13 février 2019
Cour de cassation
Pourvoi n°
17-28.854
SOC.
JT
COUR DE CASSATION
______________________
Audience publique du 13 février 2019
Rejet non spécialement motivé
M. HUGLO, conseiller doyen
faisant fonction de président
Décision n° 10184 F
Pourvoi n° Q 17-28.854
R É P U B L I Q U E F R A N Ç A I S E
_________________________
AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS
_________________________
LA COUR DE CASSATION, CHAMBRE SOCIALE, a rendu la décision suivante :
Vu le pourvoi formé par Mme Y… D…, domiciliée […] ,
contre l’arrêt rendu le 28 septembre 2017 par la cour d’appel de Paris (pôle 6, chambre 7), dans le litige l’opposant à la société P… O… , société à responsabilité limitée, dont le siège est […] ,
défenderesse à la cassation ;
Vu la communication faite au procureur général ;
LA COUR, en l’audience publique du 16 janvier 2019, où étaient présents : M. Huglo, conseiller doyen faisant fonction de président, Mme Basset, conseiller rapporteur, M. Rinuy, conseiller, Mme Piquot, greffier de chambre ;
Vu les observations écrites de la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat de Mme D…, de la SCP Gatineau et Fattaccini, avocat de la société P… O… ;
Sur le rapport de Mme Basset, conseiller, et après en avoir délibéré conformément à la loi ;
Vu l’article 1014 du code de procédure civile ;
Attendu que les moyens de cassation annexés, qui sont invoqués à l’encontre de la décision attaquée, ne sont manifestement pas de nature à entraîner la cassation ;
Qu’il n’y a donc pas lieu de statuer par une décision spécialement motivée ;
REJETTE le pourvoi ;
Condamne Mme D… aux dépens ;
Vu l’article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi décidé par la Cour de cassation, chambre sociale, et prononcé par le président en son audience publique du treize février deux mille dix-neuf.
MOYENS ANNEXES à la présente décision
Moyens produits par la SCP Lyon-Caen et Thiriez, avocat aux Conseils, pour Mme D…
PREMIER MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Mme D… de sa demande en paiement de dommages et intérêts au titre du harcèlement moral ;
AUX MOTIFS PROPRES QU’ aux termes de l’article L. 1152-1 du code du travail, aucun salarié ne doit subir les agissements répétés de harcèlement moral qui ont pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de travail susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité, d’altérer sa santé physique ou mentale ou de compromettre son avenir professionnel ; que l’article L. 1154-1 du même code prévoit qu’en cas de litige, le salarié concerné établit des faits qui permettent de présumer l’existence d’un harcèlement et il incombe alors à l’employeur, au vu de ces éléments, de prouver que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et que sa décision est justifiée par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu’en l’espèce, Mme Y… D… soutient qu’à partir de septembre 2011, date où la cession était déjà conclue entre Madame J… (ancien employeur et cédant) et la F… (nouvel employeur et cessionnaire), elle a dans un premier temps été invitée à trouver un autre travail par son ancien employeur au motif que le repreneur avait indiqué ne pas souhaiter la reprendre, puis dans un second temps, a subi des contraintes professionnelles jusque-là inconnues de la part de son nouvel employeur générant un stress important ; qu’elle invoque ainsi, notamment : – des agressions verbales de M. O…, mari de la gérante, pourtant dépourvu de fonction dans l’officine, – l’ironie et les mises en cause injustifiées de la part de Mme Florence O…, – une mise sous surveillance permanente, – l’utilisation de son poste de travail en débarras puis en dépotoir, – la privation de travail les journées des 27 avril, 11 mai, 19 juin et 22 juin 2012, – la mise en place de conditions de travail pénibles et contraires à son état de santé par l’affectation d’un tabouret et de tâches répétitives ou imposant une station debout alors qu’elle est reconnue travailleur handicapé par la MDPH avec la mention station débout pénible depuis le 5 février 2009 et est classée en invalidité 1ère catégorie par la caisse primaire d’assurance maladie depuis le 10 août 2004 ; que pour étayer ses affirmations, Mme Y… D… produit : – des tableaux descriptifs dans lesquels elle a consigné