Droits des héritiers : 28 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/02982

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Droits des héritiers : 28 mars 2023 Cour d’appel de Versailles RG n° 21/02982

28 mars 2023
Cour d’appel de Versailles
RG n°
21/02982

COUR D’APPEL

DE

VERSAILLES

1ère chambre 1ère section

ARRÊT N°

CONTRADICTOIRE

Code nac : 28A

DU 28 MARS 2023

N° RG 21/02982

N° Portalis DBV3-V-B7F-UPWE

AFFAIRE :

[B] [C] épouse [N]

C/

[H], [L], [S], [X], [A] [Z] épouse [O]

Décision déférée à la cour : Jugement rendu le 15 Février 2021 par le Tribunal Judiciaire de PONTOISE

N° Chambre :

N° Section :

N° RG : 20/00319

Expéditions exécutoires

Expéditions

Copies

délivrées le :

à :

-la SELARL CABINET BOURSIN-JANSSEN,

-Me Claire RICARD

RÉPUBLIQUE FRANÇAISE

AU NOM DU PEUPLE FRANÇAIS

LE VINGT HUIT MARS MARS DEUX MILLE VINGT TROIS,

La cour d’appel de Versailles a rendu l’arrêt suivant dont le délibéré a été prorogé le 14 mars 2023, les parties en ayant été informées, dans l’affaire entre :

Madame [B] [C] épouse [N]

née le 05 Septembre 1978 à EREVAN (ARMÉNIE)

de nationalité Armenienne

[Adresse 6]’

[Adresse 6]

[Localité 5]

représentée par Me Virginie JANSSEN de la SELARL CABINET BOURSIN-JANSSEN, avocat – barreau de VERSAILLES, vestiaire : C.316 – N° du dossier 21050034

APPELANTE

****************

Madame [H], [L], [S], [X], [A] [Z] épouse [O]

née le 23 Juillet 1936 à PARIS 17ÈME

de nationalité Française

[Adresse 2]

[Localité 4]

représentée par Me Claire RICARD, avocat postulant – barreau de VERSAILLES, vestiaire : 622 – N° du dossier 2211391

Me Brett LE MEUR substituant Me Quentin CHABERT de la SARL SARL CHABERT-CHOTARD, avocat – barreau de NANTES, vestiaire : 174

INTIMÉE

****************

Composition de la cour :

En application des dispositions de l’article 805 du code de procédure civile, l’affaire a été débattue à l’audience publique du 08 Décembre 2022 les avocats des parties ne s’y étant pas opposés, devant Madame Sixtine DU CREST, Conseiller chargée du rapport.

Ce magistrat a rendu compte des plaidoiries dans le délibéré de la cour, composée de :

Madame Anna MANES, Présidente,

Madame Nathalie LAUER, Conseiller,

Madame Sixtine DU CREST, Conseiller,

Greffier, lors des débats : Madame Natacha BOURGUEIL,

FAITS ET PROCÉDURE

De l’union de [I] [Z] née [F] et [Y] [Z] est née Mme [H] [Z] épouse [O].

[Y] [Z] se mariait en secondes noces avec [A] [U] épouse [Z] le 30 mars 1948, sous le régime de la communauté des meubles et acquêts.

Par acte notarié du 24 octobre 1959, [Y] [Z] faisait donation au bénéfice de son épouse pour le cas où elle lui survivrait, de :

” (‘) la toute propriété de l’universalité des biens et droits mobiliers et immobiliers qui appartiendront au donateur au jour de son décès et composeront sa succession, sans aucune exception ni réserve.

Pour la donataire, audit cas de survie, jouir et disposer de tous les dits biens et droits comme de chose lui appartenant en pleine propriété, à compter du décès de Monsieur [Y] [Z] son mari.

En cas d’existence d’enfants du mariage ou de descendants d’eux lors du décès du donateur, la présente donation ne comprendra que l’usufruit de tous les mêmes biens (‘)”.

Le 4 mai 1965, ils faisaient l’acquisition, par le biais de parts dans la société civile immobilière (SCI) ” [Adresse 8] ” d’un appartement situé dans la [Adresse 8], bâtiment ” [Adresse 6].

[Y] [Z] décédait le 21 septembre 1969, laissait pour héritières sa fille Mme [H] [Z] épouse [O] et son épouse [A] [U].

Par jugement du 10 octobre 1973 rendu par le tribunal de grande instance de Pontoise, M. [G], notaire honoraire, était désigné en qualité d’expert pour établir un état liquidatif de la communauté légale des époux [Z] ainsi qu’un état liquidatif pour la succession de [Y] [Z]. M. [G], notaire honoraire, déposait son rapport le 29 mai 1976 et établissait les actes liquidatifs, tant de la communauté légale des époux [Z] que de la succession de [Y] [Z].

Par jugement du 15 mars 1979, le tribunal de grande instance de Pontoise fixait le montant de l’actif de la succession de [Y] [Z] et renvoyait les parties devant le notaire pour procéder aux opérations de compte, liquidation et partage tant de la communauté légale que de la succession de [Y] [Z].

Cependant, aucune suite n’était donnée et les partages n’étaient pas finalisés.

Par testament du 12 mars 2010, [A] [U] veuve [Z] instituait son aide-ménagère, Mme [B] [C] épouse [N], comme sa légataire universelle, indiquant lui céder l’intégralité de ses biens à l’exception de l’appartement situé dans la [Adresse 8] lequel devait revenir à Mme [H] [O] née [Z], la fille de son conjoint défunt, qui n’a donc pas la qualité d’héritière réservataire de la de cujus.

Ces dispositions étaient réitérées dans un testament daté du 5 août 2013.

Cependant, dans trois autres testaments, datés respectivement des 11 avril, 15 août et 5 octobre 2014, elle instituait comme seule légataire universelle Mme [B] [C] épouse [N] (la copie du testament du 5 octobre 2014 étant produite par cette dernière en première instance, devant le tribunal judiciaire).

[A] [U] veuve [Z] décédait le 8 mars 2015.

Par décision du 2 octobre 2018, Mme [H] [O] née [Z] était condamnée, en sa qualité de copropriétaire, à payer les charges de copropriété afférente à l’appartement anciennement occupé par [A] [U] veuve [Z] et occupé depuis fin 2013/début 2014 par Mme [B] [C] épouse [N].

Par acte d’huissier de justice du 23 janvier 2020, Mme [H] [O] née [Z] assignait devant le tribunal judiciaire de Pontoise Mme [C] épouse [N] aux fins de voir prononcer la nullité des testaments du 5 août 2013, 11 avril 2014 et 15 août 2014 et ordonner l’ouverture des opérations de compte, liquidation et partage des communautés et indivision dépendant de [Y] [Z] et [A] [U] veuve [Z].

Par un jugement contradictoire rendu le 15 février 2021, le tribunal judiciaire de Pontoise a :

– Déclaré nuls et de nul effet les testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014,

– Rappelé que les opérations d’ouverture des comptes, liquidations et partage des indivisions issues de la communauté ayant existé entre [A] [U] veuve [Z] et [Y] [Z] d’une part et du décès de [Y] [Z] d’autre part, ont déjà été ordonnées par jugement en date du 27 janvier 1977,

– Désigné afin d’y procéder et de finaliser ces opérations le président de la chambre interdépartementale des notaires de Versailles avec faculté de délégation de notaire,

– Dit que les opérations se feront sous la surveillance du magistrat en charge de la deuxième chambre civile du tribunal de grande instance de Pontoise,

– Dit qu’en cas d’empêchement du notaire, il sera pourvu à son remplacement d’office ou à la requête de la partie la plus diligente,

– Rappelé qu’en application des dispositions des articles 1368, 1370 et 1372 du code de procédure civile il appartient au notaire désigné de :

i. dresser un état liquidatif dans le délai d’un an de sa désignation, sauf causes de suspension prévues à l’article 1369, et en cas de besoin de solliciter une prorogation de ce délai auprès du juge commis, cette demande de prorogation pouvant également être présentée par un co-partageant,

ii. tenir le juge commis informé de la clôture de la procédure.

