Contexte du crédit-bailLa SAS Rotishop France a signé un contrat de crédit-bail le 15 janvier 2016 avec la SA Crédit Mutuel Leasing pour un montant de 41 899,20 euros, remboursable en 36 mensualités de 1 006,58 euros, afin d’acquérir deux rotissoires. M. [E] et Mme [D] se sont portés cautions solidaires pour des montants respectifs de 15 000 euros et 35 000 euros. Déchéance du terme et mise en demeureEn raison d’impayés, le crédit-bailleur a prononcé la déchéance du terme et a mis en demeure les cautions de régler un montant restant dû de 16 190,98 euros par un acte du 16 juillet 2018. La SAS Rotishop France a ensuite été placée en redressement judiciaire le 3 avril 2019, puis en liquidation judiciaire le 29 mai 2019. Assignation en justiceLa SA Crédit Mutuel Leasing a assigné M. [E] et Mme [D] devant le tribunal de commerce de Marseille le 4 juin 2021, demandant le paiement solidaire de 19 180,98 euros, incluant des intérêts. Le tribunal a rendu un jugement le 9 septembre 2021, condamnant les cautions à payer la somme de 16 190,98 euros, avec des intérêts et des dépens. Appels des cautionsMme [D] a interjeté appel du jugement le 3 novembre 2021, tandis que M. [E] a formé un appel incident. Les deux parties ont contesté la décision initiale, invoquant des arguments relatifs à la disproportion de leurs engagements de caution et à un manquement de la banque à son obligation de mise en garde. Arguments des partiesMme [D] a soutenu que son engagement était disproportionné par rapport à son patrimoine et a demandé à être déboutée de toutes les demandes de la SA Crédit Mutuel Leasing. M. [E] a également fait valoir la disproportion de son engagement et a demandé des réparations pour le manquement de la banque à son devoir d’information. La SA Crédit Mutuel Leasing a, quant à elle, demandé la confirmation du jugement initial. Décision de la courLa cour a confirmé le jugement concernant Mme [D], mais a infirmé celui concernant M. [E], reconnaissant que la SA Crédit Mutuel Leasing avait méconnu son obligation d’information annuelle. La cour a prononcé la déchéance des pénalités et intérêts de retard dus par M. [E] et a fixé le montant à payer à 11 894,21 euros, tout en rejetant les demandes de délais de paiement et en condamnant les deux cautions aux dépens d’appel. |
REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
Chambre 3-3
ARRÊT AU FOND
DU 24 OCTOBRE 2024
N° 2024/135
Rôle N° RG 21/15518 – N° Portalis DBVB-V-B7F-BIKTR
[H] [D]
C/
[U] [E]
S.A. CREDIT MUTUEL LEASING
Copie exécutoire délivrée
le :
à :
Me Carine NAHON
Me Alexandra MALY
Me Victoria CABAYÉ
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Commerce de MARSEILLE en date du 09 Septembre 2021 enregistré(e) au répertoire général sous le n° 2021F00874.
APPELANTE
Madame [H] [D]
née le [Date naissance 1] 1956,
demeurant [Adresse 2]
représentée par Me Carine NAHON de la SELARL CARINE NAHON, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE substituée par Me Aymeric ROS, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur [U] [E]
né le [Date naissance 5] 1986 à [Localité 7],
demeurant [Adresse 8]
représenté par Me Alexandra MALY de la SARL BAFFERT-MALY, avocat au barreau de MARSEILLE substituée par Me Stéphane PAILHE, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
S.A. CREDIT MUTUEL LEASING,
dont le siège social est sis [Adresse 9]
représentée par Me Victoria CABAYÉ de l’ASSOCIATION ROUSSEL-CABAYE & ASSOCIES, avocat au barreau de TOULON substituée par Me Amandine LANDELER, avocat au barreau de MARSEILLE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 03 Septembre 2024 en audience publique devant la cour composée de :
Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président, magistrat rapporteur
Madame Françoise PETEL, Conseillère
Mme Magali VINCENT, Conseillère
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Laure METGE.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 24 Octobre 2024.
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 24 Octobre 2024,
Signé par Monsieur Jean-Wilfrid NOEL, Président et Madame Laure METGE, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
FAITS & PROCÉDURE
La SAS Rotishop France a souscrit le 15 janvier 2016 auprès de la SA Crédit Mutuel Leasing un contrat de crédit-bail de 41 899,20 euros remboursables par 36 mensualités de 1 006,58 euros, afin de financer l’achat de deux rotissoires.
