Émissions télévisées : Droits du cocompositeur

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Émissions télévisées : Droits du cocompositeur
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Le co-compositeur de musique de série télévisée qui quitte la collaboration commune ne peut revendiquer sa qualité d’auteur au titre de la composition de musiques additionnelles.

Par ailleurs, pour démontrer sa qualité d’auteur, un co-compositeur est en droit de se prévaloir du générique d’une émission télévisée et d’invoquer la présomption de l’article L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle (l’oeuvre étant divulguée sous les noms des co-auteurs au générique de l’émission).

Selon l’article L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle, « la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’oeuvre est divulguée ».

La présomption prévue à cet article selon laquelle la qualité d’auteur est attribuée à la personne sous le nom de laquelle l’oeuvre est divulguée à condition que les faits sur lesquels repose cette présomption soient exempts de toute ambigüité, est une présomption simple qui peut être combattue par tous moyens.

Résumé de l’affaire

Cette affaire concerne un jugement rendu par le tribunal judiciaire de Paris le 8 juillet 2022, suivi d’un appel principal interjeté par M. [U] le 26 août 2022. Les parties ont échangé des conclusions d’appel et des actes de signification, notamment à la Société des Auteurs Compositeurs et Editeurs de Musique (SACEM). Les parties impliquées sont M. [U], MM. [J] et [I], M. [Y] [U], MM. [E] [J] et [N] [I], ainsi que la société Société Européenne de Production. L’affaire a été clôturée par une ordonnance le 8 février 2024, avec une demande de note en délibéré pour vérifier la signification des dernières conclusions aux parties concernées.

REPUBLIQUE FRANÇAISE
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

14 juin 2024
Cour d’appel de Paris
RG n°
22/15431
Copies exécutoires RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

délivrées aux parties le : AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE PARIS

Pôle 5 – Chambre 2

ARRÊT DU 14 JUIN 2024

(n°70, 14 pages)

Numéro d’inscription au répertoire général : n° RG 22/15431 – n° Portalis 35L7-V-B7G-CGK44

Décision déférée à la Cour : jugement du 08 juillet 2022 – Tribunal Judiciaire de PARIS – 3ème chambre 2ème section – RG n°20/10799

APPELANT AU PRINCIPAL et INTIME INCIDENT

M. [Y] [U]

Né le 24/01/1981 à [Localité 11] (28)

De nationalité française

Exerçant la profession de compositeur

Demeurant [Adresse 3] – [Localité 7]

Représenté par Me Charles CUNY de l’AARPI PHI AVOCATS, avocat au barreau de PARIS, toque P 26

INTIMES AU PRINCIPAL et APPELANT INCIDENTS

M. [E] [J]

Né le 26 novembre 1983 à [Localité 12]

De nationalité française

Exerçant la profession de compositeur

Demeurant [Adresse 5] – [Localité 7]

M. [N] [I]

Né le 21 mai 1982 à [Localité 10]

De nationalité française

Exerçant la profession de compositeur

Demeurant [Adresse 1] – [Localité 8]

Représentés par Me Jean-Marie GUILLOUX, avocat au barreau de PARIS, toque G 818

INTIMEES

S.A.S. SOCIETE EUROPEENNE DE PRODUCTION (SEP) prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège.

[Adresse 4]

[Localité 6]

Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 477 774 251

Représentée par Me Olivier BERNABE, avocat au barreau de PARIS, toque B 753

Assistée de Me Christophe DE WATRIGANT plaidant pour la SELAS CABINET LABORDE, avocat au barreau de PARIS, toque C 2010

SACEM

Société civile, prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité au siège social situé

[Adresse 2]

[Localité 9]

Immatriculée au rcs de Nanterre sous le numéro 775 675 739

Assignée à personne habilitée et n’ayant pas constitué avocat

COMPOSITION DE LA COUR :

En application des dispositions des articles 805 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 24 avril 2024, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposés, devant Mme Véronique RENARD, Présidente, en présence de Mme Agnès MARCADE, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport

Mmes Véronique RENARD et Agnès MARCADE ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :

Mme Véronique RENARD, Présidente

Mme Laurence LEHMANN, Conseillère

Mme Agnès MARCADE, Conseillère

Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT

ARRET :

Réputé contradictoire

Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile

Signé par Mme Véronique RENARD, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, présente lors de la mise à disposition.

Vu le jugement réputé contradictoire rendu le 8 juillet 2022 par le tribunal judiciaire de Paris.

Vu l’appel principal interjeté le 26 août 2022 par M. [U].

Vu la signification de la déclaration d’appel et de ses premières conclusions d’appel par M. [U] par acte en date du 28 novembre 2022 à la Société des Auteurs Compositeurs et Editeurs de Musique (SACEM), qui n’a pas constitué avocat (remise à personne habilitée).

Vu la signification des conclusions du 20 février 2023 par MM. [J] et [I] par acte en date du 1er mars 2023 à la SACEM (remis à personne habilitée).

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 29 décembre 2023 par M. [Y] [U], appelant à titre principal et intimé à titre incident.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 10 janvier 2024 par MM. [E] [J] et [N] [I], intimés à titre principal et appelants à titre incident.

Vu les dernières conclusions remises au greffe et notifiées par voie électronique le 21 février 2023 par la société Société Européenne de Production, intimée à titre principal et appelante à titre incident.

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 8 février 2024.

Vu la demande de note en délibéré de la cour aux fins de justification par les parties de la signification de leurs dernières conclusions à la SACEM qui n’a pas constitué avocat.

