Économies d’énergie : 6 novembre 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 18-22.024

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Économies d’énergie : 6 novembre 2019 Cour de cassation Pourvoi n° 18-22.024
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SOC.

JT

COUR DE CASSATION
______________________

Audience publique du 6 novembre 2019

Rejet non spécialement motivé

Mme FARTHOUAT-DANON, conseiller doyen
faisant fonction de président

Décision n° 11116 F

Pourvoi n° M 18-22.024

R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E

_________________________

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________

LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :

Vu le pourvoi formé par la société Courtier en économie d’énergie (C2E), société par actions simplifiée, dont le siège est […] ,

contre les arrêts rendus les 27 octobre 2017 et 29 juin 2018 par la cour d’appel de Douai (chambre sociale), dans le litige l’opposant à M. F… N…, domicilié […] ,

défendeur à la cassation ;

Vu la communication faite au procureur général ;

LA COUR, en l’audience publique du 1er octobre 2019, où étaient présents : Mme Farthouat-Danon, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Capitaine, conseiller rapporteur, M. Ricour, conseiller, Mme Jouanneau, greffier de chambre ;

Vu les observations écrites de la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat de la société Courtier en économie d’énergie, de la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat de M. N… ;

Sur le rapport de Mme Capitaine, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;

Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;

Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;

Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;

REJETTE le pourvoi ;

Condamne la société Courtier en économie d’énergie aux dépens ;

Vu l’article 700 du code de procédure civile, condamne la société Courtier en économie d’énergie à payer la somme de 3 000 euros à M. N… ;

Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du six novembre deux mille dix-neuf.

MOYENS ANNEXES à la présente décision

Moyens produits par la SCP Célice, Soltner, Texidor et Périer, avocat aux Conseils, pour la société Courtier en économie d’énergie

PREMIER MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué (DOUAI, 27 octobre 2017) d’AVOIR dit que M. N… et la société Courtier en Economie d’Energie étaient liés par un contrat de travail, et d’AVOIR prononcé la résiliation judiciaire du contrat de travail à effet du 31 octobre 2014 ;

AUX MOTIFS QUE « Pour se prononcer sur la compétence de la juridiction prud’homale il convient donc de trancher la question de fond relative à l’existence d’un contrat de travail entre les parties, dont dépend la compétence ; qu’il sera rappelé que l’existence d’une relation de travail salariée ne dépend ni de la volonté exprimée par les parties ni de la dénomination qu’elles ont donné à leur convention mais des conditions de fond dans lesquelles est exercée l’activité professionnelle ; qu’en l’espèce, M. N… a été recruté par la société C2E en qualité de vendeur à domicile indépendant dans le cadre d’une convention de mandataire conclue le 17 septembre 2012 ; que selon un contrat de courtage conclu le Ier novembre 2012, M. N… a ensuite été recruté en qualité de courtier sous le statut d’auto entrepreneur inscrit au RCS ; que si le statut de vendeur à domicile indépendant institué par la loi du 27 janvier 1993 est exclusif de tout lien de subordination juridique caractéristique du contrat de travail ce n’est qu’à la condition que le vendeur à domicile indépendant gère librement l’organisation de son travail et détermine seul son niveau d’activité et ses objectifs financiers sans que l’entreprise puisse lui donner des directives ; qu’une autonomie dans l’organisation du travail n’exclut pas la reconnaissance d’un lien de subordination fondant un contrat de travail liant les parties ; qu’ il résulte des éléments produits par M. N… que des objectifs lui étaient fixés en ce qu’il devait réaliser un minimum de contrats par jour, que la société mettait à disposition des vendeurs un mode de transport en commun sous la forme d’une navette qui partait le matin à 9 heures et revenait le soir à 18 heures ; que si l’employeur indique que cette assistance n’était pas obligatoire et ne limitait le vendeur ni dans ses horaires de travail ni dans son secteur géographique, il ne produit aucune pièce en ce sens ; que le procès-verbal de constat du 28 mai 2014 qui relate le contenu du SMS collectif que l’intéressé a reçu de son chef d’agence, le 5 janvier 2014, révèle au contraire qu’il était soumis des directives et à des horaires de travail précis : “Bonjour à tous / Un petit message pour vous faire part de nos attentes pour 2014 / En 2014 la ponctualité sera de rigueur donc les pénalités de retard seront appliquées … /Je compte donc sur vous pour être à l’heure … Pas d’excuses. / Rendez-vous à 9h00 à l’agence départ à 9h45 sur le terrain / Départ du terrain 17h45 (période d’hiver). Rdv à l’agence pour déposer les contrats et si besoin est débriefing de la journée/ En 2014 ]’agence de Lille sera n° 1” ; que les témoignages versés aux débats confirment que le terrain d’action des vendeurs était choisi quotidiennement par le responsable et que le démarchage se faisait obligatoirement en équipe selon les horaires préalablement fixés et que les vendeurs qui n’avaient pas atteint les objectifs fixés pouvaient être contraints de travailler le samedi ; qu’il ressort de l’ensemble de ces éléments que la société C2E avait le pouvoir de donner des ordres et des directives relatifs à l’exercice du travail lui-même, d’en contrôler l’exécution et d’en sanctionner les manquements, de sorte que le lien de subordination est caractérisé ; que c’est donc à tort que le conseil de prud’hommes s’est déclaré incompétent ; que le jugement sera en conséquence infirmé » ;