Par acte du même jour, M. [E] et Mme [D] se sont portés cautions solidaires de la SAS Rotishop France respectivement à hauteur de 15 000 euros et 35 000 euros.
Le crédit-bailleur a prononcé la déchéance du terme par suite d’impayés et, par mise en demeure du 16 juillet 2018, a mis en demeure les cautions solidaires de régler le montant restant dû, soit la somme de 16 190,98 euros.
Par jugements du tribunal de commerce de Marseille des 3 avril et 29 mai 2019, la SAS Rotishop France a été placée en redressement puis en liquidation judiciaire.
La SA Crédit Mutuel Leasing a déclaré sa créance et mis en demeure les cautions solidaires de régler le montant restant dû, soit la somme de 16 190,98 euros.
Les mises en demeure de payer ont été réitérées les 11 juillet 2019 et du 13 septembre 2019.
Par acte d’huissier de justice du 4 juin 2021, la SA Crédit Mutuel Leasing a assigné M. [E] et Mme [D] devant le tribunal de commerce de Marseille aux fins de condamnation soliaire à lui payer la somme de 19 180,98 euros au titre du solde débiteur du compte associé au contrat de crédit-bail, avec intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2019.
Par jugement du 9 septembre 2021, le tribunal de commerce de Marseille a condamné solidairement M. [E] et Mme [D], sous le bénéfice de l’exécution provisoire :
– à payer à la SA Crédit Mutuel Leasing les sommes de 16 190,98 euros en principal avec intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2019, la condamnation de M. [E] étant limitée en tout état de cause à la somme de 15 000 euros, montant de son engagement, et de 500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– à supporter la capitalisation des intérêts au taux légal, et
– au paiement des dépens de l’instance.
Par déclaration du 3 novembre 2021 dont la régularité et la recevabilité ne sont pas contestées, Mme [D] a interjeté appel du jugement en visant chacune des mentions de son dispositif.
M. [E] a formé appel incident.
Par ordonnance d’incident du 13 avril 2023, le conseiller de la mise en état a débouté la SA Crédit Mutuel Leasing de sa demande de radiation et dit que les dépens de l’incident les demandes concernant les frais irrépétibles seront joints au fond.
* * *
Conformément à l’article 455 du code de procédure civile, il est fait renvoi aux dernières écritures déposées pour l’exposé des moyens et prétentions des parties.
La clôture a été prononcée le 3 septembre 2024.
Le dossier a été plaidé le 3 septembre 2024 et mis en délibéré au 24 octobre 2024.
PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES
Aux termes de ses dernières conclusions d’appelant n°2 notifiées par la voie électronique le 20 juillet 2022, Mme [D] demande à la cour de la déclarer recevable en son appel, d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau,
» à titre principal, débouter la SA Crédit Mutuel Leasing de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions en raison :
– d’une part, de la disproportion entre le patrimoine de la caution solidaire au jour de la conclusion de son engagement, et le montant du cautionnement souscrit,
– d’autre part, du manquement, par la SA Crédit Mutuel Leasing à son obligation de mise en garde à l’égard de la caution profane,
» à titre subsidiaire :
– la condamner au paiement de la somme en principal de 16 190,98 euros, outre intérêts au taux légal à compter du 13 septembre 2019,
– échelonner le paiement de la créance à hauteur de 23 mensualités de 674,62 euros et d’une mensualité de 674,72 euros,
» en tout état de cause :
– condamner la SA Crédit Mutuel Leasing à lui payer une somme de 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la SA Crédit Mutuel Leasing aux entiers dépens.