SUR CE, LA COUR

Il est expressément renvoyé, pour un exposé complet des faits de la cause et de la procédure à la décision entreprise et aux écritures précédemment visées des parties.

MM. [U], [J] et [I] sont des compositeurs de musique inscrits auprès de la SACEM organisme de gestion collective des droits d’auteur, chargée notamment de la collecte et de la répartition de ces droits.

La société Société Européenne de Production (SEP) ayant pour nom commercial « SEPTV Music », est une société de production et réalisation audiovisuelle, qui produit notamment l’émission télévisée « Secrets d’histoire », présentée par M. [G], diffusée depuis 2007, d’abord sur France 2, puis sur France 3.

Elle a fait appel à M. [J] pour composer la nouvelle musique des génériques, celui-ci ayant alors commencé à travailler avec M. [U], puis avec M. [I].

En raison de divergences entre M. [J] et M. [U], ce dernier s’est retiré du projet en début d’année 2013.

Par un contrat du 4 avril 2013, les trois compositeurs ont conclu avec la société SEP un contrat de cession et d’édition de l’oeuvre musicale intitulée « Secrets d’histoire », appelée à sonoriser différentes parties de l’émission télévisée du même nom et à en constituer le générique.

L’illustration musicale de l’émission télévisée « Secrets d’histoire » est en effet composée d’un générique de début et d’un générique de fin qui sont identiques pour tous les épisodes depuis 2013.

Des musiques additionnelles propres à des épisodes de l’émission ont également été composées.

Certaines de ces «  musiques additionnelles » de la série « Secrets d’histoire » ayant été déclarées à la SACEM le 18 juillet 2013 sans qu’il en soit désigné co-auteur, M. [U] a par actes des 1er, 2 et 9 octobre 2020, fait assigner MM. [J] et [I] ainsi que la société SEP et la SACEM devant le tribunal judiciaire de Paris aux fins de se voir reconnaître la qualité de co-auteur et indemniser du préjudice qu’il estime avoir subi.

C’est dans ce contexte qu’a été rendu le jugement dont appel qui a :

– dit irrecevables les fins de non-recevoir soulevées par les défendeurs tendant à voir déclarer M. [U] prescrit et irrecevable à agir sur le fondement de ses droits patrimoniaux,

– dit que M. [U] échoue à établir être le co-compositeur des titres « Secrets d’histoire » : « ouverture », « crépuscule », « vol de nuit », « valse baroque », « Eole », « honors and braves », « romance », « le destin des glorieux », « magie et mystère », « le roi clabois », « le roi full », « le roi orch piano », « le roi piano », « la force du tombeau ‘ sans voix », « la force du tombeau », « angel », « air du vent », « forza », « grands espaces », « liberis », « duo 1 », « duo 2 », « duo 3 », « duo 4 », « duo 5 », « duo 6 », « duo 7 », « piano solo 3 », et « piano solo 4 » visés à l’annexe I, du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013,

En conséquence,

– l’a débouté de ses demandes de rectification des bulletins de déclaration déposés pour les titres en cause auprès de la SACEM et de communication d’informations,

– l’a débouté de ses demandes au titre de son droit de paternité,

– débouté M. [J] et M. [I] de leur demande reconventionnelle en procédure abusive,

– condamné M. [U] à payer à M. [J], M. [I] et la société Société Européenne de Production, la somme de 3 000 euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [U] aux entiers dépens de l’instance.

M. [U] a interjeté appel de ce jugement et par ses dernières conclusions demande à la cour de :

– le juger recevable à agir en revendication de sa qualité de coauteur des oeuvres et recevable en ses demandes,

– confirmer le jugement en ce qu’il a débouté les intimés de leur demande de dommages et intérêts au titre d’un prétendu abus du droit d’ester en justice,

– infirmer le jugement du tribunal judiciaire de Paris du 8 juillet 2022 en ce qu’il a :

– dit que M. [U] échoue à établir être le co-compositeur des titres « Secrets d’Histoire » : « ouverture », « crépuscule », « vol de nuit », « valse baroque », « Eole », « honors and braves », « romance », « le destin des glorieux », « magie et mystères », « le roi clabois », « le roi full », « le roi orch piano », « le roi piano », « la force du tombeau – sans voix », « la force du tombeau », « angel », « air du vent », « forza », « grands espaces », « liberis », « duo 1 », « duo 2 », « duo 3 », « duo 4 », « duo 5 », « duo 6 », « duo 7 », « piano solo 3 » et « piano solo 4 » visés à l’annexe I du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013,

– débouté M. [U] de ses demandes de rectification des bulletins de déclaration déposés pour les titres en cause auprès de la SACEM et de communication d’informations,

– débouté M. [U] de ses demandes au titre de son droit à la paternité,

– condamné M. [U] à payer à M. [J], M. [I] et la Societe Européenne de Production la somme de 3 000 (trois mille) euros chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamné M. [U] aux entiers dépens de l’instance,

Statuant à nouveau :

– lui reconnaître la qualité de co-compositeur de l’oeuvre intitulée Secrets d’Histoire, et, en conséquence, des 39 morceaux séparés de l’oeuvre visés à l’annexe I du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013,

– ordonner à la Société Européenne de Production, à M. [J] et à M. [I] de procéder, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt, à des dépôts rectificatifs auprès de la SACEM pour les 39 morceaux visés en annexe 1 du contrat de cession et ci-dessous rappelés sur la base :

– d’une répartition à parts égales entre les trois coauteurs des droits d’exécution publique,

– d’une répartition des droits de reproduction mécanique à hauteur de :

