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29 mars 2023
Cour d’appel de Saint-Denis de la Réunion
RG n°
20/02475
ARRÊT N°23/
SP
R.G : N° RG 20/02475 – N° Portalis DBWB-V-B7E-FPI5
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C/
S.E.L.A.R.L. PHARMACIE DE PARIS
COUR D’APPEL DE SAINT – DENIS
ARRÊT DU 29 MARS 2023
Chambre commerciale
Appel d’une décision rendue par le TJ A COMPETENCE COMMERCIALE DE SAINT DENIS en date du 18 FEVRIER 2020 suivant déclaration d’appel en date du 29 DECEMBRE 2020 RG n° 14/00008
APPELANTS :
Madame [E] [Y] [ZK]
[Adresse 3]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [R] [T] [ZK]
[Adresse 4]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [U] [NY] [T] [ZK]
[Adresse 2]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [VI] [D] [T] [ZK]
[Adresse 1]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [U] [Z] [T] [ZK]
[Adresse 7]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [S] [D] [T] [ZK]
[Adresse 8]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [WR] [T] [ZK]
[Adresse 8]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [JW] [T] [ZK]
[Adresse 18]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [T] [F] [ZK]
[Adresse 22]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [BE] [D] [F] [ZK]
[Adresse 11]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [OJ] [F] [ZK] épouse [YK] [JW] [R]
[Adresse 17]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [H] [F] [ZK]
[Adresse 6]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [W] [F] [ZK]
[Adresse 23]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [EX] [F] [ZK]
[Adresse 19]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [JW] [F] [ZK]
[Adresse 16]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [E] [F] [ZK] épouse [JK] [K]
[Adresse 11]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [TL] [F] [ZK]
[Adresse 22]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [J] [F] [ZK]
[Adresse 15]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [FU] [F] [ZK]
[Adresse 22]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [R] [F] [ZK]
[Adresse 22]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [EL] [F] [ZK]
[Adresse 22]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [BG] [O] [ZK]
[Adresse 12]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [R] [O] [ZK]
[Adresse 12]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [AU] [O] [ZK]
[Adresse 12]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [I] [O] [ZK]
[Adresse 12]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [F] [O] [ZK]
[Adresse 12]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [B] [O] [ZK]
[Adresse 12]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [E] [O] [ZK]
[Adresse 22]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [H] [O] [ZK] épouse [NM] [GF] [JW]
[Adresse 5]
[Localité 25]- AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Madame [G] [O] [ZK] épouse [NM] [R] [RG]
[Adresse 14]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
Monsieur [X] [O] [ZK]
[Adresse 10]
[Localité 21] – AFRIQUE DU SUD
Représentant : Me Laurent BENOITON, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
INTIMÉE :
S.E.L.A.R.L. PHARMACIE DE PARIS
[Adresse 13]
[Localité 20]
Représentant : Me François AVRIL, avocat au barreau de SAINT-DENIS-DE-LA-REUNION
DATE DE CLÔTURE : 31/01/2022
DÉBATS : en application des dispositions des articles 804 et 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 07 décembre 2022 devant Madame PIEDAGNEL Sophie, Conseillère, qui en a fait un rapport, assistée de Madame Nathalie BEBEAU, Greffière, les parties ne s’y étant pas opposées.
Ce magistrat a indiqué, à l’issue des débats, que l’arrêt sera prononcé, par sa mise à disposition au greffe le 29 mars 2023.
Il a été rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :
Président : Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère
Conseiller : Madame Pauline FLAUSS, Conseillère
Conseiller : Madame Magali ISSAD, Conseillère
Qui en ont délibéré
Arrêt : prononcé publiquement par sa mise à disposition des parties le 29 mars 2023.
* * *
LA COUR
Suivant acte authentique du 12 septembre 1997, les consorts [ZK] ont donné à bail commercial à M. [FI] [L] [SO] [DH] un immeuble situé à [Localité 20], à l’angle des rues [Adresse 26] et [Adresse 24], cadastré section AD n° [Cadastre 9] pour une durée de 9 années, à compter du 1er octobre 1996 pour se terminer le 30 septembre 2005 moyennant un loyer annuel de 23.000 francs HT, soit 25.185 francs TTC (TVA 9,5%).
