande à la cour d’infirmer partiellement le jugement en ce qu’il a constaté que la demande de résiliation judiciaire du contrat de travail est postérieure au licenciement, l’a déboutée de sa demande en résiliation judiciaire, constaté l’absence de harcèlement moral sur sa personne, dit et jugé que le licenciement notifié le 4 mai 2020 reposait sur une cause réelle et sérieuse, l’a déboutée de sa demande de paiement de la somme de 5 889,77 euros à titre de maintien de salaire outre celle de 588,98 euros au titre des congés payés afférents, en conséquence,

– à titre principal, prononcer la résiliation judiciaire aux torts exclusifs de M. [V] à la date du licenciement pour inaptitude et le condamner à lui verser la somme de 56 300 euros à titre de dommages et intérêts pour licenciement nul, ou à titre subsidiaire, pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, ou à défaut, si le barème de l’article L. 1235-3 du code du travail était appliqué, en limitant le montant de l’indemnité à la somme de 28 150 euros,

– à titre subsidiaire, dire et juger que son licenciement pour inaptitude est nul et en conséquence, condamner M. [G] [V] à lui verser la somme de 56 300 euros à titre de dommages et intérêts, soit dix-huit mois de salaire,

– à titre infiniment subsidiaire, dire que son licenciement est dépourvu de cause réelle et sérieuse et condamner M. [G] [V] à lui verser la somme de 56 300 euros à titre de dommages et intérêts, ou à défaut la somme de 28 150 euros,

– en tout état de cause, condamner M. [G] [V] à lui verser la somme de 6 255,74 euros au titre de l’indemnité compensatrice de préavis, outre celle de 625,57 euros au titre des congés payés afférents, la somme de 5 889,77 euros à titre de maintien de salaire, outre celle de 588,98 euros au titre des congés payés afférents,

– confirmer pour le surplus les dispositions du jugement déféré, débouter M. [V] de toutes ses demandes et le condamner à lui verser la somme de 2 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.

Par conclusions remises le 18 octobre 2022, auxquelles il est renvoyé pour plus ample exposé de ses moyens, M. [G] [V] demande à la cour de réformer le jugement du conseil de prud’hommes en ce qu’il l’a condamné à verser à Mme [O] les sommes suivantes :

remboursement de frais : 300,25 euros,

dommages et intérêts pour privation illégitime de son véhicule de fonction : 3 000 euros,

dommages et intérêts pour absence d’adhésion d’un service de santé au travail : 4 000 euros,

paiement des commissions de janvier 2019 : 463 euros,

congés payés afférents : 46, 30 euros,

solde dû sur son indemnité de licenciement : 293,50 euros,

solde dû sur son indemnité compensatrice de congés payés : 2 948,74 euros,

rappel de salaire sur la période allant du 20 mars au 4 mai 2020 : 1 778,52 euros,

article 700 du code de procédure civile : 1 500 euros,

dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : 20 000 euros ;

– le confirmer pour le surplus, débouter Mme [O] de son appel principal et de toutes ses demandes fins et conclusions, y ajoutant, la condamner à lui payer une somme de 1 500 euros au titre des frais irrépétibles exposés en cause d’appel, outre les entiers dépens.

L’ordonnance de clôture de la procédure a été rendue le 20 octobre 2022.

MOTIFS DE LA DÉCISION

A titre liminaire, il convient de préciser que conformément à l’application des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile, la cour n’étant saisie que par le dispositif des conclusions, elle ne peut statuer sur la demande de dommages et intérêts à hauteur de 5 000 euros pour mauvaise foi caractérisée présentée par M. [V] uniquement dans le corps de ses conclusions.

Sur la résiliation judiciaire du contrat de travail

Lorsqu’un salarié saisit le conseil des prud’hommes d’une demande de résiliation de son contrat de travail et qu’il est ensuite licencié, le juge doit d’abord examiner la demande de résiliation judiciaire, avant de se prononcer sur la régularité du licenciement.

La résiliation judiciaire du contrat de travail peut être prononcée si l’employeur n’exécute pas ses obligations contractuelles et que les manquements sont d’une gravité suffisante pour empêcher la poursuite du contrat de travail.

La résiliation judiciaire du contrat de travail prend effet au jour où le juge la prononce, dès lors qu’à cette date le salarié est toujours au service de son employeur. Lorsque le salarié n’est plus au service de son employeur au jour où il est statué sur la demande de résiliation judiciaire, cette dernière prend effet, si le juge la prononce, au jour du licenciement ou au jour de la prise d’acte de rupture ou au jour à partir duquel le salarié a cessé de se tenir à la disposition de son employeur.

