Grosse + copie
délivrées le
à
3e chambre sociale
ARRÊT DU 01 Mars 2023
Numéro d’inscription au répertoire général : N° RG 18/03750 – N° Portalis DBVK-V-B7C-NYBI
ARRÊT n°
Décision déférée à la Cour : Jugement du 20 JUIN 2018 TRIBUNAL DE PREMIERE INSTANCE DE PERPIGNAN
N° RG21700087
APPELANT :
Monsieur [R] [D]
[Adresse 1]
[Localité 5]
Représentant : Me Florent ESQUIROL, avocat au barreau de PYRENEES-ORIENTALES
INTIMEES :
CPAM DES PYRENEES ORIENTALES
[Adresse 2]
[Adresse 6]
[Localité 10]
Mme [S] [C] (Représentante de la CPAM) en vertu d’un pouvoir du 06/12/23
SA [7]
[Adresse 4]
[Localité 3]
Représentant : Me GARDIER substituant Me Bertrand LUX, avocat au barreau de BORDEAUX
COMPOSITION DE LA COUR :
L’affaire a été débattue le 19 JANVIER 2023, en audience publique, devant la Cour composée de :
Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet
Mme Isabelle MARTINEZ, Conseillère
Monsieur Pascal MATHIS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier, lors des débats : M. Philippe CLUZEL
ARRÊT :
– Contradictoire;
– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
– signé par Monsieur Richard BOUGON, Conseiller, faisant fonction de président spécialement désigné à cet effet et par Mademoiselle Sylvie DAHURON, greffier.
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* *
EXPOSÉ DU LITIGE
La SA [7] a embauché M. [R] [D] en qualité de directeur d’agence bancaire à compter du 16 août 2007.
À compter du 1er avril 2015, le salarié a été muté de l’agence de [Localité 5], à la création de laquelle il avait participé, à celle de [Localité 11].
Le salarié a été placé en arrêt de travail à compter du 5 mai 2015 pour un syndrome dépressif qu’il explique par un épuisement professionnel et il ne devait plus reprendre son poste dans l’entreprise.
Le 30 septembre 2015, le salarié a adressé à la caisse primaire d’assurance maladie des Pyrénées-Orientales une déclaration de maladie professionnelle pour une affection hors tableau dont la première constatation médicale remonte au 4 mai 2015.
Le salarié a été licencié pour inaptitude et impossibilité de reclassement suivant lettre du 19 octobre 2015.
Le salarié a contesté son licenciement devant le conseil de prud’hommes de Perpignan, lequel, par jugement du 17 juillet 2019, devait le débouter de ses demandes concernant le licenciement et surseoir à statuer en attendant le présent arrêt concernant les autres demandes. Le salarié a interjeté appel de cette décision et l’affaire a été fixée devant la cour de céans au 3 octobre 2022.
Suivant lettre du 6 septembre 2016 adressée au salarié, la caisse a reconnu le caractère professionnel de sa maladie conformément à l’avis rendu le 19 juillet 2016 par le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 9].
Se plaignant de la faute inexcusable de l’employeur M. [R] [D] a saisi le 2 février 2017 le tribunal des affaires de sécurité sociale des Pyrénées-Orientales.
Par lettre du 10 février 2017, l’employeur a saisi la commission de recours amiable afin de contester la reconnaissance du caractère professionnel de la maladie du salarié.
Le 12 juillet 2017 la commission de recours amiable a rejeté le recours de l’employeur.
Le 28 août 2017, l’employeur a saisi le tribunal des affaires de sécurité sociale des Pyrénées-Orientales afin de contester la décision de la commission de recours amiable. Par jugement du 6 août 2019, le tribunal a débouté l’employeur de ses demandes. Ce dernier a interjeté appel de cette décision et l’affaire n’est pas encore fixée devant la cour de céans.