Suivant acte d’huissier en date du 27 septembre 2005, M. [DH] a délivré à ses bailleurs une demande de renouvellement du bail commercial.
Le 27 décembre 2005, les bailleurs ont donné leur accord sur le renouvellement du bail pour une durée de 9 années à compter du 1er octobre 2005 et sollicité que le loyer soit porté à la somme de 109.764 euros HT. Aucune saisine du juge des loyers n’est intervenue.
Le 6 mai 2008, M. [DH] a cédé son fonds de commerce, en ce compris le droit au bail, à la SELARL Pharmacie de Paris, avec effet rétroactif au 1er avril 2008, moyennant le prix de 1.610.000 euros, hors frais d’acquisition et de prise de garantie ordinaire sur le fonds.
Par acte d’huissier en date du 12 juillet 2013, les consorts [ZK] ont donné congé au preneur auquel ils ont indiqué que s’il entendait se prévaloir d’un renouvellement, ils entendaient voir fixer le nouveau loyer à la somme de 109.764 euros HT, soit un loyer mensuel hors taxes et hors charges de 9.147 euros.
Par exploit du 27 novembre 2013, le conseil de la SELARL Pharmacie de Paris a accepté le principe du renouvellement du bail mais, à compter du terme du bail renouvelé, soit le 1er octobre 2014, et a refusé le nouveau montant de loyer proposé.
Le 5 février 2014, la commission départementale de conciliation en matière de baux commerciaux a constaté le désaccord des parties.
Les consorts [ZK] ont saisi le juge des loyers commerciaux près le tribunal de grande instance de Saint Denis, estimant que la demande de renouvellement du bail ayant été faite par M. [DH] et non par la SELARL Pharmacie de Paris, elle leur était inopposable, ce qui impliquait la prorogation du bail pendant 17 ans et son possible déplafonnement. Tandis que la SELARL Pharmacie de Paris a soulevé la nullité du congé et la prescription de l’action des consorts [ZK], faisant remarquer par ailleurs que M. [DH], aux droits duquel elle venait, avait formé une demande de renouvellement du bail commercial par acte extrajudiciaire du 27 septembre 2005 et que les consorts [ZK] en ayant accepté le principe sans proposer un nouveau loyer dans le délai légal, un nouveau bail commercial avait commencé à courir à compter du 30 septembre 2005 et avait pris fin le 30 septembre 2014.
Par jugement du 23 février 2016, le juge des loyers commerciaux près le tribunal de grande instance de Saint Denis a jugé le congé avec offre de renouvellement délivré par les consorts [ZK] le 12 juillet 2013 régulier et leur action non prescrite et ordonné avant dire droit une expertise confié à M. [P] [IZ].
Sur appel interjeté de la SELARL Pharmacie de Paris, par arrêt du 17 novembre 2017, la cour d’appel de Saint-Denis a confirmé le jugement en toutes ces dispositions.
La SELARL Pharmacie de Paris a formé un pourvoi en cassation, pourvoi déclaré irrecevable par arrêt en date du 28 mars 2019.
M. [XC] [CK] a été désigné en remplacement de M. [IZ] et a déposé son rapport le 17 décembre 2018.
Le rapport d’expertise a évalué la valeur locative à la date de renouvellement du bail à la somme de 5.800 euros par mois, retenant une valeur de 24 euros au /m2 déduction faite d’un abattement de 20 % eu égard aux obligations du preneur figurant au bail, appliqué à une surface pondérée de 302,10 sur les 799,58m2 loués.
Dans le cadre de leur dernier mémoire après expertise, les consorts [ZK] ont conclu à titre principal à la fixation du loyer renouvelé à compter du 1er octobre 2014 à la somme annuelle de 184.223,28 euros, soit 15.351,94 euros par mois HT et charges. Subsidiairement, ils ont sollicité l’homologation du rapport de l’expert et la fixation du loyer à la somme de 5.800 euros HT et hors charges.
