Élagage : 13 septembre 2018 Cour de cassation Pourvoi n° 17-20.286

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Élagage : 13 septembre 2018 Cour de cassation Pourvoi n° 17-20.286
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CIV.3

MF

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 13 septembre 2018

Rejet non spécialement motivé

M. CHAUVIN, président

Décision n° 10485 F

Pourvoi n° B 17-20.286

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, TROISIÈME CHAMBRE CIVILE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société JLD, société à responsabilité limitée, dont le siège est […] , venant aux droits de M. Jean-Louis X…,

contre l’arrêt rendu le 5 avril 2017 par la cour d’appel de Bordeaux (1re chambre civile), dans le litige l’opposant :

1°/ à M. Jean-Claude Y…, domicilié […] ,

2°/ à Mme Danielle Y…, épouse Z…, domiciliée […] ,

3°/ à Mme Yveline Y…, épouse A…, domiciliée […] ,

défendeurs à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 10 juillet 2018, où étaient présents : M. Chauvin, président, M. B…, conseiller rapporteur, Mme Masson-Daum, conseiller doyen, Mme Besse, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de la société JLD, de la SCP Matuchansky, Poupot et Valdelièvre, avocat des consorts Y… ;

Sur le rapport de M. B…, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que le moyen de cassation annexé, qui est invoqué à l’encontre de la décision attaquée, n’est manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société JLD aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette la demande de la société JLD ; la condamne à payer aux consorts Y… la somme globale de 3 000 euros ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du treize septembre deux mille dix-huit. MOYEN ANNEXE à la présente décision

Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils, pour la société JLD.

IL EST FAIT GRIEF à l’arrêt attaqué d’avoir constaté que la demande de taille de la végétation présentée par la société JLD s’avère dénuée d’intérêt au jour où la Cour statue, dit qu’aucun trouble anormal de voisinage n’est caractérisé à raison de la hauteur de la végétation sur la parcelle Y… et d’avoir débouté la société JLD de l’intégralité de ses prétentions y compris au titre de sa demande de dommages et intérêts ;

AUX MOTIFS QUE sur la demande de réduction de la végétation, la SARL JLD demande dans le dispositif de ses dernières conclusions communiquées le 6 février 2017 par voie électronique de « condamner solidairement les consorts Y…, Z… et A… à réduire la végétation à une hauteur de 1,50m et tout au plus, à 2/2,50 m comme elle l’était au moment de la construction de la maison de la société JLD ». Elle indique dans le corps de ces mêmes conclusions en page 11 après des développements sur la taille de la végétation affirmée par les consorts Y… comme intervenue en 2011 et les témoignages des élagueurs produits par ses adversaires : « l’on notera toutefois que ces témoignages ne portent pas sur les mimosas qui cachent la vue notamment sur le Mimbeau et qu’aucune précision n’est donnée par les supposés témoins quant à l’emplacement des arbres concernés ; ainsi doit on rendre hommage à l’habileté des consorts Y… et à la subtilité de leurs écrits. Ces manquements volontaires n’ont rien d’une négligence ; c’est ce qu’attestent les refus successifs opposés aux demandes légitimes et amiables de M. Jean-Louis X…. Ils ont eu pour unique effet de faire obstacle à la vue oblique dont pouvait légitimement bénéficier ladite famille X… qui depuis sa terrasse a été délibérément privée de la vue sur la langue de sable du Mimbeau dès que les quatre mètres de hauteur ont été dépassés. Quant à la vue frontale sur le bassin depuis cette même terrasse, elle a été rendue impossible après l’abandon de l’élagage qui jusque-là était régulier, des grands arbres situés sur la propriété Y… en bordure de Bassin. Ces arbres sont morts depuis la montée des eaux de l’hiver 2014/2015 mais ils ont été maintenus en place. Ils ont été rabattus que récemment (2016) uniquement en raison de la présente procédure. La société appelante souhaite seulement que ces arbres ne dépassent pas la hauteur du garde-corps des balcons. C’est le cas actuellement en raison de la coupe qui a été opérée en 2016, et il appartient à la Cour de dire que cette situation, que les intimés estiment d’ailleurs normale (puisqu’ils prétendent qu’il en a toujours été ainsi) doit être maintenue
.Retenons que présent procès a eu un effet bénéfique, dans ce domaine, puisqu’en 2010, la végétation atteignait 8 mètres de hauteur et qu’elle interdisait toute vue sur le bassin et sur le Mimbeau et qu’en 2016 elle est tout à fait normale. En raison de l’engagement de la présente procédure, l’abus de droit qui consistait en le maintien en place d’arbres morts et en l’abandon de tout élagage des mimosas, a disparu depuis 2016, de même que le trouble de voisinage de ce point de vue. Souhaitons que cette situation perdure. La société appelante demande donc à la cour de prendre acte de la volonté affirmée des consorts Y… de maintenir cette situation qui autorise la vue sur le Bassin, qui est un site remarquable, depuis les terrasses de leur voisin de seconde ligne ». La position de la SARL JLD est peu logique car il est contradictoire de demander à la Cour en même temps d’ordonner le rabat d’une végétation et de lui faire savoir que depuis 2016 elle estime la situation régularisée et la haie coupée à la bonne hauteur. A l’appui de ces conclusions elle verse aux débats un constat d’huissier réalisé en date du 28 janvier 2016 par Maîtres Biran et Audibert-Meyral, huissiers de justice associés à Bordeaux constatant que : « Toute la vue est bien dégagée et permet de voir, non seulement toute la partie du bassin visible en ligne droite mais aussi, la plage de la Conche du Mimbeau que nous n’avions jamais pu voir depuis que nous avons commencé ce constat il y a plusieurs années. Pour obtenir ce résultat nous constations que le voisin a fait couper et élaguer la tête et les branches de tous les arbres gênants c’est-à-dire 2 arbousiers situés dans les deux angles et les mimosas situés sur le chemin de la franchise. Une exception, le troisième arbousier, situé au centre de la vue, qui n’a pas été rabaissé et qui bouche la vue (alors que le sommet apparait mort) ». Ce constat étant antérieur aux dernières conclusions communiquées le 6 février 2017 par la SARL JLD, il en sera déduit que cet arbre a été coupé. La demande d’élagage des arbres et mimosas s’avère dès lors dénuée d’objet étant précisé de manière surabondante, que le cahier des charges tel que reproduit n’impose pas de hauteur limite concernant les haies en clôture ni la hauteur des arbres dans les jardins.

