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COUR D’APPEL D’AIX-EN-PROVENCE
4e Chambre A
ARRÊT AU FOND
DU 14 JUIN 2018
hg
N° 2018/ 533
Rôle N° RG 17/00572
N° Portalis DBVB-V-B7B-722Y
Joseph edouard X…
jacques Y…
herve Y…
gerard Y…
corinne Y…
C/
Z… A…
VIrginie Vanessa B…
O…
Jean-Claude C…
Grosse délivrée
le :
à :
Me Pierre D…
Me Marie-Thérèse E…
Me Nicolas F…
Décision déférée à la Cour :
Jugement du Tribunal de Grande Instance d’AIX-EN-PROVENCE en date du 15 Décembre 2016 enregistré au répertoire général sous le n° 14/05467.
APPELANTS
Monsieur Joseph Edouard X…
demeurant […]
représenté par Me Pierre D…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Monsieur Jacques Y…
demeurant […]
représenté par Me Pierre D…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Monsieur Hervé Y…
demeurant […]
représenté par Me Pierre D…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Monsieur Gérard Y…
demeurant […]
représenté par Me Pierre D…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Madame Corinne Y… épouse G…
demeurant […]
représentée par Me Pierre D…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
INTIMES
Monsieur Z… A…
demeurant […]
représenté par Me Marie-Thérèse E…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Madame Virginie Vanessa B… épouse A…
demeurant […]
représentée par Me Marie-Thérèse E…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Madame O…
demeurant […]
représentée par Me Nicolas F…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
Monsieur Jean-Claude C…, demeurant […]
représenté par Me Nicolas F…, avocat au barreau d’AIX-EN-PROVENCE
*-*-*-*-*
COMPOSITION DE LA COUR
L’affaire a été débattue le 12 Avril 2018 en audience publique. Conformément à l’article 785 du code de procédure civile, Madame Hélène H…, a fait un rapport oral de l’affaire à l’audience avant les plaidoiries.
La Cour était composée de:
Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre
Madame Hélène H…, Conseiller
Madame Bernadette MALGRAS, Conseiller
qui en ont délibéré.
Greffier lors des débats : Madame Danielle PANDOLFI.
Les parties ont été avisées que le prononcé de la décision aurait lieu par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2018
ARRÊT
Contradictoire,
Prononcé par mise à disposition au greffe le 14 Juin 2018,
Signé par Monsieur Jean-Luc PROUZAT, Président de chambre et Madame Danielle PANDOLFI, greffier auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
***
FAITS, PRÉTENTIONS ET MOYENS DES PARTIES :
Suivant acte de rétrocession par la SAFER du 5 avril 2006, P… est propriétaire sur la commune de Lambesc d’une parcelle cadastrée section […], lieu-dit plaine de Bertoire d’une contenance de 1 hectare 78 ares 10 centiares.
Suivant acte de partage du 10 avril 1979, Yves Y… aux droits de qui se trouvent sa veuve et leur quatre enfants, Jeannine I…, Jacques Y…, Hervé Y…, Gérard Y…, Corinne Y… épouse G… (l’hoirie I… Y…) s’était vu attribuer une parcelle cadastrée section […], lieu-dit «Boimau ouest» d’une superficie de 2 hectares 15 ares 30 centiares.
Z… A… et Virginie B… ( les consorts A… et B… ) sont propriétaires depuis le 6 mai 2009 des parcelles cadastrées section […], […] et […], pour une contenance totale de 29 ares 87 centiares, chemin du vallon rouge.
Suivant acte du 21 septembre 1985, Jean-Claude C… et Jeannette Co ( les consorts C… et Co) ont acquis des consorts J… les parcelles cadastrées section […], […], […], […] et […] pour une contenance totale de 47 ares 10 centiares.
Par actes d’huissier du 9 septembre 2014, P…, Jeannine I…, Jacques Y…, Hervé Y…, Gérard Y…, Corinne Y… épouse G…, ( les consorts X…-I…-Y…) ont assigné devant le tribunal de grande instance d’Aix en Provence, les consorts A… et B… et les consorts C… et Co, afin, suivant leurs dernières conclusions, et au visa des articles 544, 545, 685, 691 du code civil, L162-1 du code rural et de la pêche maritime, de voir :
-dire et juger que les consorts C… et Co d’une part, A… et B… d’autre part, ne détiennent aucun titre, ni droit quelconque, ni à emprunter, ni à empiéter sur leurs parcelles ;
-leur faire défense d’emprunter et d’empiéter de quelque manière que ce soit lesdites parcelles, propriétés des concluants sous astreinte de 1 000 € par manquement constaté;
– dire et juger en tout état que le chemin litigieux ne peut pas être un chemin d’exploitation juridiquement en ce qu’il traverse de part en part les fonds, et que son tracé a été récemment aménagé, au corps défendant des concluants, par les défendeurs eux-mêmes.