– Dit que le dossier sera rappelé à l’audience du juge commis du jeudi 17 mars

2022 à 9h30 pour déposer l’état liquidatif ou pour faire un point sur l’avancement des opérations de liquidation et dit qu’en cas de défaut, le dossier sera radié du rôle des affaires,

– Rappelé que le notaire commis pourra s’adjoindre, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, un expert choisi d’un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis,

– Rappelé que le notaire a la possibilité d’interroger le Ficovie et l’Argira dans le cadre de sa mission et sans décision judiciaire préalable,

– Rappelé que le délai imparti au notaire pour établir l’état liquidatif est suspendu jusqu’à la remise du rapport de l’expert,

– Rappelé que les copartageants peuvent, à tout moment, abandonner les voies judiciaires et poursuivre le partage à l’amiable,

– Dit que Mme [B] [C] épouse [N] est réputée avoir accepté la succession d'[A] [U] veuve [Z], avec effet rétroactif au 8 mars 2015, date du décès

– Envoyé Mme [H] [O] née [Z] en possession du legs à titre particulier fait par [A] [U] veuve [Z] par testament en date du 12 mars 2010 et dit qu’en sa qualité de légataire à titre particulier, lui reviennent les parts de la SCI concernant le bien immobilier suivant sis [Adresse 6] cadastré AN [Cadastre 1], section BK :

* Lot n°259, à savoir un appartement dans le Batiment F “[Adresse 6]”, au 2ème étage C, et les 742/30.74èmes des parties communes générales de l’immeuble;

* Lot n°271, à savoir une cave n°19, et les 1/30.149èmes des parties communes générales de l’immeuble,

* Lot n°280, à savoir un garage no5 dans le bâtiment F ” [Adresse 6]”, et les 15/30.149èmes des parties communes générales de l’immeuble,

– Ordonné la publication du présent jugement valant titre de propriété auprès des services de publicité foncière ([Adresse 3]),

– Débouté Mme [H] [O] née [Z] de sa demande en ouverture des opération de compte, liquidation et partage s’agissant du décès d’ [A] [U] veuve [Z], aucune indivision successorale n’ en étant issue.

– Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à [H] [O] née [Z] la somme de 35 500 euros au titre de l’indemnité d’occupation due du 8 mars 2015 au 8 février 2021, et au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle de 1000 euros à compter du 9 février 2021 et ce jusqu’à la fin de l’occupation effective

– Débouté Mme [H] [O] née [Z] de sa demande au titre du recel successoral

– Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [O] née [Z] la somme de 20 000 Euros à titre de dommages et intérêts au vu des préjudices subis,

– Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [O] née [Z] la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile

– Condamné Mme [B] [C] épouse [N] aux entiers dépens,

– Rappelé qu’en vertu de l’article 514 l’exécution provisoire est de droit.

Mme [C] a interjeté appel de ce jugement le 7 mai 2021 à l’encontre de Mme [Z], épouse [O].

Par conclusions notifiées le 30 novembre 2022, Mme [C] demande à la cour, au fondement des articles 970, 931, 1360, 1379, 901, 414-1, 433, 435, 778, 921 du code civil dans leur version en vigueur avant le 1er janvier 2007, et de l’article 2262 du même code dans sa version en vigueur avant le 19 juin 2008, de :

– la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

– déclarer irrecevable la demande de Mme [H] [O] née [Z] de voir fixer au 29 décembre 2015 la délivrance de son legs comme étant nouvelle en cause d’appel,

– infirmer le jugement du 15 février 2021 uniquement en ce qu’il a :

* Déclaré nul et de nul effet les testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014,

* Dit que le dossier sera rappelé à l’audience du juge commis du jeudi 17 mars 2022 à 9 heures 30 pour déposer l’état liquidatif ou pour faire une point sur l’avancement des opérations de liquidation et dit qu’en cas de défaut le dossier sera radié du rôle des affaires,

* Envoyé Mme [H] [O] née [Z] en possession du legs à titre particulier fait par [A] [U] veuve [Z] par testament en date du 12 mars 2010, et dit qu’en sa qualité de légataire à titre particulier lui reviennent les parts de la SCI concernant le bien immobilier sis [Adresse 6] (95), cadastré AN[Cadastre 1] section BK,

* Ordonné la publication du présent jugement valant titre de propriété auprès des services de publicité foncière [Adresse 3],

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [O] née [Z] la somme de 35 500 euros au titre de l’indemnité d’occupation due du 08 mars 2015 au 08 février 2021 et au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle de 1 000 euros à compter du 09 février 2021 et ce jusqu’à la fin de l’occupation effective,

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [O] née [Z] la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts au vu des préjudices subis,

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [O] née [Z] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] aux entiers dépens,

* Rappelé qu’en vertu de l’article 514 l’exécution provisoire est de droit,

Statuant à nouveau,

– Déclarer valables les testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014,

– Ordonner la publication de l’arrêt valant titre de propriété du bien sis [Adresse 6] (95), cadastré AN [Cadastre 1] section BK, lots 259, 271 et 280, comme lui appartenant auprès des services de la publicité foncière ([Adresse 3]),

– Débouter Mme [H] [O] née [Z] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– Condamner Mme [O] née [Z] à une somme de 3000 euros au titre de l’article 700 en première instance et la condamner aux entiers dépens de première instance,

– Condamner Mme [H] [O] née [Z] à la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 en cause d’appel et la condamner aux entiers dépens d’appel,

A titre subsidiaire,

– la déclarer recevable et bien fondée en son appel,

– Ordonner une expertise graphologique afin de déterminer si Mme [U] veuve [Z] est la rédactrice du testament olographe en date du 5 octobre 2014,

– Dire que la provision à valoir sur la rémunération de l’expert graphologue devra être réglée par moitié par Mme [C] d’une part et par Mme [O] née [Z] d’autre part,

– Débouter Mme [H] [O] née [Z] de l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

– Surseoir à statuer dans l’attente du rapport d’expertise graphologique,

– Réserver les dépens

A titre infiniment subsidiaire, si les testaments sont annulés,

– Infirmer le jugement du 15 février 2021 en ce qu’il a :

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [O] née [Z] la somme de 35.500 euros au titre de l’indemnité d’occupation due du 8 mars 2015 au 08 février 2021 et au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle de 1000 euros à compter du 09 février 2021 et ce jusqu’à la fin de l’occupation effective,

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à [H] [O] née [Z] la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts au vu des préjudices subis,

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [O] née [Z] la somme de 3 000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] aux entiers dépens,

* Rappelé qu’en vertu de l’article 514 l’exécution provisoire est de droit,

– Dire que l’indemnité d’occupation due par elle devra être fixée par le notaire désigné en fonction de la valeur locative du bien fixée année par année à laquelle sera affecté un taux de précarité de 20 %,

– Dire qu’elle ne devra une indemnité d’occupation qu’à compter du 15 février 2021, date à laquelle Mme [O] née [Z] a été envoyée en possession de son legs,

– Dire qu’elle ne sera redevable que de la moitié des charges de copropriété jusqu’au 15 février 2021,

– Dire qu’à compter du 15 février 2021, Mme [O] née [Z] sera redevable de l’intégralité des charges de copropriété ; à titre subsidiaire, dire qu’elle ne sera pas redevable des charges si elle est condamnée à régler les indemnités d’occupation antérieurement au 15 février 2021 ;

– Débouter Mme [O] née [Z] de toutes ses demandes contraires,

– Dire que chacune des parties conservera à sa charge ses frais et dépens.

