Droits des héritiers : 4 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/05914

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Droits des héritiers : 4 mai 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 22/05914

4 mai 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
22/05914

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

Code nac : 78F

16e chambre

ARRET N°

CONTRADICTOIRE

DU 04 MAI 2023

N° RG 22/05914 – N° Portalis DBV3-V-B7G-VNYH

AFFAIRE :

[Z] [C]-[E]

[V] [N]

C/

[M] [T]

SCP PLOUCHART ET BARNIER

Décision déférée à la cour : Renvoi après cassation suite à l’arrêt rendu le 21 Septembre 2022 par le Cour de Cassation sur l’arrêt rendu le 27 juin 2019 par la Cour d’appel de Versailles en appel d’un jugement rendu le 12 Janvier 2018 par le juge de l’exécution de Pontoise

N° pourvoi : 19-22.693

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le : 04.05.2023

à :

Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Claire RICARD, avocat au barreau de VERSAILLES

Me Franck LAFON, avocat au barreau de VERSAILLES

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE QUATRE MAI DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de VERSAILLES, a rendu l’arrêt suivant dans l’affaire entre :

DEMANDERESSES devant la cour d’appel de Versailles saisie comme cour de renvoi, en exécution d’un arrêt de la Cour de cassation du 21 Septembre 2022 cassant et annulant partiellement l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles le 27 Juin 2019

Madame [Z] [C]-[E]

née le [Date naissance 5] 1966 à [Localité 21]

de nationalité Française

[Adresse 8]

[Localité 15]

Madame [V] [N]

Ayant droit de Madame [L] [B] épouse [C]-[E], sa mère, née le [Date naissance 9] 1948 à [Localité 16] (25) et décédé le [Date décès 12] 2016

née le [Date naissance 6] 1967 à [Localité 20] (Allemagne)

de nationalité Française

[Adresse 11]

[Localité 14]

Représentant : Me Oriane DONTOT de la SELARL JRF AVOCATS & ASSOCIES, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 617 – N° du dossier 20180090 – Représentant : Me Philippe TEBOUL de la SELARL TEBOUL PHILIPPE, Plaidant, avocat au barreau de NICE, vestiaire : 082

****************

DEFENDEURS DEVANT LA COUR DE RENVOI

Monsieur [M] [T]

né le [Date naissance 7] 1949 à [Localité 17] (Algérie)

de nationalité Française

[Adresse 10]

[Localité 13]

Représentant : Me Claire RICARD, Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 – N° du dossier 2221893 – Représentant : Me Philippe SOLER, Plaidant, avocat au barreau de TOULON, vestiaire : 241

S.C.P PLOUCHART ET BARNIER

Société Civile Professionnelle titulaire d’un office de Commissaires de Justice

[Adresse 22]

[Adresse 22]

[Localité 18]

Prise en la personne de ses représentants légaux domiciliés en cette qualité audit siège

Représentant : Me Franck LAFON, Plaidant/Postulant, avocat au barreau de VERSAILLES, vestiaire : 618 – N° du dossier 20220358

****************

Composition de la cour :

L’affaire a été débattue à l’audience publique du 29 Mars 2023, Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles, ayant été entendu en son rapport, devant la cour composée de :

Madame Fabienne PAGES, Président,

Madame Caroline DERYCKERE, Conseiller,

Madame Sylvie NEROT, Magistrat honoraire exerçant des fonctions juridictionnelles,

qui en ont délibéré,

Greffier, lors des débats : Mme Mélanie RIBEIRO;

EXPOSÉ DU LITIGE

Selon trois testaments authentiques des 16 juin 1983, 20 juin 1991 et 03 août 1992, madame [H] [C]-[E] a effectué divers legs à titre particulier (parmi lesquels, selon le deuxième, un legs instituant monsieur [M] [T] comme légataire à titre particulier pour une somme de 1.800.000 euros, soit : 274.408,23 euros), à charge de respecter la part réservataire revenant à son fils, [O] [C]-[E], à hauteur de la moitié du patrimoine de sa mère.

La testatrice et son fils sont respectivement décédés les [Date décès 1] 1993 et [Date décès 4] 2000, ce dernier laissant pour lui succéder madame [L] [B], son épouse, et madame [Z] [C]-[E], sa fille.

Madame [L] [B] veuve [C]-[E] est à son tour décédée le [Date décès 2] 2016 et madame [V] [N], sa fille, vient aux droits de celle-ci.

Le 11 octobre 1994, maître [U], le notaire qui a procédé au règlement de la succession d'[H] [C]-[E], a établi une déclaration de succession dans laquelle le legs de monsieur [T] n’a pas été délivré.

‘ Vu, sur la délivrance du legs, l’assignation délivrée le 16 juin 2005 à cette fin et en paiement de la somme de 274.408,23 euros par monsieur [T] à l’encontre de mesdames [L] [B] et [Z] [C]-[E], l’assignation en la cause du notaire par ces dernières et, sur injonction du tribunal de grande instance de Toulon saisi (selon jugement rendu le 04 octobre 2007), la mise en cause de l’ensemble des légataires,

Vu, sur appel du jugement au fond rendu par cette juridiction le 16 septembre 2010, l’arrêt rendu le 13 mars 2012 par la cour d’appel d’Aix en Provence qui a :

rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la commune de [Localité 19],

et, statuant à nouveau,

réformé le jugement du 16 septembre 2010,

constaté la coexistence des testaments des 16 juin 1983, 20 juin 1991 et 03 août 1992,

dit que monsieur [T] est fondé à solliciter la délivrance du legs consenti par le testament du 20 juin 1991 dans les limites de la quotité disponible,

dit n’y avoir lieu à prescription de l’action en réduction demandée par madame [L] [B] épouse [C]-[E] et madame [Z] [C]-[E],

ordonné la réduction des dispositions testamentaires de madame [H] [C]-[E],

renvoyé les parties devant le président de la chambre des notaires du Var ou son délégataire pour établir sur la base de la présente décision, un nouvel état liquidatif,

dit n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile et que chaque partie conservera la charge des dépens,

Vu l’arrêt rendu le 03 juillet 2013 par la première chambre civile de la Cour de cassation (pourvois n° 12-19146 et 12-20467) qui a cassé et annulé ledit arrêt sauf en ce qu’il a rejeté l’exception d’incompétence soulevée par la commune de [Localité 19], constaté la coexistence des testaments, dit que monsieur [T] est fondé à solliciter la délivrance du legs consenti par testament du 20 juin 1991 dans les limites de la quotité disponible et dit n’y avoir lieu à prescription de l’action en réduction de madame [C]-[E], renvoyant, sur les autres points, la cause et les parties devant la cour d’appel de Lyon,