1. ALORS QUE le contrat liant le vendeur à domicile indépendant à l’entreprise qui lui confie la vente de ses produits ou services peut prévoir que le vendeur assure des prestations de service visant au développement et à l’animation du réseau de vendeurs à domicile indépendants, si celles-ci sont de nature à favoriser la vente de produits ou de services de l’entreprise ; que ce contrat prévoit alors la nature des prestations, en définit les conditions d’exercice et les modalités de rémunération ; qu’en déduisant de ses constatations l’existence d’un lien de subordination sans rechercher, comme elle y était invitée par les conclusions de la société exposante, si les sujétions constatées ne relevaient pas de l’organisation normale du réseau, la cour d’appel a privé sa décision de base légale au regard des articles L. 135-1 et L.135-2 du code de commerce et L.1221-1 du code du travail ;

2. ALORS, DE SURCROIT, QUE la cour d’appel ne pouvait pas énoncer en des termes généraux que le statut de vendeur à domicile indépendant suppose que le vendeur gère librement l’organisation de son travail et détermine seul son niveau d’activité et ses objectifs financiers, sans analyser la portée des dispositions de l’article L.135-2 du code de commerce invoquées par la société Courtier En Economie d’Energie qui autorisent le contrat liant le vendeur à l’organisateur d’un réseau de ventes à préciser la nature des prestations du vendeur à domicile et à en définir les conditions d’exercice et les modalités de rémunération ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel a violé les dispositions des articles L.135-2 du code de commerce et L.1221-1 du code du travail ;

3. ALORS, EN TOUT ETAT DE CAUSE, QUE la cour d’appel ne pouvait statuer comme elle l’a fait sans répondre aux conclusions de la société Courtier En Economie d’Energie (p.6) qui invoquaient les dispositions de l’article L.135-2 du code de commerce et en passant ces dispositions sous silence ; que la cour d’appel a ainsi méconnu les prescriptions de l’article 455 du code de procédure civile.

DEUXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué (DOUAI, 27 octobre 2017) d’AVOIR dit que M. N… et la société Courtier en Economie d’Energie étaient liés par un contrat de travail, et d’AVOIR prononcé la résiliation judiciaire de ce contrat de travail à effet du 31 octobre 2014 ;

AUX MOTIFS QUE « Dès lors que les relations contractuelles sont requalifiées en contrat de travail, celui-ci ne peut être rompu que par la démission du salarié, le licenciement ou la rupture conventionnelle ; que contrairement à ce que soutient la société C2E, il ne peut être soutenu que le contrat a pris fin en raison de la démission de M. N…, en l’absence de manifestation d’une volonté claire et non équivoque de sa part de rompre le contrat de travail ; que la société C2E ayant commis divers manquements à ses obligations d’employeurs – absence de déclaration auprès des organismes concernés, absence de congés payés, absences de complémentaire santé. – suffisamment graves pour rendre impossible la poursuite des relations contractuelles, c’est à juste titre que M. N… sollicite la résiliation judiciaire du contrat de travail, laquelle prendra effet le 31 octobre 2014, puisqu’à compter de cette date, l’intéressé a admis qu’il n’était plus à disposition de la société C2E » ;

1. ALORS QUE à supposer justifiée la requalification du contrat de courtage en un contrat de travail, le simple fait d’avoir eu recours à un contrat inapproprié ne suffit pas à lui seul à établir le manquement grave de l’employeur justifiant la résiliation judiciaire du contrat ainsi requalifié, dès lors que le vendeur à domicile n’a jamais demandé jusque-là à bénéficier du statut de salarié, qu’il n’invoquait aucun refus qui aurait été opposé à une quelconque demande salariale, pas plus qu’il n’invoquait une intention frauduleuse caractérisée de la part de la société C2E ; qu’en prononçant la résiliation judiciaire du contrat qui liait les parties au seul motif que ce contrat n’avait pas été initialement qualifié de contrat de travail, en conséquence de quoi les règles applicables au contrat de travail n’ont pas été appliquées par la société, la cour d’appel a violé les articles L.1221-1, L.1231-1 du code du travail, ensemble les articles 1224 à 1227 (ancien article 1184) du code civil ;

2. ALORS QUE la cour d’appel ne pouvait prononcer la résiliation judiciaire du contrat à compter du 31 octobre 2014 sans rechercher ce qui avait pu justifier que M. N… ait cessé subitement de se tenir à la disposition de la société, en l’absence de toute demande préalablement adressée à la société C2E et de toute notification de son intention de mettre fin à la relation contractuelle ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel n’a pas mis la Cour de cassation en mesure d’exercer son contrôle, privant sa décision de base légale au regard des articles L.1221-1, L.1231-1 du code du travail, ensemble les articles 1224 à 1227 (ancien article 1184) du code civil.

TROISIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué (DOUAI, 29 juin 2018) d’AVOIR dit que la relation de travail était soumise à la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intra-communautaire et d’importation-exportation du 18 décembre 1952 et d’AVOIR condamné la société C2E à verser à M. N… les sommes de 10.005,03 euros au titre de rappels de salaires pour la période du 17 septembre 2012 au 31 octobre 2.014, 4767,78 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés, 978,38 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement, 3.692 euros d’indemnité compensatrice de préavis, 369,20 euros au titre des congés payés afférents, 10.000 euros à titre d’indemnité pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, 11.076 euros au titre de l’indemnité pour travail dissimulé, 2.000 euros en réparation du préjudice qu’il a subi du fait de l’absence de cotisations à un régime de retraite et 3.000 euros au titre des frais irrépétibles engagés en première instance et devant la cour d’appel ;

