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13 mai 2016
Cour d’appel de Paris
RG n°
15/07882
Grosses délivrées REPUBLIQUE FRANCAISE
aux parties le :AU NOM DU PEUPLE FRANCAIS
COUR D’APPEL DE PARIS
Pôle 5 – Chambre 2
ARRET DU 13 MAI 2016
(n°87, 11 pages)
Numéro d’inscription au répertoire général : 15/07882
Jonction avec le dossier 15/07884
Décision déférée à la Cour : jugement du 03 avril 2015 – Tribunal de grande instance de PARIS – 3ème chambre 2ème section – RG n°13/08932
APPELANTS et INTIMES
S.A.R.L. BMG RIGHTS MANAGEMENT (FRANCE), venant aux droits de la S.A.S. BMG VM MUSIC FRANCE, agissant en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 1]
[Localité 1]
Immatriculée au rcs de Paris sous le numéro 508 353 299
Représentée par Me Matthieu BOCCON-GIBOD de la SELARL LEXAVOUE PARIS-VERSAILLES, avocat au barreau de PARIS, toque C 2477
Assistée de Me Florence DAUVERGNE plaidant pour la SELARL NOMOS et substituant Me Eric LAUVAUX, avocat au barreau de PARIS, toque L 237
M. [G] [M] [Y] [Z] dit [J] [Z]
Né le [Date naissance 1] 1960 à [Localité 2] (Algérie)
De nationalité algérienne
Demeurant [Adresse 2]
Représenté par Me Bruno REGNIER de la SCP REGNIER – BEQUET – MOISAN, avocat au barreau de PARIS, toque L 0050
Assisté de Me Michaël HADDAD plaidant pour l’AARPI HADDAD & LAGACHE, avocat au barreau de PARIS, toque C 2092
INTIMES
M. [L] [R] dit [J] [J]
Né le [Date naissance 2] 1962 à [Localité 3] (Algérie)
De nationalité algérienne
Exerçant la profession d’auteur compositeur
Demeurant [Adresse 3]
Représenté par Me Jean-Marie GUILLOUX, avocat au barreau de PARIS, toque G 0818
Société DES AUTEURS COMPOSITEURS ET EDITEURS DE MUSIQUE (SACEM)
Société civile à capital variable, prise en la personne de son représentant légal domicilié en cette qualité au siège social situé
[Adresse 4]
[Localité 4]
Immatriculée au rcs de Nanterre sous le numéro 775 675 739
Représentée par Me Frédéric INGOLD de la SELARL INGOLD & THOMAS, avocat au barreau de PARIS, toque B 1055
Assistée de Me Anne BOISSARD, avocat au barreau de PARIS, toque B 412
COMPOSITION DE LA COUR :
Après rapport oral, en application des dispositions des articles 786 et 907 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue le 9 mars 2016, en audience publique, les avocats ne s’y étant pas opposé, devant Mme Colette PERRIN, Présidente, en présence de Mme Véronique RENARD, Conseillère, chargée d’instruire l’affaire, laquelle a préalablement été entendue en son rapport
Mmes Colette PERRIN et Véronique RENARD ont rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la Cour, composée de :
Mme Colette PERRIN, Présidente
Mme Sylvie NEROT, Conseillère
Mme Véronique RENARD, Conseillère
Greffière lors des débats : Mme Carole TREJAUT
ARRET :
Contradictoire
Par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la Cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile
Signé par Mme Colette PERRIN, Présidente, et par Mme Carole TREJAUT, Greffière, à laquelle la minute du présent arrêt a été remise par la magistrate signataire.
Monsieur [L] [R], dit [J] [J] est auteur, compositeur et interprète de musique raï, d’origine algérienne.
Il revendique être l’auteur d’une chanson intitulée Eli Kan qui figurerait sur une cassette commercialisée en 1988 par la société algérienne Oran Music, et qui aurait été commercialisée à nouveau en 1994 par la société Megamix sous un nouveau titre Angui ou Selmi puis déposée à la société DES AUTEURS COMPOSITEURS ET EDITEURS DE MUSIQUE (SACEM) sous ce titre le 2 août 1995.
