Élagage : 1 octobre 2019 Cour d’appel de Rennes RG n° 17/07632

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Élagage : 1 octobre 2019 Cour d’appel de Rennes RG n° 17/07632
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1ère Chambre

ARRÊT N°365/2019

N° RG 17/07632 – N° Portalis DBVL-V-B7B-OLIE

M. [Z] [O]

C/

Mme [D] [F] épouse [Z]

M. [C] [Z]

Copie exécutoire délivrée

le :

à :

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

COUR D’APPEL DE RENNES

ARRÊT DU 01 OCTOBRE 2019

COMPOSITION DE LA COUR LORS DU DÉLIBÉRÉ :

Président : Madame Françoise COCCHIELLO, Présidente de Chambre,

Assesseur : Madame Brigitte ANDRÉ, Conseillère,

Assesseur : Madame Christine GROS, Conseillère,

GREFFIER :

Madame Marie-Claude COURQUIN, lors des débats et lors du prononcé

DÉBATS :

A l’audience publique du 17 Juin 2019 devant Madame Brigitte ANDRÉ, magistrat rapporteur, tenant seul l’audience, sans opposition des représentants des parties, et qui a rendu compte au délibéré collégial

ARRÊT :

Contradictoire, prononcé publiquement le 01 Octobre 2019 par mise à disposition au greffe comme indiqué à l’issue des débats

****

APPELANT :

Monsieur [Z] [O]

né le [Date naissance 1] 1973 à [Localité 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Gwenaëla PARENT de la SCP IPSO FACTO AVOCATS, avocat au barreau de NANTES

INTIMÉS :

Madame [D] [F] épouse [Z]

née le [Date naissance 2] 1964 à [Localité 1]

[Adresse 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représentée par Me Alain PALLIER de la SELARL PALLIER, BARDOUL & ASSOCIES, avocat au barreau de NANTES

Monsieur [C] [Z]

[Adresse 2]

[Adresse 1]

[Adresse 1]

Représenté par Me Alain PALLIER de la SELARL PALLIER, BARDOUL & ASSOCIES, avocat au barreau de NANTES

EXPOSÉ DU LITIGE

Les époux [Z] ont acquis en1998 une maison d’habitation sise au [Adresse 1] [Adresse 1] à [Localité 2] (44), dans un secteur classé en espaces naturels et sensibles. Leur fond est en partie clos par une haie de cyprès plantée par leur vendeur en 1979. M. [O] a acquis, en 2003, la parcelle voisine sur laquelle il a fait édifier une maison d’habitation.

Par jugement du 16 mars 2015, signifié le 19 juin 2015, le tribunal d’instance de Nantes, saisi par M. [O], a :

– déclaré prescrite l’action en arrachage de la haie de cupressus plantée en limite de propriété ;

– condamné les époux [Z] à faire tailler les branches de cupressus de sorte qu’aucune ne dépasse sur le fonds voisin et à réduire et nettoyer les tas de bois de façon à supprimer les ronces et à limiter la dangerosité de l’actuel empilement des rondins ;

– accordé aux époux [Z] un délai de six mois à compter de la signification du jugement pour y procéder ;

– leur a accordé un droit d’échelle à charge d’en informer M. [O] une semaine à l’avance ;

– les a condamnés à payer la somme de 1 200 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Les époux [Z] ont avisé le conseil de M. [O] de leur intention d’intervenir les 11, 18 et 25 juillet 2015 mais celui-ci s’est opposé à leur demande, refusant tout droit d’échelage avant le mois d’août suivant et imposant des exigences non prévues par le jugement. Après avoir avisé, le 30 septembre 2015, de leur intervention les 10, 12, 17, 19, 24, 26 octobre 2015, les époux [Z] ont effectué les travaux d’élagage et de nettoyage prescrits au mois d’octobre 2015.

Sans mise en demeure préalable, M. [O] a, le 20 décembre 2016, fait assigner les époux [Z] devant le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Nantes aux fins d’obtenir, sous astreinte, leur condamnation à réduire et nettoyer les tas de bois entreposés en limite de propriété de façon à limiter la dangerosité de l’empilement ainsi qu’au paiement d’une somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts et de 1 000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile.