Par conclusions notifiées le 29 novembre 2022, comportant un appel incident, Mme [O] demande à la cour, au fondement des articles 414-2 et 901, 757 et suivants, 778 et suivants, 815 et suivants, 1004, 1014, 1240 du code civil, et des articles 1359 et suivants, 699 et 700 du code de procédure civile, ainsi que des articles 775 et 796-0 bis du code général des impôts, de :

– Recevoir son appel incident,

– Déclarer recevable l’ensemble de ses demandes, fins et conclusions,

En conséquence,

– Confirmer le jugement rendu par le tribunal judiciaire de Pontoise du 15 février 2021 en ce qu’il a :

* Déclaré nul et de nul effet les testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014,

* Rappelé que les opérations d’ouverture des comptes, liquidations et partage des indivisions issues de la communauté ayant existé entre [A] [U] veuve [Z] d’une part et du décès de [Y] [Z] d’autre part ont déjà été ordonnées par jugement en date du 27 janvier 1977,

* Désigné afin d’y procéder et de finaliser ces opérations le président de la chambre interdépartementale des notaires de Versailles avec faculté de délégation de notaire,

* Dit que Mme [B] [C] épouse [N] est réputée avoir accepté la succession d'[A] [U] veuve [Z] avec effet rétroactif au 8 mars 2015, date du décès,

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [O] née [Z] la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts au vu des préjudices subis,

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] aux entiers dépens,

– Infirmer le jugement le tribunal Judiciaire de Pontoise du 15 février 2021 en ce qu’il a :

* Envoyé Mme [H] [O] née [Z] en possession du legs à titre particulier fait par [A] [U] veuve [Z] par testament en date du 12 mars 2010,

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [O] née [Z] la somme de 35 500 euros au titre de l’indemnité d’occupation due du 8 mars 2015 au 8 février 2021 et au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle de 1000 euros à compter du 9 février 2021 et ce jusqu’à la fin de l’occupation effective,

En conséquence et statuant à nouveau de ces chefs :

A titre principal,

– Dire que les parts de la SCI concernant le bien suivant sis [Adresse 6], cadastré AN[Cadastre 1] section BK, lui reviennent, en sa qualité de légataire à titre particulier,

– Dire qu’elle a sollicité la délivrance du legs le 29 décembre 2015,

– L’envoyer en possession du legs à titre particulier fait par [A] [U] veuve [Z] par testament à compter du 29 décembre 2015,

– Dire que Mme [B] [C] épouse [N] est tenue, en qualité de légataire universelle, de régler les charges afférentes au legs attribué à Mme [O] à compter de l’ouverture de la succession jusqu’au jour de sa délivrance effective ;

– condamner Mme [B] [C] épouse [N] à lui verser une somme de 39 495,51 euros, à parfaire au jour de la délivrance du legs, au titre du remboursement des charges afférentes au bien réglées par elle ;

– fixer à 1000 euros par mois l’indemnité d’occupation due par Mme [B] [C] épouse [N] à Mme [O] ;

– condamner Mme [B] [C] épouse [N] à lui verser au titre de l’indemnité d’occupation :

* 500 euros par mois à compter du décès de Mme [U] épouse [Z] le 8 mars 2015, jusqu’au mois de décembre 2015 inclus (date de demande de délivrance du legs), soit un montant total de 5000 euros ;

* 1000 euros par mois de janvier 2016 jusqu’à la délivrance du legs, soit au jour de la présente la somme de 82 000 euros (1000 euros x 82 mois), à parfaire au jour du jugement ;

A titre subsidiaire,

– confirmer le jugement le tribunal judiciaire de Pontoise du 15 février 2021 en ce qu’il a :

* Envoyé Mme [O] née [Z] en possession du legs à titre particulier fait par [A] [U] veuve [Z] par testament en date du 12 mars 2010 ;

* Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [O] née [Z] la somme de 35 500 euros au titre de l’indemnité d’occupation due du 8 mars 2015 au 8 février 2021 et au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle de 1000 euros à compter du 9 février 2021 et ce jusqu’à la fin de l’occupation effective ;

– Si d’extraordinaire la juridiction venait à retenir que Madame [O] était tenue des charges de copropriété alors même qu’elle n’était pas en mesure d’entrer en possession de son legs, condamner Mme [B] [C] épouse [N] à lui rembourser les charges de copropriété qui sont imputables au locataire et dire que cette somme sera à parfaire au jour de la délivrance du legs,

A titre infiniment subsidiaire,

Si d’extraordinaire, la juridiction de céans déclarait les testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014 valides :

– Dire que Mme [U] n’était propriétaire que de la moitié des parts de la SCI et que l’autre moitié est détenue par Mme [O] en qualité d’héritière de Monsieur [Y] [Z] ;

– Condamner Mme [B] [C] épouse [N] à rembourser à Mme [O] la somme de 19 747,75 euros, au titre de la moitié des charges afférentes au bien réglées par Mme [O] ;

– Fixer à 1000 euros par mois l’indemnité d’occupation due par Mme [B] [C] épouse [N] à Mme [O] née [Z] ;

– Condamner Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [O] née [Z] au titre de l’indemnité d’occupation :

* 500 euros par mois à compter du décès de Mme [U] épouse [Z] le 8 mars 2015, jusqu’au mois de décembre 2015 inclus (date de demande de délivrance du legs), soit un montant total de 5000 euros ;

* 1000 euros par mois de janvier 2016 jusqu’à la délivrance du legs, soit au jour de la présente la somme de 82 000 euros (1000 euros x 82 mois), à parfaire au jour du jugement ;

En tout état de cause,

– Condamner Mme [B] [C] épouse [N] au paiement de la somme de 3000 euros pour la procédure de première instance et 10 000 euros pour la procédure d’appel au bénéfice de Mme [O] née [Z] sur le fondement des dispositions de l’article 700 du code de procédure civile ;

– Condamner Mme [B] [C] épouse [N] aux entiers dépens ;

– Débouter Mme [B] [C] épouse [N] de ses demandes plus amples et contraires.

La clôture de l’instruction a été ordonnée le 1er décembre 2022.

SUR CE, LA COUR,

A titre liminaire

La cour rappelle que l’article 954 du code de procédure civile oblige les parties à énoncer leurs prétentions dans le dispositif de leurs conclusions et que la cour ne statue que sur celles-ci.

Par prétention, il faut entendre, au sens de l’article 4 du code de procédure civile, une demande en justice tendant à ce qu’il soit tranché un point litigieux.

Par voie de conséquence, les ” dire ” ou ” dire et juger ” ne constituent pas des prétentions, mais en réalité des moyens qui ont leur place dans le corps des écritures, plus précisément dans la partie consacrée à l’examen des griefs formulés contre le jugement et à la discussion des prétentions et moyens, pas dans le dispositif. La cour ne répondra de ce fait à de tels ” dire ” ou ” dire et juger ” qu’à condition qu’ils viennent au soutien de la prétention formulée en appel et énoncée dans le dispositif des conclusions et, en tout état de cause, pas dans le dispositif de son arrêt, mais dans ses motifs.

Sur les limites de l’appel

Dans les motifs de ses conclusions, Mme [O] sollicite la désignation d’un notaire en charge des opérations de liquidation et partage de la liquidation du régime matrimonial des époux [Z], de la succession de [Y] [Z], de la succession d'[A] [U] et de l’indivision successorale existant avec Mme [C]. Force est de constater qu’elle ne reprend pas cette demande au dispositif de ses conclusions de sorte qu’en application de l’article 954 précité, la cour n’en est pas saisie.

