20 mars 2018
Cour de cassation
Pourvoi n°
17-81.358
N° J 17-81.358 F-D
N° 296
ND
20 MARS 2018
CASSATION PARTIELLE
M. PERS conseiller doyen faisant fonction de président,
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
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AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
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LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE CRIMINELLE, en son audience publique tenue au Palais de Justice à PARIS, a rendu l’arrêt suivant :
Statuant sur les pourvois formés par :
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M. Bruno Y…,
La société Mycoceutics,
contre l’arrêt de la cour d’appel de REIMS, chambre correctionnelle, en date du 17 janvier 2017, qui, dans la procédure suivie contre eux du chef notamment d’exercice illégal de la pharmacie, les a condamnés respectivement à 25 000 et 5 000 euros d’amende, et a prononcé sur les intérêts civils ;
La COUR, statuant après débats en l’audience publique du 30 janvier 2018 où étaient présents dans la formation prévue à l’article 567-1-1 du code de procédure pénale : M. Pers, conseiller doyen faisant fonction de président en remplacement du président empêché, Mme Harel-Dutirou, conseiller rapporteur, Mme Dreifuss-Netter, conseiller de la chambre ;
Greffier de chambre : Mme Zita ;
Sur le rapport de Mme le conseiller référendaire HAREL-DUTIROU, les observations de la société civile professionnelle WAQUET, FARGE et HAZAN, de la société civile professionnelle CÉLICE, SOLTNER, TEXIDOR et PÉRIER, avocats en la Cour, et les conclusions de M. le premier avocat général CORDIER ;
Joignant les pourvois en raison de la connexité ;
Vu le mémoire commun aux demandeurs, et le mémoire en défense produits ;
Attendu qu’il résulte de l’arrêt attaqué et des pièces de procédure que, à la suite de signalements faits par la caisse primaire d’assurance maladie de la Marne et l’agence régionale de la santé de Champagne-Ardennes, une enquête a été diligentée sur les activités de M. Bruno Y…, gastro-entérologue, gérant de la société Mycoceutics qui proposait à la vente, via son site internet, des produits sous le statut de compléments alimentaires, auxquels étaient prêtés des vertus thérapeutiques ; qu’au cours de l’enquête, des perquisitions ont été effectuées sur ordonnances du juge des libertés et de la détention, la perquisition au domicile du prévenu permettant notamment la découverte d’un laboratoire de fabrication et de conditionnement de produits, de nombreux champignons ainsi que des fascicules exposant les propriétés thérapeutiques de ces derniers ; qu’une réquisition a été faite à l’Agence nationale de sécurité du médicament ; que M. Y… et la société Mycoceutics ont été poursuivis pour exercice illégal de la pharmacie ; que le tribunal, après avoir rejeté les exceptions de nullité soulevées, les a déclarés coupables de ces faits ; qu’appel a été interjeté ;
En cet état :
Sur le premier moyen de cassation, pris de la violation des articles 8 de la Convention européenne des droits de l’homme, 76, 591 à 593 du code de procédure pénale, droit au respect de la vie privée, droit à un procès équitable, défaut de motifs, manque de base légale ;
« en ce que l’arrêt attaqué a rejeté l’exception de nullité fondée sur la violation du quatrième alinéa de l’article 76 du code de procédure pénale ;
« aux motifs que d’une part, les trois ordonnances contiennent les infractions dont la preuve est recherchée puisqu’elles précisent l’escroquerie, l’exercice illégal de la profession de pharmacien et la commercialisation de médicaments sans autorisation de mise sur le marché et d’autre part, elles indiquent que la perquisition au […] « peut permettre de recueillir des éléments quant à la production, la fabrication, les méthodes de vente et la dangerosité des produits commercialisés, ainsi que fournir un éclairage sur le rôle exact de M. Bruno Y… » de même « qu’une perquisition au domicile de Mme G… susceptible d’héberger » ce dernier, ainsi « qu’un tel acte au sein d’un établissement de la SARL M.I.F. situé au […] » ; que pour autoriser, ces trois perquisitions, le juge des libertés et de la détention s’est référé à une synthèse partielle de la procédure 2012/72 diligentée par le Service Régional de Police Judiciaire (SRPJ) de Reims, comportant plus de six pages et récapitulant les investigations déjà réalisées, laquelle permettait de décider en connaissance de cause ; que les premiers juges doivent donc être approuvés d’avoir rejeté cette exception de nullité ;
« alors qu’au regard du droit au respect de la vie privée et familiale, du domicile et de la correspondance, de l’évolution législative du statut et du rôle juridictionnel du juge des libertés et de la détention et de la nécessité de permettre au justiciable de connaître les raisons précises d’une décision portant atteinte à ses droits fondamentaux, l’ordonnance du juge des libertés et de la détention qui autorise des perquisitions sans l’assentiment de la personne chez qui elles ont lieu, doit être motivée au regard des éléments de fait et de droit justifiant de leur nécessité ; que l’ordonnance qui se borne, en guise de justification, à se référer à un rapport de police annexé, n’est pas conforme à cette exigence de motivation ; qu’en l’espèce, pour rejeter l’exception de nullité des ordonnances autorisant les perquisitions au domicile et cabinet de M. Y… et au domicile de Mmes G… et B…, la cour d’appel a énoncé que celles-ci se référaient à la synthèse de la procédure diligentée par le SRPJ de Reims, longue de six pages et récapitulant les investigations réalisées ; qu’en se prononçant ainsi, alors qu’il en résulte qu’elles ne contiennent pas de motivation propre justifiant de la nécessité des mesures, la cour d’appel a méconnu les textes susvisés » ;