AUX MOTIFS QUE « Sur la convention collective de branche applicable à la relation de travail : que M. N… soutient qu’il y aurait lieu d’appliquer, en l’espèce, la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intra- communautaire et d’importation-exportation du 18 décembre 1952 ; qu’en effet, il précise que dans son arrêt du 27 octobre 2017, la cour de céans a indiqué que la société C2E pourrait ne pas entrer dans le champ d’application de la convention collective nationale du négoce et de distribution de combustibles solides, liquides, gazeux et produits pétroliers du 20 décembre 1985 (IDCC 1408) et qu’au regard de son code APE, en l’occurrence 4618Z, et de son activité, à savoir celle d’intermédiaire spécialisé dans le commerce de produits spécifiques, elle pourra relever de la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intracommunautaire et d’importation-exportation du 18 décembre 1952 (IDCC 43) ; que M. N… affirme souscrire à cette analyse ; que la société C2E fait au contraire valoir qu’au regard de la spécificité de son activité, elle n’entre dans le champ d’application d’aucune convention collective, que la cour de céans a seulement émis l’hypothèse, dans son arrêt du 27 octobre 2017, que la société relève de la convention collective précitée, et elle a demandé aux parties de verser des éléments en vue de trancher la question ; que M. N… s’est contenté de reprendre l’arrêt de la cour et de souscrire à son analyse, sans fournir aucun élément au soutien de l’application de cette convention collective ou d’une autre ; que la société indique qu’elle exerce une activité d’intermédiaire dans la commercialisation des offres d’abonnement électricité et gaz pour le compte de fournisseurs, qu’elle commercialise aussi des produits, que ses clients sont principalement des particuliers et des « petits professionnels » et qu’elle ne fait pas d’importation-exportation, ce qui exclut par conséquent l’application de la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intracommunautaire et d’importation-exportation, laquelle vise principalement l’import-export ; Que l’article L.2261-2 du code du travail dispose que la « La convention collective applicable est celle dont relève l’activité principale exercée par l’employeur » ; que la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intracommunautaire et d’importation-exportation du 18 décembre 1952 (étendue par arrêté du 18 octobre 1955) dispose en son article 1, qui définit son champ d’application, que “La présente convention régit les rapports entre les employeurs et les employés, agents de maîtrise et cadres des entreprises de commerce, de commission et de courtage dont l’activité principale et habituelle consiste en opérations d’échanges commerciaux intracommunautaires et/ ou internationaux (importation-exportation) exerçant leurs activités sur le territoire national même dans le cas où les entreprises considérées ont leur siège en dehors de ce territoire et quels que soient l’importance et le nombre de leurs établissements en France” ; qu’en l’espèce, la cour relève d’abord que la convention collective nationale du négoce et distribution de combustibles solides, gazeux et produits pétroliers du 20 décembre 1985, n’est pas applicable à la relation de travail, l’entreprise n’ayant pas pour activité principale de commercialiser directement des combustibles ou des produits pétroliers ; que la société C2E ayant, comme elle l’affirme, pour activité principale celle d’intermédiaire dans le commerce à la fois d’abonnements électricité et gaz pour le compte de fournisseurs, mais aussi de divers produits spécifiques (pompes à chaleur, cheminée bioethanol…), elle entre dans le champ d’application de la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intra- communautaire et d’importation exportation du 18 décembre 1952, laquelle convention collective correspond au demeurant au code APE 4618Z de la société ; qu’en effet, contrairement à ce qu’affirme la société C2E, cette convention collective ne limite pas son champ d’application aux entreprises qui importent et exportent à l’international, mais vise bien aussi alternativement celles dont l’activité consiste en opérations d’échanges commerciaux intra-communautaires, c’est à dire au sein des pays de l’Union européenne et donc y compris sur le territoire d’un seul Etat membre ; qu’en outre et en tout état de cause, le fait que les clients de la société CE2 soient principalement, comme elle l’affirme, des particuliers et des « petits professionnels » ne saurait avoir pour effet de la soustraire à l’application de cette convention collective, celle-ci ne distinguant ni selon la qualité de particulier ou de professionnels des clients, ni selon leur taille, sans compter que rien n’exclut qu’une entreprise ayant pour clients des petits professionnels ou des particuliers puisse être amenée à exporter, y compris à l’international ; qu’il en ressort que la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intra-communautaire et d’importation exportation du 18 décembre 1952 est bien applicable à la société C2E et donc au contrat de travail qui a existé entre celle-ci et M. N… » ;