Considérant que l’oeuvre DIDI, figurant sur l’album intitulé [G] commercialisé par la société UNIVERSAL et interprété par monsieur [G] [M] [Y] [Z] dit [J] [Z], déposée par lui à la SACEM le 3 mars 1992 en ses qualités d’auteur et compositeur, est reprenait 98 % de l’harmonie et 89 % de la mélodie de Eli Kan avec une rythmique très proche, monsieur [L] [R] dit [J] [J] a, selon actes d’huissier en date des 11, 12 et 18 juin 2013, fait assigner monsieur [G] [M] [Y] dit [J] [Z], ainsi que les sociétés BMG VM MUSIC FRANCE, EMI MUSIC PUBLISHING FRANCE et EMI MUSIC PUBLISHING GROUP FRANCE (ci-après les sociétés EMI) venant aux droits de l’éditeur, la société UNIVERSAL, ainsi que la SACEM en contrefaçon de droits d’auteur.
Par ordonnance en date du 7 février 2014, le juge de la mise en état a rejeté la demande en nullité de l’assignation, mis hors de cause les sociétés EMI, et rejeté les demandes de monsieur [R] tendant à la communication de pièces et au blocage des redevances.
Par jugement contradictoire en date du 3 avril 2015, assorti de l’exécution provisoire, sauf en ce qui concerne la mesure de publication, le tribunal a :
– rejeté les fins de non-recevoir,
– dit n’y avoir lieu à rejet de pièces,
– dit que les ‘uvres de Monsieur [L] [R] Eli Kan et Angui ou Selmi sont les mêmes et ont été divulguées avant l”uvre DIDI, laquelle en constitue une adaptation non autorisée pour ce qui est de la musique,
– dit que Monsieur [L] [R] est donc le seul compositeur de la musique de l”uvre DIDI, et qu’il a été porté atteinte à ses droits patrimoniaux et à son droit moral d’auteur sur cette ‘uvre,
– ordonné à la SACEM de modifier toute la documentation afférente à la chanson DIDI, en ce que Monsieur [L] [R] doit bénéficier, en tant que seul compositeur, (de) 50% du droit de reproduction mécanique et (de) 6/12 du droit d’exécution publique,
– condamné in solidum monsieur [M] [Y] et la société BMG VM MUSIC FRANCE à verser à monsieur [L] [R], en réparation de l’atteinte à ses droits patrimoniaux, les droits, pour la période postérieure au 12 juin 2003, afférents à la totalité de la composition de l”uvre DIDI reçus au titre de l’exploitation de cette ‘uvre pour la France et pour le monde, majorés des intérêts légaux à compter de l’assignation,
– condamné in solidum monsieur [M] [Y] et la société BMG VM MUSIC FRANCE à payer à monsieur [L] [R] la somme de 100.000 euros en réparation de son préjudice moral et la même somme de 100.000 euros en réparation des atteintes à son droit moral d’auteur,
– autorisé la publication du dispositif de la présente décision dans 5 journaux ou revues du choix du demandeur et aux frais de monsieur [M] [Y] et de la société BMG VM MUSIC FRANCE, dans la limite de 3.500 euros HT par publication,
– rejeté le surplus des demandes et les demandes contraires,
– condamné in solidum monsieur [M] [Y] et la société BMG VM MUSIC FRANCE aux dépens, qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile,
– condamné monsieur [M] [Y] et la société BMG VM MUSIC FRANCE à payer chacun à monsieur [L] [R] la somme de 4.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– rejeté les autres demandes sur le même fondement,
– dit que monsieur [M] [Y] devra garantir la société BMG VM MUSIC FRANCE de l’intégralité des condamnations prononcées à son encontre.
La société BMG et monsieur [G] [M] [Y] dit [J] [Z] ont respectivement interjeté appel de ce jugement par déclarations au greffe en date du 10 avril 2015 et les procédures ont été jointes le 29 septembre 2015.
Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 26 janvier 2016, auxquelles il est expressément renvoyé, la Sarl BMG RIGHTS MANAGEMENT France venant aux droits de la société BMG VM MUSIC France ( ci-après la société BMG) demande à la cour, au visa des articles 1353, 2222 et 2224 du code civil ainsi que L121-2, L.331-1-3 du code de la propriété intellectuelle de :
– constater qu’elle vient aux droits de la société BMG VM Music France, à la suite de la transmission universelle de patrimoine ayant entraîné la radiation au RCS de la société BMG VM Music France en date du 9 mars 2015,
– la dire recevable et bien fondée en ses demandes,
Y faisant droit :
– confirmer le jugement entrepris en ce qu’il a jugé que l’action en contrefaçon et en paiement des redevances de monsieur [L] [R] est prescrite pour la période antérieure au 12 juin 2003,
– réformer le jugement pour le surplus,
Statuant à nouveau :
– constater que l”uvre Angui ou Selmi a fait l’objet d’un dépôt et d’une divulgation postérieurs à ceux de l”uvre DIDI,
– constater que l”uvre intitulée Hada Raykoum a été divulguée antérieurement à l”uvre Eli Kan,
– dire et juger que monsieur [L] [R] ne justifie pas de l’antériorité de l”uvre Eli Kan sur l”uvre DIDI,
– dire et juger que monsieur [L] [R] ne justifie pas de l’originalité de l”uvre ‘Eli Kan’,
En conséquence :
– débouter monsieur [L] [R] de l’intégralité de ses demandes,
– condamner monsieur [L] [R] à lui payer toutes sommes équivalent à la part éditoriale qu’il aura perçues de la SACEM à compter de la répartition du 5 juillet 2015 au titre de l’exploitation de la composition musicale de l”uvre DIDI,
En tout état de cause :
– condamner monsieur [L] [R] à lui payer la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner monsieur [L] [R] aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de son conseil conformément aux dispositions de l’article 699 code de procédure civile,
A titre subsidiaire,
– limiter la demande de monsieur [L] [R] à la seule composition musicale de l”uvre à l’exclusion des paroles,
– dire et juger que l’éditeur a exploité l”uvre de bonne foi compte tenu de la cession de droits consentie et dire et juger qu’elle n’est pas responsable de l’attribution inexacte de la paternité d’une ‘uvre,
– fixer la quote-part revenant à Monsieur [L] [R] sur l”uvre DIDI en fonction de la (part) originale qui peut lui être incontestablement reconnue, soit 0% de la part auteur et au maximum 66% de la part compositeur,
– fixer le montant de l’indemnité due par l’éditeur en réparation du préjudice patrimonial
de monsieur [L] [R] à 10.000 euros et au maximum à 34% des sommes générées par l’exploitation de l”uvre au profit de l’éditeur, sur la période non prescrite
postérieure au 12 juin 2003, soit 35.685,91 euros,
– débouter monsieur [R] de sa demande de paiement de 100.000 euros à titre de
provision sur les sommes perçues au titre de l’exploitation de l”uvre DIDI par la gestion
individuelle,
– ramener le montant de l’indemnité due au titre du préjudice moral à une juste proportion,
– rejeter toute demande d’astreinte associée à la communication de justificatif, toute solidarité entre l’éditeur, BMG RIGHTS MANAGEMENT France et l’auteur monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z] ainsi que toute mesure de publication,
– condamner Monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z] à la garantir de toute condamnation prononcée à son encontre ,
– lui donner acte de ce qu’elle se réserve le droit de réclamer auprès de Monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z] dans le cadre de la procédure qui les oppose par ailleurs, l’indemnisation de son propre préjudice du fait de toute condamnation qui serait prononcée à son encontre, du fait de sa fausse déclaration sur la titularité des droits sur l”uvre DIDI,
En tout état de cause :
– condamner Monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z] à lui payer la somme de 20.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z], aux entiers dépens de première instance et d’appel dont distraction au profit de son conseil conformément aux dispositions de l’article 699 code de procédure civile.
Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 9 février 2016, auxquelles il est expressément renvoyé, la SACEM demande à la cour de :
– lui donner acte de ce qu’elle s’en rapporte à justice concernant la recevabilité et le bien-fondé de l’appel de la société BMG RIGHTS MANAGEMENT comme aussi bien de celui de monsieur [G] [M] [Y] [Z] ou de l’appel incident de monsieur [R], à l’égard des autres parties attraites à la cause,
– dire et juger néanmoins, dans l’hypothèse où une nouvelle modification de la documentation afférente à l”uvre DIDI devait être ordonnée et que celle-ci ne se limitait pas à un retour au statu quo ante, c’est- à-dire à l’application du bulletin du 3 mars 1992, que cette modification ne vaudra que pour l’avenir, et qu’elle devra en outre être subordonnée à l’obligation faite, dans tel délai qu’il plaira à la cour de fixer, à monsieur [G] [M] [Y] [Z], à la société BMG RIGHTS MANAGEMENT et à monsieur [L] [R] de signer et redéposer auprès de ses services un nouveau bulletin de déclaration de l”uvre DIDI respectant les termes de l’arrêt à intervenir (en précisant au besoin que celui qui n’exécuterait pas cette injonction dans le délai imparti, sera réputé avoir signé le bulletin en question,
– condamner la partie qui succombera aux entiers dépens, dont distraction au profit de son conseil conformément à l’article 699 du code de procédure civile.
Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 10 février 2016, auxquelles il est expressément renvoyé, Monsieur [G] [M] [Y] dit [J] [Z] entend voir:
à titre principal,
– constater l’irrecevabilité de l’action diligentée par monsieur [L] [R],
En conséquence,
– réformer le jugement du 3 avril 2015 en toutes ses dispositions, sauf en ce qu’il a débouté monsieur [R] de ses demandes tendant aux paroles des ‘uvres en litige, et déclarer prescrites les demandes de Monsieur [R] antérieures à l’année 2003,
– débouter monsieur [L] [R] de l’ensemble de ses demandes,
subsidiairement,
– constater l’antériorité de l”uvre DIDI créé par monsieur [M] [Y] [Z] dit [J] [Z] sur l”uvre ELI KAN devenue Angui ou Selmi de monsieur [L] [R],
– réformer le jugement en toutes ses dispositions,
– débouter monsieur [L] [R] de l’ensemble de ses demandes,
A titre infiniment subsidiaire,
– limiter la demande de monsieur [L] [R] à la seule composition musicale de l”uvre à l’exclusion des paroles,
En tout état de cause,
– condamner monsieur [L] [R] à lui payer la somme de 80.000 euros à titre de dommages et intérêts,
– condamner monsieur [L] [R] à lui payer à Monsieur [M] [Y] [Z] la somme de 15.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner monsieur [L] [R] aux entiers dépens.
Par dernières écritures notifiées par voie électronique le 11 février 2016, auxquelles il est expressément renvoyé, monsieur [L] [R], dit [J] [J] entend voir :
– confirmer dans toutes ses dispositions le jugement du 3 avril 2015 sauf en ce qu’il a retenu qu’il n’avait pas la qualité de coauteur des paroles de l”uvre DIDI,
Y ajoutant et statuant à nouveau,
– dire et juger qu’il a la qualité de coauteur des paroles de l”uvre DIDI,
– dire et juger que l’application de la prescription décennale ne vaut que pour les seules
atteintes à ses droits patrimoniaux et non pour les atteintes à ses droits moraux et les préjudices moraux,
– débouter la société BGM RM de l’ensemble de ses demandes,
– débouter monsieur [G] [M] [Y] dit [J] [Z] de l’ensemble de ses demandes,
– écarter des débats les pièces n°10, 11, 12, 13, 18, 20, 21, 22, 26-1 et 26-2 de monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z] pour défaut de force probante,
– condamner, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z] à justifier auprès de lui des sommes perçues au titre de l’exploitation de l”uvre DIDI, au titre de la gestion individuelle et de la gestion collective pour la période postérieure au 12 juin 2003,
