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COUR D’APPEL D’ORLÉANS
CHAMBRE DES URGENCES
COPIES EXECUTOIRES + EXPÉDITIONS :
SCP CRUANES-DUNEIGRE, THIRY ET MORENO
SCP SIMARD VOLLET OUNGRE CLIN
ARRÊT du 4 MAI 2022
n° : 162/22 RG 21/02681
n° Portalis DBVN-V-B7F-GONP
DÉCISION DE PREMIÈRE INSTANCE : Jugement, Juge des contentieux de la protection, Tribunal Judiciaire de TOURS en date du 13 septembre 2021, RC 21/01816 ;
PARTIES EN CAUSE
APPELANTE : timbre fiscal dématérialisé n°: 1265 2774 6549 0764
OPH TOURS HABITAT (Office public de l’Habitat), pris en la persoone de son représentant légal en exercice, domicilié ès qualités au siège sis
1 rue Maurice Bedel – 37000 TOURS
représenté par Me Maxime MORENO de la SCP CRUANES-DUNEIGRE, THIRY ET MORENO, avocats au barreau de TOURS
INTIMÉ : timbre fiscal dématérialisé n°: 1265 2661 7771 1635
Monsieur [W] [P]
11 allée de la Belle fille, appt 30, logt N44 – 37000 TOURS
rerprésenté par Me Didier CLIN de la SCP SIMARD VOLLET OUNGRE CLIN, avocats au barreau d’ORLÉANS
‘ Déclaration d’appel en date du 15 octobre 2021
‘ Ordonnance de clôture du 8 mars 2022
Lors des débats, à l’audience publique du 23 mars 2022, Monsieur Michel Louis BLANC, Président de Chambre, a entendu les avocats des parties, avec leur accord, par application des articles 786 et 910 du code de procédure civile ;
Lors du délibéré :
Monsieur Michel BLANC, président de chambre,
Monsieur Eric BAZIN, conseiller,
Madame Laure Aimée GRUA, conseiller,
Greffier : Madame Mireille LAVRUT, faisant fonction de greffier lors des débats et du prononcé par mise à disposition au greffe ;
Arrêt : prononcé le 4 mai 2022 par mise à la disposition au greffe, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile ;
Par acte sous seings privé en date du 20 novembre 2008, l’OPH Tours Habitat donnait à bail à [W] [P] un bien immobilier à usage d’habitation sis à Tours, 11 allée de la Belle Fille, bâtiment 30, logement 44, moyennant un loyer de 203,07 €.
Courant 2019, des travaux de remplacement de menuiseries de l’ensemble du bâtiment étaient programmés par le bailleur ; un avis de travaux de remplacement des fenêtres était affiché au bas du bâtiment, les travaux devant être réalisés du 20 mai au 31 mai 2019 ; [W] [P] refusait l’accès à son logement à l’entreprise Lorillard, chargée de la réalisation des travaux.
Par courrier recommandé avec accusé de réception en date du 18 septembre 2019, la société Tours Habitat adressait à [W] [P] une dernière relance puis, par un nouveau courrier recommandé avec accusé de réception en date du 23 décembre 2019, le mettait en demeure d’avoir à laisser l’entreprise réaliser les travaux de remplacement, et ce en vain.
Par acte en date du 19 août 2020, la société Tours Habitat assignait [W] [P] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Tours statuant en référé lequel, par une ordonnance en date du 19 mars 2021, considérant qu’il existait une contestation sérieuse, disait n’y avoir lieu à référé.
Par acte en date du 14 avril 2021, la société Tours Habitat assignait [W] [P] devant le juge des contentieux de la protection du tribunal judiciaire de Tours, sollicitant l’autorisation de mandater un huissier de son choix afin de requérir l’ouverture du logement et l’accès à l’entreprise, réclamant en outre le paiement de la somme de 500 € en raison de la résistance abusive de [W] [P].
Par un jugement en date du 13 septembre 2021, le tribunal judiciaire de Tours déboutait la société Tours Habitat de l’ensemble de ses demandes et [W] [P] de sa demande de dommages-intérêts et de sa demande formée au titre de l’article 700 du code de procédure civile.