1. ALORS QUE par application de l’article 625 du code de procédure civile, la cassation de l’arrêt n° 2304/17 rendu par la cour d’appel de Douai le 27 octobre 2017 en ce qu’il a dit que M. N… et la société C2E étaient liés par un contrat de travail et en ce qu’il a prononcé la résiliation judiciaire de ce contrat de travail, entrainera par voie de conséquence l’annulation de l’arrêt du 29 juin 2018, qui en est la suite et s’y rattache par un lien de dépendance nécessaire en ce qu’il se prononce sur la convention collective applicable et condamne la société au versement à M. N… de diverses sommes au titre du contrat de travail et de sa résiliation ;

2. ALORS QUE selon les termes clairs et précis de l’article 1er de la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intracommunautaire et d’importation-exportation du 18 décembre 1952, cette convention s’applique aux seules entreprises dont l’activité principale et habituelle consiste en opérations d’échanges commerciaux intracommunautaires et/ ou internationaux (importation-exportation) ; que des opérations d’échanges commerciaux intracommunautaires se déroulent nécessairement entre des entreprises qui relèvent d’au moins deux États différents, membres de l’Union Européenne ; qu’en considérant que cette convention s’applique à des entreprises dont l’activité consiste en opérations d’échanges commerciaux noués sur le territoire d’un seul Etat membre, la cour d’appel a violé l’article 1er de la convention collective susvisée, ensemble l’article 1103 du code civil (ancien article 1134) ;

3. ALORS, DE SURCROIT, QUE l’identification de l’entreprise auprès de l’INSEE par son code APE n’a qu’une valeur indicative ; qu’en se référant à cette identification sans égard pour l’activité réelle de l’entreprise et pour le champ d’application précis de la convention en cause, la cour d’appel s’est prononcée par un motif inopérant et a violé l’article L.1221-1 du code du travail, ensemble l’article 1er de la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intracommunautaire et d’importation-exportation du 18 décembre 1952.

QUATRIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué (DOUAI, 29 juin 2018) d’AVOIR condamné la société Courtier En Economie d’Energie à verser à M. N… les sommes de 10.005,03 euros au titre de rappels de salaires pour la période du 17 septembre 2012 au 31 octobre 2014, 4.767,78 euros au titre de l’indemnité compensatrice de congés payés, 978,38 euros au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement, 3.692 euros d’indemnité compensatrice de préavis, 369,20 euros au titre des congés payés afférents, 11.076 euros au titre de l’indemnité pour travail dissimulé, 2.000 euros en réparation du préjudice qu’il a subi du fait de l’absence de cotisations à un régime de retraite et 3.000 euros au titre des frais irrépétibles ;