Vu l’arrêt rendu le 04 mars 2014 par la cour d’appel de Lyon qui a :

réformé le jugement du 16 septembre 2010,

débouté madame [L] [B] épouse [C]-[E] et madame [Z] [C]-[E] de leurs demandes dirigées contre la commune de [Localité 19],

débouté monsieur [T] de sa demande de réduction de legs,

dit n’y avoir lieu de renvoyer les parties devant un notaire en vue de l’établissement d’un nouvel état liquidatif,

débouté monsieur [T] de ses demandes contre maître [U],

condamné maître [U] à payer, à titre de dommages-intérêts, les sommes de 5.000 euros à madame [K], 5.000 euros à monsieur [A], 5.000 euros à madame [L] [B] épouse [C]-[E] et madame [Z] [C]-[E],

condamné maître [U] à payer, sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, les sommes de 2.000 euros à madame [K], 2.000 euros à monsieur [A], 2.000 euros à madame [L] [B] épouse [C]-[E] et madame [Z] [C]-[E]

condamné [L] [B] épouse [C]-[E] et [Z] [C]-[E], sur le fondement de l’article 700 du code de procédure civile, à payer les sommes de 2.000 euros à monsieur [T], 2.000 euros à la commune de [Localité 19], 2.000 euros à monsieur [Y] [D]-[W] et 2.000 euros à monsieur [X] [D]-[W],

Vu l’arrêt rendu le 10 juin 2015 par la première chambre civile de la Cour de cassation (pourvois n° 14-16655 et 14-17186) qui a rejeté les pourvois formés par les parties à l’encontre de ce dernier arrêt,

‘ Vu, sur la mesure d’exécution forcée, le commandement de payer afin de saisie-vente du 05 janvier 2016 signifié à la requête de monsieur [T] par exploit de la Scp Plouchart et Barnier, huissiers de justice à [Localité 18] (95), à madame [Z] [C]-[E] (copie de cet acte étant remis par acte séparé à madame [L] [B] épouse [C]-[E], selon ses énonciations), pour une somme de 383.770,10 euros dont 274.408,23 euros en principal, ceci en vertu de l’arrêt rendu le 13 mars 2012 par la cour d’appel d’Aix en Provence et de l’arrêt rendu le 03 juillet 2013 par la Cour de cassation,

Vu l’assignation en contestation de la mesure délivrée le 18 janvier 2016, à la requête de madame [L] [B] épouse [C]-[E] et de madame [Z] [C]-[E] à l’encontre de monsieur [T] et de la Scp d’huissiers, devant le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Toulon, et le jugement rendu par celui-ci le 22 novembre 2016 qui s’est déclaré territorialement incompétent au profit de juge de l’exécution de Pontoise,

Vu le jugement contradictoire rendu le 12 janvier 2018 par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Pontoise qui, rappelant que sa décision est exécutoire de droit par provision, a :

déclaré irrecevable l’intervention de madame [V] [N] venant aux droits de sa mère, madame [L] [B] épouse [C]-[E] décédée le [Date décès 3] 2016,

déclaré recevable la contestation présentée par madame [Z] [C]-[E],

mis hors de cause la société Plouchart et Barnier, huissiers de justice à [Localité 18] (95),

dit que le commandement de payer afin de saisie-vente signifié le 05 janvier 2016 à madame [Z] [C]-[E] est fondé sur un titre exécutoire régulier et valable,

débouté madame [Z] [C]-[E] de sa contestation,

débouté madame [Z] [C]-[E] de sa demande de dommages-intérêts pour abus de saisie,

débouté monsieur [M] [T] de sa demande de dommages-intérêts pour procédure abusive,

débouté madame [V] [N], venant aux droits (…), et madame [Z] [C]-[E] de leur demande d’indemnité fondée sur l’article 700 du code de procédure civile,

débouté les parties de toute demande plus ample ou contraire,

condamné in solidum madame [V] [N], venant aux droits (…), et madame [Z] [C]-[E] aux dépens de l’instance,

Vu l’arrêt contradictoire rendu le 27 juin 2019 par la cour d’appel de Versailles qui a :

confirmé le jugement en toutes ses disposition, y ajoutant ,

déclaré irrecevable la demande de réduction du legs,

condamné in solidum madame [Z] [C]-[E] et madame [V] [N] venant aux droits de madame [L] [B] épouse [C]-[E] à payer à monsieur [M] [T] une indemnité de 3.000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné in solidum madame [Z] [C]-[E] et madame [V] [N] venant aux droits de madame [L] [B] épouse [C]-[E] à payer à la société Thierry Plouchart, Vincent Barnier et Aurore Sia, huissiers de justice associés, la somme de 1.500 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

condamné in solidum madame [Z] [C]-[E] et madame [V] [N] venant aux droits de madame [L] [B] épouse [C]-[E] aux dépens de l’appel,

Vu l’arrêt rendu le 21 septembre 2022 par la première chambre civile de la Cour de cassation (pourvoi n° 19-22693) qui a cassé et annulé ledit arrêt mais seulement en ce qu’il met hors de cause la Scp Plouchard et Barnier, dit que le commandement de payer afin de saisie-vente signifié le 5 janvier 2016 à madame [Z] [C]-[E] est fondé sur un titre exécutoire régulier et est valable, rejette la contestation de cette dernière, rejette sa demande de dommages-intérêts pour abus de saisie et déclare irrecevable la demande de réduction du legs en renvoyant les parties devant la présente cour d’appel autrement composée, ceci en énonçant : (…)

Sur Ie premier moyen, pris en sa première branche, en ce qu’il est formé par Mme [C]-[E]

Enoncé du moyen

8. Mme [C]-[E] fait grief à l’arrêt de dire que le commandement du 5 janvier 2016 est fondé sur un titre exécutoire régulier et est valable, de rejeter sa contestation et sa demande de dommages-intérêts pour abus de saisie et de déclarer irrecevable la demande de réduction du legs, alors ‘que seul le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur ; que la délivrance d’un legs a pour seul objet de reconnaître les droits du légataire et doit être distinguée du paiement du legs lequel ne peut intervenir que dans le cadre des opérations de partage par I’attribution au légataire de biens le remplissant de ses droits ; qu’en décidant que l’arrêt de la cour d’appel d’Aix en Provence du 13 mars 2012 qui se contente de dire que M. [T] est fondé à solliciter la délivrance de son legs consenti par le testament du 20 juin 1991 serait constitutif d’un titre exécutoire pour avoir paiement de ce legs, la cour d’appel a violé les articles L. 111-2 et L. 221-1 du code des procédures civiles d’exécution et 1014 du code civil.’