La Pharmacie de Paris a soulevé la nullité du congé, la fin de non recevoir tirée de la prescription de l’action en augmentation de loyer prescrite. Au fond, elle a conclut au débouté des prétentions des consorts [ZK] et subsidiairement à la fixation du montant du bail renouvelé à la somme de 5.800,38 euros.
C’est dans ces conditions que, par jugement rendu le 18 février 2020, le juge des loyers commerciaux près le tribunal judiciaire de Saint Denis de la Réunion a :
-débouté les consorts [ZK] de leur demande en augmentation de loyer et dit que le bail sera renouvelé à compter du 1er octobre 2014 pour une durée de neuf années dans les conditions du précédent bail suivant indexation et clause d’échelle y figurant
-condamné les consorts [ZK] à payer à la SELARL Pharmacie de paris la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile
-condamné les consorts [ZK] aux entiers dépens de l’instance en ceux compris les frais de l’expertise.
Par déclaration au greffe en date du 29 décembre 2020, les consorts [ZK] ont interjeté appel de cette décision.
Dans leurs dernières conclusions transmises par voie électronique le 29 mars 2021, les consorts [ZK] demandent à la cour, au visa des articles R145-10 et suivants, L145-33 et L145-34 du code de commerce, de :
-dire son appel recevable et bien fondé
-infirmer le jugement entrepris en ce qu’il a débouté les consorts [ZK] de leur demande d’augmentation de loyer, a dit que le bail sera renouvelé à compter du 1er octobre 2014 pour une durée de neuf années, et a condamné les consorts [ZK] à des frais irrépétibles et aux dépens
Et, statuant à nouveau
A titre principal
-fixer le loyer du bail renouvelé au 1er octobre 2014 à la somme annuelle de 184.223,28 euros hors taxes et hors charges, soit la somme de 15.351,94 euros par mois
Subsidiairement
-homologuer le rapport d’expertise de M. [CK] transmis le 12 décembre 2018
-donner acte aux parties de ce que la SELARL Pharmacie de Paris a donné son accord pour voir fixer le loyer du bail renouvelé à la somme de 5.800 euros par mois, telle que retenue par l’expert
-fixer le loyer du bail renouvelé au 1er octobre 2014 à la somme annuelle de 69.600 euros hors taxes et hors charges, soit la somme de 5.800 euros par mois
En tout état de cause
(condamner la SELARL Pharmacie de Paris à payer aux consorts [ZK] la somme de 3.000 euros au titre des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile, ainsi qu’aux entiers dépens y compris les frais d’expertise.
Dans ses dernières conclusions transmises par voie électronique le 22 juin 2021, la SELARL Pharmacie de Paris demande à la cour de :
-voir confirmer en toutes ses dispositions le jugement frappé d’appel
-voir condamner les appelants à verser la somme de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile et aux entiers dépens.
Conformément aux dispositions de l’article 455 du code de procédure civile, il est fait expressément référence aux conclusions des parties, visées ci-dessus, pour l’exposé de leurs prétentions et moyens.
L’ordonnance de clôture est intervenue le 31 janvier 2022 et l’affaire a reçu fixation pour être plaidée à l’audience rapporteur du 4 mai 2022, reportée au 5 octobre 2022 puis au 07 décembre 2022. Le prononcé de l’arrêt, par mise à disposition du greffe, a été fixé au 29 mars 2023.
SUR CE, LA COUR
A titre liminaire
Il en ressort des dispositions de l’article 954 du code de procédure civile que :
-la cour ne doit statuer que sur les prétentions énoncées au dispositif. Ne constituent pas des prétentions au sens de l’article 4 du code de procédure civile les demandes des parties tendant à voir ‘constater’ ou ‘donner acte’ ou encore ‘considérer que’ voire ‘dire et juger que’ et la cour n’a dès lors pas à y répondre
-la cour n’a à statuer que sur les prétentions des parties récapitulées au dispositif de leurs écritures.