Suivant jugement du 15 mai 2018, le tribunal du contentieux de l’incapacité de Montpellier a fixé à 25 % le taux d’incapacité permanente partielle résultant au 13 janvier 2016 de la maladie professionnelle survenue le 30 septembre 2015. Le tribunal s’est prononcé au visa du rapport d’expertise du Dr [T] [I] ainsi rédigé :
« Commémoratifs :
M. [R] [D] exerçait la profession de directeur de banque à [Localité 5]. À la suite d’une surcharge de travail, il a présenté des manifestations réactionnelles, dépressives et anxieuses assimilables à un burn-out, qui ont conduit à un arrêt de maladie le 04/05/2015. Par la suite, il a effectué une demande de requalification, avec reconnaissance de maladie professionnelle au 30 septembre, qui a été autorisée à partir de la même date. Antérieurement au 04/05/2015, il n’avait jamais bénéficié de prise en charge par un psychologue ou un psychiatre. Il n’a jamais présenté d’état dépressif antérieur, pas de tentative de suicide, pas d’arrêt de maladie antérieur pour raison psychiatrique. On ne retrouve pas d’antécédents familiaux psychiatriques. À partir du mois de juin 2015, il est pris régulièrement en charge par le Dr [J], psychiatre à [Localité 10]. De juin 2015 à janvier 2016, il est suivi régulièrement tous les 15 jours, parfois tous les mois, avec prescription d’un traitement par antidépresseur : ZOLOFT 1 comprimé par jour. Depuis février 2016, le rythme des consultations se serait espacé et il verrait ce praticien environ tous les mois (non documenté). Le ZOLOFT a été diminué puis arrêté et il ne prend plus depuis mars 2016 qu’ATARAX 25 mg 2 comprimés par jour (non documenté à l’exception d’une seule ordonnance datée du 29/07/2018). Il n’y a pas eu d’hospitalisation psychiatrique. M. [D] vit avec sa compagne, qui exerce la profession de formatrice consultante. Le couple n’a pas d’enfant, mais d’une précédente liaison, M. [D] a trois enfants âgés respectivement de 14, 18 et 23 ans.
Examen
Le sujet est anxieux, légèrement inhibé, avec des troubles cognitifs, attentionnels et de la concentration. Il a du mal à gérer son dossier médical. Il se plaint de céphalées, qui surviennent périodiquement régulièrement plusieurs fois par semaine, qui, lorsqu’elles surviennent, entraînent des douleurs jusqu’au moment de l’endormissement, et qui ne sont pas bien contrôlées par le traitement antalgique. Il décrit une dysthymie avec des sautes d’humeur et une irritabilité. Il décrit des troubles de la concentration et de l’attention, il ne parvient pas à se concentrer sur des tâches intellectuelles plus de 3 ou 4 heures, il présente des troubles de la mémoire. Il a des sentiments de dévalorisation, de perte de confiance en lui, il se plaint de troubles de la libido. Il présente des crises d’angoisse, avec un désarroi et l’impression d’un avenir bouché, avec une vision catastrophique de son existence, notamment du futur de son existence relationnel et affectif mais également professionnel. Sa compagne décrit des réactions d’irritabilité et d’agressivité qui tranchent avec son caractère antérieur. Lui-même décrit des modifications de sa personnalité : « je ne me sens plus le même ».
Discussion
1) Le sujet allègue un suivi psychiatrique, mais il n’est pas fourni de documentation médicale en faisant état de ce suivi au-delà du 13/01/2016 (date de dernière consultation, dernière prescription et date de consolidation de l’épisode dépressif antérieur) et avant une nouvelle ordonnance du 29/01/2018, prescrivant un anxiolytique (Atarax). Il existe donc manifestement une rupture de prise en charge du 13/01/2016 au 29/01/2018.
2) Lors de la consolidation du 13/01/2016 le psychiatre traitant mentionne au titre des séquelles : « de la vulnérabilité et des angoisses ».
3) Le médecin conseil a fixé un taux d’IPP de 15 % + 5 % au titre du coefficient professionnel pour des séquelles d’un épisode dépressif sévère sans trouble psychotique consistant en : « persistance de troubles chroniques anxieux, toubles mnésiques, troubles de la concentration. »
4) Le barème AT/MP de l’UCANSS mentionne, concernant la maladie professionnelle section 4.4 Troubles psychiques chroniques. États dépressifs d’intensité variable :
‘ soit avec une asthénie persistante : 10 à 20 %;
‘ soit à l’opposé, grande dépression mélancolique, anxiété pantophobique : 50 à 100 %
Troubles du comportement d’intensité variable : 10 à 20 %.
5) Postérieurement à la date de consolidation, les troubles ont régressé, permettant l’arrêt du traitement antidépresseur.
6) L’examen de ce jour retrouve des plaintes cognitives subjectives, une dysthymie, une irritabilité, des sentiments d’injustice.