Par jugement du 15 décembre 2016, le tribunal de grande instance d’Aix en Provence a:
-déclaré irrecevable l’action engagée par les consorts X… I… Y…,
-les a condamnés in solidum aux dépens et à payer, au titre de l’article 700 du code de procédure civile:
. 3 000 € aux consorts A… et B…,
. 3 000 € aux consorts C… et Co.
Les consorts X…-I…-Y… ont interjeté appel de ce jugement par déclaration du 10 janvier 2017.
Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 3 avril 2017 auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, les consorts X…-I…-Y… entendent voir:
– réformer le jugement dans toutes ses dispositions, et, statuant de nouveau :
– déclarer recevable leur action,
-dire et juger que les consorts C… et Co d’une part, A… et B… d’autre part, ne détiennent aucun titre, ni droit quelconque, ni à emprunter, ni à empiéter, ni sur leurs parcelles ;
– leur faire défense d’emprunter et d’empiéter de quelque manière que ce soit lesdites parcelles, propriétés des concluants sous astreinte de 1 000 € (soit 500 € à P… et 500 € à l’hoirie I… Y…) par manquement constaté, passé le délai de 8 jours suivant la signification de l’arrêt à intervenir ;
– débouter les intimés de l’ensemble de leurs demandes, moyens, fins et conclusions plus amples ou contraires ;
– condamner in solidum les consorts C… et les consorts A… et B… à leur payer la somme de 6 000 € ( soit 3 000 € à P…, et 3 000 € à l’hoirie Y… conformément à l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens de l’instance distraction dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile.
Pour eux:
– les fonds des consorts A… B… et C… étaient à l’origine desservis par un chemin d’exploitation longeant les parcelles […] et […] et débouchant su l’ancienne route de Berre,
– à partir de la fin des années 1990, ils ont abandonné ce passage pour emprunter le chemin traversant leurs fonds qui n’était qu’un sentier de chasse et de promenade, et l’ont transformé en chemin carrossable,
– un chemin d’exploitation longe des parcelles sans les traverser.
Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 30 mai 2017, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, les consorts A… et B… entendent voir:
– constater qu’ils s’en rapportent sur la recevabilité de l’action,
– en conséquence, débouter les consorts X…-I…-Y… de leur appel ainsi que de toutes leurs demandes, fins et conclusions et confirmer le jugement entrepris ;
subsidiairement :
– débouter les consorts X…-I…-Y… de leur appel ainsi que de toutes leurs demandes, fins et conclusions comme mal fondées et en conséquence :
vu les articles 162-1 et 162-3 du code rural et de la pêche maritime,
– constater que leur propriété et par voie de conséquence, en raison de la servitude conventionnelle prévue par l’acte de Maître Raoul K…, notaire à Aix-en-Provence du 28 novembre 1961, et celle des consorts C… et Co, sont desservies et reliées à la voie publique, c’est-à-dire au chemin dit du vallon rouge par un chemin d’exploitation, traversant les propriétés des consorts X…-I…-Y…,
– en conséquence, dire et juger que les consorts X…-I…-Y… ne sont pas fondés à leur interdire de traverser leurs propriétés respectives en utilisant le chemin existant et les débouter de toutes leurs demandes.
plus subsidiairement :
vu l’article 685 du code civil,
– constater que leur propriété, et par voie de conséquence en raison de la servitude conventionnelle prévue par l’acte de Maître Raoul K…, notaire à Aix-en-Provence du 28 novembre 1961, celle des consorts C… et Co sont enclavées, mais que ces propriétés ont été reliées de manière continue pendant plus de 30 ans au chemin rural dit « du vallon rouge » par un chemin permettant un accès à pieds et en véhicule à la voie publique,
– en conséquence, dire et juger qu’eux et les consorts C… et Co bénéficient par 30 ans d’usage continu, d’un droit de passage à pieds et en véhicule pour accéder à leurs propriétés respectives, dont l’assiette est constituée par le chemin actuel dont le tracé traverse les propriétés des consorts X…-I…-Y… et débouter ceux-ci de toutes leurs demandes.
infiniment subsidiairement :
vu l’article 682 du code civil,
-constater que leur propriété, et par voie de conséquence en raison de la servitude conventionnelle prévue par l’acte de Maître Raoul K…, notaire à Aix-en-Provence du 28 novembre 1961, celle des consorts C… et Co sont enclavées et dire et juger qu’ils sont fondés à réclamer un passage suffisant pour assurer leur desserte.