Sur la fixation du loyer renouvelé
Les consorts [ZK] soutiennent en substance que :
-les locaux pris à bail sont situés dans un emplacement exceptionnel qui bénéficie d’une visibilité importante et qui a l’avantage de se situer dans le bas de la ville de [Localité 20], secteur qui a connu et qui connaît encore un fort développement ces dernières années
-l’expert n’a pas pris en compte que le preneur pouvait sous-louer les locaux annexes, tels que les bureaux et de nombreuses autres surfaces qui ne lui servent pas directement
-il convient d’appliquer la valeur locative retenue à la surface totale des locaux, soit 799,58m² et non 302,103 m² pondérés.
Les consorts [ZK] versent aux débats, outre le congé avec offre de renouvellement du 12 juillet 2013, le jugement dont appel, l’arrêt de la cour du 17 novembre 2017 et les mémoires des 5 mars 2014 et 14 octobre 2019 :
-le procès-verbal de non-conciliation de la commission départementale de conciliation du 5 février 2014 qui contient l’avis de ladite commission qui relève que le bien loué se compose de trois locaux différents : l’un (le plus important) à situé au rez-de-chaussée de 488 m² pour un loyer qu’elle estime à 7.076 euros par mois, soit 14,5 euros /m², l’autre situé à l’étage de 179 m² pour un loyer qu’elle estime à 1.611 euros par mois, soit 9 euros/m² et un troisième constitué d’une cave de 131 m² pour un loyer qu’elle estime à 520 euros par mois, soit 4 euros/m²
-le rapport d’expertise définitif
-un procès-verbal de constat du 11 juin 2018 établi à la demande des consorts [ZK] dans le but d’établir que la locataire occupe les lieux et sous-loue une partie des locaux objet du bail à des professionnels de santé : est fixé sur une face d’un poteau du bâtiment donnant sur la [Adresse 24] une plaque professionnelle indiquant « [N] [V] Dr en Pharmacie » ; est installée une plaque professionnelle indiquant « Docteur [C] [UI] MALADIE ALLERGIQUES ASTHME » en longeant la façade du bâtiment côté [Adresse 26] devant un premier local ; est installée une plaque professionnelle indiquant « [A] [M] MASSEUR-KINESITHERAPEUTE » en façade côté [Adresse 26] devant un deuxième local ; est présente une plaque professionnelle faisant mention du Docteur [XN] [TA] à l’entrée d’un troisième local toujours en façade du bâtiment côté [Adresse 26].
La SELARL Pharmacie de Paris fait valoir pour l’essentiel que s’agissant d’un bail, renouvelé pour une durée de 9 ans, à compter du 1er octobre 2005 et en l’absence de reconduction tacite, le déplafonnement ne peut être obtenu et le loyer fixé sur la base de la valeur locative réelle à la date de renouvellement que si le bailleur démontre qu’il y a eu une modification notable des quatre premiers critères de détermination de la valeur locative définie à l’article L145-33 du même code, le critère des prix couramment pratiqués dans le voisinage étant exclu. Elle estime qu’en cause d’appel les bailleurs n’apportent aucun élément et plus exactement aucune pièce complémentaire de nature à considérer qu’un déplafonnement serait possible et n’allèguent pas plus qu’en première instance l’existence de modification des facteurs locaux de commercialité sur la période de 2005 à septembre 2014, le rapport d’expertise n’apportant aucun élément probant à ce titre.
La SELARL Pharmacie de Paris verse aux débats le contrat de location, l’acte de cession de fonds de commerce en ce compris le droit au bail, l’acte extrajudiciaire du 27 septembre 2005, la notification de la réponse du bailleur du 27 décembre 2005 et l’attestation de l’huissier de justice confirmant qu’il a bien délivré copie de la demande de nouvellement du bail commercial le 27 septembre 2005.