– 55% pour M. [J],

– 35% pour M. [I],

– 10% pour M. [U],

– ordonner à la SACEM d’adresser, pour les 39 morceaux visés en annexe 1 du contrat de cession du 4 avril 2013, le détail des répartitions corrigées sur la base de la répartition susvisée, au titre des 5 années précédant le 2 octobre 2020, date de l’assignation et jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir,

– ordonner à la Société Européenne de Production de produire la totalité des redditions de compte d’exploitation des 39 morceaux séparés susvisés, au titre des 5 années précédant le 2 octobre 2020, date de l’assignation et jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir,

– surseoir à statuer sur la liquidation du préjudice financier subi par lui,

– se réserver la liquidation de l’astreinte,

– condamner la Société Européenne de Production à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de l’atteinte portée à son droit au nom,

– débouter M. [J] et M. [I] de l’ensemble de leurs demandes,

– condamner in solidum la Société Européenne de Production, M. [J] et M. [I] à lui verser la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner in solidum la Société Européenne de Production, M. [J] et M. [I] aux entiers dépens dont distraction au profit de l’AARPI Phi Avocats, Avocats au Barreau de Paris, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.

Par leurs dernières conclusions, MM. [J] et [I], demandent à la cour de :

A titre liminaire : Sur l’irrecevabilité des demandes formées par M. [U] :

– déclarer recevables les fins de non-recevoir tirées de la prescription et du défaut de qualité et d’intérêt à agir de M. [U],

– juger que l’action de M. [U] est prescrite à la date de délivrance de l’assignation par application de l’article 2224 du code de procédure civile,

– juger que M. [U] est irrecevable à agir sur le fondement de ses droits patrimoniaux pour défaut de qualité,

– juger que M. [U] est irrecevable à agir en paiement des créances nées de sa prétendue qualité de coauteurs des oeuvres musicales d’illustration : « Secrets d’Histoire », « ouverture », « crépuscule », « vol de nuit », « valse baroque », « Eole », « honors and braves », « romance», « le destin des glorieux », « magie et mystères », « le roi clabois », « le roi full », « le roi orc piano », « le roi piano », « la force du tombeau ‘ sans voix », « la force du tombeau », « angel», « air du vent », « forza », « grands espaces », « liberis », « duo 1 », « duo 2 », « duo 3 », « duo 4 », « duo 5 », « duo 6 », « duo 7 », « piano solo 3 » et « piano solo 4 » visés à l’annexe I du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013, pour lesquelles il revendique une telle qualité,

En conséquence :

– déclarer M. [U] irrecevable dans l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions,

Sur la prétendue qualité d’auteur de M. [U] sur les trente-neuf oeuvres musicales revendiquées :

– confirmer le jugement du 08 juillet 2022 du tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il :

– a dit que M. [U] échoue à établir être le co-compositeur des titres : « secrets d’histoire », « ouverture », « crépuscule », « vol de nuit », « valse baroque », « Eole », « honors and braves», « romance », « le destin des glorieux », « magie et mystères », « le roi clabois », « le roi full », « le roi orc piano », « le roi piano », « la force du tombeau ‘ sans voix », « la force du tombeau», « angel », « air du vent », « forza », « grands espaces », « liberis », « duo 1 », « duo 2 », «duo 3 », « duo 4 », « duo 5 », « duo 6 », « duo 7 », « piano solo 3 » et « piano solo 4 » visés à l’annexe I du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013,

En conséquence,

– l’a débouté de ses demandes de rectifications des bulletins de déclaration déposés pour les titres en cause auprès de la SACEM et de communication d’informations,

– l’a débouté de ses demandes au titre de son droit à la paternité, »

En conséquence :

– débouter M. [U] de sa demande visant à ce que soit reconnue sa qualité de co-compositeur de l’oeuvre intitulée Secrets d’Histoire, et, en conséquence des 39 morceaux séparés de l’oeuvre visés à l’annexe I du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013,

– débouter M. [U] de sa demande visant à ce qu’il soit ordonné à la Société Européenne de Production, à M. [J] et à M. [I] de procéder sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du premier arrêt, à des dépôts rectificatifs auprès de la SACEM pour les 39 morceaux visés en annexe 1 du contrat de cession sur la base :

– d’une répartition à parts égales entre les trois coauteurs des droits d’exécution publique,

– d’une répartition des droits de reproduction mécanique à hauteur de :

– 55% pour M. [J],

– 35% pour M. [I],

– 10% pour M. [U],

– débouter M. [U] de sa demande visant à ce qu’il soit ordonné à la SACEM d’adresser, pour les 39 morceaux visés en annexe 1 du contrat de cession du 4 avril 2013, le détail des répartitions corrigées sur la base de la répartition susvisée, au titre des 5 années précédant le 2 octobre 2020, date de l’assignation et jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir,

– débouter M. [U] de sa demande visant à ce qu’il soit ordonné à la Société Européenne de Production de produire la totalité des redditions de compte d’exploitation des 39 morceaux séparés susvisés, au titre des 5 années précédant le 2 octobre 2020, date de l’assignation et jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir,

– débouter M. [U] de sa demande visant à ce que la cour sursoit à statuer sur la liquidation du préjudice financier subi par M. [U],

– débouter M. [U] de sa demande de condamnation de la Société Européenne de Production à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de l’atteinte portée à son droit au nom,

Sur la demande reconventionnelle en procédure abusive formée par MM. [I] et [J] :

– infirmer le jugement du 08 juillet 2022 du tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il a :

– débouté [J] et [I] de leur demande reconventionnelle en procédure abusive,

Statuant à nouveau :

– juger que la mauvaise foi de M. [U] dans l’exercice de son action est caractérisée,

– juger que l’action intentée par M. [U] est abusive,

En conséquence :

– condamner M. [U] à verser à MM. [J] et [I], chacun, la somme de 15 000 euros de dommages et intérêts pour procédure abusive

En tout état de cause :

– condamner M. [U] à verser à MM. [J] et [I], chacun, la somme de 20 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [U] aux entiers dépens.