– condamner, sous astreinte de 500 euros par jour de retard à compter de la signification de l’arrêt à intervenir, monsieur [G] [M] [Y] dit [J] [Z] à justifier auprès de lui des sommes perçues au titre des répartitions SACEM à partir du mois d’octobre 2015 portant sur la part de composition musicale de l”uvre DIDI,
– condamner monsieur [G] [M] [Y] dit [J] [Z] à lui payer les sommes perçues au titre des répartitions SACEM à partir du mois d’octobre 2015 portant sur la part de composition musicale de l”uvre DIDI,
– ordonner à la SACEM pour l’avenir la modification de la documentation pour ce qui concerne les ayants droit de l”uvre musicale DIDI en lui restituant le statut de seul compositeur et de co-auteur de l”uvre DIDI dans la proportion de 75% du droit de reproduction mécanique et 9/12 du droit d’exécution publique,
– condamner la société BMG RM à lui verser la somme de 39.882,12 euros au titre des droits patrimoniaux perçus au titre de la gestion collective pour la période postérieure au 12 juin 2003, afférents à la totalité de la composition de l”uvre DIDI majorés des intérêts légaux à compter de la date de délivrance de l’assignation,
– condamner Monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z] à lui verser la somme de 69.329,49 euros au titre des droits patrimoniaux perçus pour la période postérieure au 12 juin 2003, afférents à la totalité de la composition de l”uvre DIDI, majorés des intérêts légaux à compter de la date de délivrance de l’assignation,
– condamner in solidum monsieur [G] [M] [Y] dit [J] [Z] et la société BMG RM à lui payer à la somme de 50.388,70 euros au titre des sommes perçues par la gestion individuelle pour la période postérieure au 12 juin 2003, afférents à la totalité de la composition de l”uvre DIDI majorés des intérêts légaux à compter de la date de délivrance de l’assignation,
– condamner in solidum monsieur [G] [M] [Y] dit [J] [Z] et la société BMG RM à lui payer les droits d’auteur et droits éditoriaux afférents à la moitié de l’écriture de l”uvre DIDI perçus au titre de l’exploitation de l”uvre dans le monde, depuis l’origine de l’exploitation, majoré des intérêts jusqu’à parfait règlement de la dette,
En tout état de cause :
– condamner la société BMG RM à lui régler la somme de 15.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner Monsieur [G] [M] [Y] dit [J] [Z] à lui régler la somme de 15.000 euros, en application de l’article 700 du code de procédure civile,
– condamner la société BMG RM et monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z] aux
entiers dépens, conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture a été prononcée le 11 février 2016.
SUR CE,
Considérant au préalable qu’il n’est pas contesté que la société BMG RIGHTS MANAGEMENT FRANCE vient aux droits de la société BMG VM Music France, à la suite de la transmission universelle de patrimoine ayant entraîné la radiation au RCS de la société BMG VM Music France en date du 9 mars 2015 ;
Sur la demande de rejet des débats les pièces n° 10, 11, 12, 13, 18, 20, 21, 22, 26-1 et 26-2 de monsieur [G] [M] [Y], dit [J] [Z]
Considérant que monsieur [L] [R], dit [J] [J] demande à la cour de rejeter des débats les pièces n° 10, 11, 12, 13, 18, 20, 21, 22, 26-1 et 26-2 de monsieur [G] [M] [Y] [Z], dit [J] [Z] au motif qu’elles seraient dénuées de force probante ;
Que toutefois ce motif ne peut constituer un motif de rejet desdites pièces dont l’examen de la force probante reste soumis à l’examen de la cour ;
Que la demande doit donc être rejetée ;
Sur la prescription
Considérant que monsieur [G] [M] [Y] [Z], dit [J] [Z], sans contester l’application de la prescription décennale au présent litige compte tenu des dispositions transitoires de la loi du 17 juin 2008 modifiant le régime des prescriptions de droit commun en matière de responsabilité extra contractuelle, conclut à l’irrecevabilité de l’action engagée par monsieur [L] [R] les 11, 12 et 18 juin 2013, en faisant valoir que dès 1996, ce dernier a prétendu lors d’une interview publiée dans le journal ‘Ramadhan 1417’ avoir été victime ‘d’une arnaque’ au titre de son oeuvre, de sorte que son action serait prescrite depuis 2006 ; qu’à titre subsidiaire, il demande à la cour de confirmer le jugement dont appel en ce qu’il a déclaré prescrites les demandes de monsieur [J] antérieures à l’année 2003 dès lors qu’il ‘est inconcevable’ que Monsieur [R] n’ait pu avoir connaissance de l’existence du titre DIDI qu’il prétend contrefaisant compte de la grande renommée de celui-ci dès sa sortie en 1992 ;