Sur quoi,
A titre liminaire,
Par arrêt du 17 novembre 2017, la cour d’appel de Saint-Denis a confirmé le jugement en toutes ces dispositions estimant que le bail avait été renouvelé jusqu’au 1er octobre 2014 de sorte que les consorts [ZK] ne pouvaient délivrer congé à une date antérieure mais que la SELARL Pharmacie de Paris avait déclaré accepter le principe du renouvellement au 30 septembre 2014, de sorte qu’il ne restait qu’à déterminer le montant du loyer.
La SELARL Pharmacie de Paris a formé un pourvoi en cassation, pourvoi déclaré irrecevable par arrêt en date du 28 mars 2019.
Il s’en déduit que ne sont plus discutés à hauteur de cour, ni la régularité du congé délivré par les bailleurs, ni la fin de non recevoir tirée de la prescription de l’action en fixation de loyer.
Pour rappel,
Conformément aux dispositions des articles L145-9 et suivant du code de commerce, par dérogation aux articles 1736 et 1737 du code civil, les baux de locaux commerciaux ne cessent que par l’effet d’un congé donné six mois à l’avance ou d’une demande de renouvellement. A défaut de congé ou de demande de renouvellement, le bail fait par écrit se prolonge tacitement au-delà du terme fixé par le contrat.
L’article L145-38 alinéa 3 instaure le plafonnement du loyer révisé :
« Par dérogation aux dispositions de l’article L145-33, et à moins que ne soit rapportée la preuve d’une modification matérielle des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative, la majoration ou la diminution de loyer consécutive à une révision triennale ne peut excéder la variation de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l’article L112-2 du code monétaire et financier, intervenue depuis la dernière fixation amiable ou judiciaire du loyer. Dans le cas où cette preuve est rapportée, la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente. »
Ainsi, si la preuve n’est pas rapportée d’une modification des facteurs locaux de commercialité ayant entraîné par elle-même une variation de plus de 10 % de la valeur locative, la majoration ou la diminution du loyer ne peut excéder la variation de l’indice.
Aux termes de l’article L145-34 (modifié par la loi n°2014-626 du 18 juin 2014, applicables aux contrats conclus ou renouvelés à compter du 1er septembre 2014 conformément au 21 II de ladite loi)
« A moins d’une modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L145-33, le taux de variation du loyer applicable lors de la prise d’effet du bail à renouveler, si sa durée n’est pas supérieure à neuf ans, ne peut excéder la variation, intervenue depuis la fixation initiale du loyer du bail expiré, de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires mentionnés aux premier et deuxième alinéas de l’article L112-2 du code monétaire et financier, publiés par l’Institut national de la statistique et des études économiques. A défaut de clause contractuelle fixant le trimestre de référence de cet indice, il y a lieu de prendre en compte la variation de l’indice trimestriel des loyers commerciaux ou de l’indice trimestriel des loyers des activités tertiaires, calculée sur la période de neuf ans antérieure au dernier indice publié.
En cas de renouvellement postérieur à la date initialement prévue d’expiration du bail, cette variation est calculée à partir du dernier indice publié, pour une période d’une durée égale à celle qui s’est écoulée entre la date initiale du bail et la date de son renouvellement effectif.
Les dispositions de l’alinéa ci-dessus ne sont plus applicables lorsque, par l’effet d’une tacite prolongation, la durée du bail excède douze ans.
En cas de modification notable des éléments mentionnés aux 1° à 4° de l’article L145-33 ou s’il est fait exception aux règles de plafonnement par suite d’une clause du contrat relative à la durée du bail, la variation de loyer qui en découle ne peut conduire à des augmentations supérieures, pour une année, à 10 % du loyer acquitté au cours de l’année précédente.