Il résulte des écritures susvisées que les dispositions suivantes du jugement, non contestées, sont désormais irrévocables :

– Rappelé que les opérations d’ouverture des comptes, liquidations et partage des indivisions issues de la communauté ayant existé entre [A] [U] veuve [Z] et [Y] [Z] d’une part et du décès de [Y] [Z] d’autre part, ont déjà été ordonnées par jugement en date du 27 janvier 1977,

– Désigné afin d’y procéder et de finaliser ces opérations le président de la chambre interdépartementale des notaires de Versailles avec faculté de délégation de notaire,

– Dit que les opérations se feront sous la surveillance du magistrat en charge de la deuxième chambre civile du tribunal de grande instance de Pontoise,

– Dit qu’en cas d’empêchement du notaire, il sera pourvu à son remplacement d’office ou à la requête de la partie la plus diligente,

– Rappelé qu’en application des dispositions des articles 1368, 1370 et 1372 du code de procédure civile il appartient au notaire désigné de :

i. dresser un état liquidatif dans le délai d’un an de sa désignation, sauf causes de suspension prévues à l’article 1369, et en cas de besoin de solliciter une prorogation de ce délai auprès du juge commis, cette demande de prorogation pouvant également être présentée par un co-partageant,

ii. tenir le juge commis informé de la clôture de la procédure,

– Rappelé que le notaire commis pourra s’adjoindre, si la valeur ou la consistance des biens le justifie, un expert choisi d’un commun accord entre les parties ou, à défaut, désigné par le juge commis,

– Rappelé que le notaire a la possibilité d’interroger le Ficovie et l’Argira dans le cadre de sa mission et sans décision judiciaire préalable,

– Rappelé que le délai imparti au notaire pour établir l’état liquidatif est suspendu jusqu’à la remise du rapport de l’expert,

– Rappelé que les copartageants peuvent, à tout moment, abandonner les voies judiciaires et poursuivre le partage à l’amiable,

– Dit que Mme [B] [C] épouse [N] est réputée avoir accepté la succession d'[A] [U] veuve [Z], avec effet rétroactif au 8 mars 2015, date du décès,

– Débouté Mme [H] [O] née [Z] de sa demande en ouverture des opérations de compte, liquidation et partage s’agissant du décès d'[A] [U] veuve [Z], aucune indivision successorale n’en étant issue.

– Débouté Mme [H] [O] née [Z] de sa demande au titre du recel successoral.

Sur le recel successoral, la cour note que Mme [O] dans les motifs de ses conclusions sollicite que Mme [C] soit condamnée par la juridiction à rendre tous les fruits et revenus produits par les biens recelés, et dont elle a eu la jouissance depuis l’ouverture de la succession. Cependant, elle ne reprend pas cette demande au dispositif de ses écritures et ne demande pas l’infirmation du jugement en ce qu’il l’a déboutée de sa demande sur ce point. Il s’ensuit que, comme énoncé, la cour n’est saisie d’aucune demande sur ce point et le dispositif du jugement en ce qu’il a débouté Mme [O] de sa demande au titre du recel successoral est irrévocable.

En outre, Mme [C] sollicite l’infirmation du jugement en ce qu’il a ” dit que le dossier sera rappelé à l’audience du juge commis du jeudi 17 mars 2022 à 9h30 pour déposer l’état liquidatif ou pour faire un point sur l’avancement des opérations de liquidation et dit qu’en cas de défaut, le dossier sera radié du rôle des affaires “. Elle ne formule cependant aucune demande ni ne développe aucun moyen de fait ou de droit de nature à remettre en cause cette disposition, qui est la conséquence indissociable de la désignation d’un notaire commis en vue de procéder aux opérations de compte, liquidation et partage, désignation qui n’est au demeurant pas contestée. De plus, cette demande d’infirmation est manifestement une erreur de copier-coller, de sorte que la cour n’a pas à y répondre.

Ainsi, il résulte des écritures susvisées que la cour est saisie des prétentions suivantes :

– la nullité des testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014,

– l’envoi en possession de Mme [O] de son legs à titre particulier,

– la publication de l’arrêt au services de la publicité foncière pour valoir titre de propriété,

– l’indemnité d’occupation due par Mme [C]

– les dommages et intérêts sollicités par Mme [O],

– les frais irrépétibles et les dépens.

Sur la recevabilité de la demande en nullité des testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014 présentée par Mme [O]

Moyens des parties

Poursuivant l’infirmation du jugement en ce qu’il a déclaré nuls les testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014, Mme [C] demande à la cour de déclarer ces testaments valables, d’ordonner la publication de l’arrêt valant titre de propriété du bien sis [Adresse 6] (Val d’Oise), cadastré AN [Cadastre 1] section BK, lots 259, 271 et 280, comme lui appartenant auprès des services de la propriété foncière, et de débouter Mme [O] de ses demandes contraires.

Sans formuler de demande d’irrecevabilité au dispositif de ses écritures, elle soutient que Mme [O] est irrecevable à solliciter l’annulation des testaments pour insanité d’esprit aux motifs que son action serait prescrite d’une part, et qu’en tant que légataire à titre particulier d’un testament antérieur, elle n’aurait pas qualité pour introduire cette action concernant des testaments postérieurs, d’autre part.

Poursuivant la confirmation du jugement en ce qu’il a déclaré nuls les testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014, Mme [O] conteste que la prescription serait acquise et, au fondement de l’article 414-2, dernier alinéa, du code civil, fait valoir qu’elle a bénéficié de la prescription quinquennale à compter de la date du décès de Mme [U], soit à compter du 8 mars 2015, et qu’elle a assigné Mme [C] moins de cinq ans après cette date le 23 janvier 2020. Elle en déduit que son action en nullité des testaments pour insanité d’esprit est recevable.

Elle ne développe aucun moyen de fait et de droit de nature à défendre sa qualité à agir.

Appréciation de la cour

Selon les articles 122 et 123 du code de procédure civile, constitue une fin de non-recevoir tout moyen qui tend à faire déclarer l’adversaire irrecevable en sa demande, sans examen au fond, pour défaut de droit d’agir, tel le défaut de qualité, le défaut d’intérêt, la prescription, le délai préfix, la chose jugée. Les fins de non-recevoir peuvent être proposées en tout état de cause, sauf la possibilité pour le juge de condamner à des dommages-intérêts ceux qui se seraient abstenus, dans une intention dilatoire, de les soulever plus tôt.

L’article 125 du code de procédure civile dispose que les fins de non-recevoir doivent être relevées d’office lorsqu’elles ont un caractère d’ordre public, notamment lorsqu’elles résultent de l’inobservation des délais dans lesquels doivent être exercées les voies de recours ou de l’absence d’ouverture d’une voie de recours.

Le juge peut relever d’office la fin de non-recevoir tirée du défaut d’intérêt, du défaut de qualité ou de la chose jugée.

Ainsi, l’article 125 précité autorise le juge, même à hauteur d’appel, à relever d’office la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir à condition que les parties aient été invitées à présenter leurs observations (2ème Civ., 16 octobre 2014, 13-24.575, Publié au bulletin).

En l’espèce, Mme [C] a soulevé dans les motifs de ses conclusions (page 12) l’irrecevabilité de Mme [O] au motif qu’en tant que légataire particulier, elle n’a pas qualité à agir en nullité des testaments pour insanité d’esprit.

Si Mme [C] n’a pas repris au dispositif de ses conclusions cette fin de non-recevoir pour défaut de qualité à agir, la cour, au fondement des articles 123 et 125 du code de procédure civile, entend la soulever d’office et reprend à son compte ce moyen pertinent.