La résiliation judiciaire du contrat de travail produit les effets d’un licenciement nul ou sans cause réelle et sérieuse avec toutes ses conséquences de droit.

En l’espèce, au soutien de sa demande de résiliation judiciaire, Mme [O] invoque le retrait abusif et illégitime de son véhicule de fonction, l’absence d’adhésion de son employeur à un service de santé au travail, la privant de toute visite médicale d’embauche, mais également de la possibilité de consulter un médecin du travail pendant son arrêt maladie, le non paiement des commissions dues au mois de janvier 2019, le manquement de son employeur à son obligation de maintien de salaire ainsi que le harcèlement moral dont elle a été victime.

I – Sur le véhicule de fonction

La suppression d’un véhicule mis à disposition d’un salarié constitue une modification du contrat de travail nécessitant l’accord du salarié. De plus, un véhicule de fonction, dont le salarié conserve l’usage dans sa vie personnelle, ne peut, sauf stipulation contraire, être retiré à l’intéressé pendant une période de suspension du contrat de travail.

En l’espèce, aux termes d’un avenant signé le 25 mai 2018, les parties ont convenu qu’ ‘un véhicule Citroën 3 a été pris en location pour une durée de 3 ans auprès de la banque CIC en vue de prêts consentis aux clients. En mai 2018, il a été décidé qu'[D] [O] utiliserait le véhicule pour les besoins de sa profession ainsi que pour ses déplacements domicile-agence le matin et le soir. Les déplacements personnels sont tolérés, étant entendu que les frais de carburants seront alors à sa charge. Le fait de lui confier le véhicule ne constitue en aucun cas un engagement pour les années à venir. Lors de la restitution du véhicule, les frais de remise en étant pourront lui être réclamés.’ Par ailleurs, il résulte des bulletins de salaires de Mme [O] et de l’attestation du comptable que cette mise à disposition faisait l’objet d’un avantage en nature évalué à 63,67 euros par mois sur lequel la salariée payait des cotisations sociales.

Au vu de ces éléments, le véhicule confié à Mme [O] revêtant incontestablement la qualification de véhicule de fonction et la convention de mise à disposition ne prévoyant aucune clause de restitution pendant la suspension du contrat de travail, c’est à tort que M. [V] s’est cru autorisé à réclamer, dans un premier temps par courrier, puis dans un second temps, en mandatant un huissier de justice, la restitution du véhicule auprès de Mme [O] pendant son arrêt de travail.

Sur le préjudice en résultant, il est constant que Mme [O] a rendu le véhicule à M. [V] le 26 mars 2019 et que malgré l’injonction faite par la cour d’appel de Rouen dans son arrêt du 18 décembre 2019 de lui restituer le véhicule, Mme [O] n’est jamais entrée à nouveau en possession dudit véhicule, les parties n’ayant pas réussi à se mettre d’accord sur un rendez-vous commun permettant cette reprise avant la rupture du contrat de travail intervenue le 4 mai 2020. Elle sollicite, en conséquence, en réparation de son préjudice moral et matériel une indemnité de 5 000 euros.

En l’absence de tout justificatif établissant la réalité du préjudice matériel et moral subi du fait de cette privation, autre que la facture du coût de la location d’une voiture du 11 au 29 avril 2019 pour un montant de 300,25 euros dont le lien de causalité avec la restitution du véhicule de fonction n’est aucunement établi eu égard à la courte période de location qui ne correspond pas à la période de privation et au fait que M. [V] rapporte, par ailleurs, la preuve que Mme [O] disposait, à titre personnel, de deux autres véhicules, régulièrement assurés à son nom et à celui de son conjoint auprès d’Aviva, il convient d’allouer en réparation du préjudice subi par Mme [O] la somme de 800 euros.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris et de condamner M. [V] à payer à Mme [O] la somme de 800 euros, sous déduction de la somme provisionnelle de 800 euros accordée par l’arrêt du 18 décembre 2019.

II – Sur le rappel de commission et le maintien de salaire

Sur le paiement des commissions :

Aux termes de l’article 1134 du code civil, dans sa rédaction applicable, les conventions légalement formées tiennent lieu de loi à ceux qui les ont faites.