jour par jour les événements survenus au sein de l’officine, – des photographies, – des arrêts de travail sur la période du 2/03/2012 au 21/03/2012, du 22/05/2012 au 31/05/2102, du 27/06/2012 au 20/08/2012, – un certificat médical du docteur Thierry E… daté du 18/04/2012, – un certificat médical du centre hospitalier de […] daté du 22/05/2012, – des attestations de clients de la pharmacie à savoir M. A… et Mmes S…, R…, L… , Q…, M… ; que la F… conteste les faits invoqués par Mme Y… D… et la force probante des pièces produites ; que cela étant, les « tableaux descriptifs » produits par Mme Y… D… sont entièrement rédigés de la main de cette dernière et ne contiennent que ses propres affirmations ; qu’aucun des témoignages versés par la salariée ne décrit de faits matériels imputables à Mme Florence O… et à son mari à l’encontre de Mme Y… D… ; qu’en effet, seules Mmes Y… S… et U… L… évoquent les relations entre Mme Y… D… et son employeur, mais à partir des seules confidences de la salariée, en l’absence de tout constat personnel du témoin, en ce qui concerne la première (« Elle m’apparaissait comme triste et très fatiguée. Je me suis donc permise de lui demander si elle avait des soucis, ce qui l’a amenée à me confier ses problèmes avec ses nouveaux patrons ») et selon un ressenti personnel détaché de la description de faits objectifs en ce qui concerne la seconde (« Elle était triste et même si elle m’a expliqué les soucis qu’elle avait avec ses parents, j’ai très vite compris qu’il y avait autre chose. J’ai très bien senti les fortes tensions. J’en étais très mal à l’aise. Je suis repassée à la boutique quelques jours plus tard et elle était toujours côté boutique. Je me souviens avoir pensé Bizarre. Bizarre ») ; que certes, M. Jacky A…, Mmes Danielle R…, Y… S…, Véronique Q…, et Frédérique L… indiquent que Mme Y… D… travaillait debout ou était debout toute la journée ; mais, Mme Y… D… ne rapporte aucune preuve d’avoir informé ses employeurs de son statut de travailleur handicapé avec mention debout pénible qui lui a été notifié le 5 février 2009 alors que la F… produit la réponse de Mme Isabelle J…, cédante du fond de commerce, qui, à sa question sur le statut de Mme Y… D…, lui indique n’avoir jamais été informée de la situation de handicap de son ancienne salariée ; que les commentaires portés par Mme Y… D… au dos des photographies d’un bureau, d’un écran de vidéo surveillance au dessus d’un four à micro-ondes, d’un pan de travail et d’une paire de ciseaux ne sauraient caractériser une dégradation des conditions de travail au delà de l’interprétation subjective de leur auteur ; qu’ainsi, à titre d’exemple, l’écran au dessus du four à micro ondes est divisé en plusieurs vignettes, ce qui implique qu’il surveille l’ensemble de la pharmacie et peut, dès lors, avoir pour but de prévenir les vols ou autre comportement malveillant de clients ; qu’aucune autre pièce de la procédure ne démontre un détournement de ce système de surveillance au préjudice de Mme Y… D… ; que le docteur E… ne reprend que les doléances de Mme Y… D… lorsqu’il relie l’état de santé de la patiente à ses conditions de travail avec la formule d’usage en la matière assortie de guillemets (« Pour état de stress et d’angoisses lié selon ses dires .aux mauvaises conditions d’exercice professionnel. ») ; que le certificat du 22 mai 2012 de l’hôpital de […] est purement descriptif et ne se prononce pas sur un éventuel lien de causalité entre l’état de santé de Mme Y… D… et son malaise vagal (« a été victime ce jour d’un malaise vagal typique sur son lieu de travail, survenant dans un contexte de stress aigu ») ; qu’au surplus, la F… produit une lettre de la CPAM de la Seine-et-Marne lui notifiant son refus de reconnaître le caractère professionnel de l’accident déclaré le 22 mai 2012 par Mme Y… D… ; qu’ainsi, en l’état des explications et des pièces fournies, la matérialité d’éléments de fait précis et concordants qui, pris dans leur ensemble, laissent supposer l’existence d’un harcèlement moral n’est pas démontrée ; que le jugement entrepris sera confirmé en ce qu’il a débouté Mme Y… D… de sa demande en dommages-intérêts pour harcèlement moral ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE les faits relatés par Mme D… sur son harcèlement moral se passent