Assortir une licence d’entrepreneur de spectacles vivants d’une durée limitée (régime antérieur à l’ordonnance n° 2019-700 du 3 juillet 2019) n’est pas contraire à la directive « Services » 2006/123/CE ni à sa loi de transposition n° 2011-302 du 22 mars 2011 et son décret d’application n° 2011-994 du 23 août 2011.
Encadrement des régimes d’autorisation
Selon l’article 9 de la directive, les Etats membres ne peuvent subordonner l’accès à une activité de service et son exercice à un régime d’autorisation que si les conditions suivantes sont réunies : a) le régime d’autorisation n’est pas discriminatoire à l’égard du prestataire visé ; b) la nécessité d’un régime d’autorisation est justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général ; c) l’objectif poursuivi ne peut pas être réalisé par une mesure moins contraignante, notamment parce qu’un contrôle a posteriori interviendrait trop tardivement pour avoir une efficacité réelle.
Aux termes de l’article 11 de la même directive, l’autorisation octroyée au prestataire ne doit pas avoir une durée limitée, à l’exception des cas suivants : a) l’autorisation fait l’objet d’un renouvellement automatique ou est subordonnée seulement à l’accomplissement continu d’exigences ; b) le nombre d’autorisations disponibles est limité par une raison impérieuse d’intérêt général ; ou c) une durée limitée d’autorisation est justifiée par une raison impérieuse d’intérêt général.
Enfin, l’article 4 de la directive dispose que qu’il faut entendre par » raisons impérieuses d’intérêt général « , des raisons reconnues comme telles par la jurisprudence de la Cour de justice, qui incluent les justifications suivantes : l’ordre public, la sécurité publique, la santé publique, la préservation de l’équilibre financier du système de sécurité sociale, la protection des consommateurs, des destinataires de services et des travailleurs, la loyauté des transactions commerciales, la lutte contre la fraude, la protection de l’environnement et de l’environnement urbain, la santé des animaux, la propriété intellectuelle, la conservation du patrimoine national historique et artistique, des objectifs de politique sociale et des objectifs de politique culturelle.
Régime d’autorisation des licences d’entrepreneurs
Le régime d’autorisation d’une durée de trois ans renouvelable instauré par les anciens articles L. 7122 et R. 7122-4 du code du travail, s’applique à toute personne souhaitant produire des spectacles vivants, et ne revêt pas, dès lors, de caractère discriminatoire à l’égard des entrepreneurs.
Par ailleurs, ce régime d’autorisation temporaire ayant notamment pour objet la préservation de l’équilibre financier du système de sécurité sociale, la protection des travailleurs de ce secteur, la protection littéraire et artistique et des objectifs de politique culturelle, il est dès lors justifié par des raisons impérieuses d’intérêt général.
Par ailleurs, si d’autres mécanismes que l’autorisation à durée déterminée, tels que le recours aux tribunaux et l’inspection du travail permettraient de poursuivre l’objectif de respect de la règlementation du travail, ils ne peuvent tenir lieu de contrôle régulier et automatique du respect de cette règlementation, de la préservation de l’équilibre financier du système de sécurité sociale, et de la protection littéraire et artistique, et dès lors ni l’existence de ces contrôles, ni le rapport d’évaluation du dispositif, établi en septembre 2016 par l’inspection générale du travail, recensant les limites et imperfections du régime instauré par les dispositions des articles L. 7122 et R. 7122-4 du code du travail, ne permettent d’établir que l’instauration d’un régime d’autorisation temporaire serait disproportionné par rapport aux objectifs de protection poursuivis et que ceux-ci pourraient être atteints par une mesure moins contraignante.
Régime d’autorisation validé
Ce régime d’autorisation pour une durée de trois ans renouvelable était donc justifié par des raisons impérieuses d’intérêt général, proportionné aux objectifs poursuivis, et compatible avec les dispositions des articles 9 et 11 de la directive 2006/123/CE, il n’est pas contraire à l’objectif de simplification administrative exposé au considérant 43 de la même directive.
Le maintien de ce régime d’autorisation à durée limitée en matière de spectacles vivants, justifié par une raison impérieuse d’intérêt général, ne contrevient pas au principe de liberté artistique, tel qu’énoncé notamment par l’article 2 de la loi n° 2016-925 du 7 juillet 2016 relative à la liberté de la création, à l’architecture et au patrimoine.
Ce principe de renouvellement périodique de l’autorisation n’a ni pour objet ni pour effet de permettre à l’administration de se prononcer sur la qualité du travail fourni par le pétitionnaire au cours des trois années précédentes, ni de créer une » police des spectacles » mais seulement de s’assurer du respect des conditions légales d’exercice des sociétés de spectacles vivants.