Réponse de la Cour

Vu les articles L. 111-2 du code des procédures civiles d’exécution et 1014 du code civil :

9. Aux termes du premier de ces textes, le créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible peut en poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur dans les conditions propres à chaque mesure d’exécution.

10. En application du second, la délivrance d’un legs particulier a pour seul objet la reconnaissance des droits du légataire, permettant l’entrée en possession de l’objet du legs et l’acquisition des fruits, et se distingue du paiement du legs.

11. Pour rejeter la contestation de Mme [C]-[E], l’arrêt retient que le commandement de payer afin de saisie-vente qui lui a été signifié le 5 janvier 2016 est fondé sur un titre exécutoire régulier et valable résultant des arrêts du 13 mars 2012 et du 3 juillet 2013 ayant définitivement jugé que M. [T] était fondé à solliciter la délivrance du legs consenti par le testament du 20 juin 1991 dans les limites de la quotité disponible, ce qui s’interprète comme une décision ordonnant la délivrance qui est la reconnaissance par le juge de la régularité du titre du légataire.

12. En statuant ainsi, alors qu’une décision accueillant une demande de délivrance d’un legs de somme d’argent ne constitue pas un titre exécutoire autorisant le légataire à procéder à des mesures d’exécution forcée, la cour d’appel a violé les textes susvisés.

Et sur le quatrième moyen, en ce qu’il est formé par Mme [C]-[E]

Enoncé du moyen

13. Mme [C]-[E] fait grief à l’arrêt de mettre hors de cause la SCP Plouchart et Barnier, alors ‘que les huissiers sont responsables de la rédaction de leurs actes ; que lorsque l’acte a été rédigé par un autre officier ministériel, leur responsabilité n’est exclue que pour les indications

matérielles qu’ils n’ont pas pu eux-mêmes vérifier; que l’existence d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible ne constitue pas une indication matérielle que l’huissier ne serait pas en mesure de vérifier par lui-même ; que dès lors, quand bien même elle n’aurait pas rédigé le commandement litigieux, la SCP Plouchart et Barnier a engagé sa responsabilité en signant et délivrant ce commandement en l’absence de titre exécutoire portant sur une créance liquide ; qu’en décidant le contraire, la cour d’appel a violé l’article 2 de l’ordonnance du 2 novembre 1945.’

Réponse de la Cour

Vu l’article 2, alinéa 2, de l’ordonnance n° 45-2592 du 2 novembre 1945 :

14. Aux termes de ce texte, les huissiers sont responsables de la rédaction de leurs actes, sauf, lorsque l’acte a été préparé par un autre officier ministériel, pour les indications matérielles qu’ils n’ont pas pu eux-mêmes vérifier.

15. Pour mettre hors de cause la SCP Plouchart et Barnier, l’arrêt, après avoir énoncé les termes de l’article 2, alinéa 2, de l’ordonnance du 2 novembre 1945, retient, par motifs propres, que la lettre en date du 28 décembre 2015 démontre que la SCP Leroi, Wald-Reynaud-Ayache l’avait requise pour délivrer le commandement de payer qu’elle avait elle-même préparé et, par motifs adoptés, qu’il n’est pas contestable que la SCP Plouchart et Barnier, simple mandataire, n’est pas l’auteur du commandement de payer du 5 janvier 2016 et qu’elle n’est pas responsable de la rédaction de cet acte.

16. En statuant ainsi, alors que les dispositions susvisées n’intéressent que la rédaction des actes, la cour d’appel, qui a constaté qu’il était reproché à l’huissier de justice d’avoir diligenté la saisie-vente en l’absence de titre exécutoire portant sur une créance liquide, a violé, par fausse application, le texte susvisé.’,

Vu la déclaration de saisine de la présente cour de renvoi par madame [Z] [C]-[E] et madame [V] [N], enregistrée au greffe le 26 septembre 2022,

Vu les dernières conclusions de madame [Z] [C]-[E] et de madame [V] [N] notifiées le 26 janvier 2023 par lesquelles elles demandent à la cour, au visa du dernier arrêt de la Cour de cassation précité, des dispositions des articles L 111-2 et L111-6 du code des procédures civiles d’exécution, de l’article 1382 (ancien) devenu 1240 du code civil :

d’infirmer et de réformer en toutes ses dispositions le jugement du tribunal de grande instance de Pontoise, juge de l’exécution, en date du 12 janvier 2018,

en conséquence,

d’annuler purement et simplement le commandement de payer afin de saisie-vente du 05 janvier 2016, signifié par la Scp Plouchart-Barnier, aux intérêts de monsieur [M] [T], contre madame [Z] [C]-[E],

de débouter monsieur [M] [T] et la Scp Plouchart et Barnier de toutes leurs demandes, fins et conclusions,

de condamner in solidum monsieur [M] [T] et la Scp Plouchart-Barnier, huissiers de justice, à payer et porter à la concluante les sommes suivantes : 30.000 euros à titre de dommages et intérêts pour procédure abusive et injustifiée // 15.000 euros sur la base de l’article 700 du code de procédure civile // et les entiers dépens,

Vu les dernières conclusions notifiées le 13 décembre 2022 par monsieur [M] [T] par lesquelles il prie la cour, visant les décisions judiciaires rendues, les articles R 121-1 et suivants du code de procédure civile, 921, 1011, 1014 et suivants, 1351, 1383-2 et suivants du code civil, le procès-verbal du ‘TI’ de Montmorency du 14/03/2019, les articles L 111-1, L 111-2, L 111-3 et L 111-6, L 221-1 et suivants du code des procédures civiles d’exécution, 31, 122 et 564 du code de procédure civile, la loi n° 2006-728 du 23 juin 2006, le titre exécutoire de monsieur [T], la responsabilité des huissiers instrumentaires et les pièces versées au débat :

A titre principal

de confirmer partiellement le jugement (entrepris), et ce faisant :