AUX MOTIFS QU’ « il y a lieu de classer M. N… au niveau M10 de la convention collective applicable pendant la période considérée et donc de fixer sa rémunération conformément à ce coefficient de la grille des minima conventionnels, soit un salaire mensuel brut minimal de 1 787 euros pour 2012, 1 819 euros pour 2013 et 1 846 pour 2014. En conséquence, il y a lieu de débouter M. N… de sa demande visant à le classer dans la catégorie cadre, niveau C 16 et à fixer son salaire mensuel brut de référence à 2 863 euros. Sur les rappels de salaire M. N… sollicite un rappel de salaire pour la période du 17 septembre 2012 au 31 octobre 2014 d’un montant de 35 406,25 euros correspondant à la différence entre le montant qu’il aurait dû percevoir pour ladite période s’il avait été classé cadre niveau C16 (72 834,72 euros) et le montant des rémunérations qu’il a perçues (37 428,47 euros). La société C2E soutient à titre subsidiaire qu’à supposer applicable la convention collective nationale des entreprises de commission, de courtage et de commerce intra-communautaire et d’importation exportation du 18 décembre 1952, M. N… ne peut solliciter aucun rappel de salaire, comme le montre la différence entre le salaire mensuel brut conventionnel d’un agent de maîtrise coefficient M10 et les rémunérations déjà perçues par M. N…, telles que reconstituées en brut compte tenu des cotisations salariales versées par la société, et hors des mois de septembre et octobre 2014. En l’espèce, M. N… devant être classé dans la catégorie Agent de Maîtrise niveau 10, il peut revendiquer, en application de la Grille des minima conventionnels, un salaire mensuel brut minimal de 1.787 euros pour 2012, 1 819 euros pour 2013 et 1 846 pour 2014. Par rapport au tableau produit par la société, la cour relève que M. N… ayant débuté son activité en qualité de VDI non-inscrit au RCS le 17 septembre 2012, la société a acquitté des cotisations sociales pendant cette période, mais plus à compter du 1er novembre 2012, date à laquelle M. N… a été inscrit comme auto-entrepreneur, de telle sorte qu’il n’y a pas à reconstituer en brut, comme le fait la société, les sommes perçues par M. N… à compter de cette date. Au regard des factures de rémunération versées aux débats par M. N… et des tableaux établis par la société, il convient de retenir les calculs suivants pour les périodes suivantes : – Du 17 septembre au 31 octobre 2012, M. N… ayant perçu une rémunération brute totale d’un montant de 1 354,61 euros, la société lui doit la somme de 774,36 euros pour septembre 2012 (1 787/30 x 13) et de 432,39 euros pour octobre 2012 (1 787 — 1 354,61 en bruts). – Du 1er novembre 2012 au 31 décembre 2012, M. N… ayant perçu une rémunération de 2 220,68 euros (en net), la société lui doit la somme de 1 353,22 euros (= 1 787 x 2 – 2 220,68). – De janvier 2013 à décembre 2013, M. N… ayant perçu (selon les parties qui sont d’accords) une rémunération de 23 082,50 euros et la rémunération minimale qu’il devait percevoir sur cette période s’élevant à 21 828 euros (= 1 819 x 12), il a perçu plus que le minima conventionnel, de sorte que la société ne lui doit rien pendant cette période. – Du ler janvier 2014 au 31 octobre 2014, M. N… ayant perçu une rémunération de 11 014,94 (et non pas de 12 934,94 selon la société avant même reconstitution en brut) alors que la rémunération qu’il devait percevoir sur cette période s’élevait à 18 460 euros (1 846 x 10), la société lui doit la somme de 7 445,06 euros (= 18 460 – 11 014,94). Il en ressort que la société C2E est condamnée à verser à M. N… une somme totale de 10 005,03 euros euros au titre de rappels de salaires pour la période du 17 septembre 2012 au 31 octobre 2014. Sur l’indemnité compensatrice de congés payés (
) Compte tenu de l’ensemble des rémunérations que M. N… a perçues ou aurait dû percevoir du 17 septembre 2012 au 31 octobre 2014, à savoir : du 17 septembre au 31 décembre 2012 : 6 135,36 euros ( 774,36 + (3 x 1787)) – pour l’année 2013 : 23 082,50 euros – du ler janvier au 31 octobre 2014 : 18 460 euros M. N… ayant perçu ou aurait dû percevoir des rémunérations s’élevant au total à 47 677,86 euros, l’indemnité compensatrice de congés payés de M. N… s’élève à une somme de 4 767,78 euros. En conséquence, la société C2E sera condamnée à verser à M. N… une indemnité compensatrice de congés payés de 4 767,78 euros. Sur les indemnités de rupture S’agissant de l’indemnité de licenciement (
) Le salaire moyen de référence de M. N… étant de 1 846 euros et la résiliation de son contrat de travail ayant été fixée au 31 octobre 2014, il y a lieu de retenir la somme de 978,38 euros (= Œ x 1 846 x 2,12 ans). La société C2E sera condamnée à verser 978,38 euros à M. N… au titre de l’indemnité conventionnelle de licenciement. * S’agissant de l’indemnité compensatrice de préavis (
) la société C2E sera condamnée à payer à M. N… la somme de 3 692 euros d’indemnité compensatrice de préavis, ainsi que 369,20 euros au titre des congés payés afférents. (
) Sur l’indemnité forfaitaire pour travail dissimulé (
) La cour en conclut que la société C2E a dissimulé intentionnellement un emploi salarié et qu’elle doit être condamnée à verser à M. N…, dont le contrat a été rompu le 31 octobre 2014, la somme de 11 076 euros (1 846 x 6) » ;