La charge de la preuve du paiement du salaire incombe à l’employeur qui se prétend libéré. Les bonus et primes sur objectif et commissions en pourcentage sur un chiffre d’affaires constituent une rémunération variable. Toutefois, il appartient au salarié de justifier qu’il a droit à l’attribution des commissions qu’il revendique, l’employeur, tenu à une obligation de transparence, étant uniquement contraint à communiquer au salarié les éléments servant de base de calcul de son salaire, notamment de cette part variable.

En l’espèce, le contrat de travail de Mme [O] prévoit qu’ ‘outre le salaire fixe prévu au présent contrat, Mademoiselle [O] [D], percevra des primes sur objectifs fixés en annexe, ainsi qu’une prime de 13ème mois versée pour 1/2 au mois de juin et pour 1/2 au mois de décembre, prorata temporis du temps de présence.’ L’annexe au contrat précise la rémunération des commissions sur objectif comme suit :

‘- auto : 10 % sur le montant de la prime HT, tout contrat supplémentaire 15 %,

– habitation : 10 % sur le montant de la prime HT, tout contrat supplémentaire 15 %,

– complémentaire santé : 10 % sur le montant de la prime HT, si plus de 2 contrats : 15 % sur l’ensemble de la production,

– prime périodique : 100 €

– prime unique : 100 € par tranche de 15 000 € ou 12 000 € en UC

– contrat prévoyance : 100 €

– 10 % sur les autres contrats.’

Mme [O] soutient qu’elle avait droit à une commission de 463 euros au mois de janvier 2019 pour les contrats conclus en décembre 2018, son employeur ne contestant pas lui devoir cette somme.

S’il est exact que M. [V] conteste un certain nombre de commissions qu’il a réglées à sa salariée, estimant qu’elles procèdent de déclarations mensongères de sa part, force est néanmoins de constater qu’il produit lui-même d’une part, un SMS de Mme [O] qui explicite le montant ainsi réclamé comme suit ‘santé [Y] [R] : 777 euros; Santé [Y] [J] : 523 euros, Auto Flo naturel : 738 euros, Amrp Cavaro (carnaval) : 2 263 euros, auto Cavaro 329 euros total 10 % : 463 euros’ et d’autre part, un tableau récapitulatif des contrats déclarés conclus de manière mensongère selon lui, qui indique que pour le mois de décembre 2018, les indications fournies par Mme [O] sont exactes.

Au vu de ces éléments, c’est à juste titre que Mme [O] a sollicité le paiement de ce rappel de commissions et les congés payés y afférents, le jugement entrepris étant donc confirmé sur ce point.

Sur le rappel d’indemnités de maintien de salaire :

Aux termes de l’article L. 1226-1 du code du travail, tout salarié ayant une année d’ancienneté dans l’entreprise bénéficie, en cas d’absence au travail justifiée par l’incapacité résultant de maladie ou d’accident constaté par certificat médical et contre-visite s’il y a lieu, d’une indemnité complémentaire à l’allocation journalière prévue à l’article L. 321-1 du code de la sécurité sociale, à condition :

1° D’avoir justifié dans les quarante-huit heures de cette incapacité, sauf si le salarié fait partie des personnes mentionnées à l’article L. 169-1 du code de la sécurité sociale ;

2° D’être pris en charge par la sécurité sociale ;

3° D’être soigné sur le territoire français ou dans l’un des autres Etats membres de la Communauté européenne ou dans l’un des autres Etats partie à l’accord sur l’Espace économique européen.

Ces dispositions ne s’appliquent pas aux salariés travaillant à domicile, aux salariés saisonniers, aux salariés intermittents et aux salariés temporaires.

Un décret en Conseil d’Etat détermine les formes et conditions de la contre-visite mentionnée au premier alinéa.

Le taux, les délais et les modalités de calcul de l’indemnité complémentaire sont déterminés par voie réglementaire.

En outre, il résulte de l’article 27 de la convention collective applicable que le salarié de plus de huit ans d’ancienneté au premier jour de son absence pour maladie ou accident se voit verser par l’employeur, au-delà d’une franchise d’un nombre de jours variable selon la nature de l’arrêt de travail, une allocation qui complète les prestations en espèces versées par la sécurité sociale et/ou d’autres régimes de prévoyance d’entreprise alimentés par l’employeur, de 100 % pendant les 90 premiers jours et de 66 % pendant les 90 jours suivants. Le plein salaire net à prendre en compte pour calculer le salaire à maintenir est celui que le salarié aurait perçu s’il avait continué à travailler, à l’exclusion des primes et gratifications bénévoles. Pour les salariés payés en tout ou partie à la commission, il convient de prendre en compte la rémunération moyenne mensuelle des 12 mois précédant la date de l’arrêt de travail. Sont déduites du plein salaire les indemnités journalières et les éventuelles prestations en espèces versées par le régime de prévoyance institué par l’entreprise.