-en conséquence, surseoir à statuer sur les demandes des consorts X…-I…-Y… et ordonner une mesure d’expertise en donnant pour mission à l’expert de réunir tous les éléments permettant ultérieurement au tribunal de déterminer l’assiette d’un droit de passage permettant le désenclavement de leur propriété, et celle des consorts C… et Co
en toutes hypothèses :
– débouter les consorts X…-I…-Y… de toutes leurs demandes tendant à voir supprimer l’accès à leur propriété par le chemin litigieux.
– les autoriser à entretenir le chemin litigieux pendant la durée de la procédure et jusqu’à la solution du litige, pour leur permettre d’accéder à pieds et en véhicule à leur propriété.
– condamner in solidum les consorts X…-I…-Y… à leur payer 4 000 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile.
– condamner in solidum les consorts X…-I…-Y… aux entiers dépens de première instance et d’appel avec distraction dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile.
Pour eux:
– eux-mêmes et leurs auteurs, qui ont été communs à un moment donné avec ceux des consorts C… et Co accèdent par le chemin litigieux à leur propriété;
– les photographies de l’institut géographique national attestent de l’existence de ce chemin depuis 1949,
– il doit être qualifié de chemin d’exploitation,
Aux termes de leurs dernières conclusions remises au greffe et notifiées le 8 juin 2017, auxquelles il convient de se référer pour un exposé détaillé des moyens et prétentions, les consorts C… et Co entendent voir:
-confirmer le jugement,
statuant à nouveau, vu les articles 30, 31, 122 et 124 du code de procédure civile,
– dire et juger irrecevable l’action des consorts X…-I…-Y… en ce qu’ils n’ont pas mis en cause la commune de Lambesc, en sa qualité de propriétaire des parcelles […] traversée par le chemin litigieux et CO 204, ni les consorts L…, propriétaires de la parcelle […], et en conséquence rejeter toutes leurs demandes ;
à titre subsidiaire, vu les articles 682 et 685 du code civil et L162-1 et 3 du code rural et de la pêche maritime,
– dire et juger qu’ils bénéficient sur les parcelles […], […] et […] d’une servitude de passage à pied et en voiture établie par possession depuis plus de trente ans ;
– dire et juger que le chemin s’analyse en tout état de cause en un chemin d’exploitation;
en conséquence, rejeter toutes les demandes, fins et conclusions des consorts X…-I…-Y… ;
à titre infiniment subsidiaire,
– ordonner expertise avec mission pour l’expert commis d’avoir à établir le tracé d’une servitude de passage afin de désenclaver leur fonds ;
en tout état de cause,
– condamner in solidum les consorts X…-I…-Y… à leur payer 2 000 € de dommages et intérêts pour préjudice moral et 3 000 € en application de l’article 700 du code de procédure civile ;
– les condamner aux entiers dépens de première instance et d’appel distraction dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile.
Pour eux:
-alors que leur fonds est enclavé, ils ont prescrit l’assiette par 30 ans de passage,
-le chemin litigieux est un chemin d’exploitation, et cela est rappelé dans le titre de Monsieur X…,
-ils ne disposent pas d’un autre accès.
L’ordonnance de clôture a été rendue le 27 mars 2018.
MOTIFS DE LA DÉCISION:
Sur la recevabilité de la demande:
Bien que la commune de Lambesc, propriétaire des parcelles […] et […], ou les consorts L…, propriétaires des parcelles […] et […] ne soient pas en cause dans la présente instance, l’action engagée par les consorts X…-I…-Y… afin de faire cesser le passage sur leur fonds est recevable, leurs qualité et intérêt à agir étant acquis indépendamment des droits des consorts A… B… et C… sur d’autres parcelles, propriété de la commune ou des consorts L….
Le jugement sera infirmé en ce qu’il les a déclarés irrecevables en leur action.