ALORS QUE la cour d’appel a jugé que la rémunération de M. N… devait être fixée conformément à la grille des minima conventionnels, ce qui correspondait à un salaire mensuel brut minimal de 1.787 euros pour 2012, 1.819 euros pour 2013 et 1.846 euros pour 2014 (arrêt 2p.8, al.4) ; que pour déterminer les rappels de salaire éventuellement dus au salarié, il convenait de comparer ces minima conventionnels bruts avec la rémunération brute perçue par l’intéressé pendant la période considérée ; que pour vérifier si M. N… avait été rempli de ses droits, la cour d’appel a dit qu’il n’y avait pas lieu de reconstituer en brut la rémunération perçue par celui-ci dans la mesure où il avait été inscrit comme auto-entrepreneur à partir du 1er novembre 2012 et que la société n’avait plus acquitté les cotisations sociales à compter de cette date ; qu’en statuant de la sorte, par un motif inopérant qui la conduisait à déterminer les droits du salarié en comparant des minima conventionnels bruts avec une rémunération nette et à prononcer des condamnations à des rappels de salaire et des indemnités de rupture en net, la cour d’appel n’a pas tiré les conséquences légales de ses propres constatations et a violé les articles L.1221-1 du code du travail et 1303 (1371 ancien) du code civil.

CINQUIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué (DOUAI, 29 juin 2018) d’AVOIR condamné la société Courtier En Economie d’Energie à verser à M. N… la somme de 11.076 euros au titre de l’indemnité pour travail dissimulé ;

AUX MOTIFS QUE « M. N… soutient que le travail dissimulé est parfaitement caractérisé en l’espèce, que l’intention frauduleuse et la mauvaise foi de la société C2E sont parfaitement établies de sorte que celle-ci doit être condamnée en application de l’article L.8223-1 du code du travail à verser l’indemnité forfaitaire de 6 mois de salaire qui s’élève à 17 178 euros ; que la société C2E fait au contraire valoir que le caractère intentionnel n’est pas établi en l’espèce, puisque, loin de dissimuler l’activité des VDI, elle a pris elle-même l’initiative de contacter l’Urssaf dans le cadre d’un rescrit afin de connaître les modalités de prélèvement des cotisations sociales et de pouvoir mettre en place un système de versement généralisé ; que le fait de recourir intentionnellement à une autre forme contractuelle que le contrat de travail pour masquer l’emploi de personnel salarié et se soustraire aux obligations qui en résultent caractérise le travail dissimulé par dissimulation d’emploi et oblige l’employeur concerné à payer, en cas de rupture du contrat de travail, une indemnité forfaitaire égale à six mois de salaire sur le fondement de l’article L.8223-1 du code du travail ; qu’en l’espèce, il ressort à la fois de plusieurs attestations et d’offres d’emplois de la société C2E versées aux débats, que la société C2E proposait à l’origine des contrats à durée indéterminée ou déterminée pour recruter des commerciaux, mais qu’elle recourait ensuite avec eux au statut du Vendeur à Domicile (VDI), afin d’avoir un travailleur indépendant au sens du droit du travail, non inscrit au RCS ou au RSAC, et de ce fait seulement assimilé à un salarié pour le droit de la Sécurité sociale ; que les travailleurs, comme M. N…, ayant en réalité exécuté leur travail dans un lien de subordination juridique manifeste, la société C2E ne peut affirmer qu’elle avait des difficultés à choisir le contrat de travail idoine et qu’elle n’a pas choisi intentionnellement ce statut pour se soustraire aux obligations du droit du travail ; qu’en outre, si la société C2E a en effet sollicité les conseils de l’Urssaf en 2008, c’est seulement pour avoir des précisions sur le régime de sécurité sociale applicable aux VDI, en sachant qu’en demandant dès le 1er novembre 2012 à M. N… de s’inscrire comme auto-entrepreneur, elle a aussi voulu intentionnellement se soustraire au régime de sécurité sociale applicable ; que la cour en conclut que la société C2E a dissimulé intentionnellement un emploi salarié et qu’elle doit être condamnée à verser à M. N…, dont le contrat a été rompu le 31 octobre 2014, la somme de 11 076 euros (1 846 x 6) ;

