Enveloppe de Preuve DocuSign : quelle valeur juridique ?

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Enveloppe de Preuve DocuSign : quelle valeur juridique ?

L’enveloppe de preuve’ établie par la société DocuSign, qui retrace les différentes étapes de la signature électronique, ne constitue pas nécessairement un certificat électronique qualifié. Il peut toutefois être complété par des documents annexes établissant la preuve du contrat de crédit à la consommation.

En la cause, aux termes de ce document, il résulte que dans le cadre de la transaction A0B2CPRO-SERVID01-81635118123-20210524111259-9YXCWU36737C7Y79, M. [X] identifié par son adresse mail ([Courriel 5]) a apposé sa signature électronique le 24 mai 2021 à 13 heures 19 et 26 secondes sur le contrat via l’application de la banque, que les date et heure de validation sont bien horodatées avec certificat d’horodatage et M. [X] identifié par un code utilisateur.

Ce document produit par la banque ne précise pas qu’il est établi à titre de certificat électronique qualifié, comme l’exige le décret susdit. L’identification de l’auteur de la signature par l’usage d’une boîte aux lettres électronique apparaît insuffisante pour authentifier la signature du client.

Cependant ces carences dans la preuve de la signature électronique n’ont pas d’autre effet que de faire perdre à la banque la présomption de fiabilité qui s’attache à un mode d’authentification conforme à la loi et au décret ; elles n’interdisent pas à la banque de compléter, par d’autres moyens, les éléments qui résultent de ces documents.

En l’espèce, la banque produit également les documents suivants transmis par l’emprunteur : copie de sa carte nationale d’identité, un bulletin de paie et son avis d’imposition sur les revenus de 2019. Ces éléments complémentaires de preuve sont renforcés par la production de l’historique du compte qui atteste du déblocage des fonds au profit du client le 31 mai 2021 puis du prélèvement de la première échéance du prêt, les autres échéances étant ensuite impayées.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il est démontré que l’offre de prêt a été régulièrement signée, par voie électronique, par le client. C’est donc à tort que le premier juge a rejeté l’intégralité des demandes de la société CA Consumer Finance. Partant le jugement doit être infirmé.

En application de l’article 1353 du code civil en sa version applicable au litige, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Il incombe à chaque partie, par application de l’article 9 du code de procédure civile, de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

L’article 1366 du code civil dispose que l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’état l’intégrité.

L’article 1367 alinéa 2 du même code dispose que lorsqu’elle est électronique, la signature consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garanti, dans des conditions fixées par décret en conseil d’État.

Enfin, l’article premier du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017, relatif à la signature électronique, énonce que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en ‘uvre une signature électronique qualifiée, et que constitue une signature électronique qualifiée, une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement dont il s’agit et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié, répondant aux exigences de l’article 29 du règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement.

Résumé de l’affaire :

Constitution du prêt

Le 24 mai 2021, la société Crédit Agricole Consumer Finance (CA Consumer Finance) a accordé à M. [G] [X] un prêt personnel de 22 000 euros avec un TEG de 5,100 %, remboursable en 66 mensualités de 381,80 euros hors assurance, par le biais d’une offre signée électroniquement.

Défaut de paiement et mise en demeure

M. [X] a cessé de rembourser les échéances, ce qui a conduit CA Consumer Finance à lui adresser une lettre de mise en demeure le 2 mai 2022, suivie d’une assignation en paiement devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand le 26 septembre 2022.

Jugement du tribunal

Le 21 mars 2023, le juge a rejeté toutes les demandes de CA Consumer Finance, considérant que le contrat n’était pas valablement signé électroniquement, en raison d’un manque de preuve de l’identité du signataire, et a condamné la société aux dépens.

Appel de CA Consumer Finance

Le 17 juillet 2023, CA Consumer Finance a interjeté appel du jugement, demandant l’infirmation de la décision et la condamnation de M. [X] à rembourser la somme de 24 211,29 euros, ainsi que des intérêts de retard.