Sur l’existence d’une servitude de passage conventionnelle:
Dans l’acte de vente des consorts J… aux consorts C… et Co du 21 septembre 1985, il est mentionné, au paragraphe traitant des servitudes:
«La propriété présentement vendue bénéficie d’un droit de passage de trois mètres cinquante centimètres de large sur toute la longueur de la limite nord de la parcelle actuellement cadastrée à la section CP, sous le numéro 54, ainsi qu’il résulte d’un acte de vente par Mademoiselle Catherine J… à Mademoiselle M…, reçu par Maître K…, notaire à Aix en Provence, le 28 novembre 1968».
Dans l’acte de vente des consorts Q… J… aux consorts A… B… du 6 mai 2009, il est mentionné, au paragraphe «déclaration du vendeur» :
« Le vendeur déclare qu’il n’a créé, ni laissé créer aucune servitude sur l’immeuble vendu, et qu’à sa connaissance il n’en existe pas d’autres que celles pouvant résulter de la situation des lieux, de la loi ou de l’urbanisme, et de celles contenues dans un acte reçu aux minutes de Maître Raoul K…, notaire à Aix en Provence, le 23 mars 1965 et ci-après littéralement retranscrites :
conditions particulières:
De la vente consentie à Mademoiselle M… par Mademoiselle J…, il a été stipulé les conditions particulières, ci-après littéralement transcrites :
La présente vente est consentie moyennant la condition, ci-après expressément acceptée par l’acquéreur.
N… M…, acquéreur, constitue une servitude de passage au profit de N… J…, venderesse, afin que cette dernière puisse accéder au restant de sa propriété cadastrée sous les numéros 437.438.439P de la section F, sur une bande de terrain d’une largeur de trois mètres cinquante prise sur toute la longueur de la limite nord de la parcelle par elle présentement acquise entre les plans A et B du plan ci-dessus visé».
L’étude des plans et actes translatifs de propriété produits permet de constater que les servitudes de passage résultant de ces actes concernent les fonds actuellement propriétés des consorts C… et Co et des consorts A… B…, la servitude de passage grevant la parcelle […] sur 3,5 mètres de large et sur toute la longueur de sa limite nord, au profit du fonds cadastré […], […], […], […] et […], propriété des consorts C… et Co, située à l’ouest du fonds servant.
Il n’est de la sorte aucunement justifié de l’existence d’une servitude de passage grevant les fonds de P…, CO n°951 ou de l’hoirie I… Y… R… n°378.
Sur l’existence d’un chemin d’exploitation:
Le chemin revendiqué comme chemin d’exploitation traverse à partir du chemin rural dit du «vallon rouge» du nord-ouest vers le sud-est, les fonds 591 (hors litige) 378 et 951, propriétés des consorts X…-I…-Y….
Ce chemin figure de manière très apparente sur les clichés photographiques de l’institut géographique national de 1949, 1959, 1967, 1978, 1980, et 1993.
Sa pérennité est attestée par le procès verbal d’huissier établi le 22 septembre 2014 à la demande d’Z… A….
La servitude conventionnelle créée au profit du fonds cadastré […], […], […], […] et […], propriété des consorts C… et Co, sur le fonds CP n°54 au moment de la division des fonds permet de rejoindre ce chemin.
L’acte de rétrocession par la SAFER du 5 avril 2006 à P… de la parcelle cadastrée section […] mentionne:
«le vendeur déclare que les propriétaires des parcelles cadastrées section CP, numéros 48, 49, 50, 51, 54 et 55, confrontant au sud la parcelle de terre présentement vendue, accèdent depuis de très nombreuses années à leurs propriétés à partir du chemin rural dit de Vallon Rouge en traversant diverses parcelles et notamment la partie Sud-Ouest de la parcelle de terre présentement vendue. Cette servitude ne passage ne semble résulter d’aucun titre régulièrement publié ou transcrit.
L’acquéreur déclare également avoir une parfaite connaissance de cette servitude et vouloir en faire son affaire personnelle, sans recours contre le vendeur».
Aux termes de l’article L 162-1 du code rural, « les chemins et sentiers d’exploitation sont ceux qui servent exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation. Ils sont, en l’absence de titre, présumés appartenir aux propriétaires riverains, chacun en droit soi, mais l’usage en est commun à tous les intéressés. L’usage de ces chemins peut être interdit au public.»
En l’espèce, le chemin existe depuis des décennies, et au moins depuis depuis 1949 (date de la première photographie de l’institut géographique national produite) part du chemin rural dit du «vallon rouge», traverse les fonds 591 (hors litige) 378 et 951, propriétés non bâties des consorts X…-I…-Y…, et prend fin à la desserte du fonds CP 54.