En fonction de l’ensemble de ces éléments, il n’y a pas d’argument médico-légal permettant de soutenir un taux d’IP différent de celui retenu par la CPAM à hauteur de 15 % (+ 5 % au titre professionnel). »
Le tribunal des affaires de sécurité sociale, par jugement rendu le 20 juin 2018, a :
débouté le salarié de sa demande tendant à voir reconnaître la faute inexcusable de l’employeur ;
dit qu’il sera statué ultérieurement sur la contestation de la décision de la commission de recours amiable du 22 juin 2017 quant à la prise en charge de la maladie professionnelle par la CPAM dans le cadre de l’instance enregistrée sous le n° 21700506 ;
condamné le salarié à verser à l’employeur la somme de 1 500 € au titre des frais irrépétibles.
Cette décision a été notifiée le 10 juillet 2018 à M. [R] [D] qui en a interjeté appel suivant déclaration du 18 juillet 2018.
Par arrêt partiellement avant dire droit du 12 octobre 2022 la cour a :
dit n’y avoir lieu de surseoir à statuer en l’attente de l’arrêt à intervenir dans l’instance opposant la SA [7] à la caisse primaire d’assurance maladie des Pyrénées-Orientales concernant la décision de la commission de recours amiable du 22 juin 2017 ;
dit que dans le cadre du présent litige, la cour n’est pas saisie du point de savoir si la saisine de la commission de recours amiable par la SA [7] le 10 février 2017 est tardive ;
dit que la cour ne se trouve pas plus saisie dans le cadre du présent litige d’une demande d’infirmation de la décision rendue par la commission de recours amiable le 22 juin 2017 ;
ordonné la réouverture des débats ;
renvoyé la cause à l’audience du 19 janvier 2023 afin de permettre aux parties d’indiquer si une juridiction de première instance ou d’appel a déjà recueilli l’avis d’un second comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles et dans l’affirmative de le produire en s’expliquant sur son utilisation dans le cadre du présent débat mené à la contradiction de toutes les parties ;
sursis à statuer sur les autres demandes ;
réservé les dépens.
Vu les écritures déposées à l’audience et soutenues par son conseil aux termes desquelles M. [R] [D] demande à la cour de :
infirmer dans son intégralité le jugement entrepris en ce qu’il l’a débouté de sa demande tendant à voir reconnaître la faute inexcusable de l’employeur, en ce qu’il sera statué ultérieurement sur la contestation de la décision de la commission de recours amiable du 22 juin 2017 quant à la prise en charge de la maladie professionnelle par la CPAM dans le cadre de l’instance enregistrée sous le n° 21700506, et en ce qu’il l’a condamné à verser à l’employeur la somme de 1 500 € sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
dire que le recours de l’employeur du 10 février 2017 est hors délai ;
débouter l’employeur de sa demande de sursis à statuer ;
dire en tout état de cause n’y avoir lieu à sursis à statuer compte tenu de l’unicité d’instance et l’absence de lien entre le recours de l’employeur auprès de la CRA ou du TCI et l’instance devant le TASS introduite par le salarié victime d’une maladie professionnelle ;
déclarer le jugement opposable à la CPAM ;
dire que l’employeur a commis une faute inexcusable à l’origine de la maladie professionnelle dont il a été victime ;
ordonner en conséquence la majoration des indemnités relatives à la maladie professionnelle servies à la victime dans les limites maximales prévues par l’article L. 452-2 du code de la sécurité sociale ;
dire qu’il sera indemnisé de l’intégralité de ses préjudices qui seront chiffrés après l’expertise judiciaire sollicitée avant dire droit sur son expertise ;
ordonner avant dire droit une expertise avec la mission suivante :
‘donner à la cour tous les éléments permettant d’évaluer :
‘les souffrances physiques et morales endurées ;
‘le préjudice d’agrément ;
‘le préjudice résultant de la perte ou de la diminution de possibilité de promotion professionnelle au regard de la formation professionnelle et des prévisions de carrière de l’intéressé ;
‘le déficit fonctionnel temporaire total et partiel correspondant à la privation d’activité de la vie quotidienne et des agréments normaux de la vie ;
‘dire que l’expert d’une manière générale donnera toutes informations qu’il estimera utile à la solution du litige et à l’estimation des préjudices subis par le salarié ;
condamner l’employeur à lui verser une somme de 50 000 € à titre de provision à valoir sur l’indemnisation de son préjudice ;
dire que la CPAM aura l’obligation de faire l’avance des réparations dues à M. [D] victime d’une maladie professionnelle provoquée par la faute inexcusable de l’employeur telle qu’elle est instituée par l’article L. 452-3 du code de la sécurité sociale ;
condamner l’employeur au paiement de la somme de 5 000 € au titre des frais irrépétibles ainsi qu’aux dépens.