Si du fait d’une carence de l’employeur, un salarié ne perçoit pas les prestations auxquelles il aurait pu prétendre en vertu du régime de prévoyance prévu par la convention collective, le juge peut condamner l’employeur à l’indemnité à hauteur des prestations non perçues.

Par ailleurs, l’employeur ne peut se faire justice à lui-même en effectuant directement une retenue sur salaire sauf s’il justifie d’une créance certaine, liquide et exigible, cette retenue ne pouvant, en toute hypothèse, lorsqu’une compensation s’opère avec le salaire, s’appliquer que sur la fraction saisissable.

En l’espèce, M. [V] ne conteste ni son obligation de maintien de salaire, ni les calculs opérés par Mme [O] sur le montant de l’assiette de calcul des sommes qu’elle aurait dues percevoir entre les mois de décembre 2018 et décembre 2019 au titre de cette obligation, mais estime qu’il a légitimement opéré une compensation entre le montant de cette assiette et les commissions indûment perçues par sa salariée aux termes de déclarations de conclusion de contrat mensongères qu’il chiffre à la somme de 4 954,30 euros, de sorte qu’il a régulièrement exécuté son obligation, faisant observer que si quelques retards ont pu être subis par Mme [O], ils sont dus au temps nécessaire à la transmission des informations au cabinet comptable en charge de l’établissement des salaires et aux contraintes engendrées par la crise sanitaire subie au début de l’année 2020.

Or, M. [V] ne produit aucune pièce justificative probante établissant le caractère certain, liquide et exigible de la créance qu’il invoque au titre de commissions indues. En effet, si la valeur probante des déclarations de commissions établies par Mme [O] ne peut légitimement être remise en cause, il n’en demeure pas moins que le caractère injustifié des contrats ainsi déclarés ne résultent d’aucune pièce objective. M. [V] produit à ce titre uniquement des relevés d’écrans informatiques portant mention de contrats, mais à l’exception des mentions manuscrites portées sur ces documents, à laquelle la cour ne peut accorder la moindre valeur probante, ni ces pièces ni leur étude comparée ne permettent d’établir la fictivité des contrats allégués. Il en est de même du constat d’huissier que M. [V] a fait dresser le 13 septembre 2019 et qui se contente de retranscrire ces mêmes éléments de preuve informatiques ainsi que les explications de M. [V].

Dans ces conditions, il convient d’infirmer le jugement entrepris et de condamner M. [V] à payer à Mme [O], à titre d’indemnité pour manquement à l’obligation de maintien de salaire sur la période allant de décembre 2018 à décembre 2019, la somme de 5 889,77 euros, étant précisé que s’agissant d’une indemnité compensant le préjudice subi et non d’un rappel de salaire, il n’y a pas lieu d’allouer à la salariée, les congés payés y afférents.

En revanche, pour la période allant du 20 mars au 4 mai 2020, c’est à juste titre et sans qu’au demeurant, M. [V] ne fasse valoir d’arguments sérieux contestant cette analyse, que les premiers juges ont retenu qu’au titre de son obligation de maintien de salaire, l’employeur aurait dû prendre en compte une assiette de calcul de 2 368 euros nets et non de 1 678,46 euros, de sorte que Mme [O] a subi un préjudice d’un montant total de 1 778,52 euros, que M. [V] doit indemniser. Le jugement est donc confirmé sur ce point.

III – Sur le harcèlement moral

Aux termes de l’article L.1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale de compromettre son avenir professionnel.

L’article L. 1154-1 du même code, dans sa version antérieure à la loi n°2016-1088 du 8 août 2016 applicable au cas d’espèce prévoit qu’en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il incombe à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement.