* * *
Aux termes de ses dernières conclusions n°2 notifiées par la voie électronique le 27 août 2024, M. [E] demande à la cour d’infirmer le jugement entrepris et, statuant à nouveau :
– le déclarer recevable et fondé en son appel incident,
– infirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions,
Et, statuant à nouveau,
» à titre principal, débouter la SA Crédit Mutuel Leasing de ses demandes, fins et conclusions,
» à titre subsidiaire :
– constater que l’engagement de caution du 15 janvier 2016 était manifestement disproportionné aux biens et revenus de M. [E] à cette date,
– débouter la SA Crédit Mutuel Leasing de l’ensemble de toutes ses demandes, fins et conclusions,
» à titre infiniment subsidiaire :
– condamner la SA Crédit Mutuel Leasing à lui payer la somme de 15 000 euros en réparation du préjudice subi du fait du manquement de la banque à son obligation de mise en garde,
– ordonner la compensation entre les sommes éventuellement dues à la SA Crédit Mutuel Leasing au titre de l’engagement de caution du 15 janvier 2016 et les dommages-intérêts auxquels la SA Crédit Mutuel Leasing serait condamné à lui verser,
– déchoir la SA Crédit Mutuel Leasing de ses droits aux intérêts conventionnels au titre de l’engagement cautionné,
– reporter de 24 mois, ou de tous délais que la cour jugera opportun, le paiement des sommes restant dues au titre de l’engagement de caution souscrit auprès de la SA Crédit Mutuel Leasing,
» en tout état de cause, condamner la SA Crédit Mutuel Leasing à lui payer 2 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile, outre les entiers dépens.
* * *
Aux termes de ses dernières conclusions n°3 notifiées par la voie électronique le 27 octobre 2022, la SA Crédit Mutuel Leasing demande à la cour de confirmer le jugement entrepris en toutes ses dispositions et, statuant à nouveau :
– rejeter toutes les demandes et contestations de M. [E] et de Mme [D], compte tenu de l’absence de disproportion manifeste de l’engagement de caution et d’un devoir de mise en garde,
– rejeter les demandes de délai de paiement de M. [E] et de Mme [D],
– juger que la SA Crédit Mutuel Leasing a bien rempli son devoir d’information envers M. [E],
– condamner solidairement M. [E] et Mme [D] au paiement de la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Sur la nature de la décision rendue :
L’arrêt rendu sera contradictoire, conformément à l’article 467 du code de procédure civile.
Sur l’engagement de caution de Mme [D] :
Sur la disproportion manifeste :
Mme [D] invoque le bénéfice de l’article L.341-4 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date de son engagement. Selon ce texte, « un créancier professionnel ne peut se prévaloir d’un contrat de cautionnement conclu par une personne physique dont l’engagement était, lors de sa conclusion, manifestement disproportionné à ses biens et revenus, à moins que le patrimoine de cette caution, au moment où celle-ci est appelée, ne lui permette de faire face à son obligation ». La charge de la preuve de la disproportion manifeste incombe à la caution ; la capacité de la caution à faire face à son engagement au moment où elle est appelée doit en revanche être prouvée par le banquier.
Mme [D] produit ses avis d’imposition des années 2015 et 2016 attestant d’un revenu fiscal de référence de 28 679 euros et 21 788 euros et en déduit l’impossibilité de faire face au paiement de 35 000 euros garanti.
La SA Crédit Mutuel Leasing produit cependant la déclaration patrimoniale régularisée par Mme [D] le 7 octobre 2015, mentionnant un revenu mensuel de 2 800 euros ventilé comme suit : 1 400 euros au titre de son activité salariale, outre 900 euros et 500 euros au titre de revenus locatifs. Soit un revenu annuel de 33 600 euros, sensiblement comparable au plafond de son engagement.
Mme [D] indique que les biens immobiliers dont elle a fait état ne sont pas des biens personnels mais des biens indivis. Cette restriction ne résulte pas de la fiche patrimoniale, qui mentionne une maison principale (850 000 euros), un appartement (290 000 euros) et un local commercial (75 000 euros). Soit un patroimoine de 1 215 000 euros, étant précisé que l’imprimé utilisé préconise expressément de mentionner l’existence d’une indivision. Mme [D] n’a pas non plus fait état d’un emprunt grevant tout ou partie des biens immobiliers et a barré d’un trait la rubrique « Passif résiduel en euros ».
Aucune disproportion manifeste n’est donc caractérisée, et il n’y a pas lieu d’apprécier la capacité de la caution à faire face à son engagement au moment où elle est appelée.
Sur le devoir de mise en garde :
Admis par une jurisprudence constante sur le fondement de l’article 1147 du code civil, devenu 1231-1 par suite de l’entrée en vigueur de l’ordonnance 2016-131 du 10 février 2016, le devoir de mise en garde fait peser sur le prêteur une obligation de mettre en garde la caution non avertie contre le risque, apprécié au jour de son engagement, de l’endettement de l’emprunteur né de l’octroi du prêt garanti, lequel résulte de l’inadaptation du prêt aux capacités financières de l’emprunteur (Com, 9 octobre 2019, 17-26.598).