Par une déclaration déposée au greffe le 15 octobre 2021, l’établissement public OPH Tours Habitat en interjetait appel.
Par ses dernières conclusions, l’OPH Tours Habitat sollicite l’infirmation de ce jugement, demandant à la cour, statuant à nouveau, de l’autoriser à mandater tel huissier de son choix afin de se présenter au logement occupé par [W] [P] et de requérir de celui-ci qu’il ouvre sa porte et permette l’accès à l’entreprise chargée des travaux de remplacement des menuiseries, et de dire que cette autorisation vaudra autant de fois que nécessaire ; la partie appelante réclame le paiement de la somme de 500 € en raison de la résistance abusive de [W] [P] et de la somme de 1500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
Par ses dernières conclusions en date du 7 janvier 2022, [W] [P] sollicite la confirmation de la décision du 13 septembre 2021 et la location de la somme de 1500 € en application de l’article 700 du code de procédure civile.
L’ordonnance de clôture était rendue le 8 mars 2022.
SUR QUOI :
Attendu que pour statuer comme il l’a fait, le premier juge, citant les dispositions de l’article 7 e) de la loi du 6 juillet 1989 dans sa version issue de l’entrée en vigueur de la loi du 24 mars 2014, notamment en ce que ce texte prévoit qu’avant le début des travaux, le locataire est informé par le bailleur de leur nature et des modalités de leur exécution par une notification de travaux qui lui est remise en main propre par lettre recommandée avec demande d’avis de réception, citant également les dispositions de l’article 1724 du Code civil et celles de l’article 2 de la loi du 12 juillet 1967, en ce qu’elles prévoient que les travaux destinés à adapter les locaux d’habitation à des normes de salubrité, de sécurité, d’équipement et de confort peuvent, nonobstant toute disposition ou stipulation contraire, être exécutés par le propriétaire dans les mêmes conditions que les réparations urgentes visées à l’article 1724 du Code civil, a relevé que le contrat de bail du 20 novembre 2008 prévoit en son article 22 que le locataire est tenu de laisser exécuter dans les lieux loués les travaux d’amélioration des parties communes ou des parties privatives du même immeuble, ainsi que les travaux nécessaires au maintien en l’état et à l’entretien normal des lieux loués, alors que la société Tours Habitat indique dans son assignation fonder ses demandes sur l’amélioration de la performance énergétique du bâtiment, cette mention ne figurant pas dans les courriers recommandés du 18 septembre 2019 et du 23 décembre 2019 ;
Que le premier juge en a conclu que le locataire n’était pas suffisamment informé par le bailleur de la nature et des modalités d’exécution des travaux ;
Attendu qu’à l’occasion de la procédure de référé, [W] [P] avait prétendu que Tours Habitat considérerait que les personnes n’ayant pas « un statut social élevé » n’auraient pas droit à la protection de leur vie privée, ce contre quoi s’élève l’organisme appelant, lequel considère que son locataire ne fait l’objet d’aucun traitement de défaveur de sa part ;
Attendu que [W] [P] n’a pas contesté avoir signé les conditions générales et particulières de son bail ;
Attendu que c’est à juste titre que la partie appelante déclare que si le droit au respect de la vie privée est prévu en particulier par l’article 8 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme, le droit de propriété est également un droit constitutionnellement reconnu, qualifié d’inviolable et sacré par la même convention ;
Attendu que la partie appelante produit une note technique de sa Direction du Patrimoine qui souligne l’importance des travaux de rénovation des menuiseries extérieures afin d’apporter au locataire un meilleur confort thermique et de permettre de réaliser des économies d’énergie, les dispositions de l’article 7 e) de la loi du 6 juillet 1989 prévoyant spécifiquement l’obligation pour le locataire de permettre l’accès aux lieux loués pour la préparation et l’exécution de travaux d’amélioration des parties communes, des parties privatives du même immeuble, de travaux nécessaires au maintien en état ou à l’entretien normal des locaux loués et les travaux d’amélioration de la performance énergétique ;