lorsqu’elle était employée chez Mme J…, son précédent employeur ; que Mme D… est reconnue en date du 7 avril 2009 par la maison départementale des personnes handicapées de Seine et Marne (MDPH) handicapée avec un taux d’incapacité compris entre 50 et 80 % ; que Mme D… soutient dans ses conclusions que le harcèlement moral de son employeur a altéré sa santé, et que le centre hospitalier de […] ainsi que son médecin traitant le docteur E… en avril 2012 a diagnostiqué un syndrome dépressif invalidant ; qu’en l’espèce si harcèlement moral il y a eu, ce n’est pas durant la période comprise entre le 27 février 2012 et le 18 juillet 2012 date de son licenciement, où Mme D… a eu une longue période d’absence maladie de fin mai à août 2012 ; qu’en conséquence le conseil dit que le harcèlement moral de Mme D… n’est en aucun cas imputable à Mme O…, et rejette la demande de préjudice subi par le harcèlement moral ;
1°) ALORS QU’ il appartient aux juges du fond de se prononcer sur chaque fait allégué par le salarié et de rechercher si ces faits, pris dans leur ensemble, ne permettent pas de présumer l’existence d’un harcèlement moral et dans l’affirmative, de rechercher si l’employeur prouve que ces agissements ne sont pas constitutifs d’un tel harcèlement et étaient justifiés par des éléments objectifs étrangers à tout harcèlement ; qu’en énonçant, pour écarter le harcèlement moral, que les tableaux descriptifs produits par Mme D… étaient entièrement rédigés de sa main et ne contenaient que ses propres affirmations, qu’aucun des témoignages versés par la salariée ne décrivait de faits matériels imputables à Mme O… et à son mari à l’encontre de Mme D…, que si plusieurs témoins indiquaient que Mme D… travaillait debout ou était debout toute la journée, cette dernière ne rapportait aucune preuve d’avoir informé ses employeurs de son statut de travailleur handicapé avec mention debout pénible qui lui avait été notifié le 5 février 2009, que les commentaires portés par la salariée au dos des photographies qu’elle produisait ne sauraient caractériser une dégradation des conditions de travail au delà de l’interprétation subjective de leur auteur, que le docteur E… ne reprenait que les doléances de la salariée lorsqu’il reliait l’état de santé de la patiente à ses conditions de travail et que le certificat du 22 mai 2012 de l’hôpital de […] était purement descriptif et ne se prononçait pas sur un éventuel lien de causalité entre l’état de santé de l’exposante et son malaise vagal, la cour d’appel, qui a ainsi procédé à une appréciation séparée des éléments invoqués par la salariée, alors qu’il lui appartenait de dire si, pris dans leur ensemble, ces éléments laissaient présumer l’existence d’un harcèlement moral, et dans l’affirmative, d’apprécier les éléments de preuve fournis par l’employeur pour démontrer que les mesures en cause étaient étrangères à tout harcèlement moral, a violé les articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail ;
2°) ALORS QUE le principe selon lequel nul ne peut se constituer de preuve à soi-même est inapplicable à la preuve des faits juridiques ; qu’en l’espèce où la salariée pouvait apporter librement la preuve des pressions exercées sur elle, la cour d’appel en énonçant, pour écarter le harcèlement moral, que les « tableaux descriptifs » produits par Mme D… étaient entièrement rédigés de la main de cette dernière et ne contenaient que ses propres affirmations, a violé les articles 1315 et 1353 du code civil, dans leur rédaction antérieure à celle issue de l’ordonnance n° 2016-131 du 10 février 2016, applicable en la cause ;
3°) ALORS QUE le salarié n’a pas à démontrer le lien entre le harcèlement et la dégradation de son état de santé ; que la cour d’appel qui, pour écarter le harcèlement moral, a énoncé que le docteur E… ne reprenait que les doléances de la salariée lorsqu’il reliait l’état de santé de la patiente à ses conditions de travail et que le certificat du 22 mai 2012 de l’hôpital de […] était purement descriptif et ne se prononçait pas sur un éventuel lien de causalité entre l’état de santé de l’exposante et son malaise vagal, a ainsi imposé à Mme D… d’établir le lien entre sa santé et les agissements de harcèlement moral en violation des articles L. 1152-1 et L. 1154-1 du code du travail.
DEUXIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Mme D… de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour violation par l’employeur de son obligation de prévention du harcèlement moral ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE le rejet de Mme Y… D… en ses demandes relatives au harcèlement moral prive de fondement sa demande en dommages-intérêts pour violation par l’employeur de son obligation de prévention du harcèlement moral présentée sur le fondement de l’article L. 1152-4 du code du travail ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur l’obligation de prévention du harcèlement moral, en l’espèce le conseil ne reconnait pas le harcèlement moral subi par Mme D… de la part de son employeur Mme O… ; qu’en conséquence, le conseil rejette cette demande ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen entraînera nécessairement par voie de conséquence l’annulation de l’arrêt attaqué en ce qu’il a débouté Mme D… de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour violation par l’employeur de son obligation de prévention du harcèlement moral, par application de l’article 625, alinéa 2, du code de procédure civile.
TROISIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Mme D… de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour violation par l’employeur de son obligation de sécurité ;
AUX MOTIFS PROPRES QUE sur l’obligation de sécurité de l’employeur, Mme Y… D… rappelle que l’employeur doit assurer la sécurité du personnel, que la jurisprudence de la chambre sociale de la cour de cassation lui impose de garantir l’effectivité de cette obligation et enfin, que le salarié dont l’affection n’est pas reconnue maladie professionnelle ou accident du travail peut agir à rencontre de son employeur selon les règles du droit commun ; qu’elle fait alors valoir qu’à la suite du malaise survenu le 22 mai 2012 sur le lieu du travail, une déclaration d’accident du travail a été adressée à la caisse primaire d’assurance maladie qui a notifié un refus de prise en charge et que la compétence du juge prud’homal n’est donc pas contestable ; que le malaise d’un salarié, au surplus non reconnu comme accident ou maladie professionnelle, ne peut caractériser la violation par l’employeur de son obligation de sécurité de résultat au seul motif qu’il est survenu sur le lieu de travail ; que le jugement entrepris sera également confirmé en ce qu’il a rejeté la demande de Mme Y… D… à ce titre ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur l’obligation de sécurité, en l’espèce le conseil ne reconnait pas le harcèlement moral subi par Mme D… de la part de son employeur Mme O… ; qu’en conséquence cette demande ne peut prospérer ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen entraînera nécessairement par voie de conséquence l’annulation de l’arrêt attaqué en ce qu’il a débouté Mme D… de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour violation par l’employeur de son obligation de sécurité, par application de l’article 625, alinéa 2, du code de procédure civile.
QUATRIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt attaqué d’AVOIR débouté Mme D… de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour violation par l’employeur de son obligation de loyauté dans l’exécution du contrat de travail ;
AUX MOTIFS QUE Mme Y… D… n’évoque aucun élément factuel, autres que ceux examinés dans le cadre des demandes relatives au harcèlement, qui caractériserait une déloyauté de la F… dans l’exécution du contrat de travail à son égard ; qu’elle devra donc être également déboutée de cette demande, et le jugement confirmé en ce sens ;
ET AUX MOTIFS ADOPTES QUE sur l’exécution déloyale du contrat de travail, en l’espèce, Mme D…, en l’absence de harcèlement moral, ne démontre nullement que Mme O… a exécuté de manière déloyale le contrat de travail qui liait les deux parties ; qu’en conséquence, cette demande ne peut prospérer ;
ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen entraînera nécessairement par voie de conséquence l’annulation de l’arrêt attaqué en ce qu’il a débouté Mme D… de sa demande en paiement de dommages et intérêts pour violation par l’employeur de son obligation de loyauté dans l’exécution du contrat de travail, par application de l’article 625, alinéa 2, du code de procédure civile.