L’acte d’acquisition de P… rappelle l’existence de cette desserte «depuis de très nombreuses années» et l’absence de titre de servitude de passage, ce qui est parfaitement compatible avec la notion de chemin d’exploitation.
De nombreux témoignages précis et concordants sont produits par les consorts C… et Co qui ont acquis leur bien en 1985 attestant de l’accès à ce qui n’était qu’un cabanon par ce chemin partant de celui du «vallon rouge».
Enfin, un permis de construire a été accordé le 7 avril 1987 au propriétaire de la parcelle […] pour transformer le cabanon existant en habitation, sur la base d’un plan faisant figurer l’accès par le chemin litigieux, puis un autre permis de construire a été accordé le 3 mars 1995 pour l’extension de la maison.
Face à ces documents probants, les deux attestations de K… Matheron, garde chasse bénévole décrivant l’évolution de ce chemin autrefois utilisé par les chasseurs et pour le passage de moutons ainsi que la promenade devenu chemin de terre à forte circulation, ou de René Lenfant décrivant des travaux réalisés sur le chemin, ne sont pas de nature à contredire les précédents éléments.
Il n’est pas davantage établi que les consorts C… et Co et A… B… aient eux mêmes procédé à des travaux d’élargissement du chemin litigieux en profitant de l’autorisation obtenue de Madame Y… le 14 février 2010 pour un simple élagage et débroussaillement, alors que le chemin avait déjà été utilisé précédemment pour mettre en ‘uvre les permis de construire accordés le 7 avril 1987, puis le 3 mars 1995.
Enfin, le fait que le chemin litigieux traverse et coupe les parcelles des consorts X…-I…-Y… au lieu de les longer, n’est pas incompatible avec la définition du chemin d’exploitation.
La preuve est dès lors suffisamment rapportée par l’ensemble des pièces produites de l’existence d’un chemin servant exclusivement à la communication entre divers fonds, ou à leur exploitation dans les conditions prévues par l’article L 162-1 du code rural.
Il est dès lors sans intérêt de savoir s’il existe ou non un autre chemin desservant par l’est les deux propriétés C… et Co et A… B…, tel que décrit dans le procès verbal de constat dressé le 15 septembre 2016 à la requête des consorts X…-I…-Y…, l’existence ou le maintien d’un chemin d’exploitation étant indépendant d’un état éventuel d’enclave, plusieurs chemins d’exploitation pouvant desservir un même fonds.
Les demandes des consorts X…-I…-Y… tendant à voir interdire sous astreinte aux consorts C… et Co d’une part, A… et B… d’autre part, l’usage du chemin qualifié d’exploitation seront donc rejetées.
Sur la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral des consorts C… et Co:
Il n’est pas justifié, ni même précisé en quoi les consorts X…-I…-Y… auraient fait preuve d’un comportement fautif à l’origine d’un préjudice moral qui serait subi par les consorts C… et Co, mais qui n’est pas caractérisé.
Cette demande sera donc rejetée.
Sur l’article 700 du code de procédure civile:
Les consorts X…-I…-Y… succombant à l’instance seront condamnés aux dépens avec distraction pour ceux d’appel dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile et à payer 2 000 euros aux consorts C… et Co d’une part, et 2 000 € aux consorts A… et B… d’autre part, le jugement étant infirmé en ce qu’il les a condamnés au paiement de 3 000 € à chacun au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
PAR CES MOTIFS:
La cour,
Infirme le jugement sauf en ses dispositions relatives aux dépens,
Statuant à nouveau,
Déclare Jeannine I…, Jacques Y…, Hervé Y…, Gérard Y…, Corinne Y… épouse G… et P… recevables en leurs demandes,
Dit que le chemin traversant à partir du chemin rural dit du «vallon rouge» du nord-ouest vers le sud-est, les fonds 378 et 951, propriété des consorts X…-I…-Y… est un chemin d’exploitation desservant les propriétés cadastrées section […], […], […], […] et […] d’une part et n°53, 54 et 55 d’autre part,
Rejette les demandes des consorts X…-I…-Y… tendant à voir interdire sous astreinte aux consorts C… et Co d’une part, A… et B… d’autre part, l’usage dudit chemin,
Rejette la demande de dommages et intérêts pour préjudice moral des consorts C… et Co,
Condamne les consorts X…-I…-Y… aux dépens avec distraction pour ceux d’appel dans les conditions prévues par l’article 699 du code de procédure civile, et à payer 2 000 euros aux consorts C… et Co d’une part, et 2 000 € aux consorts A… et B… d’autre part au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Le greffier Le président