Par ses dernières conclusions, la société SEP demande à la cour de :

A titre liminaire

– juger que l’action de M. [U] est prescrite à la date de délivrance de l’assignation par application de l’article 2224 du code civil,

– juger que M. [U] est irrecevable à agir sur le fondement de ses droits patrimoniaux,- juger que les demandes avant-dire-droit formées par M. [U] ne sont pas justifiées,

Au fond

– confirmer le jugement du 8 juillet 2022 du tribunal judiciaire de Paris en ce qu’il a :

– dit que [U] échoue à établir être le co-compositeur des titres : « Secrets d’Histoire », «ouverture», « crépuscule », « vol de nuit », « valse baroque », « Eole », «honors and braves», « romance », « le destin des glorieux », « magie et mystères », « le roi clabois », « le roi full », « le roi orc piano », « le roi piano », « la force du tombeau ‘ sans voix », « la force du tombeau », « angel », « air du vent », « forza », « grands espaces », « liberis », « duo 1 », « duo 2 », «duo 3», « duo 4 », « duo 5 », « duo 6 », « duo 7 », « piano solo 3 » et « piano solo 4 » visés à l’annexe I du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013,

En conséquence,

– le déboute de ses demandes de rectifications des bulletins de déclaration déposés pour les titres en cause auprès de la SACEM et de communication d’informations,

– le déboute de ses demandes au titre de son droit à la paternité, »

En toutes hypothèses

– débouter M. [U] de l’ensemble de ses demandes, fins et prétentions à son encontre,

– condamner M. [U] à lui verser à la somme de 7 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,

– condamner M. [U] aux entiers dépens.

A l’audience, la cour a demandé aux parties de justifier, par notes en délibéré, de la signification de leurs dernières conclusions à la SACEM, partie défaillante devant la cour.

Aucune des parties n’a déposé de note en délibéré.

En conséquence, seules les conclusions signifiées à la SACEM seront prises en considération s’agissant des demandes formées à l’égard de cet organisme de gestion collective qui n’a pas constitué avocat.

Dans ses premières conclusions déposées et notifiées le 22 novembre 2022 M. [U] fait à l’égard de la SACEM des demandes identiques à celles formées dans ses dernières conclusions.

La société SEP comme MM. [J] et [I] ne forment aucune demande contre cet organisme dans leurs conclusions respectives.

Sur la recevabilité à agir de M. [U]

MM. [J] et [I] ainsi que la société SEP opposent à M. [U] une fin de non-recevoir fondée sur la prescription prévue à l’article 2224 du code civil. Ils demandent également que M. [U] soit déclaré irrecevable à agir sur le fondement de ses droits patrimoniaux, ceux-ci ayant été cédés à la SACEM.

Le tribunal n’a pas statué sur le bien-fondé de ces fins de non-recevoir, les déclarant irrecevables faute pour MM. [J] et [I] ainsi que la société SEP de les avoir soulevées devant le juge de la mise en état.

MM. [J] et [I] ainsi que la société SEP ne critiquent pas le jugement sur ce point mais soulèvent directement devant la cour les fins de non-recevoir ci-avant mentionnées.

La recevabilité de ces fins de non-recevoir n’est pas discutée dans la présente instance d’appel.

Selon l’article L. 111-1 du code de la propriété intellectuelle, ‘l’auteur d’une oeuvre de l’esprit jouit sur cette oeuvre, du seul fait de sa création, d’un droit de propriété incorporelle exclusif et opposable à tous. Ce droit comporte des attributs d’ordre intellectuel et moral ainsi que des attributs d’ordre patrimonial’.

L’article L. 121-1 du même code dispose que ‘l’auteur jouit du droit au respect de son nom, de sa qualité et de son oeuvre.

Ce droit est attaché à sa personne.

Il est perpétuel, inaliénable et imprescriptible (…)’.

L’article L. 123-1 de ce code prévoit que l’auteur jouit sa vie durant du droit exclusif d’exploiter son oeuvre et, qu’à son décès, ce droit persiste au bénéfice de ses ayants droit pendant les soixante-dix années qui suivent.

Il convient de distinguer la prescription du droit lui-même qui est imprescriptible de la prescription de l’action visant à sanctionner une atteinte à ce dernier laquelle se prescrit selon les règles du droit commun.

L’article 2224 du code civil dispose que ‘les actions personnelles ou mobilières se prescrivent par cinq ans à compter du jour où le titulaire d’un droit a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer’.

En conséquence l’action en réparation des atteintes portées aux droits de l’auteur se prescrit par cinq ans à compter du jour où le titulaire de ceux-ci a connu ou aurait dû connaître les faits lui permettant de l’exercer.