Par jugement du 16 octobre 2017, le juge de l’exécution près le tribunal de grande instance de Nantes a :

-débouté les époux [Z] de leur demande de nullité de l’assignation ;

-enjoint les parties à procéder à une tentative de conciliation auprès du conciliateur qu’il leur plaira ;

-dit qu’en cas de réussite de la conciliation, les parties pourront la faire constater par le juge ;

-laissé à chaque partie la charge des dépens engagés ;

-rappelé que la décision bénéficie de droit de l’exécution provisoire.

Une réunion de conciliation qui a échoué a été organisée le 4 décembre 2017.

M. [O] a relevé appel de ce jugement, demandant à la cour, sur le fondement des articles L. 131-1 et L. 131-2 du code des procédures civiles d’exécution et 1240 du code civil, de :

– se déclarer compétente pour connaître du litige ;

– infirmer le jugement rendu par le juge de l’exécution de Nantes le 16 octobre 2017 ;

– réparer les omissions de statuer du jugement ;

Statuant à nouveau,

– le déclarer recevable et bien fondé en l’ensemble de ses demandes ;

– condamner solidairement les époux [Z] à réduire et nettoyer les tas de bois de façon à limiter la dangerosité de l’actuel empilement de rondins, sous astreinte provisoire de 50 euros par jour de retard passé le délai de quinze jours à compter de la signification du jugement à intervenir ;

-condamner solidairement les époux [Z] à lui verser la somme de 3.000 euros à titre de dommages et intérêts ;

– débouter les époux [Z] de toutes demandes contraires ;

-condamner solidairement les époux [Z] à lui verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

En réponse, les époux [Z] demandent à la cour, sur le fondement des articles 56, 127 du code de procédure civile et 1382 du code civil :

– de se déclarer incompétente au profit du juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Nantes ;

– à titre subsidiaire, de confirmer le jugement du 16 octobre 2017 en ce qu’il a ordonné une tentative de conciliation et déclaré sans objet les autres demandes ;

– de rejeter l’intégralité des demandes de M. [O] ;

– d’infirmer le jugement du 16 octobre 2017 en ce qu’il a rejeté leur demande de condamnation à verser une somme de 3 000 euros à titre de dommages-intérêts pour procédure abusive et injustifiée ;

-de condamner M. [O] à leur payer la somme de 4 000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et les dépens.

Pour un plus ample exposé des faits, de la procédure ainsi que des prétentions et moyens des parties, la cour se réfère aux énonciations de la décision attaquée ainsi qu’aux dernières conclusions déposées par les époux [Z] le 31 mai 2019 et par M. [O] le 3 juin 2019.

EXPOSÉ DES MOTIFS

Sur l’incident de procédure

Les intimés concluent au rejet des dernières conclusions déposées par l’appelant le 3 juin 2019, veille de l’ordonnance de clôture. Mais ces conclusions avaient pour objet de répondre aux conclusions déposées par les intimés le 31 mai, celles-ci n’étant pas seulement une réponse aux 3ème conclusions de l’appelant du 29 mai. Il n’y a pas lieu dès lors de les écarter des débats.

Sur la recevabilité de l’appel

Les époux [Z] font valoir qu’en ordonnant une conciliation et en déclarant les autres demandes sans objet, le premier juge a commis une omission de statuer qu’il a seul compétence pour réparer dès lors que l’appel est limité à cette omission de statuer. Mais il ressort de la décision critiquée que le juge de l’exécution a entendu vider sa saisine sans prévoir l’échec pourtant prévisible de la tentative de conciliation. Il a statué sur les dépens et définitivement écarté comme sans objet les demandes d’exécution sous astreinte, de dommages-intérêts et de condamnation sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile. Ceci ne constitue pas une omission de statuer mais un rejet des dites demandes de sorte que l’appel du jugement est recevable.

Sur le fond

Le constat du 6 février 2017 démontre que les époux [Z] ont respecté les obligations mises à leur charge par le jugement du 16 mars 2015. La haie a été élaguée au mois d’octobre, aucune demande n’étant d’ailleurs formée à ce sujet dans les conclusions de M. [O]. Les empilements de rondins étaient parfaitement rangés de manière régulière et sanglés et ne pouvaient être la cause d’un quelconque danger ou trouble de voisinage. Ni orties, ni ronces n’en émanaient.