En l’espèce, Mme [O] expose qu’à compter de 2018, elle a fait l’objet de reproches injustifiés sur une prétendue non-atteinte des objectifs, de remarques déplacées sur sa tenue vestimentaire et de tentatives de déstabilisation allant jusqu’à surveiller tous ses déplacements. Elle affirme que ces pressions continuelles vont se faire ressentir sur son état de santé dès décembre 2018, date à laquelle elle a été une première fois arrêtée (du 1er au 21 décembre 2018), puis après une brève reprise de ses fonctions, elle a été à nouveau en arrêt à compter du 12 janvier 2019, date à laquelle les tentatives de déstabilisation de M. [V] s’intensifieront, puisqu’à compter de cette date, il va refuser de lui payer ses commissions, de lui maintenir son salaire, la priver de son véhicule de fonction, résilier son forfait téléphonique professionnel, tenir des propos dégradants et misogynes, des accusations d’escroquerie infondées, réduire le nombre de congés payés acquis, lui retirer de manière injustifiée des tickets restaurant, ce comportement ayant eu de graves répercussions sur son état de santé.

Il convient de relever que pour étayer ses affirmations, Mme [O] ne produit aucun élément antérieur à son arrêt de travail du 1er décembre 2018 à l’exception d’un échange de SMS en novembre-décembre 2018 avec M. [V] dans lequel les propos tenus par celui-ci sont les suivants : le samedi 1er décembre, Mme [O] l’informe qu’elle est en arrêt jusqu’au 11 décembre ; il répond ‘ok, soignez vous bien’, étant précisé que quelques jours auparavant, il lui avait envoyé le message suivant : ‘ si vous n’êtes pas en forme, arrêtez-vous 8 jours, on se débrouillera et vous pourrez vous reposer et vous soigner’. Le 11 décembre, Mme [O] l’informe que son arrêt est prolongé jusqu’au 21 décembre inclus, et il lui demande alors si elle s’occupe de Degelec avec lequel elle avait rendez-vous ou si il s’en occupe, étant précisé que dans le cadre de l’arrêt de travail initial, Mme [O] avait proposé spontanément sans aucune demande en ce sens de son employeur de joindre les clients du rendez-vous prévu sur sa période d’arrêt pour décaler l’entrevue.

Cet échange ne contient aucun propos déplacés ou inadaptés. En outre, certes, il a eu lieu pendant une suspension du contrat de travail, mais il correspond uniquement à une situation d’exécution loyale du contrat de travail au titre de laquelle le salarié est tenu d’informer son employeur de son arrêt de travail et l’employeur, dans le cadre de l’exercice normal de son pouvoir de direction, afin d’organiser dans de bonnes conditions la poursuite de son activité, de s’enquérir auprès de son salarié, qui dispose d’une certaine autonomie dans la gestion de ses rendez-vous, des démarches à prévoir pour pallier son absence.

Pour illustrer l’ambiance de travail qu’elle expose subir depuis le début de l’année 2018, Mme [O] produit également des échanges de SMS du mois de mars 2019 avec une dénommée Lilas, qui semble être une autre salariée de M. [V], eu égard au contenu de l’échange, et aux termes desquels Mme [O] met en garde cette personne contre M. [V] qui serait ‘méchant’ et évoque le fait qu’une autre collègue [H] aurait une relation avec M. [V] et qu’ ‘elle aurait obtenu plein de choses grâce à ça’. De même, elle produit un échange de SMS non daté avec une dénommée [N] [W] à qui elle demande sur quoi M. [V] l’a sollicitée pour témoigner et à laquelle elle conseille de ‘faire gaffe’ car M. [V] la manipule. Il convient de constater que les critiques à l’encontre de l’employeur émane uniquement de Mme [O], étant de surcroît relevé qu’il s’agit de considérations générales ne faisant état d’aucune situation précise et circonstanciée.

Enfin, est versé aux débats un échange de SMS non daté, mais antérieur au 24 janvier 2019 au vu des éléments présents sur la capture d’écran et non circonstanciés de telle sorte qu’il n’est pas possible de déterminer l’auteur des propos ainsi tenus : premier message : ‘je n’arrive pas à comprendre comment vous avez pu tenir tant d’années avec tout ce qu il s est passe’ et second message : ‘oui j’ai failli partir à plusieurs reprises, surtout quand il m à caché la première naissance, mais comme personne n’était au courant, j’étais seule et personne pour m ouvrir les yeux. et l’emprise était trop grande. Cest pour cela comme vous en avez parlé à ceux que vous aimez vous êtes pleine de force et cest ce qui change tout.’ Cet échange non contextualisé et contenant des propos très vagues ne permet pas de les relier aux conditions de travail de Mme [O].