* vu les décisions rendues, à savoir l’arrêt de la cour d’appel d’Aix en Provence du13 mars 2012, l’arrêt de la Cour de cassation du 3 juillet 2013, l’arrêt de la cour d’appel de Lyon du 04 mars 2014, l’arrêt de la Cour de cassation du 10 juin 2015 ayant autorité de la chose jugée,

* vu l’absence de demande de réduction de legs de madame [C]-[E] et de madame [N] lors de la procédure par devant la cour d’appel de Lyon du 04 mars 2014 et la renonciation des héritiers à en faire la demande,

de déclarer que la délivrance vaut demande de règlement du legs, en l’absence de demande de réduction de legs par les héritières, les parties n’ayant pas été renvoyées devant un notaire liquidateur rendant la créance liquide, certaine et exigible, du fait des termes du testament de madame [H] [C]-[E] pour la somme de 1.800.000 euros [sic] (soit 274.408,23 euros),

de valider le commandement de payer comme fondé sur un titre exécutoire, la somme d’argent léguée étant parfaitement définie aux termes du testament de madame [H] [C]-[E] et en l’absence de demande de réduction de legs par les héritières,

* vu l’aveu de madame [Z] [C]-[E] lors de l’audience de conciliation des saisies rémunérations du 14 mars 2019 par lequel elle a reconnu être débitrice du legs consenti à monsieur [T] par testament d’un montant de 449.628,09 [sic] ,

de rejeter la demande de dommages et intérêts de madame [C]-[E] et de madame [N] à la somme de 30.000 euros pour abus de saisie, le préjudice n’étant pas démontré, puisque madame [C]-[E] a reconnu être débitrice de monsieur [T] pour le moment objet du commandement de payer par procès-verbal de conciliation lors de la saisie des rémunérations,

de déclarer irrecevable la demande de réduction de legs, le juge de l’exécution n’ayant pas compétence pour modifier le dispositif d’une décision de justice, madame [C]-[E] et madame [N] (venant aux droits de sa mère) n’ayant plus formulé de demande à ce titre lors de la procédure devant la cour d’appel de Lyon du 04 mars 2014 et ont donc renoncé à ce droit, et la demande étant prescrite conformément à l’article 921 du code civil et conformément à l’autorité de la chose jugée attachée aux décisions rendues du 13 mars 2012, du 03 juillet 2013, du 04 mars 2014 et 10 juin 2015,

de valider le commandement de payer afin de saisie-vente signifié le 5 janvier 2016 à madame [Z] [C]-[E] comme fondé sur un titre exécutoire régulier et valable,

de condamner mesdames [C]-[E] et [N] à régler à monsieur [T] la somme de 274.408,23 euros outre les frais, objet du commandement de payer, outre les intérêts légaux jusqu’au parfait règlement, sur le fondement de la concentration des demandes,

de condamner madame [C]-[E] et madame [N] à régler à monsieur [T] des dommages et intérêts d’un montant de 20.000 euros pour procédure abusive, les sommes étant parfaitement dues par ces dernières,

de rejeter toutes les autres demandes, fins et conclusions de mesdames [C]-[E] et [N],

de condamner in solidum madame [C]-[E] et madame [N] à (lui) verser la somme de 10.000 euros au titre de l’article 700 du ‘CPC’ outre les entiers dépens,

A titre subsidiaire, si par extraordinaire, la cour estimait que le commandement de payer n’était pas fondé sur un titre exécutoire et prononce l’annulation de ce dernier,

de déclarer responsable la Scp Plouchard [sic] et Barnier en ayant signé et délivré le commandement de payer aux fins de saisie vente en l’absence de titre exécutoire,

de condamner la Scp Plouchard [sic] et Barnier à (le) relever et garantir des condamnations mises à charge dans la présente instance, en ce compris les dommages et intérêts, article 700 du ‘CPC’ et les dépens,

de condamner la Scp Plouchard [sic] et Barnier à (lui) verser la somme objet du commandement de payer, soit la somme de 383.770,10 outre les intérêts légaux jusqu’au parfait règlement et les frais, monsieur [T] n’ayant pu percevoir son legs du fait de la nullité du commandement,

A titre infiniment subsidiaire si, par extraordinaire, la cour estimait que le commandement de payer n’était pas fondé sur un titre exécutoire et prononce l’annulation de ce dernier, et que des dommages et intérêts sont dus par monsieur [T] :

de rejeter les demandes de ‘madame’ [C]-[E] et [N] au titre des dommages et intérêts pour un montant de 30.000 euros, la créance ayant été reconnue comme due par madame [C]-[E] dans son intégralité lors de l’audience de conciliation des saisies des rémunérations et sont donc mal fondées en leur demande, le préjudice n’étant pas démontré puisque la délivrance a été accordée à monsieur [T] par décisions devenues définitives, la somme étant toujours due à monsieur [T],

de rejeter la demande formulée au titre de l’article 700 du ‘CPC’ et de laisser les dépens à la charge des demanderesses

A titre très infiniment subsidiaire, si, par extraordinaire, la Cour estimait que le commandement de payer n’était pas fondé sur un titre exécutoire et prononce l’annulation de ce dernier, et que des dommages et intérêts sont dus par monsieur [T] :

de déclarer excessive la demande de 30.000 euros de dommages et intérêts et de la ramener à de plus justes proportions,

d’ordonner la compensation entre toute somme qui serait allouée au titre des dommages et intérêts et les sommes obtenues par le commandement de payer, les sommes étant dues intégralement à monsieur [T] du fait de la reconnaissance de créance par madame [Z] [C]-[E],

de rejeter la demande de madame [C]-[E] et de madame [N] au titre de l’article 700 du ‘CPC’ et de laisser les dépens à la charge des demanderesses,

Vu les dernières conclusions notifiées le 28 décembre 2022 par la société civile professionnelle Plouchart et Barnier, titulaire d’un office de commissaires de justice à [Localité 18] (95) par lesquelles elle demande à la cour :

de statuer ce que droit sur la recevabilité de l’appel formé par madame [Z] [C]-[E],

de déclarer madame [V] [N] irrecevable en sa déclaration de saisine, subsidiairement en son appel,

Plus subsidiairement,

de déclarer irrecevables les conclusions de madame [V] [N],

* vu les dispositions des articles L.111-2 et suivants du code des procédures civiles d’exécution,

* vu, notamment, l’arrêt de la cour d’appel d’Aix en Provence du 13 mars 2012 et l’arrêt de la Cour de cassation du 03 juillet 2013,