L’exécution du jugement avait pourtant été inutilement compliquée par M. [O] qui a cherché par tous moyens à y faire obstacle, notamment en formulant des exigences inadaptées et non prévues par le jugement et en refusant une première intervention au mois de juillet alors que devant être effectuée uniquement en extérieur et pouvant l’être à partir de la propriété [Z], sa présence n’était pas utile. Il résulte également de l’attestation de M. [N] que M. [O] a, le 19 octobre 2015, fait obstruction à la réalisation des travaux d’élagage en lui interdisant de se maintenir sur sa propriété et de porter assistance à M. [Z] pour le démontage de son échafaudage. Le 17 octobre 2015, M. [Y], autre voisin, atteste que Mme [D], compagne de M. [O], s’est opposée à la réalisation de l’élagage et a entrepris de photographier et de filmer les personnes s’y employant, exerçant ainsi sur elles des pressions inadmissibles.

Les photographies prises par l’huissier de M. [O] intervenu le 11 août 2016 ne permettent pas de vérifier si la végétation déplorée, péjorativement qualifiée de ‘nuisible’, en limite de parcelle prend racine sur le fonds [Z] ou sur le fonds [O]. Le constat d’huissier du 29 mai 2017 n’est pas non plus suffisamment explicite pour que, dans le contexte de mauvaise volonté manifestée par M. [O], ce point soit établi, les époux [Z] indiquant dans leur courrier du 24 janvier 2018 que des racines d’ortie provenaient du fonds [O], ce qui est loin d’être invraisemblable dans l’environnement en cause.

L’empilement du bois de chauffage était, selon l’huissier intervenu pour le compte de M. [O] le 29 mai 2017, d’une hauteur de 1,65 mètre. Ceci révèle que sa hauteur avait été réduite par rapport à celle déplorée par M. [O] à l’occasion de la procédure devant le tribunal d’instance (2,5 m). Les prescriptions du jugement rendu par le tribunal d’instance ont sur ce point également été respectées. La demande de M. [O] aux fins de prononcer une astreinte pour faire respecter le jugement rendu le 16 mars 2015 s’agissant de la hauteur et du nettoyage des rondins de bois, n’est dès lors pas justifiée.

Il sera d’ailleurs relevé que les époux [Z] ont enlevé courant 2008 les rondins de bois servant de clôture à leur fonds selon un procédé écologique en usage en milieu rural, ce qu’ils n’avaient pourtant pas l’obligation de faire, et que leur terrain était en mai 2019 parfaitement dégagé de toute ronce ou ortie. Ils justifient avoir également tenté de procéder à un élagage annuel de leur haie, se heurtant sur ce point à de nombreuses difficultés provoquées par M. [O].

Il sera ainsi relevé que le 23 mars 2017, les époux [Z] ont vainement sollicité un tour d’échelle pour le mois d’avril suivant pour couper les éventuelles ronces et ont émis une proposition de règlement amiable du litige. Le 11 juin 2017, ils ont réitéré, toujours sans réponse positive, leur proposition d’intervention cette fois pour les 24 juin, 1er juillet et 8 juillet par lettre recommandée avec accusé de réception reçue le 20 juin puisque M. [O] prétend ne pas recevoir les courriers simples. Le 8 septembre 2017, le conseil des époux [Z] a proposé une intervention de nettoyage le 30 septembre et les 2,6 et 9 octobre. M. [O] n’a accepté aucune de ces propositions. Le 24 janvier 2018, Mme [Z] a sollicité sans recevoir de réponse un tour d’échelle pour tailler la haie les 3, 10, 17 et 24 février 2018, proposition réitérée le 1er février, qui a été rejetée par courrier reçu le 17 février. Les intimés ont accepté de décaler leur intervention au 10 mars 2018, date confirmée par leur conseil le 6 mars 2018. Celle-ci a reçu une réponse conciliante du conseil de M. [O] le 9 mars suivant. Cependant il ressort du courrier du conseil des époux [Z] daté du 4 juin 2018 que M. [O] a à nouveau fait obstruction à l’exécution paisible de cette prestation le 10 mars 2018 en refusant l’accès pourtant moins préjudiciable par le terrain [Z] et surtout en agressant physiquement M. [Y] qui en atteste, ainsi qu’en proférant des insultes envers les intervenants que, selon son conseil, il se proposait pourtant d’aider.