Attendu qu’il n’est ni contestable ni contesté que les travaux envisagés ont pour conséquence l’amélioration du confort thermique et une économie d’énergie, étant précisé qu’ils ne nécessitent qu’une seule intervention ;
Attendu que c’est à tort que le premier juge a ajouté une condition à la loi, condition que celle-ci ne prévoit pas, en prétendant que [W] [P] n’aurait pas ‘suffisamment été informé de la nature et des modalités d’exécution des travaux envisagés’ en ce que l’amélioration de la performance énergétique n’aurait pas été mentionnée, ce qui est inexact puisque le courrier recommandé du 23 décembre 2019 détaille la nature des travaux ainsi que leurs modalités d’exécution sur une journée, en deux phases ;
Attendu que c’est à juste titre que la partie appelante fait observer que [W] [P] avait reconnu lui-même qu’elle avait justifié auprès de lui qu’elle entendait changer la porte, les deux fenêtres du logement et les volets pour les améliorer, alors qu’il est indéniable qu’il avait eu connaissance des modalités d’exécution des travaux se résumant d’ailleurs à une double intervention sur une seule journée ce qui ne représente pas une gêne considérable ;
Attendu par ailleurs que, dans l’hypothèse où l’organisme bailleur se trouverait dans l’impossibilité de faire effectuer les travaux du fait de la mauvaise volonté d’un des locataires, sa responsabilité serait immanquablement recherchée ;
Que sa position en la cause est donc parfaitement légitime ;
Attendu que l’obstruction faite par [W] [P] à l’exécution des travaux d’amélioration envisagés pour l’amélioration de la performance énergétique du bâtiment se heurte aux obligations prévues par le contrat de bail dont il est le signataire ;
Attendu qu’il y a lieu d’infirmer le jugement entrepris et de faire droit à la demande de l’OPH Tours Habitat ;
Attendu qu’il y a lieu d’observer que cet organisme ne sollicite pas d’astreinte ;
Attendu qu’il ne peut être contesté que l’opposition manifestée par [W] [P] constitue une faute de nature à entraîner un préjudice pour le bailleur ;
Qu’il y a lieu de faire droit à la demande très modérée de dommages-intérêts de la partie appelante et de lui allouer à ce titre la somme de 500 € ;
Attendu qu’il serait en outre particulièrement inéquitable de laisser à la charge de l’OPH Tours Habitat l’intégralité des sommes qu’il a dû exposer du fait de la présente procédure, de sorte qu’il y a lieu de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile et de lui allouer à ce titre la somme de 1500 € ;
PAR CES MOTIFS :
Statuant publiquement, contradictoirement et en dernier ressort,
Infirme en toutes ses dispositions le jugement entrepris,
Statuant à nouveau,
Autorise l’OPH Tours Habitat à mandater tel huissier de justice de son choix afin de se présenter au logement occupé par [W] [P] à Tours au n° 11 allée de la Belle Fille, logement 44, et de requérir
de celui-ci qu’il ouvre sa porte et permette l’accès à l’entreprise chargée des travaux de remplacement des menuiseries, et ce pour la durée prévisible d’une journée,
Dit que faute par [W] [P] d’obtempérer, l’huissier pourra faire procéder à ladite ouverture par la voie forcée, avec le concours de la force publique et l’aide d’un serrurier, aux fins ci-dessus et qu’il fera procéder au changement éventuel des serrures aux frais de [W] [P],
Dit que l’autorisation ainsi donnée vaudra autant de fois que nécessaire au cours de l’exécution des travaux, dans l’hypothèse selon laquelle [W] [P] réitérerait des actes d’obstruction à l’exécution des travaux dont s’agit,
Condamne [W] [P] à payer à l’OPH Tours Habitat la somme de 500 € à titre de dommages-intérêts et la somme de 1500 € en application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile,
Condamne [W] [P] aux dépens en ce compris les frais d’intervention de l’h uissier, du serrurier, et les frais de remplacement des serrures.
Arrêt signé par Monsieur Michel Louis BLANC, président de chambre, et Madame Mireille LAVRUT, faisant fonction de greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire ;
LE GREFFIER,LE PRÉSIDENT,