Arguments de CA Consumer Finance

La société a soutenu que la signature électronique était valide, ayant vérifié l’identité de M. [X] à l’aide de documents justificatifs, et a produit un fichier de preuve attestant de l’intégrité de la signature.

Absence de représentation pour M. [X]

M. [X] n’a pas constitué d’avocat pour le représenter dans la procédure d’appel, et la déclaration d’appel ainsi que les conclusions ont été signifiées le 19 septembre 2023.

Éléments de preuve de la signature électronique

CA Consumer Finance a présenté le contrat signé électroniquement et une enveloppe de preuve, mais le tribunal a noté que l’identification par adresse e-mail était insuffisante pour établir la validité de la signature.

Évaluation de la signature électronique

Malgré les lacunes dans la preuve de la signature, le tribunal a considéré que d’autres éléments, tels que des documents d’identité et l’historique des paiements, démontraient que le contrat avait été régulièrement signé.

Recevabilité de l’action en paiement

Le tribunal a confirmé que l’action de CA Consumer Finance était recevable, car elle avait été engagée dans les délais légaux, et a constaté la déchéance du terme en raison des impayés.

Régularité de l’offre de prêt

Le tribunal a relevé que CA Consumer Finance n’avait pas respecté ses obligations de vérification de la solvabilité de M. [X], ce qui a conduit à la déchéance de son droit aux intérêts.

Montant dû par M. [X]

M. [X] a été condamné à rembourser 21 595,45 euros, correspondant au capital restant dû, avec des intérêts au taux légal à compter de la mise en demeure.

Condamnation aux dépens

M. [X] a été condamné aux dépens de la procédure, tant en première instance qu’en appel, sans application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

6 novembre 2024
Cour d’appel de Riom
RG
23/01155
COUR D’APPEL

DE RIOM

Troisième chambre civile et commerciale

ARRET N°

DU : 06 Novembre 2024

N° RG 23/01155 – N° Portalis DBVU-V-B7H-GBBW

ACB

Arrêt rendu le six Novembre deux mille vingt quatre

Sur APPEL d’une décision rendue le 21 mars 2023 par le Juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de CLERMONT-FERRAND (RG n° 22/00660)

COMPOSITION DE LA COUR lors du délibéré :

Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre

Mme Sophie NOIR, Conseiller

Madame Anne Céline BERGER, Conseiller

En présence de : Mme Christine VIAL, Greffier, lors de l’appel des causes et du prononcé

ENTRE :

La société CA CONSUMER FINANCE

SA immatriculée au RCS d’Evry sous le n° 542 097 522

[Adresse 1]

[Localité 4]

Représentants : Me Xavier BARGE, avocat au barreau de CLERMONT-FERRAND (postulant) et Me Amélie GONCALVES de la SELARL LEVY ROCHE SARDA, avocat au barreau de LYON (plaidant)

APPELANTE

ET :

M. [G] [X]

[Adresse 2]

[Localité 3]

Non représenté, assigné à étude

INTIMÉ

DÉBATS :

Après avoir entendu en application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, à l’audience publique du 19 Septembre 2024, sans opposition de leur part, les avocats des parties, Madame BERGER, magistrat chargé du rapport, en a rendu compte à la Cour dans son délibéré.

ARRET :

Prononcé publiquement le 06 Novembre 2024 par mise à disposition au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;

Signé par Mme Annette DUBLED-VACHERON, Présidente de chambre, et par Mme Christine VIAL, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Exposé du litige :

Suivant une offre préalable du 24 mai 2021 signée par voie électronique, la société Crédit Agricole Consumer Finance (CA Consumer Finance) a consenti à M. [G] [X] un prêt personnel d’un montant de 22 000 euros au TEG de 5,100 % moyennant le remboursement de 66 échéances de 381,80 euros hors assurance.