C’est à la caution qui se prévaut d’un manquement de la banque à son obligation de mise en garde de rapporter la preuve de l’inadaptation de son engagement à ses capacités financières ou de l’existence d’un risque d’endettement né de l’octroi du prêt (Com, 26 janvier 2016, 14-23.462).
Mme [D] invoque la méconnaissance par le prêteur de son devoir de mise en garde. Invoquant sa qualité, non contestée, de caution non avertie, elle fait valoir que la SARL Rotishop immatriculée le 8 octobre 2015 a rapidement rencontré des difficultés et n’a pu honorer le règlement des traites du crédit-bail souscrit cette même année. Ledit contrat a été résilié le 16 juillet 2018. L’entreprise a été placée en redressement judiciaire le 3 avril 2018, puis en liquidation judiciaire le 29 mai 2018. Mme [D] estime que la résiliation du contrat de crédit-bail deux ans après le début de l’activité de la société, combinée à la procédure collective clôturée l’année suivante, démontrent qu’il existait un risque d’endettement né de l’opération garantie.
Cependant, la mise en garde porte sur l’existence d’un endettement excessif de l’emprunteur et non sur les risques ou l’opportunité de l’opération financée (Com, 29 septembre 2021, 19-11.959). La SA Crédit Mutuel Leasing souligne à cet égard que la SARL Rotishop avait débuté son activité deux mois auparavant, en octobre 2015, et qu’elle disposait d’une trésorerie de 10 000 euros du fait de la libération du capital. Mme [D] ne démontre pas l’inadaptation du prêt aux capacités financières de la SARL Rotishop. La résiliation ultérieure du contrat de crédit-bail souscrit par la société et sa liquidation judiciaire en 2018 n’entrent pas en ligne de compte.
En outre, le cautionnement contracté dans la limite de 35 000 euros n’apparaissait pas inadapté sur le plan financier à la date de l’octroi du prêt, eu égard au revenu annuel (33 600 euros) et du patrimoine (1 215 000 euros) que Mme [D] a déclarés.
Sur l’engagement de caution de M. [E] :
Sur la disproportion manifeste :
M. [E] invoque également la dispropotion de son engagement de caution à la date du 15 janvier 2016, au regard de ses revenus et de ses biens. Il fait état en effet d’un revenu de 2 219 euros et de 1 143 euros au titre des années fiscales 2015 et 2016 et fait grief au crédit-bailleur de ne pas s’être enquis de sa situation patrimoniale à la date à laquelle il a souscrit le cautionnement. Il invoque par ailleurs des charges de famille : [P] (née le [Date naissance 6] 2018), [N] (née le [Date naissance 3] 2019) et [J] (né le [Date naissance 4] 2024).
En réalité, la fiche patrimoniale renseignée par M. [E] le 7 octobre 2015 mentionne un revenu annuel de 13 525 euros correspondant globalement au montant de son engagement. En outre, il n’a pas mentionné ses parts d’associé au capital de la SARL Citiinvest (51%) et de la SCI [U] (80%). Aucune disproportion manifeste entre le montant respectif de l’engagement et des revenus de la caution n’est caractérisée, étant précisé que les charges de famille qu’il allègue ne résultent pas des avis d’imposition qu’il produit, et sont postérieures à la date du contrat de cautionnement.
Sur le devoir de mise en garde :
M. [E] fait valoir qu’il n’aurait pas contracté s’il avait été informé du risque d’endettement né de l’opération garantie. Il évalue la perte de chance subie à la somme de 15000 euros. Il ne rapporte cependant pas la preuve qui lui incombe de l’existence d’un risque d’endettement excessif né de l’octroi du prêt à la SARL Rotishop.
En outre, le cautionnement contracté dans la limite de 15 000 euros n’apparaissait pas inadapté sur le plan financier à la date de l’engagement eu égard au revenu annuel de revenu annuel de 13 525 euros que M. [E] a déclarés.