La cour observe d’ailleurs que Mme [C] a soulevé pour la première fois ce moyen de droit dans les motifs de ses conclusions n°5 notifiées le 14 novembre 2022. La clôture a été prononcée le 1er décembre 2022, de sorte que Mme [O], qui a notifié ses dernières conclusions le 29 novembre 2022, a été mise en mesure d’y répondre. La cour soulève donc d’office la fin de non-recevoir tirée du défaut de qualité à agir de Mme [O].

L’action en nullité est réservée, en principe, à ceux que la loi protège, c’est-à-dire, en premier lieu, à l’auteur de la libéralité si, évidemment, le trouble de ses facultés mentales a été passager et qu’il a retrouvé sa lucidité, mais également, après sa mort, à ses héritiers ab intestat et seulement à ses successeurs universels légaux et testamentaires. Il s’ensuit que le légataire à titre particulier n’a pas qualité à agir en nullité pour insanité d’esprit.

Mme [C] cite un arrêt du 17 février 2010 dans lequel la première chambre civile de la Cour de cassation a considéré que l’action en nullité de la disposition à titre gratuit ne peut être introduite que par les héritiers du disposant réputés continuer la personne du défunt : les successibles ab intestat et les légataires universels.

Dans cette espèce, [E] [P]. est décédée en l’état d’un testament du 29 mai 2001 instituant Mme [C]. légataire universelle. Détenteur de la photocopie d’un testament olographe daté du 2 février 1990 par lequel [E] [P]. l’institue ” légataire universel de tous (ses) biens en France, meubles et immeubles “, M. X. a assigné Mme A. pour voir prononcer la nullité du testament du 29 mai 2001 pour insanité d’esprit.

Par jugement du 2 mai 2006, le tribunal de grande instance d’Avignon, au visa de l’article 901 du code civil, a constaté que M. X., légataire à titre particulier, n’avait pas qualité pour solliciter la nullité du testament établi le 29 mai 2001 par [E] [P]. et l’a déclaré irrecevable en ses demandes.

Par arrêt du 14 octobre 2008, la cour d’appel de Nîmes a confirmé ce jugement.

Dans son pourvoi, M. X a fait grief à l’arrêt attaqué d’avoir violé les articles 31 du code de procédure civile et 901 du code civil en ne reconnaissant pas que le légataire à titre particulier avait intérêt et qualité pour agir en nullité pour insanité d’esprit d’un testament lorsque c’est le testament établi en état d’insanité d’esprit qui avait désigné le seul légataire universel.

La Haute Juridiction a rappelé qu’aux termes de l’article 901 du code civil, pour faire une donation entre vifs ou un testament, il faut être sain d’esprit. La libéralité est nulle en cas d’insanité d’esprit du disposant. La nullité relative ne peut être invoquée que par la personne que la loi a entendu protéger. Elle a considéré ” que la nullité relative pour insanité d’esprit d’un testament ne peut être demandée que par les successeurs universels légaux ou testamentaires du de cujus ” et que ” la cour d’appel a décidé à bon droit que M. X., en tant que légataire à titre particulier, n’avait pas qualité pour agir en nullité du testament consenti à Mme A. et devait être déclaré irrecevable en sa demande ” (1ère Civ., 17 février 2010, pourvoi n° 08-21.927 ; 1ère Civ., 3 mars 1969 : D. 1969, jurispr. p. 585).

En l’espèce, Mme [O] n’est ni héritière ni successeur universel de [A] [U]. Légataire à titre particulier désignée dans un testament antérieur, elle n’avait donc pas qualité à agir en nullité des testaments postérieurs pour insanité d’esprit.

Le jugement sera par conséquent infirmé en ce qu’il a déclaré nuls les testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014 et Mme [O] sera déclarée irrecevable à agir en nullité de ces testaments pour insanité d’esprit.

La demande subsidiaire de Mme [C] aux fins d’expertise graphologique sera par conséquent rejetée.

Sur la demande de Mme [O] visant à voir fixer la délivrance de son legs au 29 décembre 2015

Selon l’article 64 du code de procédure civile, “Constitue une demande reconventionnelle la demande par laquelle le défendeur originaire prétend obtenir un avantage autre que le simple rejet de la prétention de son adversaire.”

Il s’ensuit que, lorsque la prétention du défendeur n’a pour objet que de contredire le droit invoqué par le demandeur pour obtenir le rejet de sa demande, la “demande” du défendeur constitue une défense au fond quand bien même il l’aurait qualifiée de demande reconventionnelle (par exemple Civ 3ème 3 mai 2001, Bull n° 57 ; Soc, 10 janvier 2001, n° 9844964 ; Assem. Plén. 22 avril 2011, n° 0916008, Bull AP n 4).

Aux termes de l’article 70 du même code, “Les demandes reconventionnelles [..] ne sont recevables que si elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant.”

Enfin l’article 567 du code de procédure civile dispose que “Les demandes reconventionnelles sont également recevables en appel.”

La demande reconventionnelle se définit comme celle par laquelle le défendeur originaire c’est-à-dire le défendeur à la demande initiale – prétend obtenir un avantage autre que le rejet de la prétention adverse. Cette demande ne peut être formée que par le défendeur originaire contre le demandeur originaire.

La recevabilité de telles demandes en cause d’appel est uniquement subordonnée à la condition posée par l’article 70 du code de procédure civile, à savoir qu’elles se rattachent aux prétentions originaires par un lien suffisant, et non aux conditions édictées par les articles 564 et suivants du même code (voir par exemple 3e Civ., 17 septembre 2013, pourvoi n° 12-19.004).

Il s’ensuit que la demande de Mme [O] visant à voir fixer la délivrance de son legs au 29 décembre 2015, qui s’analyse comme une demande reconventionnelle, est recevable.

Au fond, compte tenu de ce qui a été précédemment énoncé, étant irrecevable en ses demandes d’annulation de testaments, ceux-ci demeurent valables et sa demande de délivrance du legs ne pourra qu’être rejetée.

Sur la propriété des parts de la SCI ” [Adresse 8] ” et sur la demande de publication de l’arrêt valant titre de propriété

Moyens des parties

Poursuivant l’infirmation du jugement et sollicitant la publication de l’arrêt valant titre de propriété, Mme [C] considère qu’elle dispose de la pleine propriété de l’actif successoral de [A] [U] et, notamment, de la pleine propriété des parts de la SCI ” [Adresse 8] “.

Elle expose que selon l’acte de donation du 24 octobre 1959, [A] [U] est donataire de la pleine propriété de l’actif successoral de [Y] [Z]. Elle ajoute qu’aucun descendant n’est issu des noces de [Y] [Z] et [A] [U], Elle précise que Mme [O], unique héritière de [Y] [Z], n’a pas engagé d’action en réduction dans le délai de prescription. Elle en déduit que l’actif net successoral de [Y] [Z] appartient en pleine propriété à [A] [U] car la donation n’a pas été remise en cause par Mme [O].

Mme [O], qui demande à la cour de débouter Mme [C] de sa demande de publication, fait valoir à l’inverse qu’étant la seule fille d’une première union et héritière de [Y] [Z], elle possède une partie des parts de la SCI [Adresse 8].

Elle soutient que l’acte de donation de 1959 contient un astérisque après le mot ” mariage “, dans la phrase ” En cas d’existence d’enfants du mariage ou de descendants d’eux “, astérisque qui se rapporte à une mention en marge : ” ou d’un précédent mariage “. Elle en déduit qu’au décès de [Y] [Z], [A] [U] n’a donc pas récupéré la totalité des parts de la SCI en pleine propriété, mais seulement la moitié d’entre elle et, sur la part de [Y] [Z], un quart en pleine propriété et les trois quarts en usufruit, de sorte qu’elle (Mme [O]) est propriétaire.

