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CIV. 3
JL
COUR DE CASSATION
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Audience publique du 30 juin 2021
Cassation
M. CHAUVIN, président
Arrêt n° 568 F-D
Pourvoi n° R 20-15.343
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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ARRÊT DE LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, DU 30 JUIN 2021
Mme [J] [H], domiciliée [Adresse 1], a formé le pourvoi n° R 20-15.343 contre l’arrêt rendu le 20 février 2020 par la cour d’appel de Dijon (2e chambre civile), dans le litige l’opposant :
1°/ à M. [B] [O],
2°/ à M. [U] [O],
tous deux domiciliés [Adresse 2],
défendeurs à la cassation.
La demanderesse invoque, à l’appui de son pourvoi, le moyen unique de cassation annexé au présent arrêt.
Le dossier a été communiqué au procureur général.
Sur le rapport de M. Barbieri, conseiller, les observations de la SCP Bauer-Violas, Feschotte-Desbois et Sebagh, avocat de Mme [H], de la SCP Rocheteau et Uzan-Sarano, avocat de MM. [O], après débats en l’audience publique du 1er juin 2021 où étaient présents M. Chauvin, président, M. Barbieri, conseiller rapporteur, M. Echappé, conseiller doyen, et Mme Besse, greffier de chambre,
la troisième chambre civile de la Cour de cassation, composée des président et conseillers précités, après en avoir délibéré conformément à la loi, a rendu le présent arrêt.
Faits et procédure
1. Selon l’arrêt attaqué (Dijon, 20 février 2020), par acte du 24 octobre 1986, [C] [H] a donné à bail à ferme à M. [B] [O] un domaine agricole comprenant des parcelles et des bâtiments d’exploitation et d’habitation.
2. Mme [H] est venue aux droits de [C] [H], décédé le [Date décès 1] 1995.
3. Par lettres des 20 novembre 2015 et 5 septembre 2016, M. [O] a sollicité de la bailleresse l’autorisation de céder le bail à son fils [U]. Mme [H] l’a refusée et a fait délivrer congé à M. [O] en raison de l’âge de la retraite, à effet au 11 novembre 2019.
4. Par déclaration du 6 juin 2017, MM. [O] ont saisi le tribunal paritaire des baux ruraux en autorisation de cession du bail.
Examen du moyen
Sur le moyen unique, pris en sa première branche
Enoncé du moyen
5. Mme [H] fait grief à l’arrêt d’autoriser la cession du bail du 24 octobre 1986 au profit de M. [U] [O], alors « que le preneur qui ne s’est pas constamment acquitté de toutes les obligations nées de son bail ne peut bénéficier de la faculté exceptionnelle de le céder ; que commet un manquement grave aux obligations nées du bail le constituant de mauvaise foi, le preneur qui développe sur les parcelles louées, sans accord du bailleur, une activité commerciale étrangère à l’usage agricole des terres affermées ; qu’ayant relevé, d’une part, que M. [B] [O] avait exploité depuis son entrée dans les lieux au vu et au su du bailleur une activité forestière sur la propriété louée et, d’autre part, qu’il n’avait pas demandé et ne justifiait pas d’une autorisation expresse du bailleur, ce dont il résultait que le preneur avait développé une activité commerciale sur les terres affermées à usage agricole sans accord du bailleur, la cour d’appel a, en autorisant néanmoins la cession du bail aux motifs inopérants que l’activité forestière était développée sur une partie très réduite des biens loués, sans aucune dégradation du reste des biens loués et sans mettre en péril l’exploitation desdits biens, violé l’article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime .»
Réponse de la Cour
Vu l’article L. 411-35 du code rural et de la pêche maritime :
6. Il résulte de ce texte que la faculté de céder le bail dans le cercle familial est réservée au preneur qui s’est acquitté de toutes les obligations légales ou conventionnelles résultant de son bail.
7. Pour autoriser la cession du bail, l’arrêt retient que, s’il n’est pas justifié que le preneur eût sollicité un accord du bailleur en vue d’exercer une activité commerciale de scierie avec stockage et vente de bois, cette activité forestière a été développée au vu et au su du propriétaire sur une partie très réduite du domaine pris à bail, sans qu’il y ait eu mise en péril de l’exploitation dans son ensemble.
8. En statuant ainsi, tout en constatant un manquement du preneur à l’obligation d’exploiter le bien mis à sa disposition conformément à la destination que lui avait conférée le bail, la cour d’appel, qui n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations, a violé le texte susvisé.
PAR CES MOTIFS, et sans qu’il y ait lieu de statuer sur les autres griefs, la Cour :
CASSE ET ANNULE, en toutes ses dispositions, l’arrêt rendu le 20 février 2020, entre les parties, par la cour d’appel de Dijon ;
Remet l’affaire et les parties dans l’état où elles se trouvaient avant cet arrêt et les renvoie devant la cour d’appel de Metz ;
Condamne MM. [O] aux dépens ;
En application de l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de MM. [O] et les condamne à payer à Mme [H] la somme globale de 3 000 euros.
Dit que sur les diligences du procureur général près la Cour de cassation, le présent arrêt sera transmis pour être transcrit en marge ou à la suite de l’arrêt cassé ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du trente juin deux mille vingt et un.