ET AUX MOTIFS s’agissant de la demande de dommages et intérêts fondée sur l’absence d’entretien de la végétation, la SARL JLD souligne que les consorts Y… ont agi avec la volonté de leur nuire car ils n’acceptaient pas son arrivée dans cette partie du Cap Ferret ce qui a donné lieu à des recours et la mobilisation d’une association de défense des riverains contre son projet immobilier et s’est traduit par un abandon immédiat de l’entretien de la propriété Y…, notamment la taille des mimosas le long de l’allée de la Franchise à partir du moment où elle a réalisé la construction de son ensemble immobilier. Aucun élément ne permet de retenir l’intention de nuire des consorts Y… et il n’est pas établi qu’ils se soient associés à l’action de l’association s’opposant au projet immobilier de M. X… ni qu’ils se soient opposés à l’arrivée de celui-ci dans cette zone du Cap Ferret. Le préjudice né de l’obstruction de la vue sur le bassin d’Arcachon, invoqué comme conséquence de la faute des consorts Y… mais aussi comme constituant un trouble anormal de voisinage n’est pas établi. Certes la SARL JLD a produit un rapport d’expertise réalisé par M. C… révélant que l’ensemble immobilier construit sur le terrain de 892 m2 par la SARL JLD peut se voir attribuer une valeur de 4.000.000 euros, que la valeur du bien doit tenir compte de la vue exceptionnelle à cet endroit et que la moins-value tenant aux arbres et à la haie de mimosa peut être évaluée à 810.000 euros. Mais lorsque l’immeuble de la SARL JLD a été édifié il était en seconde ligne et la villa « la Belle brise » avait déjà des arbres et une haie de mimosa sur le côté. Il ne peut être considéré que le fait pour une villa située en première ligne de posséder des arbres de grande taille dans son jardin ou une haie arbustive cachant la vue du bassin a constitué un trouble anormal de voisinage ou soit fautif. Au surplus le défaut d’entretien n’est pas caractérisé. Les photographies et constats d’huissier produits par la SARL JLD révèlent que la végétation a été envahissante à certaines périodes dans la propriété Y… et que la haie de mimosas a dissimulé toute vue sur le Mimbeau à certaines périodes depuis 2010, ce qui ressort des constats d’huissier produits réalisés le 25 novembre 2013, 29 juillet 2014 et 20 novembre 2015. Mais les attestations et factures produites par les consorts Y… permettent de retenir que la propriété n’est pas restée sans entretien puisque : dans les attestations susmentionnées M. D… indique que le jardin et les arbres sont semblables à ce qu’ils étaient autrefois, seuls les cyprès ayant été réduits et même peut être détruits sous l’effet des tempêtes au fil des ans, et M. E… indique que de tous temps les mimosas ont enveloppé ce havre de paix et ont été régulièrement taillés et entretenus comme l’exige ce genre d’arbustes. Il ressort des attestations de Philippe A…, M. Jean-Pierre F…, de M. Stéphane G… qu’ils ont participé à la taille des mimosas en 2011. En second lieu le préjudice est d’autant moins établi que l’immeuble (en réalité deux villas) construit sur la parcelle de la SARL JLD est située en hauteur par rapport à la villa « la Belle Brise » qu’elles surplombent ce qui explique la volonté de la SARL JLD de faire limiter les arbres à hauteur du garde-corps de ses balcons. Enfin comme mentionné par le jugement déféré, il n’est pas anormal qu’une villa située en première vue ait une meilleure vue sur le bassin d’Arcachon et le Mimbeau qu’une villa située en seconde position et il ne peut être reproché aux résidents de la villa de première zone de conserver des arbres alors surtout qu’au vu des photographies la zone est boisée dans la commune de Lège-Cap-Ferret.