Elle indique que le jugement du 10 octobre 1973 (qui a ordonné qu’il soit procédé aux opérations de compte, liquidation et partage de la succession de [Y] [Z]) et celui de 1979, ainsi que le rapport déposé le 29 mai 1976 par M. [G], notaire, ont fait état de ses droits de succession.

Elle estime que le rapport de M. [G] du 29 mai 1976, qui dresse l’actif net de la communauté ayant existé entre [Y] [Z] et [A] [U] (180 689,77 francs) et l’actif net subséquent de la succession de [Y] [Z] (86 282,12 francs), ainsi que l’inventaire immobilier de l’appartement du Val d’Herblay dressé le 24 juillet 2015, aux seuls dires de Mme [C], dont incomplets.

Appréciation de la cour

La communauté ayant existé entre [Y] [Z] et [A] [U] était composée notamment des parts de la SCI ” [Adresse 8] “, donnant droit à l’attribution d’un appartement, d’une cave et d’un garage à la résidence ” [Adresse 8] “.

Pour déterminer la propriété des parts de cette SCI suite aux décès successifs de [Y] [Z] en 19789 et d'[A] [U] en 2015, il convient de tenir compte tout d’abord de l’acte de donation signé par eux en 1959.

Une copie de l’acte de donation de 1959 est produite par les parties, en pièce 3 pour l’appelante et en pièce 1 pour l’intimée. Contrairement à la pièce 1 de l’intimée, à laquelle il convient de se référer, la pièce 3 de l’appelante est totalement illisible.

Il résulte de l’examen de la pièce 1 de l’intimée que par cet acte, [Y] [Z] a fait donation entre vifs pour le cas où elle lui survivrait, à [A] [U], son épouse en seconde noces, de :

” ‘ la toute propriété de l’universalité des biens et droits mobiliers et immobiliers qui appartiendront au donateur au jour de son décès et composeront sa succession, sans aucune exception ni réserve.

Pour la donataire, audit cas de survie, jouir et disposer de tous les dits biens et droits comme de chose lui appartenant en pleine propriété, à compter du décès de Monsieur [Y] [Z] son mari.

En cas d’existence d’enfants du mariage* ou de descendants d’eux lors du décès du donateur, la présente donation ne comprendra que l’usufruit de tous les mêmes biens et dans le cas où lesdits enfants ne pourraient exécuter cette donation de l’usufruit universel ou en demanderaient la réduction comme excédant la quotité disponible, elle serait réduite à la quotité disponible la plus large entre époux, c’est-à-dire à un quart en toute propriété et un quart en usufruit de tous les mêmes biens et droits, calculée sur une masse comprenant les rapports conformément à l’article 922 du code civil.

Etant stipulé que la réduction ci-dessus ne porterait que sur la part de ceux des enfants ou descendants qui en feraient la demande ou qui ne pourraient exécuter cette disposition par suite d’incapacité ou pour toute autre cause ” (pièce 1 intimée) (souligné par la cour).

L’astérisque après le mot ” mariage “, ajouté à la main, se rapporte à une mention en marge, également ajoutée à la main, qui énonce ” d’un précédent mariage “. Cette mention a été dûment paraphée par l’ensemble des personnes présentes à l’acte et notamment par [A] [U] (” IB “) et par [Y] [Z] (” MD “), par les deux témoins instrumentaires et par le notaire, de sorte qu’il convient d’en tenir compte comme faisant partie intégrante de l’acte.

C’est donc bien la partie soulignée ci-dessus visée de l’acte de donation qui est applicable pour répartir les parts de la SCI [Adresse 8].

Il en résulte qu’au décès de [Y] [Z], [A] [U] était propriétaire de la moitié des parts de la SCI en pleine propriété et, étant donné la présence d’un enfant héritier d’un précédent mariage, a hérité de l’usufruit de l’autre moitié ayant appartenue à [Y] [Z].

Aucune action en réduction n’a été intentée par Mme [O].

Le jugement du 10 octobre 1973 du tribunal de grande instance de Pontoise a commis M. [D] pour réaliser les opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [Y] [Z], et a désigné M. [G], notaire honoraire, aux fins d’expertise pour rechercher tous les éléments d’actif et de passif de la communauté et de la succession de [Y] [Z] (pièce 5 de l’appelante et pièce 4 de l’intimée).

Le tribunal a donc bien tenu compte du fait qu’une indivision existait entre Mme [O] et [A] [U] dans le cadre de la succession de [Y] [Z].

Les actes notariés qui ont suivi n’ont pas tenu compte de la mention en astérisque et comportent des formules erronées, sinon ambiguës, quant aux droits d'[A] [U] sur la succession de [Y] [Z].

L’inventaire du 25 novembre 1970 effectué par M. [D], notaire, au décès de [Y] [Z] mentionne qu'[A] [U] est ” 3°/ (..) habile à se dire porter donataire de la toute propriété de l’universalité des biens et droits mobiliers et immobiliers, aux termes de la donation qui lui a été consentie par M. [Z] (‘) ; sur les effets de laquelle donation ladite dame se réserve d’opter quand il appartiendra.

4°/ et comme habile à recueillir l’usufruit du quart des biens composant sa succession en vertu de l’article 767 du code civil, lequel usufruit se confond avec le bénéfice plus large de la donation sus énoncée “, et que Mme [O] est ” habile à se dire et porter seule et unique héritière de [Y] [Z] (‘) le tout sauf les droits de toute nature de cette dernière épouse survivante ” (pièce 3 de l’intimée).

M. [G], dans son rapport du 29 mai 1976 indique que [Y] [Z] laisse ” [A] [U] (‘) donataire universelle en toute propriété de l’universalité des biens et droits immobiliers qui appartiendraient au donateur, au terme d’un acte de donation [du] 24 octobre 1959 (‘) et pour seule héritière Mme [O] ” (pièce 5 de l’appelante et pièce 4 de l’intimée).

Ce rapport du 29 mai 1976 a constaté que la communauté entre les époux n’était constituée que des parts de la SCI [Adresse 8] et du solde d’un compte bancaire, et que la succession de [Y] [Z] se résumait à la moitié de l’actif net de la communauté.

Le jugement du tribunal de grande instance de Pontoise du 15 mars 1979 a renvoyé [A] [U] et Mme [O] devant M. [D], notaire initialement commis pour réaliser les opérations de comptes, liquidation et partage de la succession de [Y] [Z] (pièce 6 de l’appelante).

Le tribunal a donc à nouveau considéré qu’une indivision demeurait entre [A] [U] et Mme [O], en dépit des mentions erronées ou à tout le moins ambiguës évoquées ci-dessus et alors qu’il connaissait la teneur de la succession de [Y] [Z].

Dès lors, en application de l’acte de donation de 1959, au décès de [Y] [Z], les parts de la SCI ont été réparties comme suit :

– la moitié des parts appartenaient à [A] [U] en pleine propriété,

– l’autre moitié appartenaient à [A] [U] en usufruit et à Mme [O] en nue-propriété.

Au décès d'[A] [U] le 8 mars 2015, son usufruit s’est éteint conformément à l’article 617 du code civil et Mme [O] a récupéré la moitié des parts de la SCI en pleine propriété, l’autre moitié étant dévolue à Mme [C] légataire universelle de la défunte. Les parties sont donc propriétaires indivis, à parts égales, des parts de la SCI [Adresse 8].

Le jugement sera infirmé en ce qu’il a ordonné sa publication valant titre de propriété au service de la publicité foncière. Il sera fait droit à la demande de Mme [C] d’ordonner la publication de l’arrêt valant titre de propriété du bien sis [Adresse 6] (Val d’Oise), cadastré AN [Cadastre 1] section BK, lots 259, 271 et 280, auprès des services de la propriété foncière, mais non comme un bien lui appartenant exclusivement.