En revanche, elle produit un mail envoyé par M. [V] le 12 décembre 2018 au moment de la prolongation de son premier arrêt de travail sur la boîte personnelle de Mme [O], dans lequel ce dernier manifeste clairement son mécontentement sur la situation, faisant observer qu’il n’est toujours pas en possession d’un justificatif de la prolongation annoncée par SMS et qu’ ‘il aurait souhaité que se manifeste un peu plus la conscience professionnelle que vous prônez régulièrement’, espérant que sa ‘reprise se fera dans de bonnes conditions avec une bonne hygiène de vie et une remise en question de [ses] méthodes de travail’, terminant son écrit par la formule suivante : ‘je suis désolé de ce mail, mais on ne peut continuer sur cette lancée confortable et peu efficace, nous remettrons à jour les objectifs actuels que vous contestez par des objectifs axés vers les professionnels’.

Si l’envoi et le contenu de ce mail peuvent être qualifiés d’inadaptés et qu’ils reflètent un différent entre Mme [O] et M. [V] sur les objectifs de travail de cette dernière, ce seul élément ne permet pas de caractériser des agissements répétés dégradant les conditions de travail de Mme [O] depuis le début de l’année 2018.

Toutefois, il résulte des motifs adoptés précédemment que M. [V] a refusé de lui régler ses commissions dues pour le mois de décembre 2018, qu’il lui a supprimé de manière injustifiée son véhicule de fonction et qu’il a failli à son obligation de maintien de salaire pendant toute la période de son arrêt de travail privant en moyenne Mme [O] d’une somme de 500 euros par mois.

Aussi et bien que les autres faits allégués par la salariée ne résultent d’aucune pièce du dossier, notamment la résiliation de la ligne téléphonique professionnelle, les propos misogynes ou dégradants et les accusations d’escroquerie, ou sont relatifs aux conditions et conséquences de la rupture du contrat de travail, notamment pour l’erreur dans le calcul de l’indemnité compensatrice de congés payés, de sorte qu’ils ne peuvent être pris en compte au titre des agissements ayant dégradé les conditions de travail et l’état de santé de la salariée au cours de la relation contractuelle, force est de constater que Mme [O] présente des faits répétés qui laissent présumer une situation de harcèlement qui n’est objectivée par aucun élément, puisqu’il résulte des motifs adoptés précédemment que M. [V] ne rapporte pas la preuve du bien fondé de sa retenue indue des commissions et du véhicule de fonction.

Enfin, sur son état de santé, si Mme [O] ne fait pas non plus état d’éléments antérieurs à mars 2019, soit près de deux mois après le début de son second et dernier arrêt de travail, elle verse néanmoins aux débats un certificat médical de son médecin traitant établi le 22 mars 2019 qui indique que Mme [O] l’a consulté ce jour dans le cadre ‘de son épuisement professionnel’, un certificat d’un psychiatre qui indique qu’il la suit depuis le mois d’octobre 2019 pour syndrome anxio-dépressif suite à une situation conflictuelle avec son employeur, ainsi que le rapport d’expertise médicale réalisée à la demande de l’organisme de prévoyance le 24 septembre 2019 qui fait état d’un certificat du médecin traitant non daté évoquant ‘un syndrome anxio-dépressif consécutif à un syndrome d’épuisement professionnel’et qui décrit les symptômes comme suit : ‘depuis 2018, Madame [O] a ressenti un épuisement. De plus, il semblerait que son employeur avait des propos et un comportement qui auraient pu faire penser à du harcèlement sexuel. Ceci surajouté à la surcharge de travail a abouti à une dépression.’ Toutefois, tous ces éléments médicaux ne font que reprendre les uniques déclarations de Mme [O] qui, contrairement à ce qu’elle soutient, ne permettent pas d’affirmer que son syndrome anxio-dépressif trouve son origine uniquement dans la dégradation de ses conditions de travail.

Aussi, ces éléments justifient qu’il lui soit alloué une indemnité de 2 000 euros au titre de l’exécution déloyale du contrat de travail constituée par le harcèlement dont elle a été victime.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris sur ce point.

IV- Sur l’adhésion à un service de santé au travail

En application de l’article D. 4622-22 du code du travail, dans ses différentes versions applicables au litige, tout employeur a l’obligation d’adhérer à un service de santé au travail.