M. [U] demande à la cour que :

– lui soit reconnue la qualité de co-compositeur de l’oeuvre intitulée Secrets d’Histoire, et, en conséquence, des 39 morceaux séparés de l’oeuvre visés à l’annexe I du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013,

– soit ordonné à la Société Européenne de Production, à M. [J] et à M. [I] de procéder, sous astreinte de 100 euros par jour de retard à compter de la signification du présent arrêt, à des dépôts rectificatifs auprès de la SACEM pour les 39 morceaux visés en annexe 1 du contrat de cession et ci-dessous rappelés sur la base :

– d’une répartition à parts égales entre les trois coauteurs des droits d’exécution publique,

– d’une répartition des droits de reproduction mécanique à hauteur de :

– 55% pour M. [J],

– 35% pour M. [I],

– 10% pour M. [U],

– soit ordonné à la SACEM d’adresser, pour les 39 morceaux visés en annexe 1 du contrat de cession du 4 avril 2013, le détail des répartitions corrigées sur la base de la répartition susvisée, au titre des 5 années précédant le 2 octobre 2020, date de l’assignation et jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir,

– soit ordonné à la Société Européenne de Production de produire la totalité des redditions de compte d’exploitation des 39 morceaux séparés susvisés, au titre des 5 années précédant le 2 octobre 2020, date de l’assignation et jusqu’au jour de l’arrêt à intervenir,

– soit sursis à statuer sur la liquidation du préjudice financier subi par lui,

– la Société Européenne de Production soit condamnée à lui verser la somme de 25 000 euros en réparation du préjudice moral subi du fait de l’atteinte portée à son droit au nom.

M. [U] explique en page 9 de ses écritures qu’il estime être co-auteur de l’oeuvre intitulée « Secrets d’histoire » objet du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013 et qui a fait l’objet d’une division en 39 morceaux, chacun déposé comme des oeuvres individuelles auprès de la SACEM, qu’il entend obtenir le partage des droits d’auteur conformément aux règles applicables et obtenir réparation du préjudice moral résultant de l’atteinte à son droit au nom au générique du début d’émission.

Pour contester la fin de non-recevoir fondée sur la prescription il fait valoir que son action tend à rétablir sa paternité en tant qu’auteur des oeuvres en cause et est donc imprescriptible. Il ajoute qu’il était dans l’ignorance du dépôt des bulletins à la SACEM non signés par lui, ceux-ci ne lui ayant jamais été présentés alors qu’il est le co-auteur de ces oeuvres, et que ce n’est qu’en fin d’année 2019 qu’il a su en suite d’une indiscrétion, que M. [J] percevait des redevances bien plus élevées que lui-même. Il fait valoir que si la cour le considère comme prescrit s’agissant de sa demande relative à ses créances de droit d’auteur au titre de la diffusion des épisodes, devront être prises en compte les autres exploitations qui sont venues aggraver son dommage en ce inclus la diffusion par le biais de DVD et la VOD payante. Il considère que seule pourrait éventuellement être prescrite l’action en recouvrement des droits d’auteur antérieure de plus de 5 ans à l’engagement de la présente action. Il invoque également une cause de report du point de départ ou de suspension de la prescription selon les dispositions de l’article 2234 du code civil et une impossibilité d’agir par suite de la force majeure, en raison d’une grave addiction à l’alcool qui l’aurait empêché de découvrir plus tôt qu’il ne percevait pas tous ses droits d’auteur.

Ainsi que le fait valoir M. [U], l’action en reconnaissance de la qualité d’auteur qui est attachée à la personne de l’auteur est imprescriptible.

La fin de non-recevoir tirée de la prescription opposée par les intimés doit être rejetée en ce qu’elle concerne à tout le moins cette prétention. Il en va de même de celle fondée sur le défaut de qualité à agir de M. [U] en raison de la cession de ses droits patrimoniaux à la SACEM.

Avant d’examiner la fin de non-recevoir tirée de la prescription s’agissant des demandes visant à sanctionner une atteinte aux droits d’auteur de M. [U], il y a lieu de déterminer si celui-ci est fondé à revendiquer la qualité de co-auteur des oeuvres en cause.

Pour démontrer sa qualité d’auteur, M. [U] invoque la présomption de l’article L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle, l’oeuvre étant divulguée sous les noms des trois co-auteurs au générique de l’émission, les stipulations du contrat d’édition ainsi que sa contribution artistique à l’illustration sonore de l’émission « Secrets d’histoire » qui doit être considérée comme un tout.

Selon l’article L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle, « la qualité d’auteur appartient, sauf preuve contraire, à celui ou à ceux sous le nom de qui l’oeuvre est divulguée ».

La présomption prévue à cet article selon laquelle la qualité d’auteur est attribuée à la personne sous le nom de laquelle l’oeuvre est divulguée à condition que les faits sur lesquels repose cette présomption soient exempts de toute ambigüité, est une présomption simple qui peut être combattue par tous moyens.

Il ressort des éléments versés au débat et des explications des parties que pour l’émission « Secrets d’histoire » ont été composés en début d’année 2013 les génériques de début et de fin de l’émission qui sont toujours les mêmes quel que soit le thème de l’émission et 37 musiques additionnelles qui sont utilisées en fonction du thème traité. M. [U] a quitté le projet de composition des oeuvres musicales d’illustration de la série « Secrets d’histoire » débuté avec M. [J], le 23 janvier 2013. M. [I] a alors rejoint l’équipe de composition.

Un contrat de cession et d’édition a été conclu le 4 avril 2013 entre la société SEP, d’une part, MM. [U], [I] et [J], d’autre part. Ce contrat a été déposé à la SACEM le 18 juillet 2013. La version du contrat déposée à la SACEM comporte une annexe 1 où est mentionnée une liste de 39 titres, dont 38 sont écrits à la main seul la mention « générique de début » est dactylographiée Le contenu de cette liste n’est pas discuté par les parties même si MM. [I] et [J] relèvent une discordance entre la version du contrat en leur possession dont l’annexe 1 comporte la seule mention dactylographiée « générique de début » et celle déposée à la SACEM.