Sur l’indemnité d’occupation due par Mme [C]

Moyens des parties

Poursuivant l’infirmation du jugement quant au montant de l’indemnité d’occupation mise à la charge de Mme [C], Mme [O] sollicite, au fondement de l’article 815-9, alinéa 2, du code civil, que l’indemnité d’occupation soit réévaluée pour être portée la somme de 87 000 euros à compter du 8 mars 2015, à parfaire au jour de la décision, compte tenu, notamment, de la situation géographique, de la surface de l’appartement, complété par un balcon avec vue dégagée sur la Seine, par un garage et par une cave, ainsi que de la copropriété donnant accès à une piscine, un court de tennis, des équipements sportifs et un garage à bateau.

Elle insiste sur le fait qu’elle a perdu toute jouissance du bien que Mme [C] occupe avec sa famille depuis 2013. Elle s’oppose à l’application d’un taux de précarité de 20% compte tenu de sa longévité dans l’appartement.

Poursuivant l’infirmation du jugement en ce qu’il l’a condamnée à verser à Mme [O] une indemnité d’occupation, Mme [C] demande à la cour de débouter Mme [O] de sa demande sur ce point, dans l’hypothèse où les testaments seraient annulés.

A titre subsidiaire, elle soutient que si une indemnité d’occupation devait être fixée, il appartiendrait au notaire chargé de la liquidation de la succession de déterminer son montant en fonction de la valeur locative fixée chaque année avec application d’un taux de précarité de 20 %.

Appréciation de la cour

L’article 815-9, alinéa 2, du code civil dispose que l’indivisaire qui use ou jouit privativement de la chose indivise est, sauf convention contraire, redevable d’une indemnité.

En l’espèce, il découle de ce qui a été dit précédemment que les parts de la SCI donnent à ses propriétaire l’attribution d’un appartement, d’une cave et d’un garage à la résidence ” [Adresse 8] “. Il n’est pas contesté que depuis le décès d'[A] [U], Mme [C] s’est installée dans l’appartement avec sa famille et son chien depuis 2013 (pièces 9 et 10 intimée, non contesté par l’appelante). Il en résulte qu’elle occupe le bien indivis privativement, Mme [O] étant de fait dans l’impossibilité d’en user.

Par conséquent, c’est à bon droit que les premiers juges ont mis à la charge de Mme [C] une indemnité d’occupation, tenant compte d’une valeur locative du bien à hauteur de 1000 euros par mois (soit 500 euros mensuels mis à la charge de Mme [C]). Compte tenu de la longévité de la jouissance privative de Mme [C], il n’y a pas lieu d’appliquer un taux de précarité de 20%.

Le jugement sera donc infirmé sur ce point.

Compte tenu du fait que Mme [C] possède la moitié des parts de la SCI, et que Mme [O] en possède l’autre moitié, Mme [C] sera donc condamnée à verser à cette dernière une indemnité d’occupation depuis le 8 mars 2015, qui sera versée comme suit :

– une somme de 48 000 euros correspondant à la période comprise entre le 8 mars 2015 et le 8 mars 2023 (8 ans x 12 mois x 500 euros) ;

– 500 euros par mois à verser le 5 de chaque mois à compter du 5 avril 2023 et jusqu’à la cessation de la jouissance privative.

Sur les charges de copropriété

Moyens des parties

Estimant être légataire à titre particulier des parts de la SCI, Mme [O] prétend, au fondement de l’article 1014 du code civil, que n’ayant pu obtenir la délivrance de son legs, elle n’a pu en percevoir les fruits et ne doit pas être tenue des charges de copropriété, impôts et taxes antérieurement à la délivrance. A titre subsidiaire, elle sollicite que Mme [C] soit condamnée à lui rembourser les charges imputables au locataire.

Elle précise avoir réglé, depuis le décès d'[A] [U], la somme de 39 495,51 euros correspondant à des appels de charges, des frais d’huissier et des taxes locaux vacants. Elle considère que Mme [C] est de mauvaise foi lorsqu’elle indique n’avoir pas été informée des appels de charges alors qu’elle était partie à la procédure qui a abouti à un jugement du 2 octobre 2018 ordonnance la condamnation de Mme [O] au titre des charges de copropriété.

Mme [C] réplique que les demandes de Mme [O] ne sont pas fondées dans la mesure où elle n’est pas légataire de [A] [U] et qu’elle doit par conséquent être déboutée de ses demandes. A titre subsidiaire, si les testaments étaient annulés, Mme [C] estime n’être redevable que de la moitié des charges de copropriété jusqu’au 15 février 2021, date de la décision dont appel et de l’envoi en possession de Mme [O], Mme [O] étant par la suite seule redevable des charges.

Elle fait valoir s’être acquittée des taxes foncières pour ce bien pour les années 2016, 2017 et 2018, mais n’avoir pas été rendue destinataire des appels de charges avant le mois de janvier 2021. Elle affirme que si elle en avait été rendue destinataire elle les aurait payés.

Elle explique que la décision dont appel ne lui a pas été favorable ; que si elle procédait au règlement et si, par extraordinaire, la cour venait à confirmer le jugement, elle aurait indûment payé les charges de copropriété, de sorte que par prudence, elle a préféré ne pas les payer.

Elle précise avoir été assignée en intervention forcée par Mme [O] dans une instance visant au paiement des charges de copropriété, dans laquelle a été prononcé un sursis à statuer dans l’attente de la décision de la cour.

Appréciation de la cour

Mme [C] prétend avoir réglé les taxes foncières pour les années 2016, 2017 et 2018. Les récépissés de demande de virement à la direction des finances publiques qu’elle produit ne démontrent aucunement que ces virements ont eu pour objet le paiement des taxes foncières de l’appartement du Val d’Herblay (pièce 46 de l’appelante).

Mme [O] justifie avoir dû faire face seule aux créanciers de la succession, compte tenu du silence observé par Mme [C] pendant plusieurs mois (pièces 11, 12, 13, 14, 47 intimée) et avoir réglé 39 495, 51 euros correspondant à des appels de charges, des frais d’huissier et des taxes (pièces 42 à 58 de l’intimée). Il résulte également des pièces du dossier que Mme [O], saisie sur ses propres comptes bancaires, a tenté de mettre en ‘uvre une procédure de saisie à l’encontre de Mme [C]. Cette procédure a échoué, cette dernière se domiciliant au 18 octobre 2017 sur une péniche à [Localité 7], alors même que dans la présente procédure elle est toujours bien domiciliée dans l’ancien appartement de [Y] [Z] et [A] [U] dans la [Adresse 8] (pièces 49 et 50 intimée, conclusions de l’appelante).

Il en résulte que Mme [C], alors qu’elle se réclame pleinement propriétaire du bien, a sciemment et de mauvaise foi cherché à se soustraire au paiement des charges de copropriété et taxes dont elle est pourtant redevable pour moitié.

Par conséquent, elle sera condamnée à verser à Mme [O] 19 747,76 euros (39 495, 51/2).

Sur les dommages et intérêts sollicités par Mme [O]

Moyens des parties

Mme [O] sollicite, au fondement de l’article 1240 du code civil, la confirmation du jugement en ce qu’il a condamné Mme [C] épouse [N] à lui verser la somme de 20 000 euros à titre de dommages et intérêts.

Elle fait valoir que Mme [C], installée dans l’appartement avec ses deux enfants et son chien depuis 2013, a profité des ressources de [A] [U] alors très âgée et épuisée physiquement et psychologiquement. Elle explique être épuisée par les procédures judiciaires qu’elle a dû mettre en ‘uvre pour faire face aux créanciers de la succession et faire cesser le comportement de Mme [C]. Elle ajoute avoir été assignée à deux reprises par le syndicat des copropriétaires en règlement des charges, alors même que Mme [C] jouissait exclusivement de l’appartement.