M. [X] a cessé de payer les échéances et la société CA Consumer Finance, après lui avoir envoyé une lettre recommandée de mise en demeure le 2 mai 2022, a prononcé la déchéance du terme et l’a fait assigner en paiement, par acte introductif d’instance du 26 septembre 2022, devant le juge des contentieux de la protection (JCP) du tribunal judiciaire de Clermont-Ferrand.

Par jugement réputé contradictoire du 21 mars 2023, le juge des contentieux de la protection, a rejeté l’intégralité des demandes de la société CA Consumer Finance et a condamné la société CA Consumer Finance aux dépens.

Le JCP a jugé qu’il n’est pas possible de rattacher le contrat litigieux au fichier de preuve rapportant l’acte matériel de signature électronique, lequel doit donc être considéré comme n’ayant pas été signé numériquement ; qu’en l’absence de certitude sur l’identité du signataire, que ce soit par écrit ou par voie électronique, l’acte fondant la demande ne saurait valablement être opposé à M. [X] de sorte que les demande de la société Consumer Finance seront rejetées.

Par une déclaration faite par voie électronique le 17 juillet 2023, la société CA Consumer Finance a interjeté appel de ce jugement.

Aux termes de ses conclusions déposées par voie électronique le 14 septembre 2023, la société CA Consumer Finance demande à la cour, au visa des articles 1217, 1224 et 1367 du code civil et L 312-39 du code de la consommation de’:

– infirmer le jugement et statuant à nouveau de :

– à titre principal :

– constater l’acquisition de la clause résolutoire et la déchéance du terme ;

– en conséquence, condamner M. [X] à lui payer la somme de 24 211,29 euros avec intérêts de retard au taux contractuel de 4,985 % à compter du 2 mai 2022 et 9 juin 2022 ;

– à titre subsidiaire :

– prononcer la résiliation du contrat et la déchéance du terme pour manquement aux obligations contractuelles ;

– en conséquence, condamner M. [X] à lui payer la somme de 24 211,29 euros avec intérêts de retard au taux contractuel de 4,985 % à compter du 2 mai 2022 et 9 juin 2022 ;

– en tout état de cause :

– débouter M. [X] de l’ensemble de ses demandes ;

– condamner M. [X] à lui payer la somme de 850 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– condamner M. [X] aux dépens de l’instance d’appel qui seront recouvrés selon les modalités de l’article 699 du code de procédure civile par Maître Xavier Barge, avocat qui en a fait la demande.

La société Crédit Agricole Consumer Finance soutient qu’en application de l’article 1366 du Code civil la banque doit s’assurer que la personne qui signe l’acte est dûment identifiée et que l’intégrité des documents est garantie. Elle relève qu’elle a vérifié l’identité du signataire grâce aux pièces justificatives fournies par celui-ci de sorte que l’identification du signataire de l’acte est bien établie ; qu’elle verse aux débats le fichier de preuve qui comprend l’intégralité du processus de signature électronique ; que ces éléments permettent de démontrer que l’intégrité des documents est garantie ; que la signature électronique bénéficie donc de la présomption de fiabilité de l’article 1367 du code civil de sorte que M. [X] sera condamné à lui payer le solde des sommes restant dues au titre du contrat souscrit.

Aucun avocat ne s’est constitué pour M. [X] à qui la déclaration d’appel et les conclusions ont été signifiées par acte du 19 septembre 2023 délivré à étude.

Pour un plus ample exposé des faits, moyens et prétentions de l’appelante, il est renvoyé aux écritures de celle-ci conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile.

L’ordonnance de clôture a été rendue le 20 juin 2024 et l’affaire a été appelée à l’audience le 19 septembre 2024.

MOTIFS DE LA DECISION :

Aux termes de l’article 472 du code de procédure civile, lorsque le défendeur ne comparaît pas, le juge ne fait droit à la demande que dans la mesure où il l’estime régulière, recevable et bien fondée.

Sur la preuve de la signature électronique :

En application de l’article 1353 du code civil en sa version applicable au litige, celui qui réclame l’exécution d’une obligation doit la prouver et réciproquement, celui qui se prétend libéré doit justifier le paiement ou le fait qui a produit l’extinction de son obligation.