Ces 39 oeuvres ont fait l’objet de bulletins de déclaration à la SACEM datés du 2 mai 2013 et enregistrés le 18 juillet 2013. Seuls les bulletins de déclaration concernant les oeuvres intitulées « Générique », « Générique fin », « Mouvement symphonique », « Apesanteur », « Fleur du désert », « Nuit d’orient », « Histoires secrètes » et « Divine Area » sont co-signés par M. [U] aux côtés de MM. [I] et [J]. Ces bulletins font état d’une clé de répartition des droits de reproduction suivante : 50% pour la société éditrice SEP et, s’agissant des trois compositeurs : 27,5 % pour M. [J], 17,5 % pour M. [I], et 5 %pour M. [U]. Les autres musiques d’illustration figurant sur cette liste objet de l’annexe I sont déclarées aux seuls noms de MM. [I] et [J], étant toutefois relevé avec les intimés que les services musicaux de la SACEM ont regroupé deux des oeuvres à savoir : « Piano solo 1» avec « Mouvement symphonique » et « Piano solo 2 » avec « Générique de fin » (lettre de la SACEM à la société SEP du 12 décembre 2013 – pièce 44 Intimés), réduisant cette liste à 37 oeuvres dont M. [U] a été désigné comme co-compositeur pour 8 d’entre elles. En conséquence seules 29 musiques d’illustration ne sont pas déclarées au nom de M. [U]. Ce dernier a été informé par la SACEM de ces regroupements (courrier de la SACEM du 3 octobre 2013 adressé à la société SEP avec copie à MM. [I], [J] et [U] ‘ pièce 51 Intimés).

Depuis mai 2013 M. [U] connaît les oeuvres pour lesquelles il est crédité et reçoit de la part de la SACEM un relevé trimestriel d’exploitation de ces oeuvres pour lesquelles il a été déclaré co-compositeur et a perçu sa rémunération au titre du droit d’auteur. Il a également été destinataire du courrier de la SACEM du 3 octobre 2013 précité.

M. [U] demande à la cour de reconnaître sa qualité de co-compositeur de l’oeuvre intitulée « Secret d’histoire » et en conséquence des 39 morceaux séparés visés à l’annexe du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013.

Aux génériques de début et de fin de l’émission « Secret d’histoire », figure la mention « Musique originale [E] [J] » et en-dessous, pour le générique de fin, « Co-compositeurs [N] [I] [Y] [U] ».

Ces mentions au générique sont corroborées par les dispositions du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013 précité qui prévoit en préambule : «  La Société Européenne de Production, productrice de l’émission télévisuelle « SECRETS D’HISTOIRE » a passé commande aux Auteurs ci-dessus désignés qui l’ont accepté, d’une oeuvre musicale originale instrumentale de 45 minutes (ci-après « L’OEUVRE ») qui doit être synchronisée dans un premier temps avec les documentaires audiovisuels « SECRETS D’HISTOIRE ».

Le présent contrat a pour objet de fixer les modalités et les conditions de la cession par les Auteurs de leurs droits sur l’oeuvre à la Société Européenne de Production ».

L’article premier dudit contrat stipule que : « Les AUTEURS cèdent à l’EDITEUR qui l’accepte, selon les conditions ci-après définies (‘) leurs droits de propriété incorporelle, exclusif et opposable à tous, sur l’OEUVRE suivante, y compris sur tous extraits et morceaux séparés tirés de l’OEUVRE, dont les AUTEURS sont propriétaires, ainsi que sur le titre de cette OEUVRE :

« SECRETS D’HISTOIRE »

Musique de : [E] [J] ‘ [N] [I] ‘ [Y] [U]

ci-dessus et ci-après dénommée : l’oeuvre ».

L’article 18 de ce contrat prévoit quant à lui que : « Le nom des auteurs sera mentionné au générique de fin du film de la façon suivante : « Musique originale de [E] [J] – Co-compositeurs [N] [I] et [Y] [U] ».

Il résulte de ce qui précède et ainsi que l’ont décidé à juste titre les premiers juges, que M. [U] est bien fondé à se prévaloir de la présomption d’auteur de l’article L. 113-1 du code de la propriété intellectuelle pour l’oeuvre musicale intitulée « Secrets d’histoire » destinée à être synchronisée avec l’émission télévisée du même nom, et partant pour l’ensemble des 39 « morceaux » visés à l’annexe 1 du contrat.

Aussi, aucune ambiguïté ne peut être utilement déduite du fait que seul le nom de M. [J] est cité dans le générique de début de l’émission, ceux de MM. [I] et [U] ne l’étant que dans le générique de fin, ou du défaut d’explication des circonstances ayant conduit au dépôt à la SACEM d’une version du contrat du 4 avril 2013 avec une annexe 1 complétée de manière manuscrite. En effet, les mentions au générique sont déterminées par le contrat signé par l’ensemble des parties et le contenu de la liste objet de l’annexe 1 n’est pas discuté.

La société SEP, M. [I] et [J] contestent la qualité de co-compositeur de M. [U] pour les musiques figurant à l’annexe 1 dont les bulletins de déclaration à la SACEM n’ont pas été co-signés par ce dernier. Il leur appartient en conséquence de démontrer que M. [U] n’est pas le co-auteur des 29 oeuvres musicales en cause.

Ils invoquent à ce titre la chronologie des faits et le comportement de M. [U], le fait que « Secrets d’histoire » ne constitue pas une oeuvre unique qui aurait été ensuite divisée pour les besoins de la série et les dispositions du contrat du 4 avril 2013.