CINQUIEME MOYEN DE CASSATION
Le moyen fait grief à l’arrêt infirmatif attaqué d’AVOIR débouté Mme D… de sa demande tendant à voir juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de ses demandes subséquentes en paiement d’indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse ;
AUX MOTIFS QUE sur le motif économique du licenciement, aux termes de l’article L. 1233-3 du code du travail, constitue un licenciement pour motif économique le licenciement effectué par un employeur pour un ou plusieurs motifs non inhérents à la personne du salarié résultant d’une suppression ou transformation d’emploi ou d’une modification, refusée par le salarié, d’un élément essentiel de son contrat de travail, consécutives notamment à des difficultés économiques ou à des mutations technologiques ; qu’une réorganisation de l’entreprise, lorsqu’elle n’est pas liée à des difficultés économiques ou des mutations technologiques, peut constituer une cause économique de licenciement à condition qu’elle soit effectuée pour sauvegarder la compétitivité de l’entreprise ou pour prévenir des difficultés économiques liées à des évolutions technologiques et leurs conséquences sur l’emploi ; que la sauvegarde de la compétitivité ne se confond pas avec la recherche de l’amélioration des résultats, et, dans une économie fondée sur la concurrence, la seule existence de la concurrence ne caractérise pas une cause économique de licenciement ; que la lettre de licenciement qui fixe les limites du litige est ainsi rédigée : « Madame, Malgré votre absence à l’entretien du vendredi 6 juillet 2012, nous sommes au regret de vous informer que nous sommes dans l’obligation de poursuivre notre projet de licenciement économique à votre égard. Votre emploi est supprimé pour les motifs économiques suivants : .Réorganisation de l’officine liée aux mutations technologiques afin de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise.. – La dématérialisation des ordonnances consistant à les scanner est mise en place dans notre officine depuis mai 2012. Cette modification nous est très fortement suggérée par la caisse d’assurance maladie pour qui cette mise en place est : .un enjeu clé pour l’efficience et la modernisation dit système de soins ; le tri, le classement et la mise sous pli des ordonnances ne sont plus nécessaires, libérant du temps pour l’information et le conseil aux patients, missions premières du pharmacien. A titre d’exemple, pour une pharmacie moyenne, le gain de temps estimé est de 2 heures par jour.. – L’adhésion aux services .Résobank. (depuis juin 2012) permet de réaliser de façon automatique le maximum de pointages et de mettre ainsi en évidence les seuls retours d’avis de règlements pour lesquels aucun virement effectif n’a été trouvé sur les relevés bancaires. L’utilisation de ce service supprime la quasi-totalité du pointage et de la recherche des règlements des organismes et mutuelles qui vous étaient demandés. – Le contexte économique de la pharmacie est particulièrement difficile, (le CA TTC est passé en 2008 de 1.447 M€ à 1.371 M€ en 2011, soit une baisse de 4,8 % ; que cette tendance se confirme en 2012 puisque le chiffre d’affaires des 4 derniers mois a décru de plus de 3 % par rapport à 2011) et nous oblige à sauvegarder sa compétitivité. Nous ne pouvons assumer la charge d’un poste où l’essentiel des tâches sont exécutées de manière automatique ; nous sommes donc contraints de supprimer votre poste de travail et de devoir vous licencier pour motif économique. Nous vous rappelons que vous disposez d’un délai de vingt et un jours à compter du 6 juillet 2012 pour pouvoir adhérer à la .convention de sécurisation professionnelle.. En cas d’acceptation de cette convention votre contrat de travail prendra fin le 27 juillet 2012 au soir, sinon votre préavis de deux mois débutera à réception de ce courrier et nous tiendrons à votre disposition à partir du 2 septembre 2012 votre certificat de travail, votre reçu pour solde de tout compte, votre attestation pôle emploi ainsi que les salaires qui vous sont dus. Durant votre préavis, vous disposez de 2 heures par jour, utilisables à votre guise afin de rechercher un emploi (…) » ; que Mme Y… D… soutient que la réalité de la suppression de son emploi à temps partiel (23 heures) n’est pas démontrée par l’employeur, dès lors que l’examen des agissements de harcèlement moral a établi qu’elle a été laissée volontairement sans travail au profit de M. O…, mari de la gérante qui accomplissait de fait, toutes les tâches qui lui étaient auparavant confiées ; qu’elle ajoute qu’à la supposer démontrée – ce qui n’est pas le cas – une baisse de 4,8 % sur les exercices 2008 à 2011, soit sur quatre années une baisse annuelle de 1,2 %, n’est pas significative au regard de l’exigence de la nécessité de la mesure, alors que son emploi représente une dépense annuelle de 13.229,04 euros, soit 0,96 % du chiffre d’affaires de 2011 de 1.377.000 € ; que la F… réplique, en premier lieu, que les mutations technologiques intervenues en 2012 au sein de la pharmacie ont conduit à la disparition des tâches administratives confiées à Mme Y… D… en tant qu’employée de bureau, en ce que, d’une part, la dématérialisation des ordonnances a mis un terme au tri et au pointage des ordonnances délivrées avec et sans carte Vitale, au signalement des anomalies, au classement des ordonnances et à leur mise sous pli ; et que d’autre part, l’adhésion au système de rapprochement bancaire Résobank a mis fin au pointage des règlements ; qu’elle affirme, en second lieu, que la pharmacie a connu une érosion de son chiffre d’affaires et de ses résultats beaucoup plus significative que celle de ses concurrents au niveau national, comme au niveau local ; que cela étant, il doit être rappelé qu’aux termes des articles visés ci-dessus, les mutations technologiques constituent un motif autonome de licenciement indépendamment d’une menace sur la compétitivité de l’entreprise ; qu’en l’espèce, la F… verse : – une lettre du 1er décembre 2011 dite point d’information de la caisse nationale d’assurance maladie prévoyant « une montée en charge progressive de la dématérialisation des ordonnances .par les pharmacies.