Que la société BMG sollicite la confirmation du jugement du 3 avril 2015 en ce qu’il a jugé que l’action en contrefaçon et en paiement des redevances de monsieur [L] [R] est prescrite pour la période antérieure au 12 juin 2003 ;
Que monsieur [L] [R] qui ne formule pas de contestation sur ce motif du jugement fait valoir quant à lui que l’application de la prescription décennale ne vaut que pour les seules atteintes à ses droits patrimoniaux et non pour les atteintes à ses droits moraux et à ses demandes relatives à son préjudice moral ;
Considérant ceci exposé, que la contrefaçon est un délit civil continu et que chaque acte incriminé constitue le point de départ du délai de prescription ;
Qu’en l’espèce monsieur [L] [R] reprochant à monsieur [G] [M] [Y] [Z] dit [J] [Z] une exploitation contrefaisante de l’oeuvre DIDI toujours exploitée, seules les exploitations antérieures au 12 juin 2003, soit 10 ans avant l’assignation du 11 juin 2013, peuvent être incriminées ;
Que, par ailleurs, il est constant que le droit moral de l’auteur est perpétuel, inaliénable et imprescriptible ;
Que la fin de non recevoir tirée de la prescription doit en conséquence être rejetée et le jugement confirmé de ce chef ;
Sur la contrefaçon de droits d’auteur
Considérant que monsieur [R] agit en contrefaçon de ses droits d’auteur sur une oeuvre musicale Angui ou Selmi précédemment intitulée Eli Kan, de par l’exploitation par [J] [Z] de l’oeuvre DIDI ; que cette action suppose donc en premier lieu la démonstration de l’antériorité de l”uvre revendiquée sur l”uvre incriminée ;
Considérant qu’il est constant que Didi a fait l’objet d’une déclaration enregistrée à la SACEM le 3 mars 1992, soit antérieurement à Angui ou Selmi qui a elle-même fait l’objet d’une déclaration à la SACEM le 14 juin 1995 et à la commercialisation alléguée de cette oeuvre en 1994 ; que monsieur [R] a ensuite redéposé l”uvre musicale Angui ou Selmi à la SACEM, le 4 mai 2007 en qualité d’auteur-compositeur, la société Because Editions figurant sur ce deuxième bulletin comme éditeur de l”uvre puis le 6 janvier 2011, à nouveau comme seul titulaire des droits, la même société Because Editions ayant déclaré se désister, à compter du 19 juin 2009, de ses prérogatives d’éditeur sur ce même titre ;
Que néanmoins monsieur [R] arguant de l’identité de l”uvre Angui ou Selmi à celle intitulée Eli Kan , fait valoir que cette dernière, qui n’a fait l’objet d’aucun dépôt ni en France ni en Algérie, a été exploitée dès 1988, soit antérieurement à la divulgation de Didi;
Considérant sur ce point, que les appelants reprochent aux premiers juges d’avoir dit que, ‘en dépit de quelques approximations’, un faisceau d’éléments confirme l’antériorité de l”uvre de Monsieur [R], sans tenir compte notamment de la déclaration de l’ONDA du 9 novembre 2014 qui contredirait celles de Monsieur [R] et des pièces produites en appel par [J] [Z] qui démontreraient l’existence d’une ‘uvre intitulée Hada Raykoum qui serait la version antérieure de Didi, divulguée dès 1982, soit antérieurement à la date de divulgation revendiquée par Monsieur [R] ;
Que ce dernier, qui sollicite sur ce point la confirmation du jugement, indique produire à l’appui de ses prétentions de nombreux éléments établissant de manière certaine l’antériorité de son oeuvre sur celle de [J] [Z] ;
Considérant qu’il résulte des pièces versées aux débats par les parties que :
– le décompte de redevances de l’ONDA n°006318 qui ne comporte aucune date visible, mais qui selon l’intimé serait du 28 décembre 1988, cette date ayant manifestement été ajoutée sur la reproduction figurant dans ses dernières écritures, ne mentionne pas Monsieur [R] en qualité d’auteur du numéro catalogue 96,