Vu les écritures déposées à l’audience et reprises par son conseil selon lesquelles la SA [7] demande à la cour de :
désigner avant dire droit un second CRRMP conformément aux dispositions de l’article R. 142-17-2 du code de la sécurité sociale ;
à titre subsidiaire,
la déclarer recevable en ses écritures et en son appel incident ;
infirmer le jugement entrepris en ce qu’il n’a pas sursis à statuer sur l’ensemble des demandes du salarié dans l’attente d’une décision définitive sur le caractère professionnel ou de la maladie du salarié (procédure actuellement pendante devant la cour de céans sous le RG 19/06264) ;
surseoir à statuer dans l’attente de la décision de la cour de céans (RG. 19/06264) relative à la contestation de la décision de la commission de recours amiable du 22 juin 2017 sur la prise en charge de la maladie professionnelle par la CPAM des Pyrénées-Orientales dans le cadre de l’instance enregistrée sous le n° 21700506 ;
à titre plus subsidiaire au fond,
infirmer la décision de la CRA du 22 juin 2017 ;
dire que la maladie du salarié n’est pas d’origine professionnelle ;
dire n’y avoir lieu à prise en charge de la maladie du salarié au titre de la législation relative aux risques professionnels ;
dire qu’aucune faute inexcusable ne peut lui être imputée ;
débouter le salarié de sa demande de condamnation provisionnelle à hauteur de 50 000 € ;
débouter le salarié de l’ensemble de ses demandes ;
plus subsidiairement encore,
ordonner avant dire droit une mesure d’instruction, en application de l’article 143 du code de procédure civile ;
désigner pour y procéder tel expert médical qu’il plaira avec notamment pour mission de :
‘décrire l’état antérieur du salarié susceptible d’avoir une incidence directe sur sa maladie ;
‘préciser si la création de la société [8] par le salarié en complément de son activité de directeur d’agence bancaire au sein du [7] a aggravé un état antérieur ayant conduit à la maladie ;
‘préciser si la création de la société [8] par le salarié en complément de son activité de directeur d’agence bancaire au sein du [7] est à l’origine de la maladie ;
‘préciser si la maladie du salarié est liée à son activité de directeur d’agence bancaire au sein du [7] et, dans une telle hypothèse, préciser en pourcentage :
‘la proportion d’imputabilité de la maladie à son activité professionnelle au sein de la banque ;
‘la proportion d’imputabilité de la maladie à sa participation dans la société [8] ;
‘la proportion d’imputabilité de la maladie à son état antérieur ;
condamner le salarié à lui payer la somme de 5 000 € au titre des frais irrépétibles.
Vu les écritures déposées à l’audience et reprises par son représentant selon lesquelles la caisse primaire d’assurance maladie des Pyrénées-Orientales demande à la cour de :
lui décerner acte de ce qu’elle s’en remet à la sagesse de la cour sur le point de savoir si l’employeur a commis une faute inexcusable à l’origine de la maladie professionnelle dont a été victime le salarié ;
dans le cas où la faute inexcusable serait reconnue, enjoindre l’employeur de lui communiquer les références du contrat d’assurance qu’il aurait souscrit, le cas échéant, pour couvrir ce type de risque ;
fixer le montant des indemnités ;
dire que ces indemnités, prévues par les articles L. 452-1 à L. 452-3 du code de la sécurité sociale, qui seraient avancées par la caisse primaire d’assurance maladie, seront remboursées par l’employeur ou son assureur à la CPAM qui en aurait fait l’avance ;
déclarer l’arrêt commun à la caisse primaire d’assurance maladie des Pyrénées-Orientales qui versera directement au salarié la majoration de rente mise à la charge de l’employeur en cas de reconnaissance d’une faute inexcusable à l’origine de la maladie professionnelle ;
accueillir l’action récursoire de la caisse primaire à l’encontre de l’employeur en cas de reconnaissance d’une faute inexcusable de sa part à l’origine de la maladie professionnelle du salarié et dire en conséquence que la caisse primaire récupérera directement et immédiatement auprès de l’employeur l’ensemble des sommes dont elle aurait fait l’avance selon les modalités prévues aux articles L. 452-2 et L. 452-3 du code de la sécurité sociale.
Vu les écritures en réouverture des débats déposées à l’audience et reprises par son représentant selon lesquelles la caisse primaire d’assurance maladie des Pyrénées-Orientales demande à la cour de lui décerner acte de ce qu’elle s’en remet à sa sagesse sur le point de savoir si un second CRRMP doit être désigné.