En l’espèce, il est constant que M. [V], qui a reconnu son erreur, n’a honoré cette obligation que le 16 avril 2019, après que Mme [O], par courrier recommandée du 15 février 2019 adressé en copie à l’inspecteur du travail, ait rappelé à M. [V] qu’elle n’avait jamais eu de convocation à la médecine du travail depuis 2010 alors que son contrat prévoyait une visite d’embauche et qu’elle lui ait demandé de lui indiquer l’organisme compétent pour sa visite de pré-reprise, cette demande étant accompagnée d’un courrier de rappel du 8 mars 2019 émanant de Mme [O] et d’un courrier de rappel du 12 mars 2019 émanant de l’inspecteur du travail.

Mme [O] a été convoquée à une première visite médicale par le médecin du travail le 3 mai 2019.

Estimant qu’elle a été privée de la possibilité de consulter la médecine du travail pendant l’exécution de son contrat de travail et pendant son arrêt maladie, afin d’être examinée, informée et dirigée vers les services spécialisés de prise en charge de sa pathologie de dépression suite à un harcèlement professionnel, elle sollicite une indemnisation à hauteur de 5 000 euros.

Alors qu’il résulte des motifs précédemment adoptés qu’il n’est pas établi un lien de causalité exclusif entre l’état de santé de Mme [O] et la situation de harcèlement subi, qu’en outre Mme [O], alors qu’elle a parfaitement su faire la démarche le 15 février 2019, ne justifie aucunement avoir sollicité précédemment son employeur pour connaître les coordonnées du service de médecine du travail, qu’elle ne justifie pas non plus de la moindre consultation médicale ou du moindre élément établissant une dégradation de son état de santé physique ou psychologique antérieur à la suspension de son contrat de travail, le préjudice résultant de ce manquement sera plus justement réparé par l’allocation d’une somme de 200 euros.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris et de condamner M. [V] à lui payer à ce titre une somme de 200 euros, sous déduction de la somme provisionnelle de 1 000 euros allouée par l’arrêt du 18 décembre 2019.

Au vu de l’ensemble de ces éléments, les manquements de M. [V] à son obligation d’exécution loyale du contrat du contrat multiples et répétés sur plusieurs mois justifient la résiliation judiciaire du contrat de travail à ses torts exclusifs, celle-ci produisant les effets d’un licenciement nul à compter du 4 mai 2020, date du licenciement de Mme [O], ces manquements étant notamment constitués de harcèlement moral.

En conséquence, il convient d’infirmer le jugement entrepris.

Sur le licenciement

Le salarié dont le licenciement est nul et qui ne demande pas sa réintégration a droit, d’une part, aux indemnités de rupture, soit en l’espèce, l’indemnité légale de licenciement et l’indemnité compensatrice de préavis et, d’autre part, à une indemnité réparant intégralement le préjudice résultant du caractère illicite du licenciement, dont le montant est souverainement apprécié par les juges du fond, dès lors qu’il est au moins égal à celui prévu par l’article L. 1235-3 du code du travail.

I – Sur l’indemnité compensatrice de préavis

Aux termes de l’article L.1234-1 du code du travail, le salarié qui justifie chez le même employeur d’une ancienneté de services continus de plus de deux ans a droit à un préavis de deux mois. La convention collective applicable ne comporte pas de dispositions plus favorables en la matière.

En l’espèce, Mme [O] ayant plus de neuf d’ancienneté, elle peut prétendre au versement d’une indemnité compensatrice de préavis équivalente à deux mois de salaire d’un montant mensuel moyen qu’il convient de fixer, au vu des bulletins de salaires produits, de l’attestation Pôle emploi et en tenant compte des commissions dues à Mme [O], à la somme de 3 003,77 euros.

En conséquence, M. [V] sera condamné à lui payer la somme de 6 007,54 euros et les congés payés afférents.

II – Sur l’indemnité légale de licenciement

En application des dispositions des articles L.1234-9 et R.1234-1 à R.1234-4 du code du travail dans leur rédaction issue de l’ordonnance 2017-1387 du 22 septembre 2017 et du décret du 25 septembre 2017 applicable au présent litige, le salarié licencié qui compte au moins huit mois d’ancienneté au service du même employeur a droit à une indemnité de licenciement dont le montant ne peut être inférieur à un quart de mois de salaire par année d’ancienneté, auquel s’ajoute un tiers de mois de salaire par année au-delà de dix ans d’ancienneté. En cas d’année incomplète, l’indemnité est calculée proportionnellement au nombre de mois complets.