au cours du l’année 2012 » pour une généralisation du système à toutes les officines, dans un but d’ « allègement des tâches administratives [qui] optimise le temps médical et la disponibilité des professionnels de santé tour en améliorant le traitement des dossiers par l’assurance Maladie », – une copie du site internet Résopharma présentant le système Résobank comme destiné à faciliter le rapprochement bancaire entre les virements reçus en banque émanant de l’assurance maladie et les décomptes de règlements et permettant ainsi de réaliser automatiquement les pointages et de mettre en évidence les avis de règlements pour lesquels aucun virement n’a été trouvé sur les relevés bancaires, – une capture d’écran de l’espace personnel de la F… montrant une adhésion de cette dernière à Résobank le 27 février 2012 avec un premier traitement automatique des virements (VRT) le 4 mars 2012 ; qu’il en résulte que la dématérialisation des ordonnances et l’adhésion de la F… à Résobank ont supprimé des tâches précédemment confiées à Mme Y… D… qui, en qualité d’employée de bureau était chargée, d’une part, du tri, du pointage, du classement par ordre de numéro de facture et de la mise sous pli des ordonnances délivrées avec et sans carte Vitale, ainsi que du signalement des anomalies, et d’autre part, du pointage des règlements effectués par les caisses d’assurance maladie et les complémentaires santé selon un nombre pouvant atteindre 120 virements bancaires chaque semaine environ ; que le caractère effectif de la suppression du poste de Mme Y… D… est démontré par le registre du personnel de la F… qui, comme déjà relevé ci-dessus, démontre l’absence de recrutement d’un ou une employé(e) de bureau concomitamment ou postérieurement au licenciement de Mme Y… D… alors que cette dernière ne rapporte aucune preuve de ses affirmations selon lesquelles elle aurait été remplacée dans ses fonctions par M. Philippe O…, mari de Mme Florence O… ; qu’il s’ensuit que le licenciement économique de Mme Y… D… repose sur une cause réelle et sérieuse sans qu’il soit nécessaire d’évoquer le motif tiré de la sauvegarde de la compétitivité ; que le jugement entrepris sera infirmé en ce qu’il a condamné la F… à verser à Mme Y… D… des dommages-intérêts pour rupture abusive ;
1°) ALORS QUE la lettre de licenciement dûment motivée, fixe les termes et corrélativement les limites du litige ; qu’en l’espèce où il ressort des constatations de l’arrêt que la lettre de licenciement mentionnait comme motif de licenciement la « réorganisation de l’officine liée aux mutations technologiques afin de sauvegarder la compétitivité de l’entreprise », et où Mme D… contestait, dans ses écritures d’appel, l’existence d’une menace pesant sur la compétitivité de l’entreprise, la cour d’appel en se bornant, pour juger le licenciement fondé sur une cause réelle et sérieuse, à relever l’existence de mutations technologiques, sans rechercher, comme il le lui était demandé, si l’absence de menace pesant sur la compétitivité de l’entreprise ne privait pas le licenciement de cause réelle et sérieuse, a privé sa décision de base légale au regard de l’article L. 1233-3 du code du travail ;
2°) ALORS QUE la cassation à intervenir sur le fondement du premier moyen entraînera nécessairement par voie de conséquence l’annulation de l’arrêt attaqué en ce qu’il a débouté Mme D… de sa demande tendant à voir juger son licenciement dépourvu de cause réelle et sérieuse et de ses demandes subséquentes en paiement d’indemnités de rupture et de dommages et intérêts pour licenciement sans cause réelle et sérieuse, par application de l’article 625, alinéa 2, du code de procédure civile.