Il n’est pas discuté que M. [U] a quitté le projet le 21 janvier 2013 ainsi qu’en témoignent les autres intervenants du dit projet. Par lettre du 28 janvier 2013, la société SEP confirmait à M. [I] « que le Producteur en accord avec le compositeur principal M. [E] [J] souhaitent que vous assureriez toute la programmation de la musique originale composée pour l’émission ».

M. [U] ne conteste pas son absence de participation aux enregistrements des oeuvres qu’il revendique. La « consultation expertale » établie par M. [M] du 26 mai 2021 à la demande des intimés pour faire dater les fichiers composant la sauvegarde des sessions de composition et d’enregistrement d’oeuvres musicales qui composent l’illustration musicale des épisodes de la série « Secrets d’histoire », combiné avec le rapport d’expertise privée complémentaire de M. [V] en date du 7 juin 2021 (pièces 53 et 54-1 intimés), soumis au débat contradictoire et non sérieusement critiqués par l’appelant, montrent que les sessions de composition, de réalisation et de production des 29 oeuvres revendiquées sont postérieures au 22 janvier 2013 et que ces musiques ont été composées au fur et à mesure de la production des épisodes de la série.

M. [U] se prévaut du contrat de cession et d’édition signé le 4 avril 2013, déposé à la SACEM le 18 juillet 2013, et particulièrement son annexe 1 où sont listées les 29 oeuvres qu’il revendique. Il a pourtant signé le 2 mai 2013 les bulletins de déclaration à la SACEM également déposés le 18 juillet 2013 pour uniquement 8 oeuvres sans démontrer avoir revendiqué d’être déclaré pour les autres oeuvres figurant dans la liste, ni réagi aux lettres de l’organisme de gestion collective qui l’informait de regroupements d’oeuvres et partant de l’existence d’autres déclarations. M. [U] ne peut à cet égard utilement arguer de son état de santé qui l’aurait empêché de réagir, de la découverte plusieurs années après de ces autres déclarations à la SACEM ou encore des manoeuvres de MM. [I] et [J] qui lui auraient fait signer les bulletins sans pour autant les déposer, ces affirmations n’étant nullement démontrées.

En outre, ainsi que l’ont relevé les premiers juges, l’article 22 du contrat du 4 avril 2013 prévoit le versement d’une prime d’inédit au seul profit de MM. [J] et [I] ce qui confirme les autres éléments qui démontrent que la courte participation de M. [U] au projet ne lui ont pas permis de collaborer à la composition de l’ensemble des oeuvres listées en annexe 1, ce quand bien même il y a concouru avec compétence au commencement de celui-ci, ce qui est reconnu par les autres acteurs et corroboré par ses échanges de courriels avec M. [J] au mois de décembre 2012.

En outre, M. [U] ne peut utilement soutenir que l’ensemble des oeuvres objets de cette liste font partie d’une seule et même oeuvre intitulée « Secrets d’histoire » les différents thèmes s’inscrivant dans le cadre d’une oeuvre globale, alors que chacune des oeuvres a fait l’objet d’un bulletin de déclaration séparé à la SACEM avec son accord au moins pour huit d’entre elles, que les experts musicaux de la SACEM n’ont pas procédé à des regroupements à l’exception de ceux précités, cette analyse étant confortée par le « rapport d’expertise privé » réalisé par M. [V], daté du 3 juin 2021, régulièrement soumis au débat contradictoire, selon lequel ces musiques additionnelles sont sans rapport musical avec les génériques de début et de fin.

La note technique d’expert réalisée par M. [T] en date du 2 septembre 2021 fournie au débat par M. [U] (pièce 35) qui procède à la comparaison, d’une part, du générique de début, du générique de fin et du Mix secrets d’histoire, le dernier étant le fichier que M. [U] a joint au courriel adressé à M. [J] le 3 décembre 2012, et d’autre part, de 27 autres morceaux objets de la liste annexée au contrat, pour conclure que « Sur les vingt-sept oeuvres de comparaison analysées, les deux-tiers d’entre elles présentent des similarités manifestes de nature compositionnelle (mélodie, harmonie, rythme) avec les oeuvres de question alors que le tiers restant présente des ressemblances d’ordre plus général liées à des modalités d’écriture communes», est inopérante à remettre en cause les considérations qui précèdent.

Il résulte de l’ensemble de ces éléments que M. [U] ne peut revendiquer la qualité d’auteur sur les 29 oeuvres en litige.

Le jugement mérite confirmation de ce chef.

M. [U] qui n’a pas la qualité d’auteur des 29 oeuvres qu’il revendique et pour lesquelles il n’a pas été déclaré à la SACEM, n’a pas qualité à agir en contrefaçon à ce titre.

M. [U] sollicite également la réparation d’un préjudice moral résultant de l’atteinte au droit au nom, reprochant principalement à la société SEP le crédit de M. [J] seul au générique de début de l’émission « Secrets d’histoire » en tant qu’auteur de l’oeuvre originale alors que le générique de fin mentionne tous les compositeurs, que le CD intitulé « Secrets d’histoire » ne mentionne que le nom de M. [J] comme les plateformes de vidéos en ligne de rediffusion de l’émission ou le site internet de l’émission. Il sollicite également une modification de la répartition des droits d’exécution publique et de reproduction mécanique.

Ces demandes concernent les 39 oeuvres précitées et en conséquence les oeuvres « Générique », « Générique fin », « Mouvement symphonique », « Apesanteur », « Fleur du désert », « Nuit d’orient », « Histoires secrètes » et « Divine Area » pour lesquelles la qualité de co-compositeur de M. [U] n’est pas discutée.