Ainsi, le mécanisme du plafonnement du loyer instauré par l’article L145-38 du code de commerce est écarté dans plusieurs situations qui permettent au juge de fixer le loyer du bail renouvelé exclusivement en fonction de la valeur locative sans avoir à tenir compte du prix plafond :
-soit en raison de la durée du bail expiré
.lorsque la durée contractuellement prévue au bail à renouveler était supérieure à 9 ans, que le renouvellement intervienne effectivement à la date d’expiration envisagée à l’origine ou que ce renouvellement intervienne plus tard après une période de tacite reconduction
.lorsque le bail à renouveler avait une durée contractuelle prévue de 9 ans mais que, par suite d’une tacite reconduction, cette durée a été supérieure à 12 ans
.lorsque le nouveau bail est conclu pour une durée supérieure à 9 ans. En ce cas, le déplafonnement se justifie par la nécessité d’obtenir l’accord des parties pour une durée supérieure à la durée légale de 9 ans et, le cas échéant, si le bail expiré avait une durée contractuelle de 9 ans, par une modification notable d’un des éléments de la valeur locative.
-soit en raison d’une modification notable de l’un des éléments d’appréciation de la valeur locative définis aux articles R145-3 à R145-6 et R145-8 du code de commerce (donc ne sont pas pris en compte les prix couramment pratiqués dans le voisinage)
-soit en raison de la nature même de l’objet du bail qui implique le recours à des méthodes particulières pour la fixation du prix :
.terrain loué nu (article R145-9),
.locaux monovalents (article R145-10)
.locaux à usage exclusif de bureaux (article R145-11)
En l’espèce, il convient de relever qu’il n’est plus contesté que le bail renouvelé a pris effet au 1er octobre 2014, soit dans la limite des neuf années prévues au contrat de bail initial, et que, dans ces conditions, seule une modification notable de l’un des éléments d’appréciation de la valeur locative définis aux articles R145-3 à R145-6 et R145-8 du code de commerce peut permettre aux parties de faire échec à la règle du plafonnement du loyer.
Aux termes de l’article L145-33
« Le montant des loyers des baux renouvelés ou révisés doit correspondre à la valeur locative.
A défaut d’accord, cette valeur est déterminée d’après :
1 Les caractéristiques du local considéré ;
2 La destination des lieux ;
3 Les obligations respectives des parties ;
4 Les facteurs locaux de commercialité ;
5 Les prix couramment pratiqués dans le voisinage ;
Un décret en Conseil d’État précise la consistance de ces éléments. »
Conformément aux dispositions de l’article R145-2 du code de commerce, les éléments mentionnés aux 1° à 5° de l’article L145-33, à savoir les caractéristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des parties, les facteurs locaux de commercialité et les prix couramment pratiqués dans le voisinage, s’apprécient dans les conditions fixées par les articles R145-3 à R145-11.
Selon l’article R145-3 du code de commerce :
« Les caractéristiques propres au local s’apprécient en considération :
1° De sa situation dans l’immeuble où il se trouve, de sa surface et de son volume, de la commodité de son accès pour le public ;
2° De l’importance des surfaces respectivement affectées à la réception du public, à l’exploitation ou à chacune des activités diverses qui sont exercées dans les lieux ;
3° De ses dimensions, de la conformation de chaque partie et de son adaptation à la forme d’activité qui y est exercée ;
4° De l’état d’entretien, de vétusté ou de salubrité et de la conformité aux normes exigées par la législation du travail ;
5° De la nature et de l’état des équipements et des moyens d’exploitation mis à la disposition du locataire. »
L’article R145-4 alinéa 1er précise que « Les caractéristiques propres au local peuvent être affectées par des éléments extrinsèques constitués par des locaux accessoires, des locaux annexes ou des dépendances, donnés en location par le même bailleur et susceptibles d’une utilisation conjointe avec les locaux principaux. »
Les facteurs locaux de commercialité dépendent principalement de l’intérêt que présente, pour le commerce considéré, l’importance de la ville, du quartier ou de la rue où il est situé, du lieu de son implantation, de la répartition des diverses activités dans le voisinage, des moyens de transport, de l’attrait particulier ou des sujétions que peut présenter l’emplacement pour l’activité considérée et des modifications que ces éléments subissent d’une manière durable ou provisoire (article R145-6)
En vertu de l’article R145-8 :
« Du point de vue des obligations respectives des parties, les restrictions à la jouissance des lieux et les obligations incombant normalement au bailleur dont celui-ci se serait déchargé sur le locataire sans contrepartie constituent un facteur de diminution de la valeur locative. Il en est de même des obligations imposées au locataire au-delà de celles qui découlent de la loi ou des usages. Les améliorations apportées aux lieux loués au cours du bail à renouveler ne sont prises en considération que si, directement ou indirectement, notamment par l’acceptation d’un loyer réduit, le bailleur en a assumé la charge.