Il ressort aussi de la lettre du 24 janvier 2018 que M. [O] a refusé catégoriquement devant le conciliateur la proposition de taille annuelle de la haie, ‘demandant cinq tailles par an’.

A cet égard, les dénégations de l’ensemble de ces griefs qu’il formule dans une lettre inutilement polémique du 19 juin 2018 sont loin d’être convaincantes au regard de la teneur d’ensemble de ce courrier et des attestations de plusieurs voisins qui témoignent des relations conflictuelles qu’il entretient avec l’ensemble de son voisinage, de son caractère querelleur, violent et intolérant et de son mépris des obligations à sa charge.

Le 17 mai 2019, les époux [Z] ont sollicité un tour d’échelle pour tailler la haie le 25 mai 2019, courrier déposé chez M. [O], resté sans réponse. Leur conseil a dû réitérer la demande par l’intermédiaire du conseil adverse pour le 1er juin. Ceci révèle qu’en dépit des multiples marques de bonne volonté de ses voisins et de la procédure en cours, M. [O] persiste dans une attitude inadaptée à des relations de voisinage normales.

Au regard de l’ensemble des éléments produits, M. [O] ne démontre pas l’existence d’une faute des intimés dans l’exécution du jugement rendu par le tribunal d’instance justifiant l’octroi des dommages-intérêts qu’il réclame.

Enfin, il n’y a pas non plus lieu de donner acte à M. [O] d’un engagement qu’il ne prend pas et que ses adversaires ne formulent pas dans leurs conclusions devant la cour, une telle disposition étant dépourvue d’effet juridique.

Sur la demande reconventionnelle de dommages-intérêts pour procédure abusive

Les époux [Z] reprochent à M. [O] de faire un usage abusif de son droit de propriété et de son droit d’ester en justice.

Il est effectivement établi que malgré les tentatives d’obstruction de M. [O], le jugement du 16 mars 2015 a été exécuté dans les délais prescrits de sorte que la procédure devant le juge de l’exécution ne se justifiait pas. En effet, si la végétation avait pu repousser ensuite, M. [O] n’a fait aucune démarche amiable pour obtenir qu’il y soit remédié et n’a pas démontré que la végétation déplorée provenait de l’héritage voisin et non d’un manque d’entretien de son propre fonds. Au contraire, les époux [Z] établissent qu’ils ont avec patience et persévérance, tenté de respecter leurs obligations légales mais que ces tentatives ont été constamment contrecarrées par M. [O]. Ils ont finalement supprimé la clôture en rondins de bois qui avait l’heur de déplaire, pour des motifs obscurs, à leur voisin, ce qu’ils n’avaient pas l’obligation de faire. Ceci n’a cependant pas apaisé ses revendications incessantes.

L’ensemble des éléments du dossier, y compris les propres écrits de M. [O], démontrent que mécontent de n’avoir obtenu l’arrachage de la haie litigieuse, il a tenté de mettre en échec l’exécution de la décision rendue par le juge d’instance dans le but unique d’obtenir des avantages pécuniaires indus. Ses exigences inadaptées, son comportement violent et injurieux, ses récriminations injustes, ses affirmations fausses sont constitutifs d’un harcèlement systématique, incompatible avec des relations normales de voisinage. Ils ont causé aux époux [Z], contraints en dépit de leurs efforts réitérés de se défendre en justice contre des affirmations mensongères et des prétentions abusives pendant près de trois ans, un préjudice grave justifiant les dommages-intérêts réclamés.

PAR CES MOTIFS, LA COUR

Rejette la demande de voir écarter des débats les conclusions n° 4 de M. [O] ;

Déclare l’appel recevable ;

Infirme le jugement rendu le 16 octobre 2017 par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Nantes en ses dispositions contestées ;

Statuant à nouveau,

Rejette l’intégralité des demandes de M. [O] ;

Condamne M. [Z] [O] à payer aux époux [C] et [D] [Z] une somme de 3.000 euros à titre de dommages-intérêts ;

Condamne M. [Z] [O] à payer aux époux [C] et [D] [Z] une somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;

Condamne M. [Z] [O] aux entiers dépens de la procédure de première instance et d’appel.

LE GREFFIER LE PRÉSIDENT

 


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