* vu l’arrêt de la cour d’appel de Lyon du 04 mars 2014 et l’arrêt de la Cour de cassation du 10 juin 2015,

de déclarer régulier et valable le commandement de payer du 05 janvier 2016,

de confirmer, en conséquence, le jugement du juge de l’exécution du ‘TGI’ de Pontoise du 12 janvier 2018,

de débouter madame [Z] [C]-[E] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

Très subsidiairement,

de réduire la demande de dommages et intérêts qui n’est justifiée ni dans son principe ni dans son quantum,

de déclarer les demandes de garantie et de condamnations de monsieur [T] irrecevables,

Subsidiairement,

de les déclarer mal fondées,

de condamner madame [Z] [C]-[E] et madame [V] [N] au paiement d’une somme de 3.500 euros sur le fondement de l’article 700 du ‘CPC’,

de condamner madame [Z] [C]-[E] et madame [V] [N], ou tout succombant aux entiers dépens dont distraction au profit de maître Franck Lafon, avocat, conformément aux dispositions de l’article 699 du ‘CPC’,

Vu l’ordonnance de clôture rendue le 07 mars 2023,

MOTIFS DE LA DÉCISION

Sur la recevabilité de madame [N] à saisir la cour de renvoi et ‘subsidiairement en son appel’

La Scp Plouchart et Barnier poursuit la confirmation du jugement, confirmé, précise-t-elle, par la présente cour d’appel, qui a jugé que madame [N] était irrecevable à agir dans la mesure où sa mère, aux droits de laquelle elle vient, s’est vue délivrer un commandement de payer, certes du même jour mais distinct et non contesté.

Elle fait valoir que cette disposition n’a pas été censurée par la Cour de cassation.

Mais la Cour de cassation a statué sur le pourvoi formé par mesdames [C]-[E] et [N] sans se prononcer sur sa recevabilité à agir.

Et dans la mesure où le litige porte sur la question du caractère exécutoire de décisions de justice portant sur la délivrance d’un legs à titre particulier dans une succession dans laquelle elle vient aux droits d’une héritière et où il est demandé liquidation et paiement d’une créance à ce titre par le légataire, il y a lieu de considérer qu’elle a intérêt à agir.

Le jugement sera, par conséquent, infirmé en ce qu’il la déclare irrecevable à intervenir.

Sur le titre exécutoire au fondement du commandement de payer valant saisie-vente délivré le 05 janvier 2016

Il convient de rappeler que pour juger que ce commandement est fondé sur un titre exécutoire et qu’il est valable, le juge de l’exécution, visant diverses dispositions du code des procédures civiles d’exécution, à savoir ses articles L221-1 (sur la saisie-vente), L111-2 et L111-6 (sur le titre exécutoire et la créance qu’il constate), L111-3 (sur le caractère exécutoire d’une décision de justice) ainsi que l’article L 213-6 du code de l’organisation judiciaire et le pouvoir d’interprétation du juge de l’exécution, a procédé à l’analyse des arrêts précités rendus les 13 mars 2012 par la cour d’appel d’Aix en Provence et 03 juillet 2013 par la Cour de cassation.

Il a considéré qu’en ressortait le droit de monsieur [T] à solliciter la délivrance du legs consenti par testament du 20 juin 1991 dans les limites de la quotité disponible.

Retenant, par ailleurs, que l’action des consorts [C]-[E] en réduction de ce legs, simplement déclarée non prescrite par la Cour de cassation, n’avait pas été soumise à la cour d’appel de Lyon, cour de renvoi, et que, par ailleurs, ces consorts n’ont soulevé aucun moyen sur la question du renvoi devant un notaire pour l’établissement d’un nouvel état liquidatif, le premier juge a conclu que ce titre exécutoire, valable, constatait une créance liquide de exigible dès lors que ces deux arrêts contenaient les éléments nécessaires à son évaluation en se référant au testament et au montant précisé de ce legs en argent.

Devant la présente cour de renvoi, les demanderesses à la saisine qui poursuivent l’infirmation de ce jugement et l’annulation dudit commandement s’approprient la motivation de le Cour de cassation qui distingue la demande de délivrance du legs et l’action en paiement du legs, ceci en affirmant qu’il n’y a pas lieu de revenir sur l’autorité de la chose jugée.

Elles critiquent l’argumentation de monsieur [T] en soutenant qu’il ne peut solliciter l’exécution du legs dans le cadre de la présente instance, ce dont il s’est jusqu’alors abstenu, du fait qu’elle ne rentre pas dans les attributions de juge de l’exécution, qu’il s’agit d’une demande nouvelle, que cette action est prescrite et que la demande se heurte au principe de la concentration des moyens.

Elles ajoutent que la délivrance du legs suppose la satisfaction à la double condition du respect de la quotité disponible et que chacun des co-indivisaires soit tenu à proportion de ses droits dans l’indivision, qu’en l’espèce et comme elles le chiffrent, eu égard au montant total des legs la quotité disponible était dépassée, qu’il appartenait à monsieur [T] de faire procéder contradictoirement à l’égard de tous au calcul de son legs, qu’il s’en est abstenu et que le juge de l’exécution n’a pas compétence pour ce faire.

Elles soutiennent enfin qu’est inopérante son argumentation relative à une procédure de saisie de ses rémunérations autorisée par le tribunal d’instance de Montmorency qui n’établit pas que madame [C]-[E] était présente ou représentée ; que cette procédure ne peut être regardée comme une reconnaissance de dette et qu’elle se borne à fixer le montant d’une créance sans la constater.

Ceci étant rappelé, c’est à tort que monsieur [T], poursuivant quant à lui la confirmation du jugement, qualifie de ‘parfaitement infondée’ la position de la Cour de cassation en ce qu’elle juge que le légataire qui sollicite la délivrance de son legs doit ensuite agir en paiement de celui-ci avant de pouvoir en solliciter l’exécution et, pour la critiquer, affirme, sur le fondement des articles 1014 et 1011 du code civil, que la délivrance au profit du légataire particulier (en possession de son legs, ici une somme d’argent définie par le testament, dès le décès du testateur) vaut paiement en faisant valoir que cette délivrance a été consacrée par les arrêts en cause et qu’une consultation du Centre de recherche d’information et de documentation notariales (Cridon) du 15 mai 2014 (pièce n° 19) vient étayer son appréciation en indiquant que ‘le légataire de somme d’argent qui a obtenu la délivrance est donc créancier direct du défendeur condamné et peut poursuivre le recouvrement de sa créance sur son entier patrimoine’.