– lors de sa demande d’admission à la SACEM, le 14 juin 1995 monsieur [R] a déclaré l”uvre Angui ou Selmi, seul le bulletin de déclaration du 4 mai 2007 mentionnant comme titre secondaire Eli Kan,
– le dépôt du 4 octobre 2005 dont fait état la traduction en français du procès-verbal de réunion de la commission d’identification de l’ONDA du 20 avril 2008 qui conclut que ‘la composition de l”uvre intitulée Di dommages-intérêts appartient à M. [L] [J] étant le premier déclarant conformément à la réglementation en vigueur de l’Office’, n’est pas versé aux débats et est en tout état de cause postérieur au dépôt de DIDI à la SACEM intervenu le 3 mars 1992,
– l’enregistrement original de la cassette audio publiée par la société Oran Music sous la référence OM 96 reproduisant le titre Eli Kan n’a jamais été versé aux débats pas plus que la jaquette originale de cette cassette ; que ni la copie de la jaquette ni celle d’une cassette (pièces 1.2-02 et 1.2-01de l’intimé) ne comportent de date de publication ; que la copie de la jaquette comporte les mentions OM 96 (pour Oran Music) [J] [J], en face A trois titres et en face B également trois titres dont Eli Kan ainsi qu’une adresse à [Adresse 5], alors que la copie de la cassette versée aux débats et supposée correspondre à cette jaquette, dont la seule face reproduite sur la pièce ne comporte pas de timbre de l’ONDA, révèle les mentions EDITION ORAN MUSIC [Adresse 6] et l’indication d’une face 2,
– outre que ces cassettes ne sont pas datées, les expertises de madame [H] ont été réalisées, pour la première à partir de la copie des enregistrements figurant sur ces deux cassettes audio sur un support CD, et pour la seconde à partir de l’acquisition numérique des deux cassettes,
– l’attestation sur l’honneur du 16/07/2003 dont se prévaut monsieur [R] pour justifier de la date de publication de cette cassette, outre le fait qu’elle est anonyme et émane de ‘l’Editeur de l’édition Oran Phone’ lequel ‘reconnaît et confirme avoir édité et produit la K7 n°96 appartenant à [L] [J] (dit [J] [J]) (en) tant qu’auteur, compositeur et interprète, entre l’année 1985 et 1987’, fait état de six titres qui ne correspondent pas à ceux mentionnés sur la copie de la cassette audio versée aux débats, – le courrier de l’ONDA du 2 décembre 2012 et adressé au conseil de Monsieur [R], s’il indique que la référence OM 96 (édition Oran Music) est la même que CAT 96 (catalogue) pour laquelle une autorisation de pressage a été accordée en 1988 et 1989, ne mentionne aucun titre figurant sur ces références, étant ajouté que monsieur [R] n’a versé aux débats aucun relevé de droit d’auteur correspondant à ces enregistrements,
– le procès-verbal de la commission d’identification des oeuvres lyriques avec ou sans paroles du 4 novembre 2012 fait état ‘du même texte’ mais aucunement de la composition musicale,
– le courrier de l’ONDA du 9 novembre 2014 adressé à [J] [Z] indique que ‘Notre comité vous a reconnu la qualité d’auteur compositeur de l”uvre DIDI’ et le procès-verbal du 18 août 2015 indique que ‘l’ONDA accorde la propriété intellectuelle d’origine à l’auteur de la première déclaration’ pour conclure que ‘la paternité de la musique de la chanson objet du litige (DI DI) revient à l’origine à monsieur [G] [M] [Y] [Z] dit [J] [Z]’, sans qu’aucun élément objectif ne permette de remettre en cause ces déclarations ;
Qu’il s’ensuit qu’aucun élément précis et concordant ne permet de conférer une date certaine à l’oeuvre revendiquée antérieurement au dépôt de Angui et Selmi du 14 juin 1995, ou même à sa commercialisation en 1994, de sorte que monsieur [R] échoue à démontrer l’antériorité de cette oeuvre sur celle de [J] [Z], objet d’un dépôt le 3 mars 1992 et d’une exploitation à compter de cette date ;