En réplique, Mme [C] indique qu’elle est légataire universelle et pleinement propriétaire du bien qu’elle occupe. Elle soutient n’avoir jamais été destinataire des appels de charges avant janvier 2021. Elle ajoute n’être pas responsable des procédures judiciaires diligentées à l’encontre de Mme [O] en paiement des charges.

Appréciation de la cour

Selon l’article 1240 du code civil, tout fait quelconque de l’homme, qui cause à autrui un dommage, oblige celui par la faute duquel il est arrivé à le réparer.

Le jugement a fait droit à la demande d’indemnisation de Mme [O] aux motifs que Mme [C] a tardé à lui délivrer son legs et s’est soustraite aux paiement des charges de copropriété.

A hauteur d’appel, la cour constate que Mme [O], âgée de 79 ans au moment du décès de [A] [U], justifie avoir dû faire face seule aux créanciers de la succession, compte tenu du silence observé par Mme [C] pendant plusieurs mois (pièces 11, 12, 13, 14, 47 intimée). Elle justifie également avoir réglé 39 495, 51 euros correspondant à des appels de charges, des frais d’huissier et des taxes (pièces 42 à 58 de l’intimée).

Il résulte également des pièces versées aux débats par Mme [O] que, saisie sur ses propres comptes bancaires, elle a tenté de mettre en ‘uvre une procédure de saisie à l’encontre de Mme [C]. Cette procédure a échoué, cette dernière se domiciliant au 18 octobre 2017 sur une péniche à [Localité 7], alors même que dans la présente procédure Mme [C] est toujours bien domiciliée dans l’ancien appartement de [Y] [Z] et [A] [U] dans la [Adresse 8] (pièces 49 et 50 intimée, conclusions de l’appelante).

Par ailleurs, Mme [C] prétend n’avoir pas été au courant des appels de charges avant le mois de janvier 2021 alors même qu’elle était partie à la procédure ayant conduit au jugement du 2 octobre 2018 condamnant Mme [O], âgée de 82 ans, au paiement des charges de copropriété avec capitalisation des intérêts.

C’est donc avec une particulière mauvaise foi que Mme [C], alors qu’elle se réclame pleinement propriétaire du bien, a sciemment cherché à se soustraire au paiement des charges de copropriété et taxes dont elle est pourtant redevable pour moitié.

Il en est résulté pour Mme [O] une impossibilité de jouir du bien, qu’elle possède pourtant pour moitié, et de multiple tracas judiciaires et administratifs à l’origine d’un préjudice qu’il convient de réparer intégralement.

La cour confirmera par conséquent le jugement en ce qu’il a condamné Mme [C] a versé à Mme [O] 20 000 euros en indemnisation du préjudice subi.

Sur les frais irrépétibles et les dépens.

Le sens du présent arrêt conduit à infirmer le jugement sur les dépens et les frais irrépétibles.

Chacune des parties, perdantes, conservera la charge de ses propres dépens tant en première instance qu’à hauteur d’appel.

Il ne sera pas fait application de l’article 700 du code de procédure civile.

PAR CES MOTIFS

La cour, statuant par arrêt contradictoire et mis à disposition,

INFIRME le jugement en ce qu’il a :

– Déclaré nuls et de nul effet les testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014,

– Envoyé Mme [H] [O] née [Z] en possession du legs à titre particulier fait par [A] [U] veuve [Z] par testament en date du 12 mars 2010 et dit qu’en sa qualité de légataire à titre particulier, lui reviennent les parts de la SCI concernant le bien immobilier suivant sis [Adresse 6] cadastré AN [Cadastre 1], section BK :

* Lot n°259, à savoir un appartement dans le Batiment F “[Adresse 6]”, au 2ème étage C, et les 742/30.74èmes des parties communes générales de l’immeuble ;

* Lot n°271, à savoir une cave n°19, et les 1/30.149èmes des parties communes générales de l’immeuble,

* Lot n°280, à savoir un garage n°5 dans le bâtiment F ” [Adresse 6]”, et les 15/30.149èmes des parties communes générales de l’immeuble,

– Ordonné la publication du présent jugement valant titre de propriété auprès des services de publicité foncière ([Adresse 3]),

– Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à [H] [O] née [Z] la somme de 35 500 euros au titre de l’indemnité d’occupation due du 8 mars 2015 au 8 février 2021, et au paiement d’une indemnité d’occupation mensuelle de 1000 euros à compter du 9 février 2021 et ce jusqu’à la fin de l’occupation effective,

– Condamné Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [O] née [Z] la somme de 3000 euros au titre de l’article 700 du code de procédure civile,

– Condamné Mme [B] [C] épouse [N] aux entiers dépens ;

CONFIRME le jugement pour le surplus ;

Statuant à nouveau sur les chefs infirmés et y ajoutant,

DÉCLARE Mme [H] [Z] épouse [O] irrecevable à agir en nullité des testaments des 11 avril 2014, 15 août 2014 et 5 octobre 2014 pour insanité d’esprit ;

REJETTE la demande subsidiaire de Mme [B] [C] épouse [N] aux fins d’expertise graphologique ;

DIT que la demande de Mme [H] [Z] épouse [O] visant à voir fixer la délivrance de son legs au 29 décembre 2015 est recevable et, au fond, la REJETTE ;

DIT que les parts de la SCI concernant le bien immobilier suivant sis [Adresse 6] cadastré AN [Cadastre 1], section BK :

* Lot n°259, à savoir un appartement dans le Batiment F “[Adresse 6]”, au 2ème étage C, et les 742/30.74èmes des parties communes générales de l’immeuble ;

* Lot n°271, à savoir une cave n°19, et les 1/30.149èmes des parties communes générales de l’immeuble,

* Lot n°280, à savoir un garage n°5 dans le bâtiment F ” [Adresse 6]”, et les 15/30.149èmes des parties communes générales de l’immeuble,

appartiennent pour moitié à Mme [H] [Z] épouse [O] et pour moitié à Mme [B] [C] épouse [N] ;

ORDONNE la publication de l’arrêt valant titre de propriété du bien sis [Adresse 6] (Val d’Oise), cadastré AN [Cadastre 1] section BK, lots 259, 271 et 280, auprès des services de la propriété foncière ;

CONDAMNE Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [Z] épouse [O] une indemnité d’occupation de 500 euros par mois depuis le 8 mars 2015, qui seront versés comme suit :

– une somme de 48 000 euros correspondant à la période comprise entre le 8 mars 2015 et le 8 mars 2023 ;

– 500 euros par mois à verser le 5 de chaque mois à compter du 5 avril 2023 et jusqu’à la cessation de la jouissance privative ;

CONDAMNE Mme [B] [C] épouse [N] à verser à Mme [H] [Z] épouse [O] la somme de 19 747,76 euros au titre des taxes et charges de copropriété du bien sis [Adresse 6] (Val d’Oise), cadastré AN [Cadastre 1] section BK, lots 259, 271 et 280 ;

DIT n’y avoir lieu à application de l’article 700 du code de procédure civile ;

DIT que chaque partie conservera la charge de ses dépens tant en première instance qu’en appel ;

REJETTE toutes autres demandes.

– prononcé par mise à disposition de l’arrêt au greffe de la cour, les parties en ayant été préalablement avisées dans les conditions prévues au deuxième alinéa de l’article 450 du code de procédure civile,

– signé par Madame Anna MANES, présidente, et par Madame Natacha BOURGUEIL, greffier, auquel la minute de la décision a été remise par le magistrat signataire.

Le Greffier, La Présidente,

 


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