De la même façon, la SCP Plouchart et Barnier ne peut être suivie lorsqu’elle soutient que la position de la Cour de cassation est contestable à plusieurs titres en observant notamment que monsieur [T] a sollicité à plusieurs reprises la délivrance du legs et que la Cour de cassation, dans l’arrêt au fondement du commandement de payer litigieux, a confirmé que celui-ci était fondé à solliciter cette délivrance, de sorte que monsieur [T] était bien un créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide, certaine et exigible.

En effet, la délivrance du legs ne constitue que la reconnaissance des droits du légataire sur la succession qu’il a acquis, comme tout héritier, depuis le décès du testateur.

Elle l’habilite, simplement, à exercer les droits et actions relatifs au bien légué et, en cas de résistance, à exercer une action en revendication susceptible de faire l’objet d’un partage, s’agissant ici d’un legs d’une somme d’argent, destiné à fixer l’assiette matérielle de son legs.

Aussi, l’arrêt rendu le 13 mars 2012 par la cour d’appel d’Aix en Provence qui se contente de juger, dans son dispositif, ‘que monsieur [T] est fondé à solliciter la délivrance du legs consenti par le testament du 20 juin 1991 dans les limites de la quotité disponible’, sans que cette disposition n’ait été censurée par la décision de la Cour de cassation semblablement au fondement du commandement litigieux, ne peut être considéré comme un titre exécutoire lui donnant pouvoir de procéder à l’exécution forcée litigieuse, faute de consacrer un droit de créance.

Faute, par conséquent, d’avoir distingué délivrance et paiement du legs à titre particulier en cause, le jugement ne pouvait retenir l’existence d’un titre exécutoire.

Et la cour, statuant avec les pouvoirs du juge de l’exécution qu’il tient de l’article L 213-6 du code de l’organisation judiciaire, ne saurait reconnaître, comme le voudrait monsieur [T], qu’il dispose d’une créance liquide et exigible quand bien même cet article donne compétence à ce juge pour connaître du fond du droit en présence de contestations qui s’élèvent à l’occasion de l’exécution forcée, dès lors qu’aux termes de l’article R 121-1 du code des procédures civiles d’exécution ‘le juge de l’exécution ne peut modifier le dispositif de la décision de justice qui sert de fondement aux poursuites (…)’ et que, par ailleurs, il dispose d’un pouvoir d’interprétation.

Or, en l’espèce, le dispositif de l’arrêt de la cour d’appel d’Aix en Provence, dépourvu d’ambiguïté, ne contient aucune disposition quant à la reconnaissance du principe ainsi que du quantum de cette créance et le juge de l’exécution ne peut y ajouter.

Est, de plus, inopérante l’argumentation de monsieur [T] tendant à voir reconnaître a posteriori, qu’il dispose d’une créance ‘due dans sa totalité’ puisque ses adversaires, expose-t-il, ont renoncé au droit de renvoyer les opérations de partage devant un notaire liquidateur ou, selon l’arrêt précité rendu par la cour d’appel de Lyon, à la réduction du legs dans la mesure où l’article L 111-2 du même code vise ‘tout créancier muni d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible (lui permettant de) poursuivre l’exécution forcée sur les biens de son débiteur’.

Enfin, la mise en oeuvre d’une voie d’exécution tend à la réalisation effective d’un droit et diffère d’une action en justice qui tend à sa consécration.

Il suit de là que, faute d’avoir distingué délivrance et paiement du legs à titre particulier en cause, le jugement ne pouvait valablement retenir l’existence d’un titre exécutoire.

Il doit donc être infirmé de ce chef.

Et monsieur [T] n’est pas recevable en sa demande tendant, selon sa formulation, à voir ‘valider le commandement de payer comme fondé sur un titre exécutoire, la somme d’argent léguée étant parfaitement définie aux termes du testament de madame [H] [C] [E] et en l’absence de demande de réduction de legs par les héritières’.

Il s’induit de ces mêmes motifs que doit être rejetée la demande de condamnation de madame [C]-[E] au paiement de la somme de 274.408,23 euros outre les frais, objet de commandement de payer, et les intérêts à compter de ce commandement jusqu’à parfait paiement.

Sur la contestation du legs évoquée en première instance par madame [Z] [C]-[E]

Analysant l’arrêt rendu par la cour d’appel de Lyon le 04 mars 2014, statuant sur renvoi après la première cassation, en retenant qu’il n’y avait pas lieu de renvoyer les parties devant un notaire en vue de l’établissement d’un nouvel état liquidatif du fait que les consorts [C]-[E] avaient renoncé à réitérer leur demande de réduction de legs, le tribunal énonce, dans ses seuls motifs, que madame [C]-[E] ne peut reprocher à cette cour d’avoir statué comme elle l’a fait.

Force est de constater qu’outre le fait que le dispositif du jugement entrepris ne contient, quant à lui, aucune disposition relative à la recevabilité d’une demande de réduction de legs, dans le dispositif de leurs dernières conclusions devant la présente cour de renvoi qui seules la saisit, les demanderesses à la saisine ne formulent aucune demande dans ce sens, de sorte que c’est en vain que monsieur [T] consacre des développements nourris à cette question en demandant à la présente cour de déclarer irrecevable une telle demande.

Il n’y a donc pas lieu à statuer de ce chef.

Sur les demandes indemnitaires présentées réciproquement par les héritières et le légataire

Sollicitant l’infirmation du jugement qui a rejeté sa demande en paiement de dommages-intérêts fondée sur l’abus de procédure au motif que l’interprétation inexacte de ses droits par une partie n’est pas constitutive en elle-même d’un abus, outre ‘l’infirmation’ de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles le 27 juin 2019 (page 13/16) monsieur [T] se prévaut à nouveau devant la cour d’une procédure abusive.

Mais la solution donnée au présent litige ne permet pas de retenir que les demanderesses à la saisine ont commis une faute en contestant la voie d’exécution mise en oeuvre et en abusant des voies de droit qui leur étaient ouvertes.

Et le procès-verbal de conciliation dressé le 14 mars 2019 dans le cadre de la saisie des rémunérations de madame [C]-[E] dont fait état monsieur [T] en tirant argument du fait qu’elle n’a alors émis aucune contestation sérieuse quant à la dette et à la validité du titre exécutoire ne contient aucune renonciation claire et non équivoque dans ce sens.