1°- ALORS QUE le cahier des charges du 10 mai 1916 qui fait la loi des parties, stipule que le terrain devra être entouré d’une clôture de fer ou en bois corroyé d’un mètre vingt centimètres de hauteur ou en haies vives à feuilles persistantes et que les haies seront taillées et entretenues avec soin ; qu’en se bornant à énoncer que le cahier des charges tel que reproduit n’impose pas de hauteur limite concernant les haies en clôture, sans rechercher comme elle y était invitée (conclusions p. 27) si la végétation litigieuse composée de mimosas, d’arbousiers et de sapins implantée par les consorts Y… en bordure de voie et en bordure du domaine maritime présentant une hauteur de huit mètres formant un barrage visuel pouvait être qualifiée de « haie taillée et entretenue avec soin » et partant répondre aux exigences du cahier des charges, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles 1134 et 1147 anciens du code civil ;

2°- ALORS QUE le débiteur est condamné s’il y a lieu au paiement de dommages et intérêts soit à raison de l’inexécution de l’obligation soit à raison du retard dans l’exécution, toutes les fois qu’il ne justifie pas que l’inexécution provient d’une cause étrangère qui ne peut lui être imputée, encore qu’il n’y ait aucune mauvaise foi de sa part ; qu’en se déterminant comme elle l’a fait sur le fondement de l’absence de preuve d’un préjudice, quand la violation du cahier des charges suffisait à justifier la condamnation des consorts Y… au paiement de dommages et intérêts, la Cour d’appel a violé l’article 1147 ancien du code civil ;

3°- ALORS QU’en énonçant que le préjudice né de l’obstruction de la vue sur le bassin d’Arcachon et le défaut d’entretien des haies constituant le trouble anormal de voisinage ne serait pas caractérisé, tout en admettant que les photographies et constats d’huissier produit par la société JLD révèlent que la végétation a été envahissante à certaines périodes dans la propriété Y… et que la haie de mimosas a dissimulé toute vue sur le Mimbeau à certaines périodes depuis 2010, comme cela ressort des constat d’huissier produits réalisés le 25 novembre 2013, 29 juillet 2014 et 20 novembre 2015, ce dont il résulte que quand bien même la haie aurait été ponctuellement taillée et l’immeuble de la société JLD surplomberait celui des consorts Y…, le préjudice de perte de vue était néanmoins caractérisé, la Cour d’appel n’a pas tiré les conséquences de ses propres constatations au regard du principe selon lequel nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage et des articles 544, 1382 ancien et 1147 ancien du code civil qu’elle a violés ;

4°- ALORS QUE nul ne doit causer à autrui un trouble anormal de voisinage ; qu’en énonçant que lorsque l’immeuble de la société JLD a été édifié il était en seconde ligne et la villa « la Belle brise » avait déjà des arbres et une haie de mimosa sur le côté, qu’il ne peut être considéré que le fait pour une villa située en première ligne de posséder des arbres de grande taille dans son jardin ou une haie arbustive cachant la vue du bassin a constitué un trouble anormal de voisinage et qu’il n’est pas anormal qu’une villa située en première ligne ait une meilleure vue sur le bassin d’Arcachon et le Mimbeau qu’une villa située en seconde position, sans rechercher ainsi qu’elle y était invitée si compte tenu notamment du caractère exceptionnel du site, les consorts Y… n’avaient pas aggravé les troubles résultant de la présence des arbres et de la haie pour la villa de la société JLD située en seconde position en laissant la végétation croitre sans l’élaguer, et après avoir elle-même constaté qu’à certaines périodes à partir de 2010 la végétation est devenue envahissante et la haie a dissimulé toute vue de son voisin sur ce site exceptionnel du bassin d’Arcachon et du Mimbeau en caractérisant ainsi elle-même cette aggravation, la Cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard du principe susvisé et des articles 544 et 1382 du code civil ;

5°- ALORS QUE si la société JLD demandait à la Cour d’appel de condamner solidairement les consorts Y…, Z… et A… à réduire la végétation à une hauteur de 1,50m et tout au plus, à 2/2,50 m comme elle l’était au moment de la construction de la maison de la société JLD », c’est après avoir exposé dans les motifs de ses conclusions et ce sans aucune contradiction, que sa demande avait pour objet le maintien de la situation résultant de la coupe opérée en cours d’instance en 2016 ; qu’en énonçant que la demande de la société JLD serait contradictoire et dénuée d’objet dès lors que les arbres ont été élagués, la Cour d’appel a dénaturé le cadre du litige en violation de l’article 4 du code de procédure civile.

 


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