Sur l’obligation d’information annuelle de la caution :
Aux termes de l’article L.341-6 du code de la consommation dans sa rédaction applicable à la date de son engagement, « le créancier professionnel est tenu de faire connaître à la caution personne physique, au plus tard avant le 31 mars de chaque année, le montant du principal et des intérêts, commissions, frais et accessoires restant à courir au 31 décembre de l’année précédente au titre de l’obligation garantie, ainsi que le terme de cet engagement. Si l’engagement est à durée indéterminée, il rappelle la faculté de révocation à tout moment et les conditions dans lesquelles celle-ci est exercée. À défaut, la caution ne saurait être tenue au paiement des pénalités ou intérêts de retard échus depuis la précédente information jusqu’à la date de communication de la nouvelle information.
M. [E] invoque la méconnaissance de cette obligation d’information annuelle par la SA Crédit Mutuel Leasing et conclut ainsi à la déchéance des intérêts au taux conventionnel.
La SA Crédit Mutuel Leasing observe que, M. [E] s’étant porté caution le 15 janvier 2016, l’information annuelle lui était due à compter du 1er janvier 2017. Elle produit trois courriers d’information annuelle des cautions datés des 18 février 2019, 19 février 2018 et 17 février 2017 ainsi que trois constats d’huissier de justice des 10 mars 2020, 7 mars 2019 et 8 mars 2018 et souligne que la cour de cassation valide ce mode de preuve de l’envoi des lettres d’information annuelle à la caution (Com, 4 mai 2017, 15-20.352).
En réalité, la SA Crédit Mutuel Leasing ne produit ni le constat d’huissier correspondant au courrier d’information annuelle du 17 février 2017, ni le courrier correspondant au constat d’huissier du 10 mars 2020.
Par ailleurs, les deux constats d’huissier des 7 mars 2019 et 8 mars 2018 concernant les courriers d’information annuelle des cautions des 18 février 2019 et 19 février 2018 comportent (en pages 37 et 16) une mention attestant de ce que l’échantillonage aléatoire auquel il a été procédé met en évidence la similitude entre le listing des destinataires des courriers d’information et les plis concernés. Pour autant, la SA Crédit Mutuel Leasing ne produit aucun extrait desdits listings mentionnant M. [E] comme destinataire. Par suite, la preuve de l’exécution de l’obligation d’information annuelle de la caution n’est pas rapportée, et la déchéance du droit aux intérêts est acquise.
En l’occurrence, les pénalités ou intérêts de retard, au sens de l’article L.341-6 précité, correspondent à la clause pénale de 4 296,77 euros mentionnée par le décompte de créance figurant dans la mise en demeure du 11 juillet 2019.
Sommes impayées au jour du jugement de redressement judiciaire : 5 342,35 euros
Indemnité de résiliation :
– loyers à échoir à la résiliation : 6 193,80 euros
– valeur résiduelle : 358,06 euros
– clause pénale : 4 296,77 euros
Total créance : 16 190,98 euros
Après imputation de la clause pénale, la somme due par M. [E] en qualité de caution est de 11 894,21 euros.
Sur la demande de délais de paiement :
Mme [D] et M. [E] sollicitent l’octroi de délais de paiement sur le fondement de l’article 1343-5 du code civil. Ils ont bénéficié des plus larges délais de paiement depuis la date d’exigibilité de la créance. L’octroi de délais de paiement n’apparaît pas justifié.
Sur les demandes annexes :
Les dispositions du jugement relatives aux dépens doivent être confirmées.
L’équité ne justifie pas l’application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Conformément à l’article 696 du code de procédure civile, M. [E] et Mme [D] sont condamnés in solidum aux dépens de l’appel.
La Cour,
Confirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour concernant les sommes mises à la charge de Mme [D] en qualité de caution.
Infirme le jugement entrepris en ses dispositions soumises à la cour concernant les sommes mises à la charge de M. [E] en qualité de caution.
Statuant à nouveau,
Dit que la SA Crédit Mutuel Leasing a méconnu son obligation d’information annuelle envers M. [E].
Prononce la déchéance du droit aux pénalités et intérêts de retard au bénéfice de M. [E], en sa qualité de caution, dus en exécution du contrat de crédit-bail du 15 janvier 2016 conclu entre la SAS Rotishop France et le Crédit Mutuel.
Condamne M. [E] à payer à la SA Crédit Mutuel Leasing la somme de 11 894,21 euros.
Rejette les demandes de délai de paiement de M. [E] et de Mme [D].
Dit n’y avoir lieu à faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne in solidum M. [E] et Mme [D] aux entiers dépens d’appel.
LE GREFFIER LE PRÉSIDENT