MOTIFS DE LA DÉCISION
1/ Sur la désignation d’un second CRRMP
L’employeur conteste le caractère professionnel de la dépression dont a souffert le salarié.
Une maladie non désignée dans un tableau de maladies professionnelles peut être reconnue d’origine professionnelle lorsqu’il est établi qu’elle est essentiellement et directement causée par le travail habituel de la victime et qu’elle entraîne le décès de celle-ci ou une incapacité permanente d’un taux au moins égal à 25 %.
Le CRRMP de [Localité 9] par avis du 19 juillet 2016 a retenu que :
« Le dossier fait état de facteurs de risques psycho-sociaux au travail, connus et référencés dans le rapport GOLLAC INSEE avril 2011 comme des exigences importantes de travail et une absence de régulation des nombres d’heures, dans un contexte de développement d’une nouvelle agence, des rapports sociaux difficiles. Compte tenu de l’ensemble des informations médico-techniques portées à sa connaissance, le comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de [Localité 9] considère qu’il peut être retenu un lien direct et essentiel, de causalité entre la profession habituellement exercée par M. [R] [D] et la pathologie dont il se plaint, à savoir « épisode dépressif majeur sévère’ » Il doit bénéficier d’une reconnaissance et d’une prise en charge « en maladie professionnelle » au titre de l’article L. 461-1 alinéa 4 du code de la sécurité sociale du régime général. »
L’article R. 142-17-2 du code de la sécurité sociale dispose que :
« Lorsque le différend porte sur la reconnaissance de l’origine professionnelle d’une maladie dans les conditions prévues aux sixième et septième alinéas de l’article L. 461-1, le tribunal recueille préalablement l’avis d’un comité régional autre que celui qui a déjà été saisi par la caisse en application du huitième alinéa de l’article L. 461-1.
Le tribunal désigne alors le comité d’une des régions les plus proches. »
Les parties sont communes pour indiquer qu’aucun second CRRMP n’a pas déjà été saisi.
Comme le fait justement remarquer le salarié, le texte précité n’est entré en vigueur que le 1er janvier 2019, ayant été créé par le décret n° 2018-928 du 29 octobre 2018. Toutefois, antérieurement, au visa des articles L. 461-1 et R. 142-24-2 du code de la sécurité sociale, la Cour de cassation retenait déjà (notamment Cass. 2e civ., 6 oct. 2016, SA EDF c/ M. Q. et al., n° 15-23.678, publié) que si la maladie déclarée ne remplit pas les conditions d’un tableau de maladies professionnelles et que la caisse a suivi l’avis d’un comité régional et il incombe à la juridiction, avant de statuer sur la demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, de recueillir l’avis d’un autre comité régional dès lors que le caractère professionnel de la maladie est contesté par l’employeur.
En conséquence, il convient, avant de statuer sur une demande en reconnaissance de la faute inexcusable de l’employeur, de recueillir l’avis d’un autre comité régional, soit le CRRMP de la région PACA CORSE, dès lors que le caractère professionnel de la maladie se trouve contesté par l’employeur.
2/ Sur les autres demandes
Il convient de surseoir à statuer pour le surplus et de réserver les dépens.
PAR CES MOTIFS
LA COUR,
Avant dire droit,
Ordonne la saisine du comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région PACA CORSE d’une demande d’avis en application des articles L 461-1 et R 142-24-2 du code de la sécurité sociale, aux fins de :
‘ prendre connaissance du dossier médical de M. [R] [D] dont la transmission devra être assurée par la caisse primaire d’assurance maladie des Pyrénées-Orientales et son médecin conseil ;
‘ indiquer s’il peut être retenu un lien direct et essentiel de causalité entre la profession habituellement exercée par M. [R] [D] et la pathologie déclarée le 30 septembre 2015.
Dit que les parties pourront communiquer au comité régional de reconnaissance des maladies professionnelles de la région PACA CORSE toutes les pièces qu’elles estimeront utiles et qu’elles devront lui communiquer toutes les pièces qu’il serait amené à leur demander, et que ce dernier pourra le cas échéant les convoquer.
Dit que ce comité adressera son avis motivé au greffe de la cour et à chacune des parties, lesquelles seront convoquées en suite de la réception de cet avis.
Sursoit à statuer pour le surplus.
Réserve les dépens.
LE GREFFIER LE PRESIDENT