Il incombe à chaque partie, par application de l’article 9 du code de procédure civile, de prouver conformément à la loi les faits nécessaires au succès de sa prétention.

L’article 1366 du code civil dispose que l’écrit électronique a la même force probante que l’écrit sur support papier, sous réserve que puisse être dûment identifiée la personne dont il émane et qu’il soit établi et conservé dans des conditions de nature à en garantir l’état l’intégrité.

L’article 1367 alinéa 2 du même code dispose que lorsqu’elle est électronique, la signature consiste en l’usage d’un procédé fiable d’identification garantissant son lien avec l’acte auquel elle s’attache. La fiabilité de ce procédé est présumée, jusqu’à preuve contraire, lorsque la signature électronique est créée, l’identité du signataire assurée et l’intégrité de l’acte garanti, dans des conditions fixées par décret en conseil d’État.

Enfin, l’article premier du décret n° 2017-1416 du 28 septembre 2017, relatif à la signature électronique, énonce que la fiabilité d’un procédé de signature électronique est présumée, jusqu’à preuve du contraire, lorsque ce procédé met en ‘uvre une signature électronique qualifiée, et que constitue une signature électronique qualifiée, une signature électronique avancée, conforme à l’article 26 du règlement dont il s’agit et créée à l’aide d’un dispositif de création de signature électronique qualifié, répondant aux exigences de l’article 29 du règlement, qui repose sur un certificat qualifié de signature électronique répondant aux exigences de l’article 28 de ce règlement.

En l’espèce, l’appelante produit aux débats au soutien de ses prétentions, le contrat de prêt signé électroniquement et une ‘enveloppe de preuve’ établie le 24 mai 2021 par la société DocuSign, qui retrace les différentes étapes de la signature électronique.

Aux termes de ce document, il résulte que dans le cadre de la transaction A0B2CPRO-SERVID01-81635118123-20210524111259-9YXCWU36737C7Y79, M. [X] identifié par son adresse mail ([Courriel 5]) a apposé sa signature électronique le 24 mai 2021 à 13 heures 19 et 26 secondes sur le contrat via l’application de la banque, que les date et heure de validation sont bien horodatées avec certificat d’horodatage et M. [X] identifié par un code utilisateur.

Ce document produit par l’appelante ne précise pas qu’il est établi à titre de certificat électronique qualifié, comme l’exige le décret susdit. L’identification de l’auteur de la signature par l’usage d’une boîte aux lettres électronique apparaît insuffisante pour authentifier la signature de M. [X].

Cependant ces carences dans la preuve de la signature électronique n’ont pas d’autre effet que de faire perdre à la banque la présomption de fiabilité qui s’attache à un mode d’authentification conforme à la loi et au décret ; elles n’interdisent pas à la banque de compléter, par d’autres moyens, les éléments qui résultent de ces documents.

En l’espèce, l’appelante produit également les documents suivants transmis par l’emprunteur : copie de sa carte nationale d’identité, un bulletin de paie et son avis d’imposition sur les revenus de 2019. Ces éléments complémentaires de preuve sont renforcés par la production de l’historique du compte qui atteste du déblocage des fonds au profit de M. [X] le 31 mai 2021 puis du prélèvement de la première échéance du prêt, les autres échéances étant ensuite impayées.

Au regard de l’ensemble de ces éléments, il est démontré que l’offre de prêt a été régulièrement signée, par voie électronique, par M. [X]. C’est donc à tort que le premier juge a rejeté l’intégralité des demandes de la société CA Consumer Finance. Partant le jugement doit être infirmé.

Sur les sommes dues au titre du contrat de prêt :

Il appartient au juge, saisi d’une demande en paiement, de vérifier la recevabilité et la régularité de l’action du prêteur. En application de l’article R. 632-1 du Code de la consommation, le juge peut soulever d’office toutes les dispositions du présent code dans les litiges nés de son application.