Les obligations découlant de la loi et génératrices de charges pour l’une ou l’autre partie depuis la dernière fixation du prix peuvent être invoquées par celui qui est tenu de les assumer.
Il est aussi tenu compte des modalités selon lesquelles le prix antérieurement applicable a été originairement fixé. »
En l’espèce, c’est à bon droit que le juge des loyers commerciaux a jugé que, s’agissant d’un bail renouvelé pour une durée de 9 ans, à compter du 1er octobre 2005 et en l’absence de reconduction tacite, le déplafonnement ne pouvait être obtenu et le loyer fixé sur la base de la valeur locative réelle à la date de renouvellement que si le bailleur démontrait qu’il y avait eu une modification notable des quatre premiers critères de détermination de la valeur locative définie à l’article L145-33 du même code, le critère des prix couramment pratiqués dans le voisinage étant exclu.
Il s’en suit que toute considération concernant les prix couramment pratiqués dans le voisinage sont inopérants.
En l’espèce, les consorts [ZK] n’établissent, ni même n’allèguent, une quelconque modification des éléments constitutifs de la valeur locative énumérés à l’article L145-33 1° à 4°, que ce soit les caractéristiques du local considéré, la destination des lieux, les obligations respectives des parties ou encore les facteurs locaux de commercialité.
Il résulte de ce qui précède que c’est à juste titre que le juge des loyers commerciaux a débouté les consorts [ZK] de leur demande tendant à voir le bail renouvelé à un loyer supérieur à celui découlant du bail en cours, faute d’apporter la démonstration d’un déplafonnement possible.
Le jugement sera par conséquent confirmé en ce qu’il a débouté les consorts [ZK] de leur demande en augmentation de loyer et dit que le bail sera renouvelé à compter du 1er octobre 2014 pour une durée de neuf années dans les conditions du précédent bail suivant indexation et clause d’échelle y figurant.
Sur les dépens et les frais irrépétibles
Les consorts [ZK] succombant, il convient de :
-les condamner aux dépens d’appel
-les débouter de leur demande au titre des frais irrépétibles pour la procédure d’appel
-confirmer le jugement en ce qu’il les ont condamnés aux dépens de première instance en ce compris les frais de l’expertise
-confirmer le jugement en ce qu’il les ont déboutée de leur demande au titre des frais irrépétibles pour la procédure de première instance.
L’équité commandant de faire application des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile en faveur de la SELARL Pharmacie de Paris, il convient de lui accorder de ce chef la somme de 3.000 euros pour la procédure d’appel et de confirmer le jugement en ce qu’il lui a alloué à ce titre la somme de 3.000 euros.
PAR CES MOTIFS
La Cour, statuant publiquement, par arrêt contradictoire rendu en dernier ressort, en matière commerciale, par mise à disposition au greffe conformément à l’article 451 alinéa 2 du code de procédure civile ;
CONFIRME en toutes ses dispositions le jugement rendu le 18 février 2020 par le juge des loyers commerciaux près le judiciaire de Saint Denis de la Réunion;
Y ajoutant
DEBOUTE les consorts [ZK] de leur demande au titre des frais irrépétibles ;
LES CONDAMNE à payer à la SELARL Pharmacie de Paris la somme de 3.000 euros sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile ;
LES CONDAMNE aux dépens d’appel.
Le présent arrêt a été signé par Madame Sophie PIEDAGNEL, Conseillère, et par Madame Nathalie BEBEAU, Greffière à laquelle la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.
LA GREFFIÈRE LA PRÉSIDENTE