C’est par une application conforme de cette disposition qu’il a été versé à Mme [O] une indemnité de licenciement de 7 103,91 euros (3 003,77 x 1/4 x 9,46 ans), de sorte que sa réclamation d’un solde restant dû de 293,50 euros n’est pas fondée, étant fait observer que les premiers juges et Mme [O] ne critiquent pas le mode de calcul conforme aux dispositions sus-visées mais uniquement son assiette retenant, à tort et sans aucune explication, un salaire mensuel moyen de 3 127,87 euros bruts.

Le jugement est infirmé sur ce point.

III – Sur l’indemnité compensatrice de congés payés

Si M. [V] entend voir réformer la décision des premiers juges sur ce point, force est de relever qu’il n’émet aucune critique sur les motifs adoptés à ce titre.

En tout état de cause, il résulte de l’examen des bulletins de salaires des mois d’avril 2020 et mai 2020, ainsi que du reçu pour solde de tout compte, que c’est à juste titre que les premiers juges ont relevé qu’alors qu’il était dû à Mme [O] un solde de congés payés de 28,50 jours au titre de l’année N-1 et 5,97 jours au titre de l’année N, il ne lui avait été réglé qu’un solde total de 20,97 jours. Sur la base d’un salaire mensuel moyen de 3 003,77 euros, elle aurait dû percevoir à ce titre une somme de 4 852,13 euros. Or, Mme [O] n’ayant perçu qu’une somme de 2 5386 euros, elle demeure créancière d’une somme de 2 298,27 euros, le jugement étant ainsi infirmé.

IV – Sur les dommages et intérêts pour licenciement nul

En considération de son ancienneté (9 ans), de son âge au moment de la rupture (34 ans), de ce qu’elle justifie ne pas avoir retrouvé d’emploi et percevoir des indemnités chômage d’un montant de l’ordre de 1 800 euros, il convient d’allouer à Mme [O] une somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Les conditions de l’article L.1235-4 du code du travail étant réunies, il convient d’ordonner le remboursement par l’employeur fautif aux organismes intéressés des indemnités chômage versées à la salariée licenciée dans la limite de quatre mois d’indemnités de chômage, du jour de la rupture au jour de la présente décision.

Sur les dépens et frais irrépétibles

En qualité de partie succombante à titre principal, il y a lieu de condamner M. [V] aux entiers dépens, y compris ceux de première instance, de le débouter de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile et de le condamner à payer à Mme [O] la somme de 1 500 euros sur ce même fondement pour les frais générés en cause d’appel et non compris dans les dépens.

PAR CES MOTIFS

LA COUR

Confirme le jugement entrepris sur les sommes allouées à Mme [O] au titre de la commission due pour le mois de janvier 2019, sur le rappel de salaires pour la période du 20 mars au 4 mai 2020, sur les frais irrépétibles et les dépens,

L’infirme pour le surplus,

Statuant à nouveau,

Prononce la résiliation judiciaire du contrat de travail liant M. [G] [V] et Mme [D] [O] aux torts exclusifs de l’employeur à effet au 4 mai 2020, cette rupture produisant les effets d’un licenciement nul ;

Condamne M. [G] [V] à payer à Mme [D] [O] les sommes suivantes :

dommages et intérêts pour absence d’affiliation à un service de médecine du travail : 200 euros, sous déduction de la provision de 1 000 euros allouée par l’arrêt du 18 décembre 2019,

dommages et intérêts pour retrait injustifié du véhicule de fonction : 800 euros, sous déduction de la provision de 800 euros allouée par l’arrêt du 18 décembre 2019,

dommages et intérêts pour manquement à l’obligation de maintien du salaire : 5 889,77 euros,

dommages et intérêts pour exécution déloyale du contrat de travail : 2 000 euros,

indemnité compensatrice de préavis : 6 007,54 euros,

congés payés y afférents : 600,75 euros,

solde dû au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés : 2 298,27 euros,

dommages et intérêts pour licenciement nul : 20 000 euros,

Déboute Mme [D] [O] de sa demande au titre du solde d’indemnité de licenciement ;

Y ajoutant,

Ordonne le remboursement par M. [G] [V] aux organismes intéressés des indemnités chômage versées à Mme [D] [O] dans la limite de quatre mois d’indemnités de chômage, du jour de la rupture au jour de la présente décision ;

Condamne M. [G] [V] à payer à Mme [D] [O] la somme de 1 500 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Déboute M. [G] [V] de sa demande formulée en application de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [G] [V] aux entiers dépens.

La greffière La présidente

 


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