Le jugement déféré a précisé que lors de l’audience du 7 janvier 2023,la société CA Consumer Finance a sollicité le bénéfice de ses dernières écritures dans lesquelles elle avait notamment répondu aux divers moyens d’ordre public soulevés d’office par le JCP concernant la recevabilité et la régularité de son action.

– sur la recevabilité de l’action du prêteur et la déchéance du terme :

L’article R 312-35 du code de la consommation, applicable au présent litige, dispose que les actions en paiement engagées devant le tribunal d’instance (devenu tribunal des contentieux de la protection) doivent être formées dans les deux ans de l’événement qui leur a donné naissance, à peine de forclusion, ce point devant être vérifié d’office par le juge.

En l’espèce, il résulte de l’historique de compte que le premier impayé de paiement non régularisé date du 5 août 2021. Dès lors, la banque qui a assigné M. [X] le 26 septembre 2022 n’est pas forclose en son action et doit être déclarée recevable.

Ensuite, il est produit la mise en demeure adressée le 19 janvier 2022 à l’emprunteur de régler les échéances impayées, dans un délai de quinze jours, le courrier précisant qu’à défaut la déchéance du terme sera prononcée, lettre restée vaine. Par courrier du 2 mai 2022, la totalité de la somme a été réclamée à M. [X]. Il convient donc au regard de ces éléments de constater que la déchéance du terme est acquise.

– sur la régularité de l’offre de prêt :

En application de l’article L 312-16 du code de la consommation avant de conclure un contrat de crédit, le prêteur vérifie la solvabilité de l’emprunteur à partir d’un nombre suffisant d’informations, y compris des informations fournies par ce dernier à la demande du prêteur. Le prêteur consulte le fichier prévu à l’article L.751-1.

L’article L 341-2 du même code sanctionne le non respect de cette obligation par la déchéance du droit aux intérêts en totalité ou dans la proportion fixée par le juge.

En outre, l’article L 312-17 du même code dispose que lorsque les opérations de crédit sont conclues sur le lieu de vente ou au moyen d’une technique de communication à distance, une fiche d’information distincte de la fiche mentionnée à l’article L 312-2 est fournie par le prêteur ou par l’intermédiaire de crédit à l’emprunteur. Cette fiche, établie sur support papier ou sur un autre support durable comporte notamment les éléments relatifs aux ressources et charges de l’emprunteur, ainsi que, le cas échéant, aux prêts en cours contractés par ce dernier. (…)

Si le montant du crédit accordé est supérieur à un seuil défini par décret, la fiche est corroborée par des pièces justificatives dont la liste est définie par décret.

L’article D 312-17 dudit code prévoit que le seuil est fixé à 3 000 euros et l’article D 312-18 précise que les pièces justificatives sont tout justificatif du domicile de l’emprunteur, de son revenu et de son identité.

En l’espèce, le contrat signé électroniquement porte sur un crédit de 22 000 euros. Or, la société Consumer Finance ne verse pas aux débats la fiche de dialogue mentionnant les revenus et charges de l’emprunteur. En outre, d’une part, la fiche d’imposition produite porte sur les revenus de 2019 alors que le contrat a été souscrit le 24 mai 2021. D’autre part, la banque verse aux débats la fiche de paie de M. [X] du mois de mai 2021. Cependant, l’offre de prêt ayant été signée le 24 mai 2021, le prêteur ne pouvait être en possession de ce document à la date de sa signature. Enfin, aucun justificatif de domicile n’est produit. Dès lors, force est de constater que la société Consumer Finance ne justifie pas du respect de son obligation de vérification de la solvabilité du débiteur, et ce, d’autant plus que le prêt souscrit par l’intimé portait sur une somme conséquente de 22 000 euros.

En conséquence, du fait du non respect de ses obligations en application des dispositions légales précitées, la déchéance du droit aux intérêts doit être totale.