Que le jugement doit donc être infirmé, sauf en ses dispositions relatives à la prexciption, et ce sans qu’il soit besoin d’apprécier l’originalité de l’oeuvre revendiquée ni les ressemblances alléguées avec l’oeuvre incriminée ni encore la réalité de l’identité et/ou de la divulgation antérieure à DIDI d’une oeuvre intitulée Hada Raykoum que [J] [Z] oppose pour la première fois devant la cour, dont il serait auteur, qui serait selon lui une antériorité de Didi, et dont la contestation de paternité par monsieur [R] est en tout état de cause sans incidence au regard de l’absence de preuve de l’antériorité de l’oeuvre qu’il oppose lui-même au titre de son action en contrefaçon ;
Considérant qu’il y a lieu, en conséquence, de condamner monsieur [L] [R] à payer à la société BMG toutes sommes équivalant à la part éditoriale qu’il a perçues de la SACEM à compter de la répartition du 5 juillet 2015, au titre de l’exploitation de la composition musicale de l”uvre DIDI conformément à la demande de l’appelante ;
Sur les autres demandes
Considérant que l’exercice d’une action en justice constitue, en principe, un droit et ne dégénère en abus que dans le cas de malice, de mauvaise foi, ou d’erreur grossière équipollente au dol ;
Que faute pour monsieur [G] [M] [Y] [Z] dit [J] [Z] de rapporter la preuve d’une quelconque intention de nuire ou d’une légèreté blâmable de la part de monsieur [L] [R] dit [J] [J] qui a pu légitimement se méprendre sur l’étendue de ses droits, sa demande tendant à voir condamner ce dernier au paiement de dommages-intérêts pour procédure abusive doit être rejetée ;
Considérant qu’il y a lieu de condamner monsieur [L] [R] dit [J] [J], partie perdante, aux entiers dépens qui seront recouvrés conformément aux dispositions de l’article 699 du code de procédure civile par les avocats qui en font la demande ;
Qu’en outre, il doit être condamné à verser, d’une part, à monsieur [G] [M] [Y] [Z] dit [J] [Z] et, d’autre part, à la société BMG, qui ont dû exposer des frais irrépétibles pour faire valoir ses droits, une indemnité au titre de l’article 700 du code de procédure civile qu’il est équitable de fixer pour le premier à la somme de 4.000 euros et pour la seconde à celle de 6.000 euros.
PAR CES MOTIFS
Constate que la société BMG RIGHTS MANAGEMENT FRANCE vient aux droits de la société BMG VM Music France, à la suite de la transmission universelle de patrimoine ayant entraîné la radiation au RCS de la société BMG VM Music France en date du 9 mars 2015.
Rejette la fin de non recevoir tirée de la prescription de l’action de monsieur [L] [R] dit [J] [J].
Confirme le jugement du tribunal de grande instance de Paris du 3 avril 2015 en ce qu’il a dit que l’action en contrefaçon et en paiement des redevances de monsieur [L] [R] dit [J] [J] est prescrite pour la période antérieure au 12 juin 2003.
Infirme ledit jugement pour le surplus et statuant à nouveau :
Dit que monsieur [L] [R] dit [J] [J] ne justifie pas de l’antériorité de l”uvre Eli Kan ou Angui ou Selmi sur l”uvre DIDI.
En conséquence,
Déboute monsieur [L] [R] dit [J] [J] de l’ensemble de ses demandes.
Déboute monsieur [G] [M] [Y] [Z] dit [J] [Z] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive.
Condamne Monsieur [L] [R] dit [J] [J] à payer à la société BMG RIGHTS MANAGEMENT FRANCE toutes sommes équivalant à la part éditoriale qu’il a perçues de la société DES AUTEURS COMPOSITEURS ET EDITEURS DE MUSIQUE (SACEM) à compter de la répartition du 5 juillet 2015 au titre de l’exploitation de la composition musicale de l”uvre DIDI.
Condamne monsieur [L] [R] à payer à la société BMG RIGHTS MANAGEMENT FRANCE la somme de 6.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Condamne monsieur [L] [R] à payer à monsieur [G] [M] [Y] [Z] dit [J] [Z] la somme de 4.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Rejette toutes autres demandes.
Condamne monsieur [L] [R] aux entiers dépens dont distraction au profit de Maître Eric LAUVAUX, SELARL NOMOS et de la SELARL INGOLD & THOMAS, avocats, conformément aux dispositions de l’article 699 code de procédure civile.
La Greffière La Présidente