Madame [C]-[E] qui conteste la régularité de cette procédure devant le juge d’instance de Montmorency fait valoir, à cet égard, qu’à cette date, était pendante la procédure d’appel à l’encontre du jugement rendu le 12 janvier 2018 par le juge de l’exécution qu’elle avait initiée selon déclaration d’appel enregistrée le 26 janvier 2018.

Par motifs substitués, le jugement doit être confirmé en ce qu’il le déboute de cette prétention.

S’agissant de la demande indemnitaire réciproque de ‘la concluante’ visée dans le dispositif des dernières conclusions des demanderesses à la saisine, si la cour retient qu’il s’agit de madame [C]-[E] à qui a été délivré le commandement de payer litigieux, elle a été rejetée par le juge de l’exécution du fait qu’il la déboutait de sa contestation.

Cette dernière présente devant la cour cette même demande en réparation du préjudice résultant d’une procédure qu’elle qualifie d’abusive et injustifiée en sollicitant la condamnation de monsieur [T] au paiement de la somme de 30.000 euros, ceci in solidum avec la Scp Plouchart et Barnier.

Force est, cependant, de considérer qu’elle s’abstient de caractériser l’abus précisément reproché à monsieur [T] et, quand bien même succombe-t-il en sa défense devant la présente cour de renvoi, outre le fait que l’appréciation erronée de ses droits, soutenus en l’espèce en droit et en fait, n’est pas constitutive d’une faute, il n’en reste pas moins que ces droits ont été reconnus en première instance.

Madame [Z] [C]-[E] sera par conséquent déboutée de cette demande formée à l’encontre de monsieur [T].

Sur les demandes en garantie et en paiement de la somme objet du commandement formées par monsieur [T] à l’encontre de la Scp Plouchart et Barnier

Se prévalant de l’arrêt rendu le 21 septembre 2022 par la Cour de cassation en sa censure de l’arrêt rendu le 27 juin 2019 par la présente cour d’appel, monsieur [T] fait valoir que l’huissier instrumentaire est tenu de vérifier que le titre en vertu duquel il pratique sa saisie-vente reste exécutoire au jour de l’acte de saisie, sauf à engager sa responsabilité.

Sans répliquer aux moyens d’irrecevabilité qui lui sont opposés, il tire de ce qui précède la conclusion que la Scp Plouchart et Barnier doit être condamnée à le relever et garantir de toutes condamnations prononcées à son encontre et que, par ailleurs, si la cour venait à annuler le commandement de payer comme non fondé sur un titre exécutoire, elle doit être condamnée à lui verser les sommes objet de ce commandement (soit : 383.770,10 euros outre intérêts et frais) puisqu’il n’a pu percevoir son legs.

Ajoutant à son argumentation tendant à démontrer qu’elle a délivré ce commandement en vertu d’un titre exécutoire ‘considéré comme tel par des notaires et différents magistrats’, la Scp Plouchart et Barnier soutient en réplique qu’est irrecevable, à divers titres, cette demande de garantie.

Elle oppose à monsieur [T] la nouveauté de cette demande en cause d’appel outre l’absence de pouvoir du juge de l’exécution pour ordonner le paiement d’un legs.

Ceci étant exposé, la Cour de cassation a certes censuré l’arrêt rendu par le cour d’appel le 27 juin 2019 en énonçant qu’il incombe à l’huissier de justice de vérifier que le titre en vertu duquel il pratique une saisie aux risques du créancier mandant reste exécutoire au jour de la saisie et que n’avait pas vocation à trouver application l’article 2 de l’ordonnance du 02 novembre 1945 relative aux huissiers sur lequel s’était fondée la cour d’appel, adoptant les motifs du juge de l’exécution pour retenir que le commandement litigieux avait été préparé par un autre huissier et que la responsabilité de la Scp Plouchart et Barnier n’était pas engagée.

Mais la Cour de cassation s’est ainsi prononcée sur le fond du droit dans un contexte procédural différent de celui qui se présente, ici, devant la cour de renvoi.

Devant le juge de l’exécution comme devant la cour d’appel statuant sur appel du jugement entrepris, les demandes (de nature indemnitaire ainsi qu’au titre des frais de procédure et des dépens) à l’encontre de la Scp Plouchart et Barnier, assignée par les consorts [C]-[E], n’étaient formulées que par ces dernières.

Devant la présente cour de renvoi, monsieur [T] présente pour la première fois les demandes précitées à l’encontre de la Scp Plouchart et Barnier.

Il y a lieu de considérer que, sauf à excéder les pouvoirs qu’elle tient de l’article L 213-6 du code de l’organisation judiciaire, la cour ne saurait statuer sur l’exécution fautive du mandat que monsieur [T] a donné à cette Scp d’huissiers, comme cela résulte, d’ailleurs, de la doctrine de la Cour de cassation (Cass civ 3ème, 05 janvier 2012, pourvoi n° 10-12741).

Surabondamment, cette Scp d’huissiers est fondée à opposer à monsieur [T] la fin de non-recevoir tirée de la nouveauté de ces demandes en cause d’appel prohibée par l’article 566 du code de procédure civile dès lors qu’aucune des exceptions à cette règle ne peut trouver application, qu’il s’agisse des demandes tendant aux mêmes fins, selon l’article 565, de la réserve relative aux prétentions accessoires ou de leur conséquence ou encore de leur complément nécessaire contenue en son article 566, ou bien de l’admission d’une demande reconventionnelle prévue à l’article 567.

Ces demandes seront, par conséquent, déclarées irrecevables.

Sur la demande indemnitaire formée par madame [C]-[E] à l’encontre de la Scp Plouchart et Barnier

Alors que les demanderesses à l’action reprochaient à cette Scp d’huissiers, devant le juge de l’exécution, d’avoir délivré un commandement de payer sans titre exécutoire et qu’elles ont vu leur demande rejetée du fait que madame [C]-[E] était déboutée de sa contestation de la mesure, objet du litige, les demanderesses à la saisine entendent voir juger, en se fondant sur l’appréciation juridique de la Cour de cassation censurant la motivation de la cour d’appel, que cette Scp a engagé sa responsabilité.

Renvoyant à la motivation de la Cour de cassation, elles soutiennent qu’il appartenait à la Scp Plouchart et Barnier de veiller à la régularité et au bien-fondé des actes qu’elle signifie et pour lequel elle perçoit des émoluments ; aussi, en l’absence de titre exécutoire formel et d’une créance liquidée de manière certaine l’huissier ne pouvait délivrer le commandement en cause, estiment-elles.