Lorsque la déchéance du droit aux intérêts contractuels a été prononcée, l’emprunteur n’est tenu qu’au seul remboursement du capital suivant l’échéancier prévu ainsi que le cas échéant, au paiement des intérêts dont le prêteur n’a pas été déchu. Ainsi le prêteur ne peut prétendre qu’au montant du financement octroyé déduction faite des remboursements réalisés.

En l’espèce, il ressort des pièces versées aux débats que M. [X] doit être condamné au paiement de la somme de 21 595,45 euros (22000 – 404,55).

La société CA Consumer Finance est fondée à réclamer à l’emprunteur le paiement des intérêts au taux légal sur le capital restant dû à compter de la mise en demeure, le taux d’intérêt légal étant majoré de plein droit deux mois après le caractère exécutoire de la décision de justice en application de l’article L.313-3 du code monétaire et financier. Toutefois, l’article 23 de la directive 2008/48 du Parlement européen et du Conseil concernant les contrats de crédits aux consommateurs dispose que les Etats membres définissent le régime de sanctions applicables en cas de violation des dispositions nationales adoptées conformément à la directive, et prennent toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte qu’elles soient appliquées, et que les sanctions

soient effectives, proportionnées et dissuasives.

Par arrêt du 27 mars 2014, la Cour de Justice de l’Union Européenne (affaire C-565/12) a dit pour droit que l’article 23 de la directive 2008/48 s’oppose à l’application d’intérêts au taux légal, si les montants susceptibles d’être effectivement perçus par le prêteur à la suite de l’application de la sanction de la déchéance du droit aux intérêts ne sont pas significativement inférieurs à ceux dont celui-ci pourrait bénéficier s’il avait respecté ses obligations. La Cour de Justice a ainsi ajouté que si la sanction de la déchéance du droit aux intérêts se trouvait affaiblie, voire purement et simplement annihilée, en raison du fait que l’application des intérêts au taux légal majoré est susceptible de compenser les effets d’une telle sanction, il en découlerait nécessairement que celle-ci ne présente pas un caractère véritablement dissuasif et qu’il appartient à la juridiction saisie de comparer, dans les circonstances de l’affaire dont elle est saisie, les montants que le prêteur aurait perçus en rémunération du prêt dans l’hypothèse où il aurait respecté son obligation avec ceux qu’il percevrait en application de la sanction de la violation de cette même obligation.

Il appartient ainsi à la cour d’apprécier la portée de la sanction prononcée et de vérifier si elle revêt un caractère suffisamment dissuasif et effectif.

En l’espèce, le taux contractuel est de 4,985 %. Compte tenu de l’intérêt légal lors de la mise en demeure et de celui à la date du présent arrêt (soit 4,92 % à compter du 1er juillet 2024), l’application de l’intérêt légal majoré de cinq points conduirait à permettre au prêteur de percevoir des sommes d’un montant supérieur à celles dont il aurait pu bénéficier au titre des intérêts conventionnels dont il a été déchu.

Dès lors, pour assurer l’effectivité, le caractère proportionné et dissuasif de la sanction, il convient de condamner M. [X] au paiement de la somme de 21 595,45 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 2 mai 2022, date de la lettre de mise en demeure.

Sur les demandes accessoires :

En application de l’article 696 du code de procédure civile, la partie succombant à l’instance supporte les dépens.

M. [X] est ainsi condamné aux dépens de première instance et d’appel.

L’équité commande de ne pas faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS :

La cour, statuant par mise à disposition au greffe, par arrêt rendu par défaut et en dernier ressort’;

Infirme le jugement déféré en toutes ses dispositions ;

Condamne M. [G] [X] à payer à la société Crédit Agricole Consumer Finance la somme de 21 595,45 euros avec intérêts au taux légal non majoré à compter du 2 mai 2022 ;

Dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [G] [X] aux dépens de la procédure aux dépens de première instance et d’appel qui pourront être recouvrés directement dans les conditions de l’article 699 du code de procédure civile.

Le greffier, La présidente,


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