1. ALORS QUE le caractère intentionnel du délit de travail dissimulé par dissimulation d’emploi salarié ne peut se déduire du seul recours à un contrat inapproprié ; qu’en jugeant que le fait de recourir intentionnellement à une autre forme contractuelle que le contrat de travail caractérise le travail dissimulé par dissimulation d’emploi et oblige l’employeur concerné à payer, en cas de rupture du contrat de travail, l’indemnité forfaitaire de l’article L. 8223-1 du code du travail, la cour d’appel a statué par un motif inopérant et a violé par fausse application ce texte ;

2. ALORS QUE la cour d’appel a constaté que la société C2E a sollicité les conseils de l’Urssaf pour avoir des précisions sur le régime de sécurité sociale applicable aux vendeurs à domicile indépendants, ce qui témoigne de sa bonne foi, nonobstant la demande que cette société aurait adressé à M. N… de s’inscrire comme auto-entrepreneur, demande qui, à elle seule, ne suffit pas à révéler une intention frauduleuse ; qu’en statuant comme elle l’a fait, la cour d’appel n’a pas légalement justifié sa décision et a violé l’article L. 8223-1 du code du travail.

SIXIEME MOYEN DE CASSATION

Il est fait grief à l’arrêt attaqué (DOUAI, 29 juin 2018) d’AVOIR condamné la société Courtier En Economie d’Energie à verser à M. N… la somme de 2.000 euros en réparation du préjudice qu’il a subi du fait de l’absence de cotisations à un régime de retraite ;

AUX MOTIFS QUE « M. N… fait valoir que si l’employeur s’était acquitté des cotisations retraite, il aurait perçu au titre de la période travaillée pour le compte de la société C2E, une pension de retraite de 55 euros nets mensuels, de telle sorte qu’il subit un préjudice à hauteur de 55 euros par mois pendant ses 26 ans de retraite et demande à ce titre 16 500 euros de dommages et intérêts ; que la société C2E soutient que cette demande est fantaisiste, puisqu’il incombait à M. N… de cotiser pour sa retraite quand il était auto-entrepreneur, sans compter qu’il ne prouve pas son préjudice qui est de toute façon éventuel et que celui-ci doit s’apprécier uniquement sur la période litigieuse à savoir du 18 septembre 2012 au 31 octobre 2014 ; que le manquement par l’employeur à son obligation de payer les cotisations retraites du salarié cause à ce dernier un préjudice né et actuel résultant de la perte de ses droits aux prestations correspondant aux cotisations non versées ; que la cour relève que la société C2E n’a pas versé les cotisations retraite de M. N… , que celui-ci fait la preuve de son préjudice, qu’il convient d’évaluer, au regard des éléments versés aux débats par les parties et du fait que les cotisations de M. N… peuvent encore être régularisées, à la somme de 2 000 euros ; qu’en conséquence, la société C2E sera condamnée à verser 2 000 euros à M. N… en réparation du préjudice qu’il a subi du fait de l’absence de cotisations à un régime de retraite » ;

ALORS QUE le préjudice né de la perte des droits correspondant aux cotisations non versées au titre de la retraite ne devient certain qu’au moment où le salarié se trouve en droit de prétendre à la liquidation de ses droits à pension ; qu’en retenant le principe d’un préjudice né et actuel résultant de la perte des droits aux prestations correspondant aux cotisations non versées tout en constatant que les cotisations peuvent encore être régularisées, la cour d’appel a violé les dispositions des articles 1231-1, 1231-2 et 1231-3 (anciens articles 1147, 1149 et 1150) du code civil.

 


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