Elles caractérisent le préjudice induit en affirmant que madame [C]-[E] a d’ores et déjà dû régler la somme de 53.276,13 euros sur la base du jugement du 12 janvier 2018 et de l’arrêt du 27 juin 2019, madame [V] [N] ayant payé la somme de 9.124,61 euros, qu’elles se voient contrainte d’engager une action en répétition de l’indu et observent que la Scp Plouchart et Barnier n’a donné aucune suite à une mise en demeure du 10 novembre 2022.

En réplique la Scp Plouchart et Barnier se prévaut à nouveau de l’existence d’un titre exécutoire, fait valoir que n’est pas ‘qualifiée’ par son adversaire la procédure qu’elle tient pour abusive et sollicite, subsidiairement, la minoration substantielle de la somme réclamée (soit : 30.000 euros), observant que deux décisions de justice ont, quant à elles, admis la validité du commandement litigieux et que madame [C]-[E] aurait pu éviter la procédure si elle avait respecté ses engagements de règlement après avoir reconnu sa dette et renoncé à une action en réduction de legs.

Ceci étant exposé, le juge de l’exécution connaît des demandes en réparation fondées sur l’exécution dommageable des mesures d’exécution forcée.

S’agissant de la faute commise par la Scp d’huissiers, il résulte des dispositions de l’article L 122-2 du code des procédures civiles d’exécution que ‘l’huissier de justice chargé de l’exécution a la responsabilité de la conduite des opérations d’exécution. Il est habilité, lorsque la loi l’exige, à demander au juge de l’exécution ou au ministère public de donner les autorisations ou de prescrire les mesures nécessaires’.

Et l’article R 151-1 du même code prescrit que ‘lorsqu’il se heurte à une difficulté qui entrave le cours de ses opérations, il en dresse procès-verbal et peut, à son initiative, saisir le juge de l’exécution’.

Cette obligation de prudence et de vigilance quant à l’effectivité d’un titre exécutoire, en lien avec la qualité de garant de la légalité des poursuites instrumentées de l’huissier, aurait dû conduire la Scp Plouchart et Barnier à s’abstenir ou, eu égard aux facultés offertes par ces textes, à soumettre la difficulté au juge de l’exécution, ce dont elle s’est abstenue.

Il peut donc être retenu une faute à son endroit.

S’agissant du préjudice corrélatif, il n’est pas justifié de la cause ni du paiement des sommes invoquées par les demanderesses à la saisine et si peut être retenu un lien de causalité entre la délivrance fautive d’un commandement de payer valant saisie-vente délivré à l’encontre d’une personne sans le support d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible et les soucis et tracas induits par la mise en oeuvre d’une telle voie d’exécution, la Scp d’huissiers peut être suivie dans son moyen d’atténuation de sa propre responsabilité tenant au comportement des héritières.

Les éléments de la procédure conduisent à accueillir la demande mais à en réduire le quantum à la somme de 1.000 euros.

Sur les frais de procédure et les dépens

Le jugement sera infirmé en ce qu’il condamne madame [Z] [C]-[E] et madame [V] [N], venant aux droits de madame [L] [B] épouse [C]-[E] au paiement des frais non compris dans les dépens ainsi qu’aux dépens de première instance.

L’équité commande de condamner in solidum monsieur [T] et la Scp Plouchart et Barnier à verser aux demanderesses à la saisine une somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile.

Déboutés de leurs demandes à ce titre, monsieur [T] et la Scp Plouchart et Barnier supporteront les dépens de première instance, de la procédure d’appel ayant donné lieu au prononcé de l’arrêt du 27 juin 2019 partiellement censuré et à ceux exposés dans la cadre de la présente procédure sur saisine après cassation.

PAR CES MOTIFS

La Cour, statuant publiquement, contradictoirement, sur saisine après arrêt de cassation partielle rendu le 21 septembre 2022 par la Cour de cassation et par mise à disposition au greffe ;

INFIRME le jugement rendu le 12 janvier 2018 par le juge de l’exécution du tribunal de grande instance de Pontoise sauf en ce qu’il a déclaré recevable la contestation présentée par madame [Z] [C]-[E] et l’a déboutée ainsi que monsieur [M] [T] de leurs demandes indemnitaires réciproques et, statuant à nouveau et y ajoutant ;

Dit que madame [V] [N] a intérêt à agir ;

Déclare madame [Z] [C]-[E] et madame [V] [N], venant aux droits de madame [L] [B] épouse [C]-[E], fondées en leur contestation de la validité du commandement de payer délivré le 05 janvier 2016 en l’absence d’un titre exécutoire constatant une créance liquide et exigible au fondement de cette voie d’exécution ;

Annule en conséquence le commandement de payer afin de saisie-vente du 05 janvier 2016, signifié par la Société civile professionnelle Plouchart et Barnier à la requête de monsieur [M] [T] et à l’encontre de madame [Z] [C]-[E] ;

Déclare monsieur [M] [T] irrecevable en sa demande tendant à l’exécution du legs à titre particulier dont il a seulement été jugé qu’il était fondé à en solliciter la délivrance ;

Déclare irrecevables les demandes en garantie et de condamnation présentées par monsieur [M] [T] à l’encontre de la Scp Plouchart et Barnier ;

Condamne la Scp Plouchart et Barnier à verser à madame [Z] [C]-[E] la somme de 1.000 euros à titre de dommages intérêts ;

Déboute monsieur [T] et la Scp Plouchart et Barnier de leurs demandes au titre de leurs frais non répétibles et des dépens ;

Condamne in solidum monsieur [M] [T] et la Scp Plouchart et Barnier à verser à madame [Z] [C]-[E] et à madame [V] [N], partie concluante, la somme de 3.000 euros en application de l’article 700 du code de procédure civile et à supporter les dépens de première instance, de la procédure ayant donné lieu au prononcé de l’arrêt rendu par la cour d’appel de Versailles le 27 juin 2019, partiellement censuré, et à ceux exposés dans la cadre de la présente procédure sur saisine après cassation, avec faculté de recouvrement conformément aux dispositions de l’article 699 du même code.

Arrêt prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile, signé par Madame Fabienne PAGES, Président et par Madame Mélanie RIBEIRO, Greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, Le Président,

 


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