Pour autant, M. [U] ne démontre pas être le seul auteur comme il l’affirme du générique de l’émission « Secrets d’histoire », la note technique d’expert de M. [T] en date du 2 septembre 2021 précitée qu’il fournit étant inopérante à établir sa seule intervention dans la composition de cette oeuvre. La description de chacune des oeuvres à laquelle a procédé M. [T] ne permet pas de conclure à la qualité d’auteur exclusif du générique de M. [U], ce d’autant qu’il a accepté selon contrat du 4 avril 2013 d’être cité comme co-compositeur du générique aux côtés de MM. [J] et [I] et d’être déclaré à la SACEM dans les bulletins précités comme compositeur à hauteur de 5 % des oeuvres en cause.

En outre, il résulte des développements qui précèdent que le nom de M. [U] est bien mentionné au générique de fin de l’émission conformément aux dispositions du contrat du 4 avril 2013. Pour ce qui est des autres atteintes reprochées, les seules reproductions dans ses écritures d’une photographie du CD « Secrets d’histoire » ou d’extraits de sites, faites dans des circonstances inconnues de la cour n’ont pas de force probante et ne peuvent être retenues.

Enfin, selon les éléments ci-avant relevés et ainsi que le font valoir les intimés, M. [U] avait connaissance ou aurait dû connaître les faits qu’il dénonce depuis au moins le 18 juillet 2013 date de dépôts du contrat du 4 avril 2013 et des bulletins de déclaration à la SACEM pour chacune des oeuvres visées en annexe, celui-ci ayant pendant près de sept années perçu les droits de la SACEM selon la clé de répartition dont il demande désormais la modification.

De même, l’émission télévisée « Secrets d’histoire » est diffusée avec le générique de début que M. [U] dénonce depuis 2013, cette émission ainsi qu’il le fait lui-même valoir, ayant rencontré un succès incontestable. M. [U] avait donc connaissance ou aurait dû connaître les faits qu’il dénonce depuis 2013.

Enfin, M. [U] ne saurait être suivi lorsqu’il soutient que chaque épisode de l’émission constitue une oeuvre audiovisuelle nouvelle, les atteintes qu’il dénonce liées à la répartition des droits et au crédit du générique ne variant pas selon l’épisode réalisé.

M. [U] n’établit pas plus que les problèmes de santé qu’il rencontrait liés à une dépression étaient tels qu’ils constituaient pour lui une impossibilité d’agir.

En conséquence, au 2 octobre 2020 date de délivrance de l’assignation, les demandes réparatrices qu’il forme sont prescrites en application de l’article 2224 du code civil, et doivent en conséquence être déclarées irrecevables.

– Sur les demandes incidentes de MM. [J] et [I] et de la société SEP au titre de la procédure abusive

Le fait d’exercer une action en justice ne constitue pas une faute, sauf s’il dégénère en abus. En l’espèce, aucun des moyens développés par MM. [J] et [I] ainsi que par la société SEP ne caractérise une telle faute, le caractère opportuniste de l’action de M. [U] étant à cet égard insuffisant.

En conséquence le jugement sera confirmé en ce qu’il a dit mal fondés MM. [J] et [I] ainsi que la société SEP en leurs demandes de dommages intérêts pour procédure abusive.

– Sur les autres demandes

Le sens de l’arrêt conduit à confirmer les dispositions du jugement concernant les dépens et les frais irrépétibles.

L’équité commande de condamner M. [U] qui succombe à payer une indemnité de 3 000 euros à chacun des intimés au titre des frais irrépétibles d’appel.

Succombant à la procédure, M. [U] en supportera les dépens d’appel.

PAR CES MOTIFS

La cour,

Dit M. [Y] [U] recevable à agir en revendication de sa qualité de co-auteur,

Confirme le jugement entrepris sauf en ses dispositions ayant débouté M. [Y] [U] de ses demandes de rectification des bulletins de déclaration déposés pour les titres en cause auprès de la SACEM et de ses demandes au titre de son droit à la paternité,

Statuant à nouveau des chefs infirmés,

Dit M. [Y] [U] irrecevable à demander, faute de qualité, la rectification des bulletins de déclaration déposés pour les titres en cause auprès de la SACEM, le détail des répartitions corrigées et les redditions de compte pour les oeuvres « ouverture », « crépuscule », « vol de nuit », « valse baroque », « Eole », « honors and braves », « romance », « le destin des glorieux », « magie et mystère », « le roi clabois », « le roi full », « le roi orch piano », « le roi piano », « la force du tombeau ‘ sans voix », « la force du tombeau », « angel », « air du vent », « forza », « grands espaces », « liberis », « duo 1 », « duo 2 », « duo 3 », « duo 4 », « duo 5 », « duo 6 », « duo 7 », « piano solo 3 », et « piano solo 4 » visés à l’annexe I, du contrat de cession et d’édition du 4 avril 2013 ainsi que la réparation de son préjudice moral,

Dit irrecevables car prescrites les demandes réparatoires formées par M. [Y] [U] pour les oeuvres « Générique », « Générique fin », « Mouvement symphonique », « Apesanteur », « Fleur du désert », « Nuit d’orient », « Histoires secrètes » et « Divine Area »,

Condamne M. [Y] [U] à payer à M. [E] [J], M. [N] [I] et à la société Société Européenne de production, la somme de 3 000 euros, à chacun, au titre des frais irrépétibles d’appel,

Condamne M. [Y] [U] aux dépens d